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08/01/2008 | FRANCE | N°06/01494

France | France, Cour d'appel de Caen, 08 janvier 2008, 06/01494


AFFAIRE : N RG 06 / 01494
Code Aff. :
ARRET N
J B. J B.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Grande Instance d' ARGENTAN en date du 23 Mars 2006-
RG no 02 / 0193



COUR D' APPEL DE CAEN
PREMIERE CHAMBRE- SECTION CIVILE
ARRET DU 08 JANVIER 2008

APPELANTS :

Madame Nicole X...


...


Maître Pascale Y..., es qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Madame X...


...- B. P. 83- 61300 L AIGLE

représentée par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués
assistée de Me AGNES, avocat au barreau

de CAEN



INTIME :

Monsieur Philippe A...


...


représenté par la SCP MOSQUET MIALON D' OLIVEIRA LECONTE
assisté de la SCP HUAUME...

AFFAIRE : N RG 06 / 01494
Code Aff. :
ARRET N
J B. J B.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Grande Instance d' ARGENTAN en date du 23 Mars 2006-
RG no 02 / 0193

COUR D' APPEL DE CAEN
PREMIERE CHAMBRE- SECTION CIVILE
ARRET DU 08 JANVIER 2008

APPELANTS :

Madame Nicole X...

...

Maître Pascale Y..., es qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Madame X...

...- B. P. 83- 61300 L AIGLE

représentée par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués
assistée de Me AGNES, avocat au barreau de CAEN

INTIME :

Monsieur Philippe A...

...

représenté par la SCP MOSQUET MIALON D' OLIVEIRA LECONTE
assisté de la SCP HUAUME- LEPELLETIER- ARIN, avocats au barreau D' ARGENTAN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. BOYER, Président de Chambre, rédacteur,
Mme CHERBONNEL, Conseiller,
M. VOGT, Conseiller,

DEBATS : A l' audience publique du 06 Novembre 2007

GREFFIER : Madame GALAND

ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 Janvier 2008 et signé par M. BOYER, Président de Chambre, et Madame GALAND, Greffier

Par jugement du 23 mars 2006, le tribunal de grande instance d' Argentan a statué ainsi :
" FIXE à 20. 664, 46 Euros la créance de dommages et intérêts de M. A... Philippe sur la liquidation judiciaire de Mme X... Nicole..
FlXE à 46. 598, 03 Euros la créance de M. A... Philippe à titre d' indemnité pour la conservation du cheptel appartenant à Mme X... Nicole depuis décembre 2001 jusqu' au 14 janvier 2003.
FIXE à 2. 000 Euros la somme due par Mme X... Nicole en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
REJETTE l' ensemble des autres demandes. "

Le tribunal relatait :
" Dans le courant de l' année 1984, Philippe A..., entrepreneur de travaux agricoles depuis 1980 et agriculteur à ECORCHES depuis 1982, se mettait en ménage avec Nicole X..., avec laquelle il aura un enfant.
Au cours de ce concubinage qui durera 18 ans, Mme X... reprenait à son compte l' exploitation de bovins attachée à la ferme. Ce transfert semble s' être réalisé en 1992.
M. A... se consacrait quant à lui au développement de l' activité de son entreprise qui possédait un compte à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Normand, sous le No 75003350011 devenu 75003334111 en 2001.
Après avoir signé un bail avec le logis familial pour un logement de Type F3 situé à TRUN, en novembre, Mme X... quittait définitivement M. A... en décembre 2001.
Le 19 février suivant, M. A... assignait Mme X... en remboursement d' une somme de 64. 845, 30 Euros en principal correspondant au montant des chèques tirés en 2001 par Mme X... sous le nom de M. A... sur le compte de l' entreprise de travaux agricoles et paraissant correspondre â des dépenses personnelles de Mme X....
Par jugement du 14 janvier 2003, le Tribunal de Grande Instance d' Argentan saisi par Mme X... prononçait la liquidation judiciaire de son exploitation agricole et nommait Maître B... en qualité de liquidateur, l' essentiel des créances déclarées étant constitué de la créance de M A... contre Mme X... d' un montant justement équivalent à la somme demandée. "

Le tribunal retenait que Mme X... avait imité la signature de M. A sur de nombreux chèques, et que celui- ci avait entretenu le cheptel de celle- la, cheptel saisi à titre conservatoire.

Il n' a retenu ni la société de fait ni le mandat allégué par Mme X....

Mme X... et Me D... concluent à la réformation du jugement et au débouté de M. A..., avec allocation de 3. 000 euros en application de l' article 37 de la loi du 10 juillet 1994, outre 5. 000 euros en application de l' article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Elles font valoir, outre l' apport d' un véhicule d' occasion, son travail sur l' exploitation agricole et affirme que si celle- ci a été officiellement séparée de l' entreprise de travaux agricoles de M.
A...
, cette différenciation ne correspondait pas à la réalité.

Elles affirment que Mme X... a, pendant 18 ans, imité la signature de M. A... avec l' accord de celui- ci, signant d' ailleurs d' autres documents administratifs et même un emprunt.

Elles font valoir des opérations détaillées ci- après sur des quotas laitiers, que M. A..., qui n' avait pas de vaches laitières, a bénéficié du règlement de quota laitiers en vertu d' accords passés " avec des amis (Suzanne) ou client de l' entreprise de travaux agricoles (Mr E...) " ; que ces paiements seraient intervenus en paiement de travaux agricoles au travers de l' entreprise de Mme
X...
, des opérations comptables entrecroisées qui n' auraient pas pu intervenir " s' il n' y avait pas eu de véritable exploitation en commun " (le détail des opérations sera examiné dans les motifs).

Elles ajoutent :
" Monsieur A... prélevait sur le compte ENTREPRISE tous les mois :
- 300 Frs pour placement PREDICA
- 477, 21 Frs pour PEA
- 475, 70 Frs pour PEA
- 484, 70 Frs pour PEA
Quant aux virements du compte EXPLOITATION de Madame X... sur le compte ENTREPRISE de Monsieur
A...
, ces sommes ont servi à faire des placements (exemple : TOTAL FINA ELF pour... 72. 026, 51 Frs). "

Elles développent quelques considérations sur le caractère erroné du refus prêté à Mme X... d' acquérir une scierie et affirment qu' elle utilisait le compte de l' entreprise de travaux agricoles et celui de la ferme alternativement pour les dépenses privées et font valoir : " Maître F... es qualité de mandataire liquidateur entend ajouter par ailleurs que la seule déclaration de créances qui lui a été faite au passif de Madame X... n' émane que de... Monsieur A..., ce qui montre, si besoin est que pour les tiers ce n' est pas Madame X... qui est débitrice mais Monsieur A... ou la Société de fait A...
X....... "
et que " Monsieur A... était dans l' impossibilité d' agir devant le Tribunal de Grande Instance qui était incompétent pour statuer sur les litiges entre associés d' une société de fait. "

Elles développent l' affirmation de la communauté durant de longues années.

Elles contestent les demandes subsidiaires au nom de la société de fait, celle- ci n' étant pas dissoute et aucun administrateur n' ayant été nommé.

M. A... conclut à l' irrecevabilité de l' appel, Mme X... étant dessaisie de ses droits, à la fixation des créances et subsidiairement, au résultat déficitaire de la société de fait alléguée, avec rapport des sommes détournées et la privation de droit résultant du recel.

Il indique qu' il exploitait 32 hectares, mais qu' il n' en a gardé que 5, outre son entreprise de travaux agricoles, laissant Mme X... reprendre les 27 restant et relate les épisodes procéduraux. Il affirme " elle est arrivée avec rien. Même ses deux valises avaient été volées sur le quai de la gare " (conclusion p. 14), ce qui témoigne du type d' écritures qu' il a déposées.

Il reproche à Mme X... d' avoir imité sa signature sur le compte bancaire de l' entreprise de travaux, alors qu' un autre compte du crédit agricole, 750003354001, 75003350018 antérieurement au passage à l' euro, était destiné aux dépenses du ménage et d' avoir détourné des sommes importantes, préparant depuis longtemps son départ, louant une boîte postale, retenant un appartement en HLM et commandant des meubles ; il détaille les mouvements de comptes qu' il estime démontrer sa thèse et reproche à Mme X... d' entretenir la confusion, son compte d' entreprise ne devant normalement pas être destiné à l' entretien du ménage, sauf détournement.

S' il ne conteste pas des aides réciproques entre les deux entreprises, il estime qu' il n' y a pas eu de société de fait, chacun des deux conservant les revenus de son entreprise et en assumant les dettes, sans participation à la direction de l' entreprise de l' autre.

Il fait remarquer qu' il s' est toujours engagé seul à l' égard de la banque.

Sur les quota laitiers, il affirme avoir perçu ceux correspondant à la partie d' exploitation qu' il avait conservée, puis ceux intervenus après le départ de Mme X... et sa cessation d' activité.

Sur les opérations comptables, il affirme qu' il s' agit d' opérations réalisées par Mme X... seule et de détournements au profit de celle- ci, et reconnaît avoir réalisé des prélèvements sur son compte d' entreprise mais fait remarquer que cela est parfaitement normal.

Il conteste toute affectio societatis et relate l' épisode d' achat d' une scierie à laquelle Mme aurait finalement refusé de participer, acceptant seulement de se porter caution.

Sur la voiture, il fait remarquer qu' elle était hors d' usage et impayée.

Par ordonnance du 24 octobre 2007, le juge de la mise en état en a ordonné la clôture.

Il a dit son rapport avant les plaidoiries.

SUR QUOI

Attendu que l " appel a été interjeté par Mme X... et par Me Y... ; que l' irrecevabilité n' est donc pas acquise ;

Que, en revanche, seule Me Y..., mandataire liquidateur, est partie à la procédure, à l' exclusion de Mme X... ;

Attendu que M. A... verse aux débats un volumineux dossier dans lequel on trouve ses relevés bancaires du compte 75003350108 depuis 1994 sans aucune annotation qui permette de deviner à quoi correspondent les débits et les crédits ;

Qu' il verse aussi des factures d' achats ménagers, dont une facture de pain du 4 août 2001 pour 43, 40 francs qui ne prouve que cet achat de pain, on ne sait par qui ;

Qu' il verse encore des copies de chèque dont les mentions de bénéficiaires sont illisibles (pièces 38 à 560) ;

Qu' il verse également ses extraits du grand livre de ses comptes généraux 1994 à 2000 ;

Qu' il est difficile de comprendre ce que cet amas de pièces tend à prouver ;

Attendu que l' obscurité de l' ensemble trouve une correspondance dans les écritures de M. A... dans son analyse des comptes en réponse à l' affirmation de Mme X... selon laquelle elle signait habituellement des chèques depuis plusieurs années, et ceci en accord avec lui ; que sans répondre au fait précis, il indique " mais Monsieur A... n' a jamais agréé qu' elle engage de dépenses pour lui, fasse des prélèvements indus ou détourne des fonds " ;

Qu' il distingue le compte 108 de son entreprise du compte bancaire75003354001, ultérieurement 7500335411, celui- ci destiné à l' entretien du ménage ; que le compte de la ferme était selon lui le 75007150083 ;

Que, cependant, il écrit que Mme X... a détourné des sommes du compte 108, pour un montant minimum de 64. 845, 30 €, " ces sommes apparaissent dans le " compte 108 " (pièce 1) qui est un sous- compte de la comptabilité de l' entreprise de Monsieur
A...
et qui correspond aux prélèvements personnels de l' exploitant.
Le comptable a dû imputer les sommes détournées sur ce compte 108 car il n' y a aucun justificatif comptable pour les imputer en tant que dépenses d' exploitations de l' entreprise.
En 1998, les prélèvements sur le compte 108 étaient d' environ 254. 000 frs,
En 1999 pour 247. 000 frs
En 2000 pour 172. 000 frs
En 2001, ils ont été de 91. 821, 05 € soit 602. 306, 60 francs (pièce 587)... alors que par ailleurs, les dépenses de la maisonnée étaient payées directement au moyen du compte CREDIT AGRICOLE 75003354001 " ;

Que la pièce 587 est le grand livre général de l' année 2001 ; que le compte 108 figure en pages 2 à 5 ; que le montant total de débits s' élève en réalité à 118. 593, 94, le débit final de 91. 821, 05 euros prenant en compte les opérations de crédit qui le diminuent ;

Attendu que M. A... ne dit pas comment il parvient au montant de 64. 845, 30 euros ;

Qu' il fait aussi état de détournements anciens dont il aurait récemment retrouvé des preuves, pièces 371 à 374 ; qu' il s' agit de quatre ordres de virement de septembre 1998, novembre 1996, août 1997, et janvier 1998 ; que si le montant du premier est illisible, les autres s' élèvent à 50. 218, 60. 000 et 43. 000 francs ;

Que, plus généralement, il affirme : " Madame X... faisait les comptes de la maisonnée. Lorsqu' elle s' apercevait que ses détournements risquaient d' être découverts, elle procédait à des régularisations en imitant la signature de Monsieur A... " ;

Attendu que finalement, M. A... reconnaît ainsi une pratique ancienne et assez répandue, tout en affirmant l' avoir ignorée ;

Attendu que cette pratique ne signifiait pas une intervention sur le compte 108 de l' exploitation, qui est un document comptable, mais sur le compte bancaire de l' exploitant et les instruments de paiement y afférents ;

Qu' il reste à déterminer si M. A... pouvait ignorer le détail de ces opérations et dans l' affirmative si cette ignorance est compatible avec la séparation des entreprises qu' il allègue ;

Que les détournements qu' il incrimine de 50. 218, 60. 000 et 43. 000 francs s' élevaient à des montants qui passent difficilement inaperçus pour un entrepreneur normalement vigilant ;

Attendu que la lecture du compte 108 de l' exploitation ne permet pas de retenir l' affirmation de M. A... selon lequel les dépenses de la maisonnée étaient étrangères à ce compte géré par le compte bancaire 75003354001 ; qu' en 2001 la mention " personnel " s' y trouve 110 fois ; que l' on trouve aussi coiffeur, familial, Docteur G..., boutique, maison de la presse, sport et détente, outre divers placements, des dépenses de pressing qui peuvent d' ailleurs concerner des vêtements de travail ; que d' autres encore concernent la (voiture) R25 et les dépenses d' essence ; que d' autres mentions, telles Elena, Ophélie ou Krystel sont moins explicites ;

Que la lecture du compte 108 pour les années précédentes, amène à des constatations du même ordre ;

Attendu que M. A..., qui n' était pas marié, était en droit de dépenser son argent comme il l' entendait ; mais que c' est lui qui, dans ses écritures, fait valoir le compte professionnel 108 pour affirmer qu' il ne servait pas aux dettes du ménage ; qu' il est d' ailleurs normal qu' un compte de l' exploitation reflète les prélèvements opérés par l' exploitant sur les revenus de son activité ;

Que M. A... n' explique d' ailleurs pas comment, sinon, il aurait participé aux dépenses du ménage ;

Attendu que, finalement, l' ensemble permet surtout de retenir la méconnaissance affirmée par M. A... du fonctionnement de ses propres comptes, et des interventions de Mme X... sur ces comptes, interventions qui ne pouvaient échapper à M. A... si celui- ci s' en préoccupait ;

Attendu que M. A... conteste la société de fait alléguée par Mme X... au motif que celle- ci ne participait à la direction de son entreprise, et notamment ni aux pertes, ni aux bénéfices ; qu' il reconnaît seulement une entraide entre deux concubins qui ont eu ensemble un fils et qui s' aidaient dans l' exploitation de leurs entreprises réciproques ;

Qu' il fait notamment valoir que tous les emprunts ont été souscrits à son nom, ce qui est exact ; que pour l' achat de la scierie, dont le déroulement est controversé, Mme X... est pourtant intervenue finalement à titre de caution, alors que selon M. A... elle ne possédait rien sauf la voiture accidentée et impayée, dont il conteste avoir perçu une indemnité d' assurance ; qu' il fait valoir avec raison que les instruments ménagers ne relèvent pas de l' entreprise ;

Attendu que Me Y... verse au dossier diverses attestations ; que selon Dominique ou Patrick H..., du Gaec de la Grande maison, Mme X... s' occupait de l' organisation de l' entreprise A..., faisait les factures et l' encaissement ;

Que M. A... conteste la valeur de cette attestation, sans désignation de la personne physique de son auteur ; qu' elle peut être retenue à titre de renseignement ;

Que M. Michel I... affirme qu' elle a toujours été son interlocutrice pour l' organisation des chantiers, les tarifs des prestations et les modalités de paiement, M. A... étant efficace dans son travail, mais jamais auprès des clients ; que le responsable des combustibles de l' Ouest atteste qu' elle s' occupait des commandes et de la gestion des comptes ; que selon M. P..., elle gérait l' entreprise ; que M. J..., ancien maire atteste qu' elle faisait seule la traite des vaches de 1984 à 1987, était toujours présente au téléphone, tenait un planning et faisait les factures ;

Que MM. K... et Q..., clients, attestent dans le même sens, sans que, l' on puisse avec M. A... considérer que ces attestations aient été délivrées dan la perspective de faciliter une retraite ;

Attendu que l' entraide décrite par M. A... l' est en ces termes :
" Mme X... :
- ne faisait pas les fenaisons. D' ailleurs elle ne savait pas conduire un tracteur
- ne faisait pas le bois et ne savait pas utiliser une tronçonneuse
- ne faisait pas la traite des vaches (Monsieur A... la faisait matin et soir), elle avait peur des animaux
- ne tenait pas le secrétariat ni la comptabilité. Le secrétariat et la comptabilité étaient externalisés auprès de Monsieur L..., secrétaire- comptable de l' expert- comptable FITECO. "
Mais
"- en cas de panne de matériel, elle pouvait aller chercher une pièce de rechange chez un fournisseur
- elle répondait au téléphone lorsqu' elle était là
- elle effectuait la facturation et les encaissements au pied du camion "
- elle transmettait au comptable la déclaration mensuelle de TVA "

Attendu que cette présentation laisse quelques questions en suspens dans la mesure où on voit mal le secrétaire comptable externe tenir aussi le secrétariat et qu' il n' est pas prétendu qu' il ait établi les factures ; que l' on ne sait pas qui établissait les factures qui n' étaient pas dressées au pied du camion, ou qui transmettait les données nécessaires à leur établissement ; que la transmission de déclaration mensuelle de TVA nécessite un travail préalable ;

Que répondre au téléphone " quand elle était là " suggère un manque d' assiduité qui aurait été difficile pour une entreprise de travaux agricoles ;

Que, en revanche, la conduite du tracteur ou l' emploi de la tronçonneuse apparaissent plus du ressort de M. A... ; mais que l' on ne peut suivre le caractère presque univoque de la collaboration décrite ;

Que les attestations versées au dossier par Mme X... apparaissent beaucoup plus crédibles ;

Attendu de même que M. A... fait valoir qu' il avait conservé cinq hectares sur lesquelles il faisait paître des vaches laitières et qu' il avait conservé les quotas.

Qu' il n' est pas prétendu que ces cinq hectares aient été démarqués du reste de l' exploitation ni que les vaches lui appartenant aient été séparées des autres ;

Qu' il n' est pas fait état d' un matériel distinct ;

Attendu que Mme X... détaille une série d' opérations comptables entrecroisées qui, selon elle, n' auraient pas pu intervenir s' il n' y avait pas eu de véritable exploitation en commun :
"- le 14 janvier 1996 Monsieur A... encaisse un chèque de Monsieur M...(41 356 Frs) qui correspond à des travaux agricoles. Grâce à ce règlement, Monsieur A... vire alors sur le compte AGRICOLE de Madame X... une somme de 43 000 Frs, ce qui permet alors à celle- ci de régler à Monsieur M...la vente de son maïs pour 54 120 Frs... pour une grande part réglée par le compte EXPLOITATION de Madame X....
- le 26 juillet 1996 le compte AGRICOLE de Monsieur A... est débité au profit du compte ENTREPRISE de celui- ci.
- le 20 novembre 1996 Monsieur A... encaisse sur le compte ENTREPRISE un chèque de Monsieur M...(50 218 Frs) grâce à quoi il peut virer sur le compte AGRICOLE de Madame X... 50 218 Frs, ce qui permet alors à Madame X... de régler à Monsieur M...61 200 Frs pour la vente de maïs...
- le 13 mai 1997 Monsieur A... débite son compte AGRICOLE de 25 000 Frs au profit de son compte ENTREPRISE.
- le 27 août 1997 Monsieur A... encaisse de Monsieur M...79 30l, 11 Frs sur son compte ENTREPRISE puis vire sur le compte AGRICOLE de Madame X... 60 000 Frs, ce qui permet à celle- ci de payer à Monsieur M...64 566 Frs pour la vente du maïs.
- le 1er septembre 1998 Monsieur A... encaisse un chèque de Monsieur M...de 40. 796, 85 Frs sur son compte ENTREPRISE puis vire ensuite sur le compte AGRICOLE de Madame X... 40. 796, 85 Frs, ce qui permet de nouveau à Madame X... de verser à Monsieur M...la somme de 42. 240 Frs pour la vente de maïs.- le 1er septembre 1998 Madame X... débite de son compte AGRICOLE 20 000 Frs pour créditer le compte ENTREPRISE de Monsieur
A....
- le même jour Monsieur A... débite son compte AGRICOLE de 10. 000 Frs pour créditer son compte entreprise. Qu' il est donc amplement démontré que toutes ces opérations étaient causées et dans l' intérêt du fonctionnement de l' entreprise puisqu' elles servaient à payer les factures de celles- ci (notamment de fourrage dans l' intérêt des deux exploitants). "

Attendu que M. A... répond que :
- le virement d e 43. 000 francs a été fait par Mme X... sous sa signature (pièce 374).
- le prétendu débit du 26 juillet 1996 n' est qu' un virement interne fait par Mme X..., que M. A... ignorait.
- le virement de 50. 218 francs a été fait par Mme X....
- le prétendu débit du 16 mai 1997 portant sur 20. 000 francs est une écriture interne faite par Mme X....
- le virement de 60. 000 francs est fait par Mme X....
- le virement du 1er septembre 1998 a été fait par Mme X... sous sa signature ;

Attendu que ces explications ne contestent pas la réalité des opérations et les attribue à Mme X... ;

Que cela suppose qu' elle ait eu la possibilité de les faire à partir des différents comptes ;

Que la seule défense de M. A... est l' ignorance dans laquelle il affirme s' être trouvé de ces opérations ;

Que cela suppose qu' il se soit désintéressé des opérations bancaires et comptables laissées à la discrétion ou à la responsabilité de Mme X... ;

Que, ce faisant, il laissait Mme X... jouer sur les comptes des deux entreprises, peut- être pour rendre certaines opérations moins apparentes ;

Qu' il en résultait une confusion entre les entreprises ;

Attendu que, sans entrer plus avant dans le détail des argumentations et des pièces des parties, dont aucune n' est de nature à contredire cette conclusion, l' ensemble de données analysées permet de retenir une interpénétration très intriquée des entreprises agricoles des deux concubins ;

Attendu que la notion de société de fait, si elle suppose cette interpénétration suppose également une volonté de participer aux bénéfices et aux pertes et une volonté de direction commune ;

Que les données de l' affaire sur ce point restent obscures, mais que la demande de Me Y... qui se limite au débouté et non à la liquidation ne suppose pas nécessairement une société de fait ;

Que des situations intermédiaires, telle une indivisibilité des activités, ou toute situation supposant un compte à faire, excluent qu' une condamnation puisse être prononcées indépendamment de ce compte ;

Attendu que cette impossibilité ne permet pas de retenir la saisie réalisée par M. A... à l' encontre de Mme X... et la créance alléguée de ce chef ;

Que la demande de débouté ne suppose acquise que cette donnée et non obligatoirement celle de société de fait ; qu' il s' agit plutôt d' une irrecevabilité ;

Qu' une demande au titre d' une société dont l' existence est incertaine et dont on ne sait qui doit la représenter n' est pas plus recevable ; que le recel suppose un partage ;

Attendu cependant que la demande n' était pas fautive ;

Attendu qu' eu égard à la présente décision et aux situations respectives des parties, l' équité ne commande aucune indemnité en application de l' article 700 du Nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement,

Infirme le jugement rendu le 17 mai 2006 par le tribunal de grande instance d' Argentan,

Déboute M. A... de ses conclusions d' irrecevabilité d' appel à l' encontre de Me Y...,

Déclare Mme X... irrecevable dans la procédure,

Déclare M. A... irrecevable en ses demandes,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Le condamne aux dépens de première instance et d' appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. GALAND J. BOYER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Numéro d'arrêt : 06/01494
Date de la décision : 08/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Argentan


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-08;06.01494 ?
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