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20/09/2007 | FRANCE | N°06/10734

France | France, Cour d'appel de Bourges, 20 septembre 2007, 06/10734


ER/GP



































































COPIE + GROSSE





Me Jean-Charles LE ROY DES BARRES

Me Jacques-André GUILLAUMIN

Me Hervé RAHON

SCP LAVAL & LUEGER

Me Didier TRACOL



LE : 20 SEPTEMBRE 2007

COUR D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2007





No - Pages





Numéro d'Inscription au Répertoire Général : 06/00734



Décision déférée à la Cour :JUGEMENT rendu par le Tribunal de Grande Instance de BOURGES en date du 06 Avril 2006





PARTIES EN CAUSE :





I - S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES

agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administr...

ER/GP

COPIE + GROSSE

Me Jean-Charles LE ROY DES BARRES

Me Jacques-André GUILLAUMIN

Me Hervé RAHON

SCP LAVAL & LUEGER

Me Didier TRACOL

LE : 20 SEPTEMBRE 2007

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2007

No - Pages

Numéro d'Inscription au Répertoire Général : 06/00734

Décision déférée à la Cour :JUGEMENT rendu par le Tribunal de Grande Instance de BOURGES en date du 06 Avril 2006

PARTIES EN CAUSE :

I - S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES

agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité au siège social

4 rue Jules LEFEBVRE

75009 PARIS 09

représentée par Me Jean-Charles LE ROY DES BARRES, avoué à la Cour

assistée de Me Philippe LACAN, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE suivant déclaration du 18/05/2006

II - S.A. MMA IARD, venant aux droits de la Société AZUR ASSURANCES prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration, domicilié en cette qualité au siège social

10 Boulevard Alexandre OYON

72030 LE MANS CEDEX 9

représentée par Me Jacques-André GUILLAUMIN, avoué à la Cour

assistée de Me Z..., avocat au barreau de PARIS, membre de la SCP KARILA ET ASSOCIES

INTIMÉE

20 SEPTEMBRE 2007

No /2

III -Société ETUDES INDUSTRIELLES DU CENTRE (S.E.I.C.) prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration, domicilié en cette qualité au siège social

Zone Industrielle no 2 - Allée Evariste Gallois

18000 BOURGES

représentée par Me Jean-Charles LE ROY DES BARRES, avoué à la Cour

assistée de la SELARL FIZELLIER ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, substituée par Me THOMAS-RIOUALLON, sa collaboratrice

INTIMÉE

IV - S.A. DAGARD prise en la personne de son Président Directeur Général, domicilié en cette qualité au siège social

Route du Stade

23600 BOUSSAC

représentée par Me Hervé RAHON, avoué à la Cour

assistée de Me Bernard B..., avocat au barreau de CAEN

INTIMÉE

V - Société LABATUT-ALMENDRO, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

Les Moulins - Chemin du Moulin

34620 PUISSERGUIER

Non représentée

Assignée à personne habilitée par actes d'huissier en date des 08/09/2006 et 08/11/2006

INTIMÉE

20 SEPTEMBRE 2007

No /3

VI - Compagnie AXA FRANCE IARD venant aux droits de la Compagnie AXA ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

9 place Vendôme

75001 PARIS

représentée par la SCP LAVAL & LUEGER, avoués à la Cour d'Appel d'ORLÉANS, désignée par ordonnance de M. le Premier Président de la Cour d'Appel de BOURGES, en date du 09/06/2006

assistée de la SELAFA BLAMOUTIER, SALPHATI & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

INTIMÉE

VII - S.A.S. REICHOLD (anciennement Sté REICHOLD CHIMIE) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

103 rue des Campanules

77185 LOGNES

représentée par Me Didier TRACOL, avoué à la Cour

assistée de Me Lara ABERGEL, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

VIII - Compagnie AVIVA, anciennement SA ABEILLE ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

13 rue du Moulin Bailly

92271 BOIS COLOMBES CEDEX

représentée par Me Didier TRACOL, avoué à la Cour

assistée de Me Mathilde D... DE LA ROCHE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

*******************

20 SEPTEMBRE 2007

No / 4

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Juin 2007 en audience publique, la Cour étant composée de :

M. PUECHMAILLEPrésident de Chambre, entendu en son rapport

Mme LE MEUNIER-POELSConseiller

Mme BOUTETConseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MINOIS

***************

ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.

