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05/05/2022 | FRANCE | N°20/02929

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 1, 05 mai 2022, 20/02929


AFFAIRE : N° RG 20/02929

N° Portalis DBVC-V-B7E-GU4T

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 09 Décembre 2020 - RG n° 19/00050









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 05 MAI 2022





APPELANT :



Monsieur [O] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Sophie CONDAMINE, avocat au barreau de CAEN

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INTIMEE :



S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES - CLEVIA NORMANDIE Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 3]



Représentée par Me Jean DELOM D...

AFFAIRE : N° RG 20/02929

N° Portalis DBVC-V-B7E-GU4T

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 09 Décembre 2020 - RG n° 19/00050

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 05 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [O] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie CONDAMINE, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE :

S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES - CLEVIA NORMANDIE Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean DELOM DE MEZERAC, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 17 février 2022, tenue par Mme VINOT, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre, rédacteur

Mme PONCET, Conseiller,

Mme VINOT, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 05 mai 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

Selon contrat de travail à durée indéterminée du 1er décembre 2003, M. [O] [F] a été engagé par la société FORCLIM NORMANDIE devenue la société EFFAGE ENERGIES SYSTEMES ' CLEVIA NORMANDIE, la convention collective nationale des ouvriers des entreprises de bâtiment étant applicable ;

Le contrat ne mentionne aucune fonction ou qualification, M. [F] indiquant sans être contredit avoir d'abord exercé les fonctions de gaineur ;

Ses dernières fonctions exercées sont celles de conducteur de travaux ;

Le 7 décembre 2015, il est devenu membre du CHSCT ;

Se plaignant d'une discrimination syndicale et de divers manquements de l'employeur à son obligation de sécurité et d'exécution de bonne foi du contrat de travail, il a saisi le 24 janvier 2019 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail le conseil de prud'hommes de Caen, lequel par jugement rendu le 9 décembre 2020, a débouté M. [F] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens ;

Par déclaration au greffe du 23 décembre 2020, M. [F] a formé appel de cette décision qui lui avait été notifié le 16 décembre précédent ;

Entre temps, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 15 avril 2021 ;

Par conclusions remises au greffe le 23 décembre 2021 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel, M. [F] demande à la cour de :

- réformer la décision dont appel en toutes ses dispositions, sauf à confirmer celle ayant débouté la SAS EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES ' CLEVIA NORMANDIE de sa demande reconventionnelle formulée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Et, statuant à nouveau,

- dire et juger Monsieur [F] recevable et bien fondé en ses demandes tant au titre de l'exécution que de la rupture de son contrat de travail ;

-prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [F] aux torts et griefs de la SAS EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES ' CLEVIA NORMANDIE ;

- constater, outre son caractère manifestement abusif, la nullité et, en toute hypothèse, l'absence de cause réelle et sérieuse s'attachant à la rupture du contrat de travail de M. [F];

En conséquence,

- condamner la SAS EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES ' CLEVIA NORMANDIE à verser à Monsieur [F] les sommes suivantes :

- 5.366,79 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 536,67 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés afférente ;

- 53.700 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- 10.000 € nets au titre de l'indemnisation du préjudice distinct lié à la discrimination subie par le salarié ;

- 2.500 € nets sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-ordonner la délivrance sous astreinte de 80 € par jour de retard d'un bulletin de paie et de documents de fin de contrat régularisés en considération de la décision à intervenir ;

-dire que les sommes à caractère de salaire porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes et, pour les autres sommes, à compter du prononcé de la décision à intervenir.

