Notification aux parties
le 14 OCTOBRE 2008
COUR D'APPEL DE BOURGES
PREMIÈRE PRÉSIDENCE
ORDONNANCE DU 14 OCTOBRE 2008
No 101-9 Pages
Numéro d'Inscription au répertoire général 08 / 00642
Appel d'une ordonnance de taxe rendue par le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de BOURGES,
NOUS, Robert CORDAS, Premier Président de la Cour d'Appel de BOURGES :
Statuant sur le recours formé par :
DEMANDEUR :
Maître Corinne Y...- SOCIETE FIDAL
...
...
assistée par Me BOULARD, avocat au barreau des Hauts de Seine
DÉFENDEURS :
Maître Catherine X...- Z...
...
comparant en personne
Maître Marie-Pierre B...
...
comparant en personne
La cause a été appelée à l'audience publique du 02 Septembre 2008, tenue par Monsieur le Premier Président, assisté de Madame SOUBRANE, greffier ;
Après avoir donné lecture des éléments du dossier et recueilli les observations des parties, Monsieur le Premier Président a, pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'ordonnance contradictoire à l'audience publique du 30 septembre 2008, à cette date Monsieur le Premier Président a ordonné la prorogation du délibéré au 14 octobre 2008 ;
A la date ainsi fixée a été rendue l'ordonnance dont la teneur suit :
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Par ordonnance du 18 mars 2008 le bâtonnier de l'Ordre des avocats au Barreau de Bourges, sur le fondement des articles 9-2 et 9- 3du Règlement Intérieur National de la profession des avocats, des articles 175 et suivants du décret du 27 novembre 1994 et des articles 14 et 19 du décret du 12 juillet 2005, a enjoint la Société FIDAL d'avoir à remettre à Maître Catherine X...- Z... et à Maître Marie-Pierre B... l'intégralité des pièces de fond et de procédure détenues dans les dossiers A..., F..., G... / GITE ET AMITIE, H..., I..., / J..., K..., L..., M..., N..., O..., P..., PAUL-D..., Q..., R...- SCEA P....
La Société FIDAL, prise en la personne de Me Y..., Directeur Adjoint a régulièrement formé le 14 avril 2008 un recours contre cette ordonnance dont elle demande l'annulation à titre principal.
Subsidiairement elle soutient que les documents demandés ont été régulièrement transmis conformément aux règles régissant la profession d'avocat.
Appelée à une première audience le 17 juin 2008, la réouverture des débats a été ordonnée par décision du 8 juillet afin que les parties fassent valoir leurs observations sur plusieurs points de droit.
A l'audience du 2 septembre les débats ont repris sur la base des conclusions échangées et des observations développées.
La Société FIDAL soutient :
- que le bâtonnier de l'Ordre n'avait pas compétence pour statuer s'agissant non pas d'une difficulté de remise de dossier entre un avocat et son client mais entre deux avocats,
- que la demande était irrecevable pour défaut de qualité des demanderesses et pour non respect des conditions de forme visées par l'article 175 du décret du 27 novembre 1991,
- que la décision entreprise serait entachée de nullité en raison du non respect du principe de la contradiction posé par les articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile,
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- que l'appel incident formé par Mes B... et X... serait irrecevable en application des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991,
Subsidiairement, elle affirme que les dossiers " judiciaires " litigieux ont en réalité été transmis dans leur intégralité et dans de brefs délais.
S'agissant des dossiers " juridiques " la Société FIDAL considère que seuls les documents qui appartiennent au client peuvent être transmis à l'exclusion des notes de recherches ou documents personnels de travail de l'avocat dessaisi.
Elle conclut donc, toujours à titre subsidiaire au débouté des demanderesses et à leur condamnation à lui verser la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Maîtres X...- Z... et B... contestent les moyens soulevés par la Société FIDAL relatifs à la compétence, la recevabilité et la validité de la décision entreprise.
Elles concluent à la confirmation de la décision du bâtonnier de l'ordre ayant ordonné la transmission des éléments des dossiers litigieux sauf à préciser qu'ils seront accompagnés d'un bordereau et qu'une astreinte devra être prévue.
Elles soutiennent en effet ne pas avoir obtenu l'intégralité des pièces demandées.
De plus elles sollicitent l'octroi d'une somme de 6000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive outre celle de 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En cours de délibéré, les parties se sont rapprochées sous l'égide de Me C... membre du Conseil de l'ordre afin de parvenir à une solution amiable du litige ainsi que cela résulte des courriers adressés les 24 et 26 septembre.
Il ressort de ces courriers que si certaines pièces des dossiers concernés ont pu être remises aux demanderesses ces dernières estiment que l'intégralité des éléments ne leurs ont pas été adressés. Elles maintiennent donc leurs demandes tells que présentées dans leurs conclusions.
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SUR QUOI ;
Sur la compétence :
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 14, 19 dernier alinéa du Décret du 12 juillet 2005 et des articles 174, 175 et 176 du Décret du 27 novembre 1991 que les contestations relatives à la restitution des pièces dont un avocat est dépositaire sont de la compétence en premier ressort du bâtonnier de l'Ordre des avocats et en cas de recours du Premier Président de la Cour d'Appel ;
Attendu que la procédure ainsi prévue ne concerne pas uniquement les litiges pouvant exister entre un avocat et son client qui le déchargerait de la défense de ses intérêts ;
Qu'elle est également applicable dans les relations entre avocats lorsque l'un d'eux est choisi par un client à la suite de l'un de ses confrères ;
Qu'en effet, l'avocat nouvellement saisi doit pouvoir obtenir les pièces de procédure et de fond constituant le dossier dont l'avocat dessaisi avait jusque là la charge sans que le cours des procédures ne soit affecté par des retards injustifiés ;
Que les dispositions de l'article 14 du Décret du 12 juillet 2005 ne précisent pas que cette restitution doive être effectuée au client lui-même ;
Que ce dernier ayant fait choix d'un nouveau conseil, ce dernier a qualité pour demander la restitution des pièces dont son confrère était dépositaire ;
Attendu que l'exception d'incompétence soulevée par la Société FIDAL doit en conséquence être rejetée, la contestation ayant été portée devant la juridiction prévue par l'article 14 susvisé qui renvoie expressément à la procédure prévue en matière de montant et de recouvrement d'honoraires réglementée par les articles 174 et suivants du Décret du 27 novembre 1991 ;
Sur la recevabilité de l'action :
Attendu qu'ainsi que rappelé ci-dessus Me X...- Z... et Me B... avaient bien qualité pour agir ;
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Attendu par ailleurs que, contrairement à ce que soutient la société FIDAL, le bâtonnier de l'ordre a bien été saisi par lettre recommandée avec accusé réception du 25 janvier reçue à l'Ordre le 28 janvier 2008 ;
Que les prescriptions de l'article 175 alinéa 1 du décret du 27 novembre 1991 ont donc été respectées ;
Sur la validité de la procédure :
Attendu qu'il résulte des pièces produites, notamment des correspondances échangées entre les parties et l'ordre des avocats que la Société FIDAL était parfaitement informée de l'objet précis du litige rappelé très exactement dans un courrier qui lui a été adressé le 4 février 2008 par le bâtonnier de l'Ordre énumérant les demandes relatives à la restitution des pièces des dossiers concernés ;
Attendu que les dispositions des articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile ont donc été respectées et que l'annulation de la procédure n'est pas encourue ;
Sur les demandes incidentes des intimées :
Attendu que la demande tendant à ce que les pièces dont la remise est sollicitée soient transmises sous bordereau ne constitue pas une prétention nouvelle ni ne peut être assimilée à un appel incident ;
Qu'elle a pour seul effet, dans le cadre de la confirmation qui est demandée, d'en assurer la bonne exécution ;
Attendu qu'il en est de même de la demande d'astreinte, le juge ayant en tout état de cause la faculté de le prévoir d'office conformément aux dispositions de l'article 33 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Attendu, s'agissant de la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive présentée par Mes X...- Z... et B..., qu'elle est parfaitement recevable sur le fondement de l'article 559 alinéa 1er in fine du code de procédure civile.
