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12/05/2022 | FRANCE | N°21/00612

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 1, 12 mai 2022, 21/00612


AFFAIRE : N° RG 21/00612

N° Portalis DBVC-V-B7F-GWKI

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CAEN en date du 02 Février 2021 - RG n° F19/00410









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 12 MAI 2022





APPELANT :



Monsieur [W] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Dominique MARI, avocat au barreau de CAEN

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INTIMEE :



S.A.R.L. ROTOFRANCE prise en son établissement sis [Adresse 3], et prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par M...

AFFAIRE : N° RG 21/00612

N° Portalis DBVC-V-B7F-GWKI

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CAEN en date du 02 Février 2021 - RG n° F19/00410

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 12 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [W] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Dominique MARI, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE :

S.A.R.L. ROTOFRANCE prise en son établissement sis [Adresse 3], et prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Jean DELOM DE MEZERAC, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 07 mars 2022, tenue par Mme PONCET, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre,

Mme PONCET, Conseiller, rédacteur

Mme VINOT, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 12 mai 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

FAITS ET PROCÉDURE

M. [W] [B] a été embauché par la SARL Rotofrance à compter du 9 mars 2015 en qualité d'opérateur rotomoulage (avec reprise d'ancienneté au vu de ses bulletins de paie au 9 décembre 2014).

Victime d'un accident du travail le 11 juin 2018, il a été placé en arrêt du travail. Déclaré inapte à son poste le 9 novembre 2018, il a été licencié le 26 décembre 2018, pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 30 juillet 2019, il a saisi le conseil de prud'hommes de Caen pour demander des dommages et intérêts pour non respect de l'obligation de sécurité, et pour licenciement nul, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 2 février 2021, rendu en formation de départage, le conseil de prud'hommes a débouté M. [B] de ses demandes.

M. [B] a interjeté appel du jugement.

Vu le jugement rendu le 2 février 2021 par le conseil de prud'hommes de Caen

Vu les dernières conclusions de M. [B], appelant, communiquées et déposées le 1er juin 2021, tendant à voir le jugement réformé, à voir la SARL Rotofrance condamnée à lui verser 3 000€ de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, tendant à voir dire le licenciement, au principal nul, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse, à voir la SARL Rotofrance condamnée à lui verser 41 527,80€ de dommages et intérêts, 3 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile et à lui remettre, sous astreinte, une attestation Pôle Emploi rectifiée

Vu l'ordonnance rendue par le magistrat de la mise en état du 17 novembre 2021 ayant déclaré irrecevables les conclusions de la SARL Rotofrance intimée

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 février 2022

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 906 du code de procédure civile prescrit, simultanément à la notification des conclusions, une communication de toutes les pièces, sans exclure celles déjà communiquées en première instance. Il s'en déduit que doivent être écartées les pièces qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification de conclusions.

Les conclusions de la SARL Rotofrance ayant été déclarées irrecevables, elle ne peut valablement déposer de pièces ; ses pièces déposées à l'audience seront donc écartées. De la même manière, les pièces qu'elle a déposées en première instance ne sauraient être prises en compte puisque toutes les pièces, sans exclure celles déjà communiquées en première instance doivent à nouveau être communiquées en appel pour pouvoir être prises en compte.

En revanche, étant supposée ne pas avoir conclu puisque ses conclusions ont été déclarées irrecevables, la SARL Rotofrance est réputée s'être appropriée les motifs du jugement.

1) Sur les dommages et intérêts pour non respect de l'obligation de sécurité

M. [B] reproche à la SARL Rotofrance d'avoir refusé de mettre en place le mi-temps thérapeutique préconisé par le médecin du travail le 13 septembre 2018 dans le cadre d'une visite de pré-reprise.

M. [B] ne produit aucun refus formel de la SARL Rotofrance et se contente de faire état d'une certaine inertie de l'employeur. Cette inertie n'est toutefois pas établie. En effet, au vu des certificats médicaux produits, M. [B] a été placé en arrêt de travail du dimanche 6 au 26 septembre, puis du 8 au 14 octobre et du 27 octobre au 8 novembre 2018 et a bénéficié de congés payés du 27 septembre au 8 octobre. En outre, dès le 8 octobre, le médecin a noté qu'une reprise était 'prématurée actuellement' et a déclaré M. [B] inapte à son poste lors de la visite suivante le 9 novembre. En conséquence, entre le jeudi 13 septembre (date à la quelle le mi-temps a été préconisé) et le 8 octobre date à laquelle le médecin n'a plus envisagé de reprise, même à mi-temps, M. [B] a toujours été soit en arrêt de travail soit en congés payés.

M. [B] n'a pas, de fait, repris le travail et la SARL Rotofrance n'a pas non plus tenté de lui faire reprendre son poste à temps complet. La SARL Rotofrance n'a donc pas ni manqué à son obligation de sécurité puisqu'elle n'a jamais fait travailler M. [B] dans des conditions contraires aux préconisations du médecin du travail ni omis de mettre en oeuvre des préconisations du médecin du travail .

De surcroît, M. [B] n'établit pas avoir subi de préjudice. En effet, pendant la période litigieuse du 13 septembre au 8 octobre, il a été soit en arrêt de travail soit en congés payés. Ayant donc été indemnisé ou payé, il n'a pas subi de préjudice financier. Il ne justifie pas non plus avoir dû prendre des congés payés à raison de l'inertie de son employeur comme il le soutient et ne justifie donc pas non plus d'un préjudice moral à ce titre.

M. [B] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts.

2) Sur le licenciement

M. [B] soutient, au principal, que le licenciement serait nul à raison du défaut de consultation des délégués du personnel, subsidiairement, qu'il serait sans cause réelle et sérieuse, faute de véritable recherche de reclassement.

Toutefois, dans aucune de ces hypothèses, le licenciement n'est susceptible d'être déclaré nul. En effet, ces deux manquements caractérisant une méconnaissance par l'employeur des règles particulières aux victimes d'accident du travail sont tous deux sanctionnés par l'article L 1226-15 du code du travail.

' Il ressort du jugement que la SARL Rotofrance a justifié, en première instance, de la convocation de tous les délégués du personnel à la réunion du 10 décembre 2018, réunion dont l'ordre du jour mentionnait le reclassement de M. [B] et qu'un compte-rendu a été établi par l'employeur contresigné par deux des délégués du personnel.

M. [B] fait état de divers manquements : absence des délégués suppléants à la réunion, absence de rédaction d'un procès-verbal, premier compte -rendu produit non signé puis second signé par seulement deux délégués, attestations non conformes à l'article 202 du code de procédure civile de ces deux seuls délégués indiquant que ce compte-rendu est authentique.

La présence des suppléants à cette réunion n'était pas nécessaire puisqu'en toute hypothèse ils n'avaient pas à être consultés si les titulaires étaient présents. Aucune forme particulière n'étant imposée pour la consultation des délégués du personnel. ni l'absence de rédaction d'un procès-verbal, ni l'absence de signature du compte-rendu par un des trois délégués présents ne sont de nature à invalider cette consultation.

En conséquence, aucun manquement ne saurait être relevé à ce titre.

' M. [B] fait valoir qu'au vu du registre d'entrée et de sortie du personnel, deux opérateurs ont été embauchés les 2 janvier et 29 avril 2019 au service finition. Or, fait-il valoir, il aurait pu être reclassé dans ce service où la majorité des pièces pèse entre 0,5 et 5kg et où travaillent déjà plusieurs salariés en mi-temps thérapeutique ou reclassés à la suite de problèmes de santé. Il produit trois attestations de salariés ayant travaillé sur des postes de finition qui indiquent que les pièces pesaient moins ou pas plus de 10kg.

La réalité de ces deux embauches est établie au vu des mentions du jugement.

La première de ces embauches a eu lieu une semaine après le licenciement de M. [B] le 26 décembre 2018.

Dans l'avis d'inaptitude, le médecin du travail indique que M. [B] pouvait occuper 'un poste n'impliquant pas la manutention de charges lourdes et de postures contraignantes'. Au vu de cet avis et des indications données par M. [B] sur le service finition, en l'état non contredites par des pièces adverses, la SARL Rotofrance aurait dû proposer ce poste à M. [B]. En effet, le très faible laps de temps entre le licenciement de M. [B] et l'embauche effective d'un salarié dans ce service, de surcroît pendant la période des fêtes, établit suffisamment que ce poste était déjà disponible au moment du licenciement.

Faute de recherche sérieuse de reclassement, le licenciement encourt les sanctions de l'article L1226-15 du code du travail et M. [B] peut prétendre à des dommages et intérêts au moins égaux à six mois de salaire

Il indique s'être senti méprisé et humilié par l'empressement de son employeur à le licencier alors que plusieurs collègues présentant des problèmes de santé analogues au sien avaient été reclassés. Il ne produit aucun élément sur sa situation depuis son licenciement.

Compte tenu des autres élément connus : son âge (40 ans), son ancienneté (4 ans), son salaire moyen (2 181,34€ en 2017), au moment du licenciement, il y a lieu de lui allouer 15 000€ de dommages et intérêts.

3) Sur les points annexes

La somme allouée produira intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt.

La SARL Rotofrance devra remettre à M. [B], dans le délai d'un mois à compter de la date du présent arrêt, une attestation Pôle Emploi rectifiée mentionnant les 12 derniers mois travaillés avant l'accident du travail. En l'absence d'éléments permettant de craindre l'inexécution de cette mesure, il n'y a pas lieu de l'assortir d'une astreinte.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [B] ses frais irrépétibles. De ce chef, la SARL Rotofrance sera condamnée à lui verser 2 500€.

DÉCISION

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

- Confirme le jument en ce qu'il a débouté M. [B] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité

- Réforme le jugement pour le surplus

- Condamne la SARL Rotofrance à verser à M. [B] 15 000€ de dommages et intérêts pour manquement aux règles de l'article L1226-15 du code du travail avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt

- Dit que la SARL Rotofrance devra remettre à M. [B] dans le délai d'un mois à compter de la date du présent arrêt une attestation Pôle emploi rectifiée

- Déboute M. [B] du surplus de ses demandes principales

- Condamne la SARL Rotofrance à verser à M. [B] 2 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamne la SARL Rotofrance aux entiers dépens de première instance et d'appel

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

M. [U] L. [P]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 1
Numéro d'arrêt : 21/00612
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.00612 ?
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