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08/11/2007 | FRANCE | N°06/00915

France | France, Cour d'appel de Caen, 08 novembre 2007, 06/00915


AFFAIRE : N RG 06/00915

Code Aff. :

ARRÊT N

MH NP





ORIGINE : DECISION en date du 17 Février 2006 du Tribunal de Commerce de BAYEUX - RG no 05/384





COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE - SECTION CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2007







APPELANTE :



LA SARL MECA FROID

Cjhemin des Pinchinades

13170 LES PENNES MIRABEAU

prise en la personne de son représentant légal



représentée par la SCP GRAMMAGNAC-YGOUF BALAVOINE L

EVASSEUR, avoués

assistée de Me Gérard MANSUY, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE





INTIME :



Monsieur Denis Z...


...


14520 PORT EN BESSIN



représenté par la SCP MOSQUET MIAL...

AFFAIRE : N RG 06/00915

Code Aff. :

ARRÊT N

MH NP

ORIGINE : DECISION en date du 17 Février 2006 du Tribunal de Commerce de BAYEUX - RG no 05/384

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE - SECTION CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2007

APPELANTE :

LA SARL MECA FROID

Cjhemin des Pinchinades

13170 LES PENNES MIRABEAU

prise en la personne de son représentant légal

représentée par la SCP GRAMMAGNAC-YGOUF BALAVOINE LEVASSEUR, avoués

assistée de Me Gérard MANSUY, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

INTIME :

Monsieur Denis Z...

...

14520 PORT EN BESSIN

représenté par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués

assisté de Me Samuel CHEVRET, avocat au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame HOLMAN, Conseiller, faisant fonction de Président, rédacteur,

Madame BOISSEL DOMBREVAL, Conseiller,

Mme VALLANSAN, Conseiller,

DÉBATS : A l'audience publique du 25 Septembre 2007

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

ARRÊT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 Novembre 2007 et signé par Madame HOLMAN, Conseiller, faisant fonction de Président, et Mme LE GALL, Greffier

La SARL MECA FROID a interjeté appel du jugement rendu le 17 février 2006 par le Tribunal de commerce de BAYEUX dans un litige l'opposant à M. Denis Z....

* *

*

Le 25 avril 2003, M. Z..., qui exerce à PORT EN BESSIN une activité commerciale de vente de crêpes, galettes, frites, gaufres et glaces a passé commande à la société MECA FROID de deux machines à glace d'occasion.

Les machines ont été livrées le 15 mai 2003, sans réserve.

Le 24 mai 2003, M. Z... a informé la société MECA FROID des pannes à répétition affectant les machines et le 28 mai 2003 a fait constater les dysfonctionnements par huissier.

Une expertise diligentée à la requête de M. Z... a révélé l'existence de non-conformités.

Sur requête de M. Z... une expertise judiciaire a été ordonnée par ordonnance du Président du Tribunal de commerce de BAYEUX le 23 avril 2004.

L'expert a déposé son rapport le 9 novembre 2004.

Par acte du 23 mai 2005, M. Z... a fait citer la société MECA FROID devant le Tribunal afin de voir prononcer la résolution des ventes, de voir condamner la société MECA FROID à lui restituer sous astreinte journalière de 100 € la somme de 7.622,45 € et trois chèques d'un montant total de 9.115,90 €, à récupérer à ses frais les machines litigieuses, et à payer les sommes de 480,65 € en remboursement de frais, 29.936,62 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice commercial avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, 3.500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société MECA FROID a formé des demandes reconventionnelles et par le jugement déféré, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal a fait droit à l'intégralité des réclamations, les sommes allouées en réparation du préjudice commercial et en application de l'article 700 du nouveau

code de procédure civile étant cependant respectivement réduites à 10.380,69 € et 1.500 €, et a débouté la société MECA FROID de ses demandes reconventionnelles.

I Sur la nature des contrats

En cause d'appel, M. Z... ne conteste plus que les deux machines litigieuses ont fait l'objet d'un contrat de vente.

En conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef par motifs adoptés.

II Sur la résolution des ventes

Aux termes des articles 1604 et 1615 du code civil, le vendeur est tenu envers l'acheteur d'une obligation de délivrance de la chose conformément à la commande, et cette obligation comprend la délivrance d'une chose aux caractéristiques conformes en tous points aux spécifications contractuellement convenues, ainsi que tout ce qui est destiné à l'usage de la chose, en ce compris le respect des normes sanitaires et techniques.

La réception sans réserve de la chose vendue couvre ses défauts apparents de conformité.

En l'espèce, l'offre de la société MECA FROID était constituée d'une part par une annonce publicitaire, passée dans le journal 14 ANNONCES, qui a initialement attiré l'attention de M. Z..., ainsi libellée : "vends machine à glace italienne Turbine neuf, occasion parfait état toutes marques .... Garantie, livraison, formation et reprise" ; d'autre part de la proposition écrite du représentant de la société MECA FROID le 15 avril 2003, alors que M. Z... envisageait l'achat d'une seule machine, précisant :

"les appareils proposés sont de marque CARPIGIANI avec pompe. Bien que d'occasion, leur aspect est du meilleur effet pour les rendre attractifs. Leur contrôle technique et révision, effectués par une société à l'expérience ancienne, sont la garantie d'un parfait fonctionnement.

L'appareil est livré et mis en route. Votre formation est comprise. Il est garanti la saison"

M. Z... a dénoncé par lettre recommandée avec accusé de réception, dès le 24 mai 2003 des défauts de conformité qui ne pouvaient être décelés que par la mise en service continue des appareils.

Le 28 mai 2003, il a fait établir un procès-verbal d'huissier constatant les dysfonctionnements lors de l'utilisation qu'il a immédiatement dénoncés à son cocontractant.

A sa requête, une expertise a été diligentée par un technicien, confirmant que les machines n'étaient pas en état de fonctionner.

Par ailleurs, l'expert judiciaire a détaillé dans son rapport les textes réglementaires et normes applicables aux machines à glace, précisant notamment que :

* les machines ne doivent présenter aucune possibilité de retenir les matières consommables susceptibles de favoriser un développement microbien,

* concernant les machines frigorifiques, l'usage des CFC (Fréon ou Forane) est totalement interdit, même en maintenance de machines existantes depuis le 1er janvier 2002.

* concernant les machines électriques, il convient de respecter la norme générale EN 60204. A ce titre, chaque machine doit être munie d'un schéma électrique identifiant chaque composant et mentionnant tous les repères des câbles utilisés.

* toute machine au contact du public et plus précisément les machines déplaçables doivent être dotées de freins efficaces.

* en matière de machine d'occasion, il appartient à l'utilisateur de rendre sa machine conforme aux textes et normes en usage en France avant la fin de l'année 1996.

Or, alors qu'il appartenait à la société MECA FROID, professionnel de la vente de machines à glace, de vérifier la conformité des appareils et si besoin de la réaliser avant remise sur le marché, l'expert a constaté, concernant la machine DL 453 qu'elle ne comportait aucune plaque signalétique ni marquage CE, aucun schéma électrique, étant précisé que CARPIGIANI FRANCE a indiqué à l'expert que ce type de matériel n'était plus fabriqué depuis 1984.

L'expert a précisé : "le couvercle sur les cuves est déformé et n'assure pas correctement la protection nécessaire de la crème. De même le reniflard dont il est muni ne dispose plus du filtre indispensable sur ce matériel pour éviter tout dépôt de poussière dans la crème consommable.

.... Sur le moteur du groupe frigorifique, il est indiqué l'usage de R 502 qui correspond à un CFC dont l'usage est interdit depuis le 1er janvier 2001"

L'expert conclut d'une part que les organes ne respectent pas la sécurité alimentaire des consommateurs, d'autre part que cette machine ne pouvait être vendue en l'état car elle ne respecte aucun des textes et règlements en vigueur.

L'expert précise également que pour que cette machine puisse subir avec succès un examen de conformité, il est nécessaire d'entreprendre plus de 3.000 € de travaux.

Concernant la machine DL 323P, l'expert a relevé qu'elle n'était plus fabriquée depuis vingt ans et que CARPIGIANI FRANCE lui avait précisé qu'il souhaitait voir disparaître ce négoce de machines obsolètes nuisant au renom de sa marque.

L'expert a également noté :

* une absence complète de plans et de documents signalétiques,

* une fuite au niveau des vannes électromagnétiques,

* un câblage électrique réalisé en vrac, méthode interdite par la norme EN 60240 de 93, étant au surplus précisé qu'aucun des relais électromagnétiques n'était homologué CE et qu'aucun parasitage n'était présent sur le circuit.

L'expert a conclu que cette machine n'était pas en état de marche, car elle n'avait pas subi une révision correcte.

Pour combattre les conclusions de l'expert judiciaire, la société MECA FROID produit un rapport d'expertise réalisé à sa requête par la société NORISKO.

Cependant, outre le fait que cette société a précisé avoir effectué son analyse sur d'autres machines que celles objet du litige, elle a conclu elle-même à la non-conformité technique des deux machines.

La société MECA FROID ne produit aucune autre pièce de nature à contredire utilement les constatations et conclusions du rapport d'expertise, et ses allégations sur la partialité de l'expert ne sont nullement étayées.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société MECA FROID a vendu des machines à glaces affectées de dysfonctionnements et ne respectant pas les normes sanitaires et techniques, alors que ces éléments constituaient un accessoire indispensable et permettaient leur utilisation normale.

Ces non-conformités n'étaient pas apparentes lors de la réception et n'ont été révélées -et immédiatement dénoncées- que lors de la mise en fonctionnement des machines pour les dysfonctionnements, et lors de l'expertise pour le non-respect des normes sanitaires et techniques.

Elles constituaient une clause essentielle du contrat, eu égard aux termes de l'offre acceptée ci-dessus précisés.

En conséquence, eu égard à la gravité des manquements à l'obligation de délivrance le Tribunal a justement fait droit à la demande de résolution et le jugement sera confirmé de ce chef sans qu'il y ait besoin d'examiner l'argumentation relative aux vices cachés.

III Sur les conséquences des résolutions

Lorsqu'un contrat synallagmatique est résolu pour inexécution par l'une des parties de ses obligations, les choses doivent être remises au même état que si les obligations nées du contrat n'avaient jamais existé.

En l'espèce, en conséquence de la résolution des ventes, le Tribunal a justement condamné la société MECA FROID à restituer le prix de vente et à reprendre à ses frais les machines livrées.

IV Sur les préjudices

M. Z... a subi divers dommages en relation de causalité avec la violation de l'obligation de délivrance, ainsi il a exposé des frais de constat d'huissier et d'expertise pour 480,65 €, dont le remboursement a été justement accordé par le Tribunal.

Il a également subi un préjudice commercial qui a été évalué par l'expert, conformément à l'attestation comptable à 9.900 € pour l'année 2003 sur la base d'une perte de marge de 1,80 € par glace et de cinq mille cinq cents ventes escomptées en 2003 à raison de l'été caniculaire, alors que quatre mille huit cents glaces avaient été vendues en 2001.

M. Z... fait justement observer qu'ayant réglé la somme de 7.622,45 € pour la première machine et consigné celle de 9.115,90 € sur le compte CARPA pour la seconde, ainsi qu'il en est justifié, il ne pouvait pas faire l'avance des fonds nécessaires à l'acquisition d'une nouvelle machine à glace jusqu'au 20 avril 2006, date du remboursement de ces sommes en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire.

Il y a donc lieu de l'indemniser également du préjudice subi pour les années 2004 et 2005 qui sera évalué sur la base des glaces vendues en 2001 à raison du caractère climatique atypique de l'année 2003, soit :

1,80 x 4.800 x 2 = 17.280 €.

Le préjudice commercial total s'élève donc à la somme de :

9.900 € + 17.280 € = 27.180 €

et le jugement sera réformé de ce chef.

S'agissant d'une créance indemnitaire, conformément à l'article 1153 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence de la somme de 9.900 €, et à compter du présent arrêt pour le surplus.

Enfin, M. Z... sollicite le remboursement des frais d'aménagement du local, correspondant à des travaux d'électricité. Cependant le Tribunal a justement considéré que ces travaux constituaient une amélioration du local, susceptible d'être utilisée pour alimenter d'autres appareils, notamment les machines rachetées par M. Z... en remplacement des appareils litigieux.

C'est à bon droit que la demande a été rejetée, et le jugement sera confirmé de ce chef.

V Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Succombant en son appel, la société MECA FROID a contraint M. Z... à exposer des frais irrépétibles qui seront en équité fixés à 2.000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Réforme le jugement en ses dispositions relatives au montant du préjudice commercial ;

- Condamne la SARL MECA FROID à payer à M. Denis Z... la somme de 27.180 € au titre du préjudice commercial, avec intérêts au taux légal sur la somme de 9.900€ à compter du jugement, et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

- Confirme le jugement en ses autres dispositions ;

Y additant,

- Condamne la SARL MECA FROID à payer à M. Z... la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- Condamne la SARL MECA FROID aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

N. LE GALLM. HOLMAN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Numéro d'arrêt : 06/00915
Date de la décision : 08/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Bayeux


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-08;06.00915 ?
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