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05/05/2022 | FRANCE | N°21/00469

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 1, 05 mai 2022, 21/00469


AFFAIRE : N° RG 21/00469

N° Portalis DBVC-V-B7F-GWA3

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 18 Janvier 2021 - RG n° 19/00637









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 05 MAI 2022





APPELANT :



Monsieur [S] [B]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté par Me Monique BINET, avocat au barreau de CAEN





INTIMEE :



S.A.S. SOCIETE DE COMMERCIALISATION ET ETUDES DE L'ECLAIR AGE DE NORMANDIE

[Adresse 7]

[Localité 3]



Représentée par Me Cécile GILBERT, avocat au barreau d'EURE









DEBATS : A l'audience publique...

AFFAIRE : N° RG 21/00469

N° Portalis DBVC-V-B7F-GWA3

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 18 Janvier 2021 - RG n° 19/00637

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 05 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [S] [B]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Monique BINET, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE :

S.A.S. SOCIETE DE COMMERCIALISATION ET ETUDES DE L'ECLAIR AGE DE NORMANDIE

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentée par Me Cécile GILBERT, avocat au barreau d'EURE

DEBATS : A l'audience publique du 24 février 2022, tenue par Mme DELAHAYE, Président de Chambre, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre,

Mme PONCET, Conseiller, rédacteur,

Mme VINOT, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 05 mai 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

FAITS ET PROCÉDURE

M. [S] [B] a été embauché par la SAS SCEEN (Société de commercialisation et d'études de l'éclairage de Normandie) à compter du 1er décembre 2005, affecté à l'agence de [Localité 5] (14), il y a exercé, à compter de juillet 2013, des fonctions de commercial.

Le 13 janvier 2016, la SAS SCEEN lui a proposé, pour motif économique, une mutation à [Localité 4]. M. [B] a refusé, le 25 janvier 2016, cette proposition.

Il a adhéré le 4 mars 2016 au contrat de sécurisation professionnelle (CSP) proposé par la SAS SCEEN et le contrat de travail a été rompu le 25 mars 2016.

Le 25 juillet 2016, M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Caen pour voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, obtenir une indemnité compensatrice de préavis et des dommages et intérêts.

Par jugement du 18 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a débouté M. [B] de ses demandes.

M. [B] a interjeté appel du jugement.

Vu le jugement rendu le 18 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Caen

Vu les dernières conclusions de M. [B], appelant, communiquées et déposées le 15 février 2022, tendant à voir le jugement infirmé, à voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et à voir la SAS SCEEN condamnée à lui verser : 4 625€ bruts (outre les congés payés afférents) d'indemnité compensatrice de préavis, 50 000€ de dommages et intérêts, à voir les intérêts dus sur ces sommes se capitaliser, à voir la SAS SCEEN condamnée à lui verser 3 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions de la SAS SCEEN, intimée, communiquées et déposées le 15 février 2022, tendant à voir le jugement confirmé, subsidiairement, tendant à voir les demandes réduites 'à de plus justes et raisonnables proportions' et tendant à voir M. [B] condamné à lui verser 2 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 16 février 2022

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. [B] soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, au principal, parce que les difficultés économiques alléguées ne sont pas réelles et sérieuse, parce que son poste n'a pas été supprimé et parce que son reclassement n'a pas été sérieusement recherché, subsidiairement parce que l'employeur n'a pas déterminé l'ordre des licenciements.

Seront d'abord examinés les moyens soulevés à titre principal qui sont les seuls susceptible de rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse, puis, le cas échéant, le moyen soulevé subsidiairement qui, s'il s'avérait fondé, n'affecterait pas le bien-fondé du licenciement mais pourrait ouvrir droit à dommages et intérêts pour perte de l'emploi.

Les motifs économiques fondant la rupture du contrat de travail, qui ont été communiqués, le 4 mars 2016, à M. [B], sont les suivants : l'ensemble du secteur d'activité du groupe connaît des difficultés économiques, qui ont nécessité une restructuration de la SAS SCEEN, ce qui emporte transfert du poste de commercial de M. [B] à [Localité 4]. Or, le salarié a refusé cette modification de son contrat de travail et le poste de reclassement offert et refusé était le seul disponible.

' Sur les difficultés économiques

La SAS SCEEN justifie du fait que son résultat d'exploitation et son résultat net ont été déficitaires au 31 décembre 2014 (-141 000€ et -1 353 000€). Son résultat d'exploitation a été positif au 31 décembre 2015 (31 377€) mais son résultat net est resté déficitaire (-309 655€). En outre, les sociétés du même secteur d'activité (Atelier Tredo, Epsilon + et H+) avaient toutes trois des résultats d'exploitation et des résultats nets négatifs au 31 décembre 2015.