-débouter la SAS EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES ' CLEVIA NORMANDIE de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions et la condamner aux entiers dépens ;

Par conclusions remises au greffe le 27 janvier 2022 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel, la société EFFAGE ENERGIES SYSTEMES ' CLEVIA NORMANDIE demande à la cour de débouter M. [F] de ses demandes et de confirmer le jugement, et de le condamner à lui payer une somme de 3500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

MOTIFS

I - Sur la discrimination syndicale

L'article L.1132-1 du code du travail énonce un principe général de non-discrimination envers le salarié qui ne doit ni être écarté d'une procédure de recrutement, l'accès à un stage ou une période de formation en entreprise, ni être sanctionné ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat à raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, , de son appartenance ou de sa non-appartenance , vraie ou supposée à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français ;

L'article L. 1134-1 du même code dispose que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

En l'espèce, le salarié fait valoir qu'il a fait l'objet à compter de sa désignation comme membre du CHSCT d'un traitement différencié et d'une mise à l'écart et invoque les faits suivants :

obstacle à son évolution vers des fonctions de Metteur au point ;

Lors de son entretien d'évaluation du 14 décembre 2016, le salarié a émis le souhait d'évoluer vers un poste de metteur au point, ce à quoi l'employeur a indiqué que cette évolution nécessitait le suivi de formation afin d'optimiser sa pertinence sur le poste et qu'il y était très favorable, et il était prévu et noté sur le compte rendu de l'entretien qu'un essai dans le service de M. [W] était prévu en février 2017 ;

Le compte rendu de l'entretien effectué le 22 mai 2018 mentionne sur ce point que « l'année 2017 a été une année particulière avec une tentative de passage au poste de metteur au point. [O] est globalement conforme aux exigences du poste de conducteur de travaux mais n'a pas su convaincre [N] [W] sur la mise en service ». L'entretien note également que [O] souhaite évoluer vers le poste de metteur au point et souhaite être accompagné pour cela, ce à quoi l'employeur conclut que « une formation et un suivi seront nécessaire pour faire évaluer [O] vers le poste de metteur au point. Cela dépendra de la charge d'[N] [W] pour pouvoir l'accompagner ou non vers ce poste » ;

M. [Y], responsable d'exploitation dans l'entreprise, atteste que « malgré les efforts consentis par E. [W] et C. [F], nous avons conclu de sa période de mise en situation que le manque de connaissance de [O] [F] en électricité et régulation ne lui permettait pas d'occuper un poste de metteur au point à part entière'. Ce point est confirmé par l'attestation de M. [X], responsable d'activité dans l'entreprise qui précise que lors d'une réunion du 14 novembre 2017, il a notifié à M. [F] les difficultés rencontrées sur les chantiers qu'il a traité en tant que metteur au point et que son essai ne pouvait être considéré comme concluant, relevant un défaut de compétences techniques, un temps d'intervention systématiquement dépassé ;

Le salarié ne peut donc soutenir n'avoir pas eu accès à la formation interne prévue. Il ne produit par ailleurs aucun élément ou pièce de nature à remettre en cause l'appréciation faite sur ses difficultés à y satisfaire. A ce titre, le fait qu'il se soit vu confier des prestations relevant de l'emploi de Metteur au point, à le supposer établi, ce qui n'est pas le cas de sa pièce n°16 qui concerne des prestations effectuées par M. [M] et non par lui, n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation faite à la suite de son stage interne ;

Enfin, il ne justifie pas non plus d'une possibilité de formation externe, faute d'établir concrètement le lien existant entre le poste de Metteur au point et la formation proposée par l'AFPA visant à « contrôler le fonctionnement d'une installation de conditionnement d'air ». En outre, lors du dernier entretien d'évaluation effectué le 27 mars 2019, le salarié n'avait fait état d'aucun souhait en matière d'évolution professionnelle ;

Ces faits ne sont donc pas établis ;

Mise à l'écart de l'agence caenaise en qualité de conducteur de travaux par des affectations sur des chantiers éloignés de son domicile, par un placement en activité partielle, par l'exécution de tâches relevant d'un emploi de catégorie inférieure et par l'exclusion de réunions et évènements de l'agence de [Localité 4].

Au vu des bulletins de salaire produits, M. [F] a été placé en absence activité partielle en mars (42h), avril (67h) et mai (52h) 2018 (et non 2017 comme l'indique par erreur le salarié dans ses conclusions). L'employeur explique cette situation par une baisse d'activité de l'agence de [Localité 4] et le refus de M. [F] de réaliser des chantiers de grands déplacements, et justifie d'un refus le 15 novembre 2017 d'un chantier prévu à [Localité 6] ;

Le salarié ne conteste pas son refus pour les grands chantiers motivés par des convenances personnelles et les contraintes de son mandat au CHSCT, ce dernier point n'étant au demeurant étayé par aucune pièce. Par ailleurs il ne démontre pas avoir été le seul conducteur de travail placé en absence d'activité partielle, l'extrait de l'évaluation de M. [I], également conducteur de travaux à l'agence de [Localité 4], fait état de deux chantiers (La FRAC et la crèche PIM PAM POM) où M. [I] indique s'être senti abandonné et sans encadrement est sans pertinence. En effet, l'extrait communiqué n'est pas daté et ne permet pas de savoir s'il s'agit de chantiers sur lesquels M. [I] a été affecté en 2018, période à laquelle M. [F] se plaint d'affectations en dehors de l'agglomération de [Localité 4], en outre, M. [I] se plaint d'un absence d'encadrement administratif qui n'aurait nullement été compensé par l'affectation de M. [F] sur ces chantiers, les salariés exerçant les mêmes fonctions ;

Enfin, M. [F] se plaint également d'avoir été affecté sur des chantiers hors de l'agglomération caennaise, en Haute Normandie. Or, l'employeur indique sans être contredit sur ce point que la société dispose de deux agences à [Localité 7] et au Havre, le salarié indiquant dans ses écritures avoir accepté ces détachements, son contrat de travail mentionnant au demeurant qu'il peut être conduit à effectuer des déplacements temporaires ;

Ce fait n'est donc pas établi ;

Pour établir qu'il était cantonné aux finitions de petits chantiers, le salarié produit aux débats une liste manuscrite non datée, non nominative et non signée listant des finitions ou des malfaçons à corriger sur le chantier OGF Le Havre et un courriel du 11 juin 2018 adressé par le salarié à un de ses collègues où il mentionne « qu'il était en train de déposer de la gaine et du calorifuge au CHU de [Localité 7] » . Ces éléments sont toutefois insuffisants pour établir d'une part que le salarié effectuait lui-même ces travaux et d'autre part et en tout état de cause que l'exécution de tels travaux était habituelle ;

Ce fait n'est donc pas caractérisé ;

Le salarié ne prouve pas que seul son entretien d'évaluation n'a pas été organisé le 14 mai 2018. L'employeur justifie par ailleurs que les entretiens d'évaluation des ETAM sont à réaliser au plus tard le 30 juin 2018, et que celui de M. [F] a eu lieu le 22 mai 2018.

Ces faits ne sont donc pas établis ;

Le salarié produit aux débats des comptes rendus de réunion de service des 22 mars, 21 juin et 20 septembre 2017 dans lesquels il n'est pas mentionné, à l'exception de celle de 22 mars où il est noté « absent non excusé », ainsi qu'une convocation à une réunion d'encadrement du 1er février 2018 où il n'apparaît pas comme destinataire. L'employeur, sans être contredit sur ce point, justifie cette omission par le fait que le salarié effectuait d'autres chantiers hors de [Localité 4] et n'avait donc pas à être convié aux réunions entre juin 2017 et janvier 2018 ;

Le plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) du 9 avril 2018 pour le chantier [Localité 5] Frères ne mentionne pas M. [F], la case « conducteur de travaux « n'est pas complétée. Mais plan notifié comme salarié (cf piece 20 salarié). Or l'employeur n'est pas contredit lorsqu'il indique que ce chantier ne nécessitait pas pour l'entreprise de conducteur de travaux s'agissant d'un petit chantier ;

Le salarié ne produit aucun élément établissant le non renouvellement de sa formation de secouriste alors que M. [D] autre salarié a pu en bénéficier ;

Ces trois faits ne sont donc pas établis ;

Le salarié justifie que le 15 juin 2018, il ne faisait pas partie de la liste des salariés dont les vêtements de travail ont été renouvelé. L'employeur réplique qu'il lui appartenait de faire une demande d'attribution à la personne compétente mais ne prouve pas l'usage qu'il invoque de ne pas affecter en priorité les conducteurs de travaux en dotation de vêtements de travail. Ce fait est donc établi ;

Le salarié justifie que sa feuille de congés payés 2018 a été égarée en juin 2018 au sein des services administratifs de l'entreprise. Pour autant il n'établit pas comme il le soutient avoir été dans l'impossibilité de savoir si sa demande de congés avait été accepté. En effet, Il résulte de l'échange de courriels entre le salarié et les responsables du service Paie et Personnel qu'il avait connaissance dès le 22 février 2018 de l'acceptation par l'employeur de ses congés d'été ;

Ce fait n'est donc pas établi ;

Enfin c'est en vain que le salarié fait état d'un rapport d'expertise de l'IRCAF réalisée à la demande du CHSCT aux fins d'analyse des conditions de travail et des risques psychosociaux et leurs conséquences sur la santé et sur la sécurité des salariés. Si ce rapport formule un certain nombre de préconisations pour améliorer la situation et pour prévenir des risques psycho-sociaux, celles-ci sont sans rapport direct avec les faits présentés par le salarié et qu'il estime discriminatoire ;

La mise à pied conservatoire du 26 avril 2019 et sa convocation le même jour à un entretien préalable de licenciement pour le 9 mai suivant ;

Il ressort des pièces produites que :

- par courriel du 23 avril 2019 à 17h10, M. [Z], salarié de l'entreprise a alerté son supérieur hiérarchique, M. [X], des faits commis à son encontre par M. [F], à savoir, alors qu'il était en communication téléphonique avec un autre salarié, l'avoir tapé sur le dos avec un gros catalogue fournisseur, précisant avoir mal au dos et avoir contacté en urgence le médecin du travail et son médecin traitant. Il mentionne dans ce courriel d'autres incidents avec M. [F], soit le fait qu'il entre dans son bureau sans frapper, qu'il lui a serré le bras très fort, lui a tapé dans le dos, et lui fait des remarques désobligeantes sur son travail. M. [X] a transmis son courriel à 17h36 à la directrice des ressources humaines, précisant que M. [Z] l'avait alerté en début d'après-midi, lui avait semblé touché psychologiquement par la situation et que son médecin lui avait remis un certificat médical d'accident de travail d'une durée de trois jours. M. [Z] a effectivement fait l'objet d'un arrêt de travail « accident du travail » jusqu'au 26 avril 2019 pour « dorsalgie suite à choc, troubles anxieux réactionnels ».

Par ailleurs il déposé une plainte pénale le 25 avril suivant ;

- Le CHST a conclu ' le rapport produit n'est pas daté, mais l'attestation de M. [R] confirme que l'employeur a eu connaissance de l'enquête pendant l'entretien du 9 mai - après enquête que le geste de M. [F] n'est pas violent et agressif mais que M. [Z] a besoin d'une aide et d'un soutien psychologique et a conseillé à l'employeur de ne pas laisser les deux salariés dans un même environnement de travail ;

-Par procès-verbal du 9 mai 2019, le comité d'établissement de la société a voté contre le licenciement de M. [F] ;

-La demande d'autorisation de licencier M. [F] pour ces faits faite le 13 mai 2019 a été rejetée par l'inspection du travail pour un motif de forme le 19 mai 2019 et l'employeur, au vu de l'enquête du CHSCT a indiqué à M. [F] le 21 mai suivant qu'il levait la mise à pied et ne retiendrait pas de faute grave à son encontre ;

Dans cette demande, l'employeur explique la procédure de licenciement par les conséquences sur M. [Z], jeune débutant en bureau d'étude sur lequel M. [F] avait un ascendant ;

Si les faits dénoncées par M. [Z] ont été apprécié différemment par les intéressés, M. [F], qui conteste même leur matérialité puisqu'il a indiqué aux membres du CHSCT qu'il avait posé le catalogue sur l'épaule et avait poussé affectueusement M. [Z] et qui estime que la crédibilité de ses propos doit l'emporter au vu de son ancienneté, également M. [S], le salarié auquel M. [Z] téléphonait lors de l'incident, qui, rapportant les propos de ce dernier sur ce point « [O] vient de me taper avec un catalogue, est ce que tu crois que c'est normal », a répondu non en indiquant dans son attestation avoir pris cela sur le ton de l'humour, il n'en demeure pas moins que les conséquences du geste et de l'attitude de M. [F] sur M. [Z] nécessitaient des mesures de l'employeur tenue d'une obligation de sécurité ;

A ce titre, au vu des éléments rappelés ci-avant et dont il disposait au moment de la décision de mise à pied, celle-ci n'apparaît nullement excessive ;

En revanche, la décision d'engager une procédure de licenciement pour faute le 13 mai 2019, alors que l'employeur connaissait les conclusions du CHSCT et les mesures préconisées par ce dernier, n'apparaît pas justifiée ;

En définitive, deux faits sont établis : l'absence de fourniture de vêtements de travail, et la décision d'engager une procédure de licenciement contre M. [F] ;

Même si le salarié justifie avoir été en arrêt de travail à compter du 9 mai au 24 mai 2019, puis à compter du 13 juin 2019 pour « stress, crises d'angoisse et troubles du sommeil » et avoir fait une déclaration d'accident de travail le 26 avril 2019 suite à la notification de la mise à pied, ces deux faits sont insuffisants pour faire présumer l'esistence d'une discrimination syndicale. En effet, l'employeur a rapidement renoncé à la procédure après le refus de l'inspection du travail et a, contrairement à ce que soutient le salarié, mis en place d'autres mesures dans un délai raisonnable, étant précisé que M. [F] était alors en arrêt de travail depuis le 29 avril 2019 ;

Ainsi, il résulte des pièces produites, notamment un courriel du médecin du travail du 24 mai 2019 que celle-ci a reçu les deux salariés, en ayant le sentiment que la situation s'était apaisée, mais qu'en réalité il n'en était rien et a proposé une médiation, qui a été mise en place en juillet 2019, mais au vu du courriel de la médiatrice du 17 juillet 2019, si M. [Z] s'est déclaré favorable, M. [F] n'a pas donné suite à la mesure ;

Il en résulte qu'aucune discrimination syndicale ne peut être retenue ;

Le salarié invoque également des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité en se fondant sur les mêmes éléments. Au vu de ce qui précède, ces manquements ne sont pas davantage établis ;

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que le salarié ne justifie pas de manquement suffisament grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ;

Il sera par confirmation du jugement débouté de sa demande de résiliation judiciaire et également de ses demandes en découlant, ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination syndicale ;

II - Sur le licenciement

Au soutien de sa demande de nullité et/ou d'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, le salarié considère que la situation vécue sur son lieu de travail est la cause de l'inaptitude médicalement déclarée ;

L'employeur rappelant que le salarié n'a donné suite à aucune des offres de reclassement, considère qu'il n'est pas démontré que l'inaptitude serait induite de ses prétendues fautes contractuelles ;

Le 21 janvier 2021, le médecin du travail a conclu que M. [F] était « inapte à son poste, et inapte à tout poste dans l'entreprise EIFFAGE ENERGIE THERMIE SYSTEME CLEVIA GIBERVILLE, et apte à un poste équivalent dans le groupe, dans une autre structure, une formation » ;

Ainsi qu'il l'a été relevé ci-avant, aucun manquement de l'employeur à ses obligations à l'origine de la dégradation des conditions de travail invoquée par M. [F] n'est démontré, si bien que la demande de nullité du licenciement et celle tendant à le voir dire dépourvu de cause réelle et sérieuse seront rejetées ;

III - Sur les autres demandes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux indemnités de procédure seront confirmées.

En cause d'appel, il n'y a pas lieu à indemnités de procédure mais M. [F] qui perd le procès sera condamné aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Caen le 9 décembre 2020 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Déboute M. [F] de sa demande de nullité du licenciement prononcé pour inaptitude le 15 avril 2021 ainsi que celle tendant à voir dire ce licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Dit n'y avoir lieu à indemnités de procédure ;

Condamne M. [F] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M. ALAIN L. DELAHAYE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 1
Numéro d'arrêt : 20/02929
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;20.02929 ?
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