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08/07/2008 | FRANCE | N°08/385

France | France, Cour d'appel de Caen, Ct0038, 08 juillet 2008, 08/385


AFFAIRE : N RG 08 / 00385 Code Aff. : ARRET N D C. J B. ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES en date du 10 Janvier 2008- RG no 07 / 01022

PREMIERE CHAMBRE-SECTION CIVILE
APPELANTE :
Madame Josiane X... veuve Y...... 50590 HAUTEVILLE SUR MER
représentée par la SCP GRAMMAGNAC-YGOUF BALAVOINE LEVASSEUR, avoués assistée de Me FOUET, avocat au barreau de CAEN
INTIME :
Monsieur Yvon A...... 50590 HAUTEVILLE SUR MER
représenté par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués assisté de la SCP PETIT ETIENNE-DUMONT FOUCAULT, avocats

au barreau de COUTANCES

INTERVENANTS VOLONTAIRES :
Madame Chantal Y... épous...

AFFAIRE : N RG 08 / 00385 Code Aff. : ARRET N D C. J B. ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES en date du 10 Janvier 2008- RG no 07 / 01022

PREMIERE CHAMBRE-SECTION CIVILE
APPELANTE :
Madame Josiane X... veuve Y...... 50590 HAUTEVILLE SUR MER
représentée par la SCP GRAMMAGNAC-YGOUF BALAVOINE LEVASSEUR, avoués assistée de Me FOUET, avocat au barreau de CAEN
INTIME :
Monsieur Yvon A...... 50590 HAUTEVILLE SUR MER
représenté par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués assisté de la SCP PETIT ETIENNE-DUMONT FOUCAULT, avocats au barreau de COUTANCES

INTERVENANTS VOLONTAIRES :
Madame Chantal Y... épouse B......
Madame Annie Y...... 50590 MONTMARTIN SUR MER
Monsieur Christian Y...... (POLYNÉSIE FRANÇAISE)
représentés par la SCP GRAMMAGNAC-YGOUF BALAVOINE LEVASSEUR, avoués assistés de Me FOUET, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 10 Juin 2008 tenue, sans opposition du ou des avocats, par M. BOYER, Président de Chambre et Mme CHERBONNEL, Conseiller, chargés du rapport, qui ont rendu compte des débats à la Cour
GREFFIER : Madame GALAND
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
M. BOYER, Président de Chambre, Madame CHERBONNEL, Conseiller, rédacteur, Mme BEUVE, Conseiller,
ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 Juillet 2008 et signé par M. BOYER, Président, et Madame GALAND, Greffier
* * * En 1998, Yvon A... a procédé au rejointoiement des pierres de la façade Ouest et des pignons Nord et Sud d'un immeuble d'habitation sis à ANNOVILLE, propriété d'Alphonse Y... (décédé) ou des époux Y... / X..., ainsi que, par voie de sous-traitance, au traitement de ces surfaces par un produit hydrofuge fabriqué par les Laboratoires XYLOBELL, dénommé IMPERTUIL.
Les consorts Y... imputent à ces travaux des infiltrations d'eau à l'intérieur de l'immeuble.

Considérant que la responsabilité d'Yvon A... ne peut être fondée sur l'article 1792 du Code civil mais seulement sur un manquement à son obligation contractuelle d'information, le Tribunal de Grande Instance de COUTANCES, par un jugement du 10 janvier 2008, l'a condamné à payer à Josiane X... veuve Y..., outre une indemnité de 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 4. 822, 07 € dite correspondre à 20 % du coût des travaux de réfection des façades (dégradations des joints, nettoyage des surfaces et leur réfection).

Vu les conclusions prises :
- le 9 juin 2008 pour Josiane Y..., appelante de cette décision, ainsi que pour Chantal Y... épouse B..., Annie Y... et Christian Y..., intervenants volontaires ;
- le 6 juin 2008 pour Yvon A..., portant appel incident.
Rapport a été fait à l'audience, avant les plaidoiries.

SUR CE,
Les consorts Y... entendent qu'Yvon A... soit déclaré entièrement responsable des désordres affectant l'immeuble, sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs ou, à défaut, pour manquement à son obligation contractuelle de conseil ; en conséquence, condamné à payer à Josiane Y... les sommes de :
-24. 110, 37 € TTC au titre des travaux de réfection des façades,-10. 191, 30 € TTC au titre des travaux de réfection des menuiseries extérieures,
-9. 738, 58 € TTC au titre des travaux de réfection des embellissements,
-3. 868, 66 € TTC au titre des travaux d'éradication du champignon lignivore,
-15. 000 € au titre de son préjudice moral,
ainsi qu'à l'indemniser du préjudice de jouissance et financier consécutif à la réalisation des travaux.
Yvon A... conteste la qualité et l'intérêt à agir de Josiane Y... ; subsidiairement, tant le principe de son obligation que les préjudices allégués.