***************

Vu le jugement dont appel rendu entre les parties le 06 avril 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BOURGES ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2006 par la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, tendant à voir :

- infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau ;

- débouter la société AZUR ASSURANCES de ses demandes de remboursement ;

- dire que la société AZUR ASSUREUR dommages-ouvrage, ne peut solliciter le remboursement des indemnités qu'elle a versées au maître d'ouvrage, alors que le bien fondé de ces versements est d'autant moins établi que l'assureur Dommages-Ouvrage qui a lui-même évoqué une demande de restitution par son assuré est en droit d'en obtenir le remboursement de la part de son assuré ;

- dire en tous les cas que le montant des sommes versées par AZUR ASSURANCE à son assuré (171 505,14 euros + 2 106 901,26 euros) qui correspond partiellement au dommage matériel sollicité par ce dernier, l'autre partie (937 840 euros) ayant été réglée directement par la concluante à la Fromagerie, devra rester à la charge d'AZUR ASSURANCE, comme constituant le préjudice propre occasionné à la Fromagerie par cet assureur Dommages ouvrage du fait de son refus persistant et fautif d'intervenir sur un sinistre qui lui avait été déclaré en 1995 et 1988 ;

- condamner en outre la société AZUR ASSURANCES à verser à la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES la somme de 111 939 euros représentant la différence entre ce qui aurait été dans le pire des cas la participation de la concluante au règlement du dossier (825 901 euros HT ou 4 529 681 F HT tels qu'arrêtés en décembre 2000) et la somme de 937 840 euros (6 151 827,13 F) que la concluante a été amenée à verser directement à la Fromagerie ;

à titre infiniment subsidiaire :

- condamner les sociétés LABATUT-ALMENDRO et REICHOLD ainsi que leurs assureurs respectifs à relever et garantir intégralement et sans limitation d'aucune sorte la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES de toute condamnation en principal, intérêts et frais, qui viendrait à être prononcée contre elle ;

- condamner AZUR ASSURANCES à payer à la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et en tous les dépens, et allouer pour ceux d'appel à Me LE ROY DES BARRES, avoué, le bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 07 novembre 2006 par la société DAGARD, tendant à :

- voir réformer le jugement du 06 avril 2006 ;

- voir déclarer autant irrecevable que mal fondée l'action engagée par la compagnie d'assurances AZUR ASSURANCES, l'en débouter ;

- subsidiairement, voir juger que par leur attitude fautive, tant le maître d'ouvrage que l'assureur dommages ouvrage ont participé à l'aggravation du coût des reprises du sinistre ;

- voir en conséquence, limiter à 825 901 € l'éventuelle créance de la société AZUR ASSURANCES à l'encontre des constructeurs et de leurs assurances respectifs ;

- en tout état de cause, voir dire que la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES devra garantir la société DAGARD de toutes condamnations pouvant intervenir à son encontre tant en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais et dépens ;

- voir accorder à la société DAGARD recours intégral à l'encontre de la société LABATUT ALMENDRO et de son propre assureur, la société AXA FRANCE IARD, ainsi qu'à l'encontre de la société REICHOLD et de son assureur AVIVA et enfin, à l'encontre SEIC et de son assureur, la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES pour l'intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées à l'encontre de la société DAGARD tant en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais et dépens ;

- voir condamner tout succombant au paiement, au profit de la société DAGARD, de la somme de 10 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître RAHON, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 17 novembre 2006 par la société D'ETUDES INDUSTRIELLES DU CENTRE (S.E.I.C.), tendant à voir :

- réformer la décision entreprise :

*en ce qu'elle fait droit à la demande d' AZUR ASSURANCES ;

*en ce qu'elle retient la responsabilité de SEIC et par conséquent, la garantie de son assureur ;

ET STATUANT A NOUVEAU :

- juger fautive la gestion du sinistre par AZUR ASSURANCES dont les conséquences ont conduit à l'aggravation substantielle du sinistre ;

En conséquence,

- dire et juger AZUR ASSURANCES responsable de l'aggravation du sinistre à compter de janvier 2001 ;

En conséquence,

- rejeter toute demande formée par AZUR ASSURANCES, ès qualités d'assureur "DO" ;

- la condamner à rembourser à SEIC et à son assureur, la somme de 41 473,63 € augmentée des intérêts à compter de la date du versement ;

- dire et juger que SEIC ne saurait voir sa responsabilité retenue sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du Code Civil, faute de l'existence d'un lien de causalité entre la sphère d'intervention du maître d'oeuvre du chantier et les désordres constatés résultant d'une fabrication industrielle ;

- dire et juger en outre qu'il n'a commis aucune faute susceptible de voir sa responsabilité retenue sur quelque fondement que ce soit ;

En conséquence ;

- prononcer la mise hors de cause pure et simple de SEIC ;

- condamner la société LABATUT ALMENDRO et son assureur à rembourser à SEIC et son assureur la somme de 69 054,55 € soit le montant total des sommes exposées par ces dernières dans le cadre du présent sinistre déduction faite du remboursement d' AZUR ASSURANCES ;

SUBSIDIAIREMENT :

Si la Cour estimait ne pas devoir faire droit à la demande formée à l'encontre de l'assureur "DO", à concurrence de 41 473,63 € ;

- condamner la société LABATUT et son assureur à lui rembourser la somme de 110 528,10 € correspondant à 10 % de l'indemnité réglée en exécution de l'ordonnance du 1er juillet 2003 ;

TRÈS SUBSIDIAIREMENT :

Si par extraordinaire, la Cour estimait devoir retenir la responsabilité de SEIC sur le fondement de l'article 1792 du Code Civil ;

- condamner la société LABATUT et son assureur à la relever intégralement de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

- dire et juger qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société SEIC les frais irrépétibles qu'elle a dû engager dans le cadre de la présente instance ;

En conséquence ;

- condamner la société LABATUT et son assureur à payer à la société SEIC une somme de 40 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamner les mêmes aux entiers dépens et allouer à Me LE ROY DES BARRES, avoué, le bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 04 décembre 2006 par la Cie AXA FRANCE IARD, tendant à voir :

- réformer le jugement pour partie ;

- statuant à nouveau ;

- dire irrecevable l'action de la société AZUR ASSURANCES comme prescrite ;

- dire subsidiairement non fondée la demande formée par la société AZUR ASSURANCES à l'encontre de la société LABATUT ALMENDRO ;

- dire en tout état de cause que la garantie de la compagnie AXA FRANCE IARD n'est pas due dès lors qu'elle ne garantit pas la responsabilité civile décennale de la société LABATUT ALMENDRO ;

- dire subsidiairement que la garantie de la compagnie AXA FRANCE IARD au titre de la responsabilité éventuellement encourue par la société LABATUT ALMENDRO est limitée au montant de la somme de 147 771 € avec application de la franchise contractuelle de 10 % avec un maximum de 1 524,49 € ;

- en conséquence condamner la compagnie AZUR ASSURANCES à rembourser à la société AXA FRANCE IARD la somme de 996 622,73 € payée au titre de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement et subsidiairement au remboursement de la somme de 850 376,22 €, et ce avec intérêts de droit à compter du jour du règlement c'est à dire le 10 octobre 2006 ;

- condamner la compagnie AZUR ASSURANCES à payer à la société AXA FRANCE IARD la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamner la cie AZUR ASSURANCES en tous les dépens tant de première instance que d'appel, ces derniers étant recouvrés par la SCP LAVAL ET LUEGER, avoués à la Cour, en application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu l'assignation régulièrement délivrée, par acte remis à personne habilitée, à la société LABATUT ALMENDRO, laquelle n'a pas constitué avoué ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 05 décembre 2006 par la société MMA IARD, venant aux droits de la société AZUR ASSURANCES, tendant à voir :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- condamner les sociétés SEIC, DAGARD et LABATUT-ALMENDRO, in solidum avec leurs assureurs respectifs, à payer à la cie MMA IARD la somme de 20 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'en tous les dépens avec distraction au profit de l'avoué de la cause ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 28 novembre 2006 par la société RECIHOLD CHIMIE devenue société REICHOLD, tendant à voir :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes dirigées à l'encontre de la société REICHOLD ;

- déclarer l'action des sociétés AZUR ASSURANCES, DAGARD, SEIC et AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES prescrites ;

- débouter l'ensemble des parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société REICHOLD ;

A titre subsidiaire :

- condamner la société AVIVA ASSURANCES à relever et garantir la société REICHOLD de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre, en application du contrat d'assurance responsabilité civile professionnelle no 33156802 souscrite par la société REICHOLD auprès de la compagnie ABEILLE ASSURANCES, aux droits de laquelle vient désormais la société AVIVA ASSURANCES ;

- condamner solidairement les sociétés DAGARD, AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, SEIC à payer à la société REICHOLD la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamner sous la même solidarité que celle précédemment requise, les sociétés DAGARD, AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, SEIC aux entiers dépens de première instance et d'appel recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile par Me Didier TRACOL, avoué aux offres de droit ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 06 novembre 2006 par la cie AVIVA ASSURANCES tendant à voir :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions concernant AVIVA ASSURANCES ;

- condamner AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, ou toute autre partie succombante à payer à AVIVA ASSURANCES la somme de 5 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en cause d'appel ;

- condamner AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, ou toute autre partie succombante aux entiers dépens d'appel, lesquels seront recouvrés par Me Didier TRACOL, avoué à la Cour, en application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 06 décembre 2006 ;

SUR QUOI LA COUR :

1 - Sur le rappel des faits et de la procédure :

Attendu pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision entreprise et aux conclusions déposées ; qu'il suffira de rappeler ce qui suit :

- dans le courant des années 1992-1993, la société LAITERIES HUBERT TRIBALLAT, propriétaire d'une laiterie située au lieudit "Le Pont de la Pierre", commune de SAINT BONNET LE COURREAU (LOIRE), a fait procéder à d'importants travaux d'agrandissement et d'aménagement dudit bâtiment ;

- la maîtrise d'oeuvre de l'opération a été confiée à la société d' ETUDES INDUSTRIELLES DU CENTRE (S.E.I.C.), assurée auprès de la compagnie UNI EUROPE, aujourd'hui AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES ;

- l'exécution des travaux du lot no 7 "cloisons et plafonds en panneaux type sandwich" a été confiée à la société DAGARD, également assurée auprès de la cie UNI EUROPE, aujourd'hui AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES ;

- la société DAGARD s'est adressée à la société LABATUT-ALMENDRO, assurée auprès de la compagnie AXA ASSURANCES, aujourd'hui AXA FRANCE IARD, pour la fabrication des parements polyester desdits panneaux ;

- la société LABATUT ALMENDRO s'est elle-même adressée à la société REICHOLD CHIMIE, assurée auprès de la compagnie ABEILLE ASSURANCES, aujourd'hui AVIVA ASSURANCES, pour la fourniture des produits de base, résine et autres ;

- afin de couvrir l'opération, la société LAITERIES HUBERT TRIBALLAT a souscrit une assurance dommages-ouvrage auprès de la compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE FRANCE devenue AZUR ASSURANCES, puis aujourd'hui la Cie MMA IARD ;

- la réception des travaux a été prononcée sans réserve le 30 mars 1993 ;

- suite à l'apparition de désordres affectant différents panneaux, une première mesure d'expertise était ordonnée, à la requête de la société DAGARD, par ordonnance de référé du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 1er juillet 1994, confiée à MM. E... et F..., co-experts, lesquels n'ont déposé leur rapport le 11 avril 1997 ;

- suite à l'apparition de nouveaux désordres affectant lesdits panneaux, une seconde mesure d'expertise était ordonnée, à la requête de la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE, filiale de la société LAITERIES HUBERT TRIBALLAT et désormais propriétaire de la laiterie, par ordonnance de référé du Tribunal de Commerce de BOURGES du 31 août 1999, complétée par ordonnance du 18 janvier 2000, confiée à M. G..., lequel se faisait adjoindre comme co-expert, par ordonnance rendue le 14 novembre 2000, M. H..., expert vétérinaire, lesquels ont déposé un premier rapport le 06 décembre 2002 et un second rapport le 10 septembre 2003 ;

Parallèlement, la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE, régularisait diverses déclarations de sinistres auprès de son assureur dommages-ouvrage, puis elle faisait assigner en référé le 12 février 2003 son assureur dommages-ouvrage, la société AZUR ASSURANCES, devant le Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON statuant commercialement, aux fins d'obtenir le paiement de la somme de 3 044 141,90 € HT ;

