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19/05/2022 | FRANCE | N°21/00781

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 1, 19 mai 2022, 21/00781


AFFAIRE : N° RG 21/00781

N° Portalis DBVC-V-B7F-GWXW

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 15 Février 2021 - RG n° 19/00247









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 19 MAI 2022





APPELANT :



Monsieur [N] [M]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Elodie AYRAL, avocat au barreau de CHERBOURG

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INTIMEE :



S.A.S.U. ELIVIE Prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Sophie POUSSIN, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me TRONEL, avocat au barreau de...

AFFAIRE : N° RG 21/00781

N° Portalis DBVC-V-B7F-GWXW

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 15 Février 2021 - RG n° 19/00247

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 19 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [N] [M]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Elodie AYRAL, avocat au barreau de CHERBOURG

INTIMEE :

S.A.S.U. ELIVIE Prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Sophie POUSSIN, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me TRONEL, avocat au barreau de LYON

DEBATS : A l'audience publique du 14 mars 2022, tenue par Mme VINOT, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de chambre,

Mme PONCET, Conseiller,

Mme VINOT, Conseiller, rédacteur

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 19 mai 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

M. [M] a été embauché à compter du 23 octobre 2017 en qualité de technicien livreur puis de technicien installateur par la société Elivie qui exerce une activité de prestataire de santé à domicile.

Il a été licencié pour faute grave le 15 mars 2019.

Le 27 mai 2019, il a saisi le conseil de prud'hommes de Caen aux fins de contester cette mesure.

Par jugement du 15 février 2021 le conseil de prud'hommes de Caen a :

- dit que le licenciement pour faute grave est justifié

- débouté M. [M] de ses demandes

- débouté la société Elivie de ses demandes reconventionnelles

- condamné M. [M] aux dépens.

M. [M] a interjeté appel de ce jugement, en celles de ses dispositions ayant dit que licenciement était justifié, l'ayant débouté de ses demandes et condamné aux dépens.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions du 16 juin 2021pour l'appelant et du 14 septembre 2021pour l'intimée.

M. [M] demande à la cour de :

- réformer le jugement

- condamner la société Elivie à lui payer les sommes de :

- 627,68 euros à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire

- 62,76 euros à titre de congés payés afférents

- 1 700 euros à titre 'd'indemnité compensatrice de congés payés'

- 170 euros à titre de congés payés afférents

- 690,24 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 3 897,90 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la société Elivie à lui remettre sous astreinte une attestation pôle emploi et un bulletin de salaire.

La société Elivie demande à la cour de :

- confirmer le jugement

- à titre subsidiaire réduire au strit minimum les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner M. [M] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 23 février 2022.

SUR CE

La lettre de licenciement expose :

' Vous avez sciemment contrevenu à une règle importante du règlement intérieur.

En effet, en date du 5 février 2019, vous avez à 15h14 envoyé le SMS suivant à un de vos collègues M. [E] : '[U]. Si tu passes à l'agence... le rhum arrangé se trouve dans la porte du bureau. Bises'.

Ce à quoi votre collègue répondait : 'Ok. Cool. Bon courage pour le taf. À demain'.

Or, le règlement intérieur stipule dans son chapitre IV article 1 alinéa 2 : 'Il est interdit à toute personne d'introduire, de distribuer et de consommer dans l'entreprise des boissons alcoolisées'.

Vous avez en toute connaissance de cause introduit de l'alcool dans l'entreprise sans autorisation et dans le but manifeste de le distribuer à un collègue, ce que nous ne pouvons tolérer.'

Dans le cadre de l'instance, la société Elivie expose qu'elle a, à l'occasion de la restitution du téléphone portable professionnel de M. [E], découvert le SMS de M. [M] et que par la suite Mme [L], responsable de l'agence de [Localité 5] a découvert une bouteille d'alcool dans le tiroir du bureau de M. [M], ce en présence d'une déléguée du personnel.

L'existence et le contenu du SMS ne sont pas contestés par M. [M] qui entend soutenir que le message, qui ne pouvait matériellement être expressément identifié comme personnel s'agissant d'un SMS (lequel ne comporte pas d'objet contrairement à un courriel), avait un contenu personnel en conséquence couvert par le secret des correspondances de sorte que l'employeur ne pouvait l'utiliser pour le sanctionner pas plus qu'il ne pouvait, sur son fondement, entreprendre une fouille du bureau, au surplus dans un tiroir lui aussi personnel.

Il sera relevé que les SMS envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone portable mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel sauf s'ils sont identifiés comme personnels.

En l'espèce, le SMS a été envoyé depuis le téléphone mis à la disposition du salarié par l'employeur pour les besoins de son travail pendant le temps de travail et reçu par un collègue de travail sur le téléphone mis à sa disposition pour les besoins de son travail, sans qu'aucune mention attirant l'attention l'identifie comme un message personnel.

Il est donc entré régulièrement en possession de l'employeur qui pouvait le consulter en dehors de la présence de l'intéressé

Par ailleurs, son contenu visait un objet placé dans le bureau, local professionnel.

L'employeur était en conséquence fondé à s'en prévaloir comme moyen de preuve.

Celui-ci produit en outre un courriel de la déléguée du personnel indiquant avoir constaté le 4 mars en la présence de Mme [L] une bouteille de jus de fruit contenant un mélange jus de fruit/alcool ('vraisemblablement du rhum vu l'odeur'), dans le tiroir du bureau de M. [M].

Ce tiroir n'était pas identifié comme contenant des objets personnels et la matérialité de cette présence est donc régulièrement établie.

Cela étant, aucun fait autre que l'introduction d'une bouteille d'alcool dans l'entreprise n'est établi, ce à l'exclusion de toute consommation sur le lieu de travail et de tout impact de cette introduction sur le travail.

Il s'ensuit que si cette introduction est fautive comme contrevenant au règlement intérieur, il ne s'agissait pas d'un fait suffisamment sérieux pour justifier un licenciement lequel sera donc jugé sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera en conséquence infirmé.

Ceci ouvre droit au paiement des indemnités de préavis (et non de congés payés comme indiqué par erreur dans le dispositif des conclusions qui indiquent bien dans les motifs que c'est une indemnité de préavis qui est réclamée) et de licenciement pour les montants sollicités non contestés à titre subsidiaire, au paiement du salaire pendant la mise à pied et à des dommages et intérêts d'un montant compris entre 1 et 2 mois de salaire en application de l'article L.1235-3 du code du travail et qui seront évalués au montant réclamé en considération du salaire moyen perçu (1 948,95 euros) et de la situation postérieure au licenciement (M. [M] a perçu l'allocation de retour à l'emploi et indique avoir retrouvé un emploi en octobre 2019).

La remise des documents demandés sera ordonnée sans qu'il y ait lieu de l'assortir d'une astreinte en l'absence d'allégation de circonstances le justifiant.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement entrepris sauf en celles de ses dispositions ayant débouté la société Elivie de ses demandes reconventionnelles.

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société Elivie à payer à M. [M] les sommes de :

- 627,68 euros à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire

- 62,76 euros à titre de congés payés afférents

- 1 700 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 170 euros à titre de congés payés afférents

- 690,24 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 3 897,90 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société Elivie à remettre à M. [M], dans le délai de deux mois de la signification du présent arrêt, un bulletin de salaire par année et une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt.

Condamne la société Elivie aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

M. ALAINL. DELAHAYE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 1
Numéro d'arrêt : 21/00781
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.00781 ?
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