Quant à la recevabilité des demandes, d'une part, l'article 815-2 du code civil autorise tout indivisaire à prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis, même (dans sa rédaction issue de la Loi 06-728 du 23 juin 2006) si elles ne présentent pas un caractère d'urgence.
La circonstance qu'un des indivisaires, soit Alain Y..., désapprouverait cette action n'est donc pas de nature à empêcher sa mère de l'initier.
D'autre part, les consorts Y... en l'état demeurent propriétaires du dit immeuble, Alain Y... s'opposant à sa vente.
Enfin, il n'est pas certain qu'une action au fond des époux C..., en l'état bénéficiaire d'un bail sur l'immeuble, ne puisse prospérer, même si ce bail met à leur charge les grosses réparations.

Etant observé en outre que les intervenants se bornent à soutenir les prétentions de leur mère, sans former de demandes propres, il s'en déduit que les moyens d'irrecevabilité développés par l'intimé ne peuvent prospérer.

Quant au fond, M. D..., expert commis en référé, a conclu en ces termes :
" Les constatations précédentes mettent en évidence un changement de fonctionnement du mur de façade, une fois les travaux de rénovation de façade réalisés :
• Sur la façade " non traitée ", nous avons mesuré que l'humidité était plus importante sur la face extérieure que sur la face intérieure ; • Sur la façade traitée, nous avons mesuré l'inverse.
L'eau pénètre à l'intérieur du logement par plusieurs zones fragiles constatées :
Conduit de cheminée au niveau de la cuisine ; Calfeutrements défectueux des menuiseries extérieures ; Défauts ponctuels dans la façade, notamment au niveau du linteau de la fenêtre du bureau au rez de chaussée ;
Le fonctionnement des habitants a pu accélérer le phénomène de condensation :
Maison peu habitée par Monsieur et Madame E... dans les années 1990 ;
Maison non habitée entre 2001 et 2006 ;
Ceci se matérialise surtout dans la chambre inoccupée de l'étage.
Le traitement d'imperméabilisation de la façade a pour effet de limiter les échanges entre l'intérieur et l'extérieur. L'humidité accumulée à l'intérieur de la maison et dans les murs de façade ne s'évacue pas facilement par la face extérieure. Elle se concentre sur la face intérieure du mur. Elle ressort aux points fragiles : encadrements de fenêtres, tableau électrique du fait d'une épaisseur de mur plus faible et de la pénétration du câble électrique.
Le procédé de traitement d'hydrofugation de la face extérieure des murs de façade, compte tenu de la nature des pierres (MONTMARTIN), n'est pas adapté, ou est insuffisant.

La composition des joints de maçonnerie, précisée en mélange 1 / 3 de ciment et 2 / 3 de chaux par Monsieur A... ne semble pas en cause.
Toutefois, nos constatations initiales sur place, ainsi que le rapport de Monsieur F... du 19 juin 2007 font état de joints durs et imperméables à l'eau. De sorte que cette cause ne peut être écartée.
En conclusion, la cause du désordre consiste en la réalisation d'une étanchéité trop importante du mur de façade par la mise en place de l'hydrofugation et la réalisation de joints trop durs. Il aurait fallu compléter ce traitement des façades par la remise en état des menuiseries extérieures et leur calfeutrement, ainsi que la mise en place d'une ventilation mécanique de l'habitation... /...
En l'absence de maître d'oeuvre, la responsabilité de la prescription incombe à l'entrepreneur. Nous ne constatons pas de déficience de mise en oeuvre du produit de traitement, mais d'une erreur de préconisation. En conséquence, la responsabilité de l'entreprise principale, ainsi que de son sous-traitant pour l'application de ce produit d'hydrofugation de surface est engagée. Toutefois, l'absence de réalisation des travaux complémentaires nécessaires : menuiseries extérieures et ventilation est de la responsabilité du maître d'ouvrage. "
Sauf à préciser que la façade non traitée est très peu exposée aux pluies puisque située à l'Est et pourvue d'un appentis, il doit être retenu que les travaux litigieux assurent l'étanchéité des murs, aucune déficience des joints ou du produit hydrofuge n'ayant été mise en évidence.
Ces travaux ne peuvent donc être source d'infiltrations, contrairement à ce que soutiennent les consorts Y..., mais ils seraient, selon l'expert, cause de condensations intérieures.
Toutefois, d'une part, s'il est constant que les joints ont été réalisés, non pas à la chaux ou en mortier bâtard comme prévu, mais en ciment avec un " adjuvant résineux ", de l'avis de Monsieur F... susnommé, il reste qu'il n'est pas établi que le produit hydrofuge mis en oeuvre, ne permettrait pas aux pierres de " respirer ", contrairement aux prévisions de son fabricant.
D'autre part, les murs ne sont pas, a fortiori lorsque comme en l'espèce ils ont été pourvus d'une certaine isolation intérieure (isolation qui n'a pas été étudiée par l'expert), destinés à assurer la ventilation des locaux.
Par ailleurs, il résulte tant du rapport de Monsieur D... que des pièces produites que l'immeuble a présenté et souffre d'importantes infiltrations.

Ainsi, aux dires des époux C... susnommés), rapportés, par cet expert, l'eau pénètre au niveau des linteaux de deux fenêtres, jusqu'à dix litres d'eau à chaque pluie d'Ouest importante.
Le 2 mai 2006, à la requête des époux C..., Me Daniel H... Huissier de justice associé à COUTANCES a constaté notamment que la porte d'entrée de l'immeuble à sa traverse basse percée, qu'on " voit le jour au travers " et que la cabine de douche fuit au travers du plafond de la cage d'escalier dans l'entrée.
Christian E..., locataire de 1986 à 2001, témoigne qu'à son entrée dans les lieux il pleuvait dans le grenier, jusqu'à ce qu'en octobre les ardoises de couverture soient remplacées " mais rien de la charpente en mauvais état, des poutres pourries dans le couloir du 1er étage ". Il ajoute que " les fenêtres (étaient) en mauvais état mais peintes, la porte d'entrée laissait rentrer l'eau, les murs suintaient d'humidité ", ce qui contrarie les propos de Monsieur D... selon lesquels les travaux litigieux tendaient à l'embellissement de la façade, alors qu'il n'y avait pas de " problèmes spécifiques d'humidité ".
Il est constant enfin, ainsi qu'exposé par cet expert, que l'immeuble a été peu ou pas habité pendant une quinzaine d'années et que la couverture de l'immeuble commercial, lequel communique avec les locaux d'habitation, " en état d'usage avancé ", laisse passer l'eau dans des conditions plus amplement décrites ci-après.

Ces données autorisent à retenir qu'il n'est pas démontré que les travaux litigieux sont affectés de désordres et que les désordres susévoqués, soit les condensations d'humidité et leurs conséquences, sont imputables à ces travaux.
En outre, elles ne laissent pas place à un dommage consécutif à un manquement à l'obligation de conseil invoquée en termes généraux, étant rappelé de surcroît que les dommages qui relèvent de la garantie décennale ne peuvent donner lieu, à l'encontre des personnes tenues à cette garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun.
Principalement, seul donc l'appel incident est fondé.

S'agissant spécifiquement de la présence d'un champignon lignivore, Monsieur D... écrit :
" Il est situé au niveau du pignon surplombant le commerce, à côté de la cheminée (pignon sud).
Il est nécessaire de rappeler la chronologie des travaux réalisés :

Année 1998 : réalisation des travaux de façade-rejointoiement et imperméabilisation sur la façade principale et les deux pignons de la maison d'habitation ;

Année 2000 : suite à la plainte de l'utilisateur des lieux à l'époque, Monsieur E..., intervention de Monsieur A... pour refaire le traitement d'imperméabilisation du pignon sud, ainsi que les joints du conduit de cheminée, le solin entre cheminée et couverture, et le solin entre le pignon et la couverture du commerce.
Monsieur C... nous précise qu'il n'a pas constaté d'infiltration d'eau à ce niveau. Il est dans les lieux depuis l'année 2006. Par contre, il y a toujours des infiltrations à l'intérieur du conduit de cheminée. Elles apparaissent sous forme de bistre, dans les combles d'une part, et au niveau de la cuisine d'autre part.
Nous avons constaté, lors de notre visite du 28 mars 2007 la présence de pénétrations d'eau par les points singuliers de la couverture, les fenêtres de toit, mais aussi en partie courante de couverture. Ces pénétrations d'eau sont anciennes.... /...
Il est donc tout à fait vraisemblable que l'origine du champignon COGNOPHORE soit antérieure à l'intervention de Monsieur A.... La réfection du solin de 2000 a eut pour effet de stopper l'arrivée d'eau et donc le développement de ce champignon.
En conclusion, il n'y a pas de lien entre l'apparition et le développement de ce champignon et le traitement réalisé par Monsieur A.... "
Outre que la cause des infiltrations d'eau dénoncées en l'an 2000 reste incertaine, ni le traitement de ce pignon réalisé en 1998, ni sa reprise en l'an 2000, n'ont pu, en raison de sa fonction d'imperméabilisation, être la cause d'infiltrations.
Par ailleurs, il est constant que les solins entre la façade / cheminée et les couvertures, qui relèvent des travaux de couverture et qu'Yvon A... conteste avoir repris, aucune facturation de ce travail n'est du reste produite, ne sont en toute hypothèse pas en cause.
Etant observé enfin que le lieu d'apparition de ce champignon est à la jonction d'une cheminée à ciel ouvert et de combles dont la couverture est anciennement déficiente, il doit être retenu que l'imputabilité de ce désordre à l'intervention d'Yvon A..., ou à un défaut de conseil de celui-ci, n'est pas démontrée.
L'appel de Madame Y... est donc infondé.
Il serait inéquitable de laisser à Yvon A... l'entière charge des frais qu'il a dû exposer dans le cadre de cette instance, ce pourquoi il est justifié de lui allouer une indemnité de 3. 000 €.

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire.
réforme la décision entreprise ;
déboute Josiane X... veuve Y... de l'ensemble de ses demandes ;
la condamne à payer à Yvon A... la somme de 3. 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

la condamne, outre aux frais et honoraires de l'expert judiciaire, aux dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. GALAND J. BOYER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 08/385
Date de la décision : 08/07/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Coutances, 10 janvier 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.caen;arret;2008-07-08;08.385 ?
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