Par ordonnance du 16 avril 2003, le Président du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON a déclaré recevable la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE en son référé, et donné acte à la société AZUR ASSURANCES de son offre de régler la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE à hauteur de la somme de 2 106 901,26 € ;

Le 16 mai 2003, la société AZUR ASSURANCES a réglé à la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE la somme de 2 106 901,26 € ;

C'est dans ce contexte que la société AZUR ASSURANCES devenue la Cie MMA IARD a assigné selon exploits des 21 et 24 mars 2003 les sociétés SEIC, son assureur AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, DAGARD et son assureur AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, LABATUT ALMENDRO et son assureur AXA FRANCE IARD, REICHOLD et son assureur AVIVA ASSURANCES ;

Cette instance avait pour objectif d'obtenir la condamnation des défendeurs au paiement de l'indemnité réglée au titre des dommages matériels affectant l'immeuble de la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE ;

C'est dans ces conditions qu'a été rendu le jugement dont appel ;

2 - Sur la recevabilité de l'action récursoire de la cie AZUR ASSURANCES ;

Attendu qu'il convient tout d'abord de donner acte à la Cie MMA IARD de ce qu'elle vient aux droits de la Cie AZUR ASSURANCES suite à la fusion absorption de cette dernière par la première, dont il est justifié ;

Attendu qu'est à nouveau soulevé en cause d'appel le moyen tiré de la prescription de l'action récursoire de la Cie AZUR ASSURANCES, au motif qu'au jour de la délivrance de son assignation, le 24 mars 2003, ladite cie n'était pas subrogée dans les droits et actions de son assurée, la société LA FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE, puisqu'elle ne l'avait pas indemnisée, ce qu'elle n'a fait que le 16 mai 2003, soit postérieurement tant à la date de délivrance de l'assignation qu'à la date d'échéance de la prescription du 30 mars 2003, la réception des travaux étant en date du

30 mars 1993 ;

Mais attendu, ainsi que l'a justement énoncé le premier juge, qu'est

recevable l'action engagée par un assureur, avant l'expiration du délai de forclusion décennale, contre les responsables des dommages dont il doit garantie, bien qu'il n'ait pas eu, au moment de la délivrance de son assignation, la qualité de subrogée dans les droits de son assuré, dès lors qu'il a payé l'indemnité due à ce dernier avant que le juge du fond n'ait statué ;

Que la Cie AZUR ASSURANCES était bien en l'espèce recevable, en son action subrogatoire, celle-ci ayant été engagée avant l'expiration du délai de forclusion décennale, et ladite cie ayant, avant que le juge du fond ne statue, payé l'indemnité dont le remboursement est réclamé par la voie de cette action ;

Que le jugement qui a rejeté la fin de non recevoir soulevée de ce chef doit être confirmé ;

3 - Sur le bien fondé de l'action récursoire de la cie AZUR ASSURANCES ;

Attendu qu'encore en cause d'appel il est conclu au rejet de l'action subrogatoire de la Cie AZUR ASSURANCES au motif que la société LA FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE, propriétaire de l'ouvrage, n'aurait pas à ce jour mis en oeuvre la solution réparatoire entérinée et chiffrée par les experts judiciaires, sur la base de laquelle la cie AZUR ASSURANCES a versé l'indemnité dont il est aujourd'hui demandé le remboursement ;

Que selon les appelants, le Tribunal ne pouvait en effet faire droit à la demande de remboursement de l'assureur dommages-ouvrage dès lors que c'est à tort que ce dernier a versé une indemnité qui n'a pas été employée à la réfection des dommages allégués ;

Qu'il est également soutenu que le maître de l'ouvrage, la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE, et l'assureur dommages-ouvrage, la Cie AZUR ASSURANCES, auraient par sa carence dans la gestion du sinistre, pour le 1er, et par son refus de pré-financer les travaux de réfection, pour le second, concouru à aggraver considérablement le coût du sinistre ;

Mais attendu que le responsable d'un dommage, qui n'est ni le souscripteur ni le bénéficiaire d'un contrat d'assurance de chose, est sans qualité à critiquer la prise en charge du sinistre par l'assureur de la chose ;

Qu'ainsi, les appelants qui ne sont ni le souscripteur ni le bénéficiaire du contrat dommages-ouvrage, sont irrecevables à opposer le caractère indu de l'indemnité versée par la cie AZUR ASSURANCES ;

Attendu d'autre part, que l'assureur dommages-ouvrage ayant versé l'indemnité en exécution de l'obligation légale à laquelle il est soumis en vertu de l'article L 242-1 du Code des Assurances, se trouve de facto subrogé à concurrence de cette indemnité sans que son action récursoire puisse se voir opposer une quelconque limite ;

Que les désordres objet du présent litige étant de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du Code Civil, la cie AZUR ASSURANCES était dès lors tenue, par application des dispositions de l'article L 242-1 du Code des Assurances, de pré-financer les travaux de réparation desdits désordres chiffrés par le rapport d'expertise judiciaire de MM. G... et H... en date du 06 décembre 2002, ce qu'elle a fait en réglant à la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE l'indemnité de 2 278 406,40 € ;

Attendu que les appelants ne sont pas davantage fondés à opposer à la Cie AZUR ASSURANCES, subrogées dans les droits et actions de la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE, le défaut d'engagement des travaux de réfection préconisés par les experts judiciaires, les constructeurs et les assureurs de responsabilité ne pouvant exiger que l'indemnité versée soit affectée à la réparation effective de l'immeuble ;

Que de même est inopérante l'argumentation développée par la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES tendant à établir l'existence d'une faute de l'assureur dommages-ouvrage dans la gestion du sinistre, l'assureur en responsabilité de l'entrepreneur, sur qui pèsera la charge finale de la réparation des désordres relevant de l'article 1792 du Code Civil, ne pouvant tirer argument des fautes éventuelles de l'assureur dommages-ouvrage dans l'exécution de son contrat, ayant pu concourir à l'aggravation des dommages, alors qu'il incombait au 1er de ces assureurs de prendre toute mesure utile pour éviter cette aggravation ;

Que le premier juge a pu dès lors justement énoncer que les assureurs défendeurs, notamment AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, étaient mal venus de reprocher à AZUR ASSURANCES d'avoir manqué de diligence, n'ayant pas eux mêmes assumé l'ensemble de leurs obligations à l'égard de leurs assurés responsables du préjudice de la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE ;

Attendu qu'en tout état de cause, aucune faute ni manquement dans la gestion du sinistre ne saurait être sérieusement reproché tant au maître de l'ouvrage qu'à l'assureur dommages-ouvrage ;

Qu'en effet, il aura fallu pas moins de 2 missions d'expertise successives, chacune confiée à des collèges d'experts composés des plus éminents spécialistes, pour que soit prise toute la mesure des désordres, les premiers experts n'ayant identifié que des désordres limités nécessitant une réfection partielle et que soit consécutivement défini et chiffré le principe réparatoire adapté, lequel n'a été arrêté que très tardivement dans le cadre du rapport partiel d'expertise de MM. G... et H... en date du 06 décembre 2002, étant de surcroît rappelé que moins de 5 mois après le dépôt dudit rapport d'expertise, l'assureur dommages-ouvrage avait dans les limites de son plafond de garantie, indemnisé la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE ;

Que si la Cie AZUR ASSURANCES avait, nonobstant la prescription biennale et la non-garantie qu'elle était en droit d'opposer sur la première déclaration de sinistre, néanmoins assuré le pré-financement des travaux, à l'évidence les sommes qu'elle aurait versées pour permettre la réfection ponctuelle envisagée par les premiers experts, MM. E... et F..., consistant en la pose de couvre-joints sur les bords de quelques panneaux défectueux, non seulement n'auraient pu mettre un terme au sinistre, mais elles auraient, en outre représenté une dépense inutile puisque seule la réfection totale par remplacement de l'ensemble des panneaux était de nature à remédier aux désordres ;

Que l'importance du coût des travaux de réfection ne trouve en réalité sa cause ni dans l'incurie prétendue du maître de l'ouvrage ni dans celle de l'assureur dommages-ouvrage, mais dans la nécessité d'intégrer au plan technique, les contraintes sanitaires particulièrement rigoureuses imposées par l'activité fromagère pratiquée dans le bâtiment, comme l'ont amplement souligné les experts judiciaires G... et H... (pages 251 à 253 du rapport du 06 décembre 2002) ;

