AFFAIRE : N° RG 21/02065
N° Portalis DBVC-V-B7F-GZM5
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 15 Juin 2021 - RG n° 9/00310
COUR D'APPEL DE CAEN
Chambre sociale section 3
ARRET DU 19 JANVIER 2023
APPELANT :
Monsieur [N] [D]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Pierre BLIN, avocat au barreau de LISIEUX
INTIMEE :
Maison Départementale des Personnes Handicapées du [Adresse 5]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Mme [W], mandatée
DEBATS : A l'audience publique du 27 octobre 2022, tenue par Mme CHAUX, Président de chambre, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé en présence de M. GANCE, Conseiller, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme GOULARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
ARRET prononcé publiquement le 19 janvier 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [N] [D] d'un jugement rendu le 15 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l'opposant à Maison départementale des personnes handicapées du [Adresse 5].
FAITS et PROCEDURE
M. [N] [D] est né le 22 août 1968. Il est père de deux enfants. Il travaille dans les espaces verts depuis 1997.
Le 26 septembre 2018, il a déposé auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du [Adresse 5] une demande d'allocation aux adultes handicapés (AAH) et de prestation de compensation de handicap ( PCH), lesquelles ont été rejetées par décisions des 7 décembre 2018 et 25 janvier 2019 de la [6] (CDAPH) de la MDPH.
Le 27 février 2019, M. [D] a contesté ces décisions devant le tribunal de grande instance de Caen.
Par jugement du 15 juin 2021, ce tribunal a :
- entériné les conclusions médicales du docteur [L], médecin désigné par le tribunal,
Sur l'allocation adultes handicapés:
- déclaré le recours de M.[D] recevable mais l'a rejeté,
En conséquence,
- rappelé que la décision de la MDPH du [Adresse 5] du 7 décembre 2018, notifiée le 20 décembre 2018, ayant rejeté la demande d'AAH est maintenue en toutes ses dispositions,
Sur la prestation de compensation du handicap :
- déclaré le recours de M. [D] recevable mais l'a rejeté,
En conséquence,
- rappelé que la décision de la MDPH du [Adresse 5] du 7 décembre 2018 notifiée le 20 décembre 2018 ayant rejeté la demande de PCH est maintenue en toutes ses dispositions,
- condamné M. [D], en tant que de besoin, aux dépens.
Par déclaration du 9 juillet 2021, M. [D] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions du 9 juin 2022, soutenues oralement à l'audience par son conseil, M. [D] demande à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau:
- dire que son taux d'incapacité est supérieur à 50% et que cette incapacité engendre une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi,
Par conséquent,
- lui accorder le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés,
- dire qu'il rencontre de graves difficultés dans la réalisation des activités de mobilité et de communication, au sens de l'article 2-5 du code de l'action sociale et des familles,
En conséquence,
- lui accorder le bénéfice de la prestation de compensation du handicap,
- préalablement et avant dire droit, ordonner une mesure d'expertise médicale confiée à tel expert qu'il plaira à la cour en lui confiant la mission suivante:
* se faire communiquer tous documents utiles,
* entendre les parties et les convoquer,
* examiner M. [D] et exposer les différents problèmes de santé qu'il subit et les séquelles envisageables ainsi que les traitements médicaux auxquels il est astreint,
* dire s'il présente une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité ou une difficulté grave pour la réalisation d'au moins deux activités telles que définies dans le référentiel figurant à l'annexe 2-5 du code de l'action sociale et des familles et dans des conditions précisées dans ce référentiel,
* dire si les difficultés rencontrées par M. [D] dans la réalisation de cette ou de ces activités sont définitives ou d'une durée prévisible d'au moins un an,
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
Par conclusions du 15 septembre 2022, déposées et soutenues oralement à l'audience par sa représentante, la MDPH du [Adresse 5] demande à la cour de confirmer le jugement déféré visant à refuser l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés et le bénéfice de la prestation de compensation du handicap à M. [D].
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
SUR CE, LA COUR
La CDAPH a indiqué , dans sa décision du 7 décembre 2018, qu'après évaluation de sa situation, de son autonomie et en tenant compte de ses besoins, les difficultés rencontrées par M. [D] ne correspondaient pas aux critères d'attribution de la PCH mentionnés à l'article 2-5 du code de l'action sociale et des familles (présence d'une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité de la vie quotidienne ou de difficultés graves pour la réalisation d'au moins deux activités de la vie quotidienne).
Dans sa décision du 25 janvier 2019, cette même commission a reconnu que M. [D] présentait des difficultés pouvant entraîner des limitations d'activité mais que celles - ci avaient une incidence légère à modérée sur son autonomie sociale et professionnelle correspondant à un taux d'incapacité inférieur à 50% ( en application du guide barème de l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles) et qu'en application des articles L 821-1 et L 821-2 du code de la sécurité sociale, ce taux ne permettait pas l'attribution de l'AAH.
Les premiers juges ont ordonné, avant dire droit, une consultation médicale, confiée au docteur [L], à charge pour lui de déterminer le taux d'incapacité de M. [D] à la date de sa demande, 26 septembre 2018, et de dire, au cas où le taux serait compris entre 50 et 79% , si ce handicap entraînait ou pas une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
L'expert a conclu en ces termes :
' - Lupus
- artérite : formes modérées. Périmètre de marche : 200 mètres
- perte auditive ( 32dB à gauche, 36dB à droite) : parole OK, discussion normale à voix normale, réponses adaptées malgré le masque,
- HTA variable
Taux inférieur à 50%
Aucun critère PCH ( aucune difficulté grave ni absolue, autonomie OK)'
Les conclusions de l'expert ont été entérinées par le tribunal qui a confirmé les deux décisions de rejet litigieuses.
- Sur la demande d'allocation aux adultes handicapés
En cause d'appel, M. [D] fait valoir que le docteur [L] n'a pas pris la mesure des déficits qu'il présente, notamment sur le plan vasculaire, que les conclusions de l'expert sont contredites par ses antécédents médicaux et les diverses appréciations de ses médecins.
Il produit plusieurs certificats médicaux et comptes rendus opératoires établis entre 2014 et 2022 par le docteur [O] [I], praticien hospitalier, spécialisée en chirurgie vasculaire.
Il en ressort que M. [D] fait l'objet d'un suivi pour une artériopathie oblitérante des membres inférieurs après avoir bénéficié à plusieurs reprises de revascularisations itératives de ces membres inférieurs, notamment du côté droit.
Il est noté le 12 avril 2016, que l'évolution à gauche est plutôt favorable puisqu'il n'existe pas de re-sténose et qu'à droite, l'occlusion notée est à partir de l'axe fémoral superficiel et inclue la poplité rétro- articulaire.
Le médecin relève que M. [D] réalise une thérapie par la marche qui n'est pas tout à fait soutenue, mais qu'il a tout de même regagné un périmètre de marche satisfaisant.
A la suite de la consultation du 2 octobre 2017, le docteur [I] souligne que son périmètre de marche est diminué à 500 mètres avec toujours l'absence de douleur de décubitus et nocturne, qu'il a bénéficié d'une évaluation doppler artériel de contrôle, laquelle a conclu à une détérioration des flux et une baisse des IPS aux alentours de 0,5 ce qui est assez inquiétant. Elle conseille le traitement conservateur par la thérapie par la marche à titre quotidien ou au moins trois fois par semaine afin qu'il réalise à chaque fois cinq kilomètres.
Il verse aux débats d'autres certificats et comptes rendus médicaux des 27 février 2020, 2 février 2021, 19 et 25 juin 2021, 22 octobre 2021, 3 novembre 2021, 18 et 25 janvier 2022.
Force est de constater que M. [D] ne produit aucun document faisant le point sur sa situation médicale à une date proche du 26 septembre 2018, à laquelle il a présenté ses demandes d'AAH et de PCH.
Il fait valoir que le 25 janvier 2022, le docteur [I] a relevé que 'le choix de la prothèse a été fait devant un capital veineux non utilisable. Cela impacte le quotidien du patient car certaines positions ne sont plus autorisées ( interdiction de rester agenouillé ou accroupi devant le risque d'écrasement du pontage et donc de thrombose). Je rappelle qu'il s'agit d'un patient aux antécédents d'AOMI revascularisée à plusieurs reprises et qui reste à haut risque vasculaire à l'avenir.'
M. [D] en conclut qu'il est fort probable que son taux d'incapacité soit supérieur à 50% et que cette incapacité engendre une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, puisqu'il exerce la profession de paysagiste.
Cependant, ces éléments, bien postérieurs au 26 septembre 2018, ne permettent de remettre en cause ni l'appréciation de sa situation qui a été faite par la CDAPH lors de l'examen de sa demande, ni les conclusions de l'expert sur lesquelles se sont fondés les premiers juges. Ils ne justifient pas non plus que soit ordonnée une mesure d'expertise.
Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a maintenu la décision de la MDPH du 25 janvier 2019 rejetant sa demande d'AAH.
- Sur la demande de prestation de compensation de handicap
Devant la cour, M. [D] soutient qu'il rencontre de graves difficultés dans la réalisation des activités de mobilité et de communication au sens de l'article 2-5 du code de l'action sociale et des familles.
Il ne produit cependant aucune pièce à l'appui de sa demande et ne fait valoir aucun argument de nature à remettre en cause tant l'appréciation faite par la MDPH lors de l'examen de sa demande, que les conclusions du docteur [L].
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'ordonner une mesure d'expertise, laquelle ne peut suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a confirmé la décision de la MDPH du [Adresse 5] du 7 décembre 2018 ayant rejeté sa demande de PCH.
M. [D] qui succombe, supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Déboute M. [D] de sa demande d'expertise,
Condamne M. [N] [D] aux dépens d'appel .
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX