AFFAIRE : N RG 06/03252
Code Aff. :
ARRET N
CJ/AC
ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES en date du 26 Octobre 2006
RG no 04/0579
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIERE CHAMBRE - SECTION 3
ARRET DU 22 NOVEMBRE 2007
APPELANT :
MINISTERE PUBLIC
représenté par Madame ROZE, Substitut Général
près la Cour d'Appel de CAEN
Comparant
INTIMEE :
Mademoiselle Xiaohong X...
née le 09 Janvier 1986
Foyer des Petites Familles
...
50100 CHERBOURG
Comparante et assistée par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avoués à la Cour et de Me Bénédicte MAST, avocat au barreau de COUTANCES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022007001464 du 28/03/2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur JAILLET, Conseiller, faisant fonction de Président, rédacteur
Madame HOLMAN, Conseiller,
Monsieur CHALICARNE, Conseiller,
DEBATS : A l'audience publique du 16 Octobre 2007
GREFFIER : Madame LEDOUX
ARRET contradictoire prononcé publiquement le 22 Novembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour et signé par Monsieur JAILLET, Conseiller, faisant fonction de Président et Madame LEDOUX, Greffier
PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Par jugement du 26 octobre 2006 (dont appel) le Tribunal de Grande Instance de Coutances a infirmé la décision du Tribunal d'Instance de Cherbourg en date du 3 décembre 2003 ayant refusé d'enregistrer la déclaration de nationalité française de Mademoiselle Xiaohong X....
Il a déclaré la contestation de celle-ci recevable et fondée et dit que l'intéressée (née le 9 janvier 1986 à Ruian, Chine) avait acquis la nationalité française.
Le tribunal a estimé que l'acte de naissance produit par Mademoiselle X... était suffisamment probant et conforme aux prescriptions légales et sur le fond, que la déclarante justifiait des conditions exigées par l'article 21.12.1o du Code Civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 26 novembre 2003.
Le Procureur Général près la Cour d'Appel de Caen a interjeté appel de ce jugement le 17 novembre 2006.
Le récépissé prescrit à l'article 1043 du nouveau code de procédure civile a été délivré le 9 mars 2007.
La contestation du Ministère Public ne porte plus devant la Cour que sur la force probante de l'acte de naissance de Mademoiselle X....
Le Parquet estime, en effet, que les documents produits par l'intéressée, non légalisés au sens de l'ordonnance royale de 1681 et de l'instruction générale relative à l'état civil, n'étaient pas suffisants pour établir de façon certaine l'état civil de Mademoiselle X... comme exigé par l'article 47 du Code Civil.
C'est pourquoi il demande à la Cour de constater l'extranéité de Xiaohong X....
Celle-ci conclut, au contraire, à la confirmation du jugement.
En rappelant les conditions dans lesquelles elle est entrée et a été accueillie en France et en soulignant l'excellence de son intégration depuis lors, Madame X... soutient que l'acte notarié du 17 juillet 2002 établissant sa naissance le 9 janvier 1986 à Ruian Province de Zhejiang en Chine répond parfaitement aux exigences de l'article 47 du Code Civil.
Elle fait valoir, en particulier, que le Consulat de Chine en France a attesté que cet acte avait été établi dans les formes prévues par la loi chinoise et que le Ministère Public, qui renverse la charge de la preuve, formule une contestation purement formelle dans le seul but de limiter artificiellement l'accès d'un étranger à la nationalité française.
Monsieur JAILLET, Président, a fait rapport de l'affaire à l'audience du 16 octobre 2007.
MOTIFS DE LA COUR
Il est constant que la nationalité française ne peut être accordée qu'à une personne dont l'état civil est établi de façon certaine.
Sur le caractère probant de l'acte de naissance produit par Mademoiselle X....
Le jugement du 26 octobre 2006, mérite à cet égard confirmation.
C'est en effet à juste titre que le Tribunal a considéré que l'acte notarié du 17 juillet 2002, certifié le 15 juillet 2004 comme établi dans les formes prévues par la loi Chinoise, par le Consulat de Chine en France, faisait foi de l'état civil de Mademoiselle X... au sens de l'article 47 du Code Civil.
Il convient de relever que le Ministère Public ne fait état devant la Cour (pas plus qu'en première instance) d'autres actes ou pièces détenus, de données extérieures ou d'éléments tirés de l'acte lui-même établissant que celui-ci est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.
Il n'a nullement, comme il lui est permis en cas de doute, fait procéder à la procédure de vérification prévue par la disposition pré-citée.
L'appelant se borne à soutenir que la mention apportée par le Consulat de Chine n'authentifie nullement la signature de l'auteur de l'acte authentique et sa qualité à établir un tel acte et qu'il aurait fallu faire légaliser cet acte au sens de l'ordonnance royale de 1681 et de l'instruction générale relative à l'état civil de juillet 1999.
Mais c'est à juste titre que l'intimée souligne que l'article 47 du Code Civil n'exige pas une telle légalisation et qu'au demeurant celle-ci, dans son acception actuelle, peut être faite par le Consulat en France du pays où l'acte a été établi (cf. instruction générale pré-citée).
Il convient de considérer que la mention du Consulat de Chine en France aux termes de laquelle l'acte du 17 juillet 2002 établissant l'état civil de Mademoiselle X... (date et lieu de naissance, filiation) a été dressé dans les formes prévues par la loi chinoise répond en substance à cette exigence.
Aucun autre élément du dossier ne permet de douter de la véracité de la signature de l'acte ou de la qualité du signataire.
Sur le fond
Dès lors que l'état civil de Mademoiselle X... est suffisamment établi, et avec lui la minorité de l'intéressée lorsqu'elle a été confiée à l'Aide Sociale à l'Enfance et a effectué sa déclaration le 1er octobre 2003, les conditions de fond exigées par l'article 21.12 du Code Civil sont réunies pour permettre l'acquisition par l'intéressée de la nationalité française.
Ce point n'est d'ailleurs pas contesté par le Ministère Public et les pièces du dossier établissent, plus qu'à suffire la parfaite et exemplaire intégration de Mademoiselle X... en France, comme l'a exactement analysé le Tribunal.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Statuant publiquement et contradictoirement.
Confirme le jugement déféré.
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
M.LEDOUX C.JAILLET