Qu'en définitive, c'est à bon droit qu'ont été rejetées toutes les demandes tendant à voir la Cie AZUR ASSURANCES déboutée de ses prétentions motifs pris de son attitude et de celle de la société FROMAGERIE DU PONT DE LA PIERRE dans la gestion du sinistre ;

Que le jugement entrepris de ce chef doit être confirmé ;

4 - Sur le bien fondé des demandes de condamnations pécuniaire formées par la Cie AZUR ASSURANCES à l'encontre des intervenants à l'acte de construire responsables et de leurs assureurs respectifs :

4/1. Sur les demandes dirigées contre la société S.E.I.C. et son assureur, la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES :

Attendu que la société S.E.I.C. s'est vue confier la maîtrise d'oeuvre de l'opération ; qu'à ce titre, elle est tenue à l'égard du maître de l'ouvrage de la présomption de responsabilité dont elle ne s'exonère que par la démonstration que les dommages proviendraient d'une cause étrangère ;

Que s'agissant d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, mission très large allant de la conception de l'ouvrage jusqu'au contrôle de son achèvement, incluant le contrôle des matériaux mis en oeuvre, la société S.E.I.C. ne saurait prétendre que les dommages affectent des ouvrages extérieurs à sa sphère d'intervention ;

Qu'en effet, d'une part, la défectuosité du matériau livré sur le chantier n'est pas constitutive de la cause étrangère de nature à exonérer le maître d'oeuvre de sa responsabilité ;

Que d'autre part, la société S.E.I.C. a, dans son descriptif des travaux, imposé les panneaux litigieux, le chapitre 07-01-01 du Cahier des Charges Techniques Particulières (CCTP) relatif au lot no 7 "cloisons et plafonds en panneaux type sandwich" prévoyant très précisément des "panneaux de type sandwich, type GL 20 de chez DAGARD" ;

Qu'enfin, les experts judiciaires reprochent à la société S.E.I.C., alors même qu'elle avait imposé des panneaux dont elle savait qu'ils ne bénéficiaient pas d'un avis technique du CSTB, de "n'avoir pas su contrôler,

ou faire contrôler, la qualité des panneaux qu'elle avait préconisés" (page

182 du rapport du 10 septembre 2003), précisant à cet égard que "même si le maître d'oeuvre n'a pas à connaître la composition du panneau, il doit en contrôler la résistance pour assurer la sécurité de la structure, et surtout sa pérennité dans l'environnement prévu dans le projet" (page 213 du rapport du 10 septembre 2003) ;

Que la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES ne contestant pas de son côté devoir sa garantie intégrale à la société S.E.I.C., son assuré, c'est en définitive à bon droit que ladite société a été condamnée in solidum avec son assureur, à rembourser à la cie AZUR ASSURANCES aujourd'hui MMA IARD, le montant des sommes par elle pré-financées au titre des dommages matériels affectant la fromagerie ;

4/2 - Sur les demandes dirigées contre la société DAGARD et son assureur, la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES :

Attendu que la société DAGARD était titulaire du lot No 7 "cloisons et plafonds en panneaux sandwich" ; qu'à ce titre, elle a fabriqué, livré et posé les panneaux litigieux ;

Qu'elle est responsable de plein droit de la mauvaise qualité des matériaux qu'elle a mis en oeuvre, en l'occurrence des vices de fabrication des panneaux, lesquels constituent la cause génératrice du sinistre ;

Qu'elle est tenue à l'égard du maître de l'ouvrage de la présomption de responsabilité dont elle ne s'exonère pas par la démonstration d'une cause étrangère ;

Qu'ainsi que le soulignent très justement les experts judiciaires, la société DAGARD n'est pas fondée à soutenir pour tenter d'échapper à sa responsabilité, qu'elle aurait sous-traité partie de la fabrication, alors qu'elle se devait (page 186 du rapport du 10 septembre 2003) de : "connaître le procédé de fabrication de tout ses sous-traitants ; contrôler le process de fabrication ; mettre en place un contrôle précis et non pas visuel du travail de son sous-traitant" ;