M. [B] fait valoir que le déficit net particulièrement important enregistré par la SAS SCEEN en 2014 est lié à l'abandon d'une importante créance commerciale consenti à la société Atelier Tredo. La SAS SCEEN fait toutefois valoir, sans être démentie, que cette société, qui est sa filiale à 100%, produit les éclairages qu'elle commercialise et qu'il était donc impératif d'assurer son sauvetage.

Parallèlement, le chiffre d'affaires de la SAS SCEEN, de 19 533 666€ nets en 2013, a baissé au cours des années suivantes : 17 120 762€ en 2014, 16 882 744€ en 2015 et a continué de baisser en 2016 (16 464 892€).

Ces éléments établissent suffisamment l'existence de difficultés économiques.

' Sur la suppression de l'emploi

M. [B] n'a pas été licencié à raison de la suppression de son poste mais à raison de son refus de la modification proposée consistant en une mutation. Dans la lettre expliquant les raisons économiques du licenciement, la SAS SCEEN indique que sa réorganisation destinée à 'redresser la situation de l'ensemble du secteur d'activité' impliquait sa scission en deux entités et le transfert du poste de M. [B] à [Localité 4].

À supposer que la scission de l'entreprise soit bien une mesure destinée à faire face aux difficultés économiques (ce que conteste M. [B] qui l'explique par une mésentente entre les deux familles d'actionnaires), encore faut-il que cette scission justifie la mutation de M. [B].

Il ressort des indications données lors du comité d'entreprise du 20 novembre 2015 que les agences de [Localité 6] et [Localité 4] devaient faire partie de la même entité. La SAS SCEEN n'explique pas, dans ces conditions, les raisons pour lesquelles le poste de commercial occupé par M. [B] devrait dépendre, à l'avenir, de l'agence d'[Localité 4] plutôt de celle de [Localité 6]. Elle ne produit notamment aucun élément sur l'activité respective de ces deux agences ou sur leur développement prévisionnel qui justifiait ce transfert.

En outre, alors que le contrat de travail de M. [B] a pris fin le 25 mars 2016, la SAS SCEEN n'a recruté un commercial à [Localité 4] que le 5 septembre 2016 et a d'ailleurs recruté un mois après, le 3 octobre 2016, un nouveau commercial à [Localité 6], ce qui établit, d'une part, que la présence d'un commercial supplémentaire à [Localité 4] n'avait rien d'urgent, d'autre part, que la suppression d'un poste à [Localité 6] ne s'est pas avérée satisfaisante.

En conséquence, la SAS SCÉEN ne démontre pas que la mutation de M. [B], puis son licenciement à raison du refus de cette mutation, étaient justifiés par les difficultés économiques existantes.

Le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse.

M. [B] est fondé à obtenir, d'une part, une indemnité compensatrice de préavis, le CSP étant dépourvu de cause, d'autre part, des dommages et intérêts au moins égaux au salaire de ses six derniers mois.

' La SAS SCEEN ne contestant pas, ne serait-ce qu'à titre subsidiaire, la somme réclamée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, cette somme sera retenue.

' M. [B] justifie avoir perçu des allocations de chômage de mars 2016 à mars 2017 puis avoir été embauché comme commercial à compter du 10 avril 2017 pour un salaire fixe de 2 166,66€ (plus commissions) pour 169H.

Compte tenu de ces renseignements, des autres éléments connus : son âge (35 ans), son ancienneté (10 ans et 3 mois), son salaire moyen (2 378,03€ en moyenne en 2015 pour 151,67H) au moment du licenciement , il y a lieu de lui allouer 20 500€ de dommages et intérêts.

Les sommes allouées produiront intérêt au taux légal à compter du 5 août 2016, date de convocation de la SAS SCEEN devant le bureau de conciliation et d'orientation en ce qui concerne l'indemnité compensatrice d préavis et à compter de la date de l'arrêt en ce qui concerne les dommages et intérêts. Ce intérêts se capitaliseront quand ils seront dus pour une année entière.

La SAS SCEEN devra rembourser à Pôle Emploi les allocations de chômage versées à M. [B] entre la date du licenciement et la date du jugement dans la limite de trois mois d'allocations.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [B] ses frais irrépétibles, de ce chef, la SAS SCEEN sera condamnée à lui verser 2 500€.

DÉCISION

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

- Infirme le jugement

- Statuant à nouveau

- Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse

- Condamne la SAS SCEEN à verser à M. [B] :

- 4 625€ bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 462,50€ bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 5 août 2016

- 20 500€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt;

- Dit que le intérêts se capitaliseront quand ils seront dus pour une année entière

- Dit que la SAS SCEEN devra rembourser à Pôle Emploi les allocations de chômage versées à M. [B] entre la date du licenciement et la date du jugement dans la limite de trois mois d'allocations

- Condamne la SAS SCEEN à verser à M. [B] 2 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamne la SAS SCEEN aux entiers dépens de première instance et d'appel

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

M. ALAIN L. DELAHAYE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 1
Numéro d'arrêt : 21/00469
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;21.00469 ?
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