Sur le fond :
Attendu qu'il convient de rappeler d'une part que la saisine du Bâtonnier ne portait que sur des dossiers précisément énumérés dans le dispositif de son ordonnance ;
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Que des lors le litige qui nous est soumis se trouve limité à ces seuls dossiers ;
Attendu d'autre part que la décision du Bâtonnier a ordonné la restitution " des pièces de fond et de procédure " relatives à ces dossiers ;
Qu'elle n'a pas prévu que soient également remises les notes personnelles, les recherches de jurisprudence ou tout autre document ;
Attendu qu'il y a lieu de constater par ailleurs que le transfert de clientèle qui s'est opéré entre la Société FIDAL d'une part et Me X...- Z... et Me B... d'autre part ne fait pas l'objet de contestation, la Société FIDAL admettant que ces clients ont fait le libre choix de confier la défense de leur intérêt à ses anciennes associées ;
Attendu qu'il résulte des courriers adressés à la Cour les 24 et 26 septembre que pour les dossiers objet de notre saisine seuls restent en litige les restitutions de pièces de fond et de procédure suivantes, auxquelles la société FIDAL s'oppose encore :
. Dossier I... :
-1 bail rural
-1 extrait Kbis
-statuts
. Dossier L... :
- documents déposés par le client
-procédure de sursis devant le tribunal paritaire des baux ruraux de St Amand
. Dossier M... :
- dossier de dévolution successorale
et d'envoi en possession
. Dossier P...- R... :
- registres de la société
-dossiers de cession de parts
-extrait de Kbis original de 2001
. Dossier D... et Q...
- actes de cession de fonds entre Monsieur Paul D... et
Madame E...
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Attendu qu'il convient de constater que les autres injonctions stipulées dans le dispositif de l'ordonnance du Bâtonnier ont été satisfaites ce, en cours de délibéré ;
Attendu que pour le surplus ci-dessus énuméré, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise, les documents visés constituant bien des pièces de fond et de procédure qui doivent être restitués aux nouveaux avocats des clients concernés conformément aux textes exactement appliqués par le Bâtonnier ;
Attendu que cette restitution se fera sous bordereau pour éviter toute nouvelle contestation ;
Attendu qu'en application de l'article 33 de la loi du 9 juillet 1991 une astreinte de 200 euros par jour de retard sera prévue ;
Attendu que la résistance de la société FIDAL qui a estimé devoir interjeter appel de l'ordonnance entreprise qui sera confirmée, alors qu'elle l'a finalement exécutée en partie au cours du délibéré, a incontestablement occasionné un préjudice aux demanderesses qui ont été mises dans l'impossibilité d'assurer la défense des intérêts de leurs clients et les a contraintes à effectuer des démarches inutiles pour lesquelles elles ont du consacrer du temps ;
Attendu qu'elles recevront la somme de 3500 euros à titre de dommages intérêts ;
Attendu en outre que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile une somme de 2000 euros leur sera allouée pour tenir compte des frais irrépétibles qu'elles ont dû exposer ;
Attendu que la société FIDAL supportera les dépens ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement ;
DÉCLARONS recevable le recours formé par la Société FDAL contre l'ordonnance du Bâtonnier de l'Ordre des Avocats au Barreau de Bourges du 18 mars 2008 ;
REJETONS les exceptions d'incompétence, d'irrecevabilité et de nullité soulevées par la Société FIDAL ;
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CONSTATONS qu'il a été partiellement satisfait à l'injonction contenue dans le dispositif de l'ordonnance entreprise ;
Pour le surplus,
CONFIRMONS cette ordonnance et ORDONNONS la restitution sous bordereau par la Société FIDAL à Me X...- Z... et Me B..., dans les trois jours suivant la notification de la présente décision, à peine d'astreinte de 200 euros par jour de retard, des pièces suivantes :
. Dossier I... :
-1 bail rural
-1 extrait Kbis
-statuts
. Dossier L... :
- documents déposés par le client
-procédure de sursis devant le tribunal paritaire des baux ruraux de St Amand
. Dossier M... :
- dossier de dévolution successorale
et d'envoi en possession
. Dossier P...- R... :
- registres de la société
-dossiers de cession de parts
-extrait de Kbis original de 2001
. Dossier D... et Q... :
- actes de cession de fonds entre Monsieur Paul D... et
Madame E....
CONDAMNONS la Société FIDAL à payer à Me X...- Z... et à Me B... :
- la somme de 3500 euros à titre de dommages-intérêts
-celle de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
La CONDAMNONS aux dépens.
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Ordonnance rendue le 14 Octobre 2008, en audience publique, par Monsieur Robert CORDAS, Premier Président qui en a signé la minute avec Madame SOUBRANE, Greffier.
LE GREFFIERLE PREMIER PRÉSIDENT,
A. SOUBRANE R. CORDAS.