Que les experts judiciaires rappellent à cet égard que la société DAGARD avait élaboré un projet de contrôle plus strict que le contrôle visuel mais que celui-ci n'a jamais été mis en place (page 186 du rapport du 10 septembre 2003) : qu'ils concluent d'ailleurs : "l'erreur technique de la société DAGARD est de premier rang" (page 186 du rapport du 10 septembre 2003) ;

Que la Cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES ne contestant pas de son côté devoir sa garantie intégrale à la société DAGARD, son assuré, ayant en effet clairement admis le principe de celle-ci pour le sinistre dont s'agit dans une lettre à cette dernière en date du 02 février 1995, c'est en définitive à bon droit que ladite société a été condamnée in solidum avec son assureur, à rembourser à la Cie AZUR ASSURANCES aujourd'hui MMA IARD, le montant des sommes par elle pré-financées au titre des dommages matériels affectant la fromagerie ;

4/3.Sur les demandes dirigées contre la société LABATUT ALMENDRO et son assureur, la cie AXA FRANCE IARD :

4/3/1/.Sur la responsabilité de la société LABATUT ALMENDRO :

Attendu que la société LABATUT ALMENDRO a fabriqué et livré les parements en polyester des panneaux litigieux ;

Qu'il s'agit d'un professionnel de la "fabrication de tous éléments à partir de résines synthétiques", comme en fait foi l'extrait K bis du registre du commerce et des sociétés versé aux débats ;

Que les experts judiciaires ont très largement établi que la dégradation des panneaux trouvait sa cause dans une fabrication déficiente des parements en polyester tenant à "une mauvaise maîtrise du process et une mauvaise exécution des peaux elles-mêmes" (page 212 du rapport du 10 septembre 2003) ;

Que la société LABATUT ALMENDRO connaissait parfaitement la destination, les conditions et contraintes spécifiques d'utilisation de ces peaux, puisque le nom de la LAITERIE TRIBALLAT figurait sur les bons de commande ;

Que la dégradation des panneaux a rendu les lieux impropres à leur destination ;

Que les défauts qui rendent la chose impropre à sa destination normale constituant les vices cachés définis par l'article 1641 du Code Civil, la responsabilité de la société LABATUT ALMENDRO se trouve dès lors engagée sur le fondement dudit article ;

Que pour s'opposer à l'action engagée sur ce fondement par la Cie AZUR ASSURANCES, il ne saurait être valablement invoquer sa prescription tirée de ce que la société FROMAGERIE DU PONT DE LA

PIERRE, dans les droits de laquelle cet assureur est subrogé, n'aurait pas agi dans le bref délai de l'article 1648 du Code Civil ;

Qu'en effet, la société LABATUT ALMENDRO a été attraite aux opérations d'expertise de MM. E... et F... dès l'apparition des désordres, soit par assignation délivrée le 17 juin 1994 à la requête de la société DAGARD ;

Or attendu que l'article 1251-3o du Code Civil édicte une subrogation de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt à l'acquitter ;

Qu'en l'espèce, la Cie AZUR ASSURANCES, en sa qualité d'assureur dommages- ouvrage soumis à l'obligation de pré-financement des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792 du Code Civil, était bien tenue avec ou pour la société DAGARD, locateur d'ouvrage soumis à la présomption de responsabilité édictée par ledit article, au paiement de la dette représentée par le coût des travaux de réfection, et avait donc intérêt à l'acquitter ;

Que la prescription a ainsi été valablement interrompue par l'assignation délivrée par la société DAGARD à la société LABATUT ALMENDRO le 17 juin 1994 ;

Qu'en définitive, c'est tout à fait justement que la cie AZUR ASSURANCES, légalement subrogée dans les droits et actions de la société DAGARD, a été déclarée recevable dans son action en garantie des vices cachés à l'encontre de la société LABATUT ALMENDRO, laquelle a bien été exercée par la société DAGARD dans le bref délai de l'article 1648 du Code Civil, de sorte que la décision des premiers juges ayant condamné la société LABATUT ALMENDRO à rembourser à la Cie AZUR ASSURANCES, aujourd'hui MMA IARD, le montant des sommes par elle pré-financées au titre des dommages matériels affectant la fromagerie, ne peut qu'être confirmée ;

4/3/2. Sur l'obligation de la cie AXA FRANