AFFAIRE : N° RG 19/03042
N° Portalis DBVC-V-B7D-GNXK
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance d'Alençon en date du 20 Septembre 2019 - RG n° 18/00229
COUR D'APPEL DE CAEN
Chambre sociale section 3
ARRET DU 17 NOVEMBRE 2022
APPELANTE :
Madame [Z] [P]
[Adresse 1]
[Localité 4]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022019009884 du 19/12/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
Représentée par Me Noémie HUET, avocat au barreau de CAEN
INTIMEE :
Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Calvados
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Mme [R], mandatée
DEBATS : A l'audience publique du 08 septembre 2022, tenue par Mme CHAUX, Président de chambre, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme GOULARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
ARRET prononcé publiquement le 17 novembre 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Mme [Z] [P] d'un jugement rendu le 20 septembre 2019 par le tribunal de grande instance d'Alençon dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [Z] [P], alors employée par la société [5], a été victime le 24 octobre 2017 d'un accident du travail, que la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados a pris en charge au titre de la législation professionnelle.
Selon certificat médical initial du 24 octobre 2017, cet accident lui a causé des douleurs au bas du dos.
Par décision en date du 5 mars 2018, la caisse l'a déclarée consolidée à la date du 15 mars 2018, sans séquelles indemnisables
Mme [P] a été licenciée après avis d'inaptitude du médecin du travail en date du 17 juillet 2018.
Après expertise technique sollicitée par l'assurée et réalisée par le docteur [S] le 14 juin 2018, la caisse a, le 12 juillet 2018, maintenu sa décision, confirmée le 26 décembre 2018 par la commission de recours amiable saisie par Mme [P].
Le 23 août 2018, Mme [P] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Orne de sa contestation.
Par jugement du 20 septembre 2019, le tribunal de grande instance d'Alençon, auquel le contentieux de la sécurité sociale a été transféré à compter du 1er janvier 2019, a :
- débouté Mme [Z] [P] de l'ensemble de ses demandes,
- confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse en date du 26 décembre 2018,
- condamné Mme [P] aux entiers dépens.
Le 28 octobre 2019, Mme [Z] [P] a interjeté appel de cette décision.
Dans ses conclusions n° 2, reprises oralement à l'audience par son représentant, Mme [P] demande la cour d'infirmer le jugement entrepris et :
- d'annuler la décision de la caisse du 5 mars 2018,
- d'annuler la décision de rejet de la commission de recours amiable du 26 décembre 2018,
- d'ordonner la réalisation d'une nouvelle expertise avec pour mission :
* fixation de la date de consolidation de l'état de santé de Mme [P],
* fixation du taux d'incapacité subsistant suite à l'accident du travail du 24 octobre 2017
- de mettre à la charge de la caisse l'ensemble des frais et honoraires pouvant être liés à cette expertise,
- de condamner la caisse au versement de la somme de 5 000 euros en raison du préjudice moral et financier subi par Mme [P] du fait des décisions prises par la caisse dont l'annulation est sollicitée,
- de condamner la caisse à lui payer la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions reçues au greffe le 27 juillet 2022, reprises oralement à l'audience par sa représentante, la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados demande à la cour:
- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- de dire que c'est à bon droit que la caisse a fixé la date de consolidation de Mme [P] au 15 mars 2018, le médecin conseil et le médecin expert désigné ayant tous deux considéré que l'état de l'assurée était consolidé à cette date et qu'il ne subsistait pas de séquelles indemnisables,
- de débouter Mme [P] de l'ensemble de ses demandes,
A titre subsidiaire,
- d'ordonner la mise en oeuvre d'une expertise médicale judiciaire afin de déterminer la date de consolidation de Mme [P].
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux écritures et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS DE LA DECISION
Il convient préalablement de rappeler que la date de consolidation, ici contestée, correspond ,non pas à une guérison mais au moment de stabilisation de l'état de la victime
Il résulte ensuite de l'article L.141-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, que les contestations d'ordre médical, relatives à l'état du malade ou à l'état de la victime, et notamment à la date de consolidation en cas d'accident du travail et de maladie professionnelle et celles relatives à leur prise en charge thérapeutique donnent lieu à une expertise médicale.
L'article L.141-2 du code de la sécurité sociale dispose que l'avis technique de l'expert s'impose alors à l'intéressé comme à la caisse. Au vu de celui-ci, sur demande d'une partie, le juge peut ordonner une nouvelle expertise.
Les dispositions susvisées ne s'appliquent toutefois pas au contentieux de l'incapacité, lié à l'existence d'éventuelles séquelles indemnisables. Il appartenait dès lors à l'assuré, sur ce point et pour toutes les procédures ouvertes avant le 1er janvier 2019, de saisir la caisse et, le cas échéant, le tribunal du contentieux de l'incapacité alors compétent d'un recours distinct.
Il résulte en l'espèce des débats que Mme [Z] [P], victime d'un accident du travail en date du 24 octobre 2017 ayant occasionné une lombalgie a, sur le fondement des dispositions précitées, contesté la date de consolidation fixée par la caisse au 15 mars 2018.
Il ressort du rapport d'expertise établi par le docteur [S], désigné sur le fondement de l'article L.141-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable, qu'à la date de l'examen, soit le 14 juin 2018, Mme [P] 'présente un état clinique stable depuis plusieurs mois', la 'situation fonctionnelle étant [fixée] depuis des mois après échec des infiltrations'.
L'expert souligne 'une bonne mobilité du rachis, sans trouble sensitivo moteur, une thymie correcte, une absence d'allothérapie autre qu'un anxiolytique, une absence de trouble fonctionnel psychomoteur' . Il en déduit que 'l'état de santé de la patiente est compatible ce jour avec une activité professionnelle quelconque adaptée à son état de santé' comme cela était le cas le 15 mars 2018, puisqu'il ne relève aucun changement notoire depuis cette date.
Il conclut donc que l'état de l'assurée en relation avec l'arrêt de travail du 24 octobre 2017 peut être considéré consolidé à la date du 15 mars 2018 et qu'un arrêt de travail n'est pas justifié en maladie au-delà de la date de consolidation pour une autre affection.
L'expertise médicale technique réalisée le 14 juin 2018 par le docteur [S] est donc complète, claire, précise et dépourvue d'ambiguïté en ce qui concerne la date de consolidation fixée au 15 mars 2018.
L'appelante ne verse aucun élément de nature à établir que son état aurait évolué postérieurement au 15 mars 2018, les certificats médicaux produits, l'inaptitude déclarée le 17 juillet 2018 et l'existence d'une rechute le 2 septembre 2019 n'ayant à cet égard aucun caractère probant.
Il convient en outre de souligner, conformément aux dispositions susvisées et ainsi qu'il l'a été précédemment rappelé, que la demande de fixation d'un éventuel taux d'incapacité ne saurait être tranchée dans le cadre du présent litige mais aurait dû faire l'objet d'un recours distinct, ainsi que précisé par la caisse dans son courrier de notification du 5 mars 2018.
Le docteur [S], dans le cadre de son expertise médicale technique fondée sur les dispositions de l'article L 141-1 du code de la sécurité sociale précitées, ne pouvait en tout état de cause être saisi de cette question particulière, distincte de l'existence des séquelles indemnisables.
La demande d'expertise formée par Mme [P] aux fins de fixation d'une date de consolidation et d'un taux d'incapacité lié à l'accident du travail survenu le 24 octobre 2017 sera donc rejetée.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a confirmé la décision de la commission de recours amiable, qui a maintenu la date de consolidation de l'état de santé de Mme [Z] [P], en suite de l'accident du travail du 24 octobre 2017au 15 mars 2018.
Mme [P], qui ne justifie d'aucun préjudice causé par une faute de la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche, sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.
Succombant , Mme [P] doit être condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a mis les dépens de première instance à la charge de Mme [P].
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
Déboute Mme [Z] [P] de sa demande de fixation d'un taux d'incapacité,
Déboute Mme [Z] [P] de sa demande de dommages-intérêts et de celle présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [Z] [P] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX