La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/05/2022 | FRANCE | N°20/00990

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 1, 05 mai 2022, 20/00990


AFFAIRE : N° RG 20/00990

N° Portalis DBVC-V-B7E-GRC7

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LISIEUX en date du 20 Mars 2020 - RG n° 19/00183









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 05 MAI 2022





APPELANT :



Monsieur [N] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représenté par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN, substitué

par Me CHATAIGNIER, avocat au barreu du HAVRE





INTIMEE :



S.A.S. STATION AUTOMOBILE NORMANDE TRANSPORTS MERTZ

[Adresse 4]

[Localité 2]



Représentée par Me Marion BELLAMY, avocat au barreau de CAEN, su...

AFFAIRE : N° RG 20/00990

N° Portalis DBVC-V-B7E-GRC7

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LISIEUX en date du 20 Mars 2020 - RG n° 19/00183

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 1

ARRET DU 05 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [N] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me CHATAIGNIER, avocat au barreu du HAVRE

INTIMEE :

S.A.S. STATION AUTOMOBILE NORMANDE TRANSPORTS MERTZ

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Marion BELLAMY, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me LAGARDETTE, avocat au barreau de PARIS

DEBATS : A l'audience publique du 17 février 2022, tenue par Mme VINOT, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre,

Mme PONCET, Conseiller,

Mme VINOT, Conseiller, rédacteur

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 05 mai 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

M. [J] a été embauché à compter du 5 janvier 2017 en qualité de directeur de filiale par la société Station automobile normande transports Mertz (ci-après dénommée SAN transports Mertz) spécialisée dans le transport de matières dangereuses en citerne et conteneurs.

Il a été en arrêt de travail à compter du 30 octobre 2017.

Le 1er décembre 2017, il a été licencié pour faute grave.

Le 23 juillet 2019, il a saisi le conseil de prud'hommes de Lisieux aux fins de contester cette mesure, obtenir paiement de diverses indemnités, d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, d'un rappel de prime et d'un rappel de maintien de salaire pendant arrêt maladie.

Par jugement du 20 mars 2020, le conseil de prud'hommes de Lisieux a :

- validé le licenciement pour faute grave,

- condamné la société SAN transports Mertz à payer à M. [J] la somme de 10 000 euros à titre de rappel annuel et celle de 1 000 euros à titre de congés payés afférents,

- condamné la société SAN transports Mertz à remettre à M. [J] un bulletin de salaire, un certificat de travail, une attestation pôle emploi, un reçu pour solde de tout compte conformes au jugement intégrant la somme de 10 000 euros pour prime,

- ordonné à la société SAN transports Mertz de recalculer la moyenne des trois derniers mois de salaire brut,

- débouté M. [J] de toutes ses autres demandes,

- condamné M. [J] à restituer l'ordinateur portable de marque Toshiba remis lors de son entrée en fonction sous astreinte,

- condamné M. [J] à verser à la société SAN Transports Mertz la somme de 10 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] aux dépens.

M. [J] a interjeté appel de ce jugement, en celles de ses dispositions ayant validé le licenciement pour faute grave, l'ayant débouté de ses demandes autres que celle de rappel de prime, condamné à restituer un ordinateur portable, à payer une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions du 10 janvier 2022 pour l'appelant et du 5 novembre 2021 pour l'intimée.

M. [J] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes celles de ses dispositions validant le licenciement, le déboutant, le condamnant à restitution d'un ordinateur et à payer une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

- condamner la société SAN transports Mertz à lui payer les sommes de :

- 28 206 euros à titre d'indemnité de préavis

- 2 820,60 euros à titre de congés payés afférents

- 3 482,30 euros ou à titre subsidiaire 3 034,11 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 23 878,64 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 15 000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail

- 53 351,94 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires

- 5 335,19 euros à titre de congés payés afférents

- 71 635,92 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé

- 12 716 euros à titre d'indemnité pour privation du maintien de salaire pendant la période d'arrêt maladie

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonner à l'employeur de remettre sous astreinte un certificat de travail, une attestation pôle emploi, un reçu pour solde de tout compte et un bulletin de salaire rectifiés, sous astreinte,

- débouter la société SAN transports Mertz de ses demandes.

La société SAN transports Mertz demande à la cour de :

- confirmer le jugement,

- condamner M. [J] à lui payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 2 février 2022.

SUR CE

1) Sur les heures supplémentaires

Le contrat de travail stipulait que M. [J] percevrait une rémunération forfaitaire pour une durée de travail de 218 jours par an.

L'argument tenant à une nullité de l'accord et celui tenant à l'inopposabilité de la convention de forfait conduisant M. [J] à tirer la même conséquence à savoir celle de son droit au paiement des heures supplémentaires effectuées, il suffit de relever que, alors que l'accord 2016 dont l'application est sollicitée par l'employeur stipulait que les salariés communiqueront à leur responsable par écrit et dans les 15 premiers jours de chaque mois le calendrier du mois écoulé faisant apparaître la qualification des jours de repos en repos hebdomadaire, congés payés, jours fériés ou jours de repos au titre du forfait, que les relevés seraient visés par la direction, que la direction veillerait à l'application de cette stipulation ainsi qu'à l'application des règles sur le repos minimal l'amplitude raisonnable et la charge de travail adéquate en assurant un suivi régulier par le supérieur hiérarchique de l'organisation du travail et de la charge de travail, en organisant un entretien individuel chaque année, la société SAN transports Mertz, qui n'apporte pas la preuve de l'envoi mensuel d'un calendrier et de sa vérification, ni d'un contrôle effectif du supérieur hiérarchique sur la charge de travail ni de la réalisation d'un entretien annuel, n'est pas en mesure de justifier du respect de ces mesures, les réunions de comité de direction n'ayant évidemment pas pour objet de vérifier la charge de travail et son adéquation.

Il s'ensuit que, à supposer qu'elle repose sur un accord valable, la convention de forfait est en toute hypothèse inopposable, ce qui rend le salarié recevable à réclamer paiement des heures supplémentaires le cas échéant effectuées.

M. [J] présente un tableau sur lequel il a mentionné pour chaque jour de la période d'emploi les horaires qu'il soutient avoir été les siens (heure de début et de fin matin et après-midi avec 'commentaires' sur l'activité du jour), ce qui est un élément suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en présentant ses propres éléments.

Force est de relever que la société SAN transports Mertz ne forme aucune observation sur ce tableau et ne s'explique pas sur les heures de travail effectuées, n'apportant aucun élément de nature à en justifier, de telle sorte que le volume d'heures tel qu'avancé par le salarié ne peut qu'être retenu.

Quant à l'argument développé par la société SAN transports Mertz selon lequel le salarié ayant, par la perception de son salaire contractuel, reçu un salaire supérieur au montant du salaire minimum conventionnel augmenté de toutes les heures supplémentaires qu'il réclame a été de fait rémunéré de toutes les heures accomplies, il ne saurait être accueuilli, rien n'établissant qu'il ait été fait application du salaire minimum conventionnel pour la fixation du salaire mensuel.

Le montant et le mode de calcul ne sont pas critiqués à titre subsidiaire et la demande subsidiaire de déduction des RTT a été déclarée irrecevable par le conseiller de la mise en état de sorte qu'il sera fait droit à la demande formée par le salarié.

2) Sur le travail dissimulé

En l'état d'un accord qui prévoyait un certain nombre de garanties et alors que le salarié bénéficiait d'une autonomie totale dans l'organisation de son temps de travail, l'intention de dissimulation n'est pas établie.

3) Sur le maintien de salaire pendant l'arrêt maladie

M. [J] soutient que l'employeur avait souscrit un contrat de prévoyance assurant un maintien de salaire en cas de maladie et n'a pas fait le nécessaire pour l'en faire bénéficier.

Cependant, aucun élément n'est produit tendant à établir le contenu du contrat et l'existence de la garantie prétendue.

La société SAN transports Mertz oppose les dispositions de l'article L.1226-1 du code du travail qui réservent ce maintien aux salariés ayant au moins un an d'ancienneté, ce qui n'appelle aucune observation en réponse.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [J] de cette demande.

4) Sur le rappel de prime

Comme le relève M. [J], le contrat de travail prévoyait le paiement d'une prime sur objectifs au minimum d'un montant de 10 000 euros au titre de l'année 2017.

Les premiers juges ont fait droit à cette demande et force est de relever que cette disposition du jugement ne fait l'objet d'aucune critique de l'intimée.

Elle sera confirmée.

5) Sur le licenciement

La lettre de licenciement expose que M. [L], responsable d'exploitation, a notifié sa démission le 19 octobre 2017, que M. [J] a pris l'initiative de faire avec celui-ci une 'exit interview' afin de revenir avec lui sur les raisons de sa démission, qu'il a fait signer ce document à M. [L] ainsi qu'à Mme [T], reponsable ressources humaines qui n'avait pas assisté à l'entretien et a signé sur ses directives, qu'il a demandé en outre à cette dernière de scanner ce document et de le lui envoyer sur sa boîte mails et celle de M. [L], le tout à l'insu de la direction.

La lettre expose ensuite qu'en croyant pouvoir au nom de la société rédiger un tel document, qui contenait des accusations particulièrement graves pour celle-ci sans juger utile d'y apporter le moindre contrepoint (ce qui laissait penser que la société n'avait strictement aucune réponse à faire valoir) ni a mimima le communiquer à la direction, et le communiquer à M. [L], M. [J] a cherché à obtenir un témoignage qui lui soit favorable dès lors qu'y était inclus un propos relatif au fait qu'il ne pouvait gérer librement la société et qu'il a en toute hypothèse manqué de loyauté.

La lettre énonce encore qu'un entretien avait eu lieu le 5 juillet 2017 portant sur les différents problèmes relationnels du salarié avec ses collègues et un management brutal et dénigrant, que des séances de coaching avaient été acceptées, que cependant de nouveaux incidents se sont produits, qu'ainsi le 27 octobre un incident s'est produit dont il a établi un compte-rendu qui dissimulait le comportement inapproprié qu'il avait eu, que le 25 octobre le salarié a adressé à un prestataire recrutement un mail méprisant pour la directrice des ressources humaines et mensonger, que dans le cadre d'une demande de formation de M. [F] il a fait preuve d'une attitude erratique et que malgré des relances du service paie en octobre il n'est pas intervenu auprès du responsable d'exploitation afin que ce dernier transmette les documents de prépaie et ceux nécessaires à l'établissement des soldes de tout compte de plusieurs salariés.

Il est constant que le 23 octobre 2017 M. [J] a réalisé de son initiative une 'Exit interview' de M. [L] suite à la démission de celui-ci, dont il a dressé un procès-verbal qui contient l'énoncé d'un certain nombre de questions (comment considérez-vous votre charge de travail, combien d'heures effectuez-vous en moyenne, qu'est-ce qui vous a amené à prendre cette décision, quelles sont vos relations avec vos collaborateurs, avec le copil agence, avec la direction locale...) et les réponses de M. [L] parmi lesquelles la suivante : 'depuis 2017 j'ai l'impression que M. [J] ne peut diriger librement la société car je ressens qu'il a les mains liées. Cela fut particulièrement criant lors des grèves qui ont été menées en mai dernier. En effet cette grève fut mal gérée par le siège qui ne donnait aucun pouvoir à M. [J]. Il s'ensuit que les résultats se sont dégradés ainsi que les relations avec nos clients'.

Ce compte-rendu est signé de M. [J], de M. [L] et de Mme [T], responsable des ressources humaines, dont il n'est pas contesté qu'elle n'était pas présente au moment de l'entretien.

Cette dernière a attesté à la demande de l'employeur que M. [J] lui avait demandé de lire le document, qu'elle avait demandé à M. [L] s'il était d'accord avec ce qui était acté et que ce dernier a répondu que oui, que M. [J] lui a demandé de signer au bas du document, de le scanner pour le lui envoyer ainsi qu'à M. [L] et de le conserver dans le dossier de M. [L].

M. [J] explique avoir réalisé cet entretien en lien avec les recommandations d'un rapport d'audit de 2016.

Le document qu'il produit pour en justifier se présente comme une 'analyse du ressenti des salariés à propos de l'organisation du travail' étude dressée par deux psychologues cliniciennes listant un certain nombre de préconisations.

Il est objecté par l'intimée que cette étude, confidentielle, s'inscrivait dans le cadre d'une mission visant les seuls conducteurs dans un contexte particulier de grève.

Peu important que ce document ait pu ne pas concerner que les conducteurs ou n'ait pas été confidentiel, il suffit de relever qu'il ne s'agissait que d'une étude et non d'un rapport final, qu'il ne contenait que des préconisations dans le cadre desquelles ne s'inscrit manifestement pas le compte-rendu litigieux, dénommé 'exit interview' sans aucune référence à un cadre d'intervention, isolé et réalisé avec le seul M. [L], et dont rien n'établit que M. [J] en ait demandé la transmission immédiate à sa direction.

Cela étant, M. [J] relève exactement qu'en sa qualité de directeur de filiale il pouvait procéder à un entretien avec un salarié démissionnaire sans en référer nécessairement à sa hiérarchie.

Quant à la 'diffusion' de ce document, selon l'intimée elle-même elle n'a été faite qu'au salarié démissionnaire.

Aucun commencement de preuve de ce que M. [J] avait l'intention de se servir de ce document en ce qu'il contenait des propos le concernant n'est apporté.

Enfin, pour curieux que se présente ce procédé d'Exit interview, il n'en demeure pas moins qu'il ne consiste qu'en questions non orientées suivies des réponses du démissionnaire, soit comme un simple compte-rendu de questions-réponses et non comme le résultat d'un débat ou d'une discussion et que le simple fait que n'y figurent pas de propos contradictoires apportés par M. [J] ne s'analyse pas en une approbation par ce dernier du contenu des réponses.

Ce fait ne saurait donc être considéré comme fautif.

S'agissant de l'incident du 27 octobre, l'intimée se prévaut de la déclaration suivante de Mme [P], chargée de mission QHSE 'M. [J] a indiqué que j'avais un mauvais comportement envers Mme [B] et m'a accusée de lui avoir causé un mal-être. Il est sorti de la salle de réunion en m'indiquant et s'exclamant dans le hall d'accueil que je l'avais obligé à faire çà à Mme [B] et que si nous n'arrivions pas à avoir l'audit ce sera à cause de mon comportement et de la réunion d'aujourd'hui. Il a hurlé dans le couloir d'appeler M. [U]. Mme [B] est sortie de réunion et partie prendre l'air'.

Cette déclaration est insérée dans un très long mail qui retrace des échanges compliqués dans le cadre de la préparation d'un audit.

Le prétendu compte-rendu qui ne ferait pas mention de la perte de contrôle de M. [J] est en réalité un document que celui-ci n'a pas rédigé, établi et signé par Mme [B] et Mme [T], laquelle, en attestant ultérieurement qu'elle a receuilli les dires de Mme [B] et a rédigé le document à la demande de M. [J], n'indique pas que le contenu en a été dicté par ce dernier.

Le fait (qui est le fait visé par la lettre de licenciement) pour M. [J] d'avoir tenté par l'établissement du compte-rendu de dissimuler un comportement inapproprié n'est donc pas établi.

Le 25 octobre 2017, M. [J] a adressé à M. [E], responsable d'un cabinet de recrutement, un mail aux fins qu'il reprenne le recrutement d'un responsable d'exploitation et accélère ce processus 'car d'une part notre responsable a démissionné la semaine dernière et d'autre part malgré ma demande vous avez stoppé cette action sous l'ordre de notre président ou de son préposé RH'.

Il ne saurait être tiré de l'emploi du mot 'préposé' que M. [J] a usé d'un terme traduisant son mépris pour les fonctions subalternes de responsable ressources humaines, le préposé désignant en termes juridiques le salarié de l'employeur.

S'agissant de la prétendue attitude erratique dans le traitement de la demande de formation de M. [F], l'intimée se réfère à son unique pièce 10, à savoir un échange de plusieurs mails entre la responsable des ressources humaines et la directrice des ressources humaines sur leurs questionnements respectifs quant à l'opportunité de faire droit à une demande de Fongecif de M. [F], suivi d'un échange de mails entre la directrice des ressources humaines et M. [J] aux termes duquel, M. [J] indiquant qu'il conviendrait de signifier à M. [F] le refus, la directrice des ressources humaines lui répond que c'est lui l'exclusif décideur.

Aucun élement n'est produit sur les conditions dans lesquelles une acceptation aurait finalement été signifiée à M. [F] qui jusqu'alors n'était pas concerné par les échanges et M. [J] étant précisément le décideur il ne peut lui être reproché d'avoir pris une décision qu'il lui était demandé de prendre, décision dont rien n'établit qu'elle n'était pas opportune, le défaut d'opportunité n'étant au demeurant pas le reproche énoncé dans la lettre de licenciement laquelle ne vise que le prétendu revirement qui ne présente en rien un caractère fautif.

Enfin, s'agissant des relances du service paie, il est fait référence à deux pièces , à savoir cinq mails de relance émanant du service paie ou de la directrice des ressources humaines dont seul un est adressé directement à M. [J], aucun commentaire n'étant fait ni aucune justification apportée dans le cadre de l'instance sur l'impact de cette simple et unique relance adressée à ce dernier.

De ce qui vient d'être exposé il ne résulte la preuve d'aucune faute de M. [J] de sorte que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et que le jugement sera infirmé.

Ceci ouvre droit au paiement d'indemnités de préavis et de licenciement dont ni le principe ni les montants ne sont contestés par l'intimée à titre subsidiaire, outre de dommages et intérêts d'un montant maximal de 1 mois de salaire en application de l'article L.1235-3 du code du travail, compte tenu d'une ancienneté inférieure à un an (celle-ci se calculant de l'embauche à la date de notification du licenciement).

M. [J] indique et justifie avoir retrouvé un emploi au smic en février 2019 se cumulant avec l'allocation de retour à l'emploi et et avoir été ensuite en formation rémunérée, la société intimée produisant quant à elle des captures d'écran tendant à établir qu'il se présenterait comme consultant senior.

En cet état, sur la base d'un salaire, heures supplémentaires et prime comprises, de 11 772,65 euros, une somme de 11 000 euros sera allouée, sans qu'il y ait lieu à octroi distinct de dommages et intérêts pour déloyauté, M. [J], qui soutient que la société SAN transports Mertz l'avait débauché d'un poste qu'il occupait depuis plus de 10 ans et a bénéficié de son expérience avant de le licencier pour des prétextes fallacieux, n'apportant cependant aucune preuve de ses propos.

6) Sur la restitution de l'ordinateur

Il n'est pas contesté que M. [J] s'était vu remettre un ordinateur portable lors de son embauche qu'il soutient avoir laissé sur son bureau lors de son départ.

Le 28 décembre 2017 et le 29 mars 2018, la société SAN transports Mertz a mis ce dernier en demeure de le restituer.

Dans le cadre de l'instance, elle fait valoir que la non-restitution ressort du bordereau de restitution et des lettres de relance.

Cependant, les lettres de relance ne sont pas une preuve de non-restitution d'autant qu'elles sont postérieures à la lettre de licenciement qui, comme l'observe M. [J], demande à ce dernier de remettre dès réception tous les documents, clés, voiture de fonction, carte de gazole et documents de bord, téléphone, carte de crédit corporate appartenant à la société, ce, sans viser d'ordinateur, outre qu'elles sont postérieures au procès-verbal du 8 décembre 2017 listant 'les équipements de M. [J]' récupérés sans mentionner de réserves sur un équipement non restitué, M. [J] observant encore exactement que l'employeur n'aurait pas manqué de viser l'ordinateur parmi les pièces dont il demandait précisément la restitution si cette restitution n'avait pas été opérée.

En l'absence de tous autres éléments accréditant le fait que M. [J] serait encore en possession de l'ordinateur de la société, la demande de resitution sera rejetée et le jugement sera infirmé sur ce point.

La remise des documents demandés sera ordonnée sans qu'il y ait lieu de l'assortir d'une astreinte en l'absence d'allégation de circonstances le justifiant.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris en celle de ses dispositions ayant condamné la société SAN transports Mertz à payer à M. [J] la somme de 10 000 euros à titre de rappel de prime et celle de 1 000 euros à titre de congés payés afférents, débouté M. [J] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, de sa demande de maintien de salaire pendant l'arrêt maladie et de sa demande de dommages et intérêts pour déloyauté.

L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société SAN transports Mertz à payer à M. [J] les sommes de :

- 28 206 euros à titre d'indemnité de préavis

- 2 820,60 euros à titre de congés payés afférents

- 3 482,30 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 11 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 53 351,94 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires

- 5 335,19 euros à titre de congés payés afférents

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société SAN transports Mertz à remettre à M. [J] dans le délai de deux mois de la signification du présent arrêt un bulletin de salaire par année, une attestation Pôle emploi, un certificat de travail conformes au présent arrêt.

Déboute la société SAN transports Mertz de ses demandes de restitution d'ordinateur et paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société SAN transports Mertz aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

M. ALAINL. DELAHAYE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 1
Numéro d'arrêt : 20/00990
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;20.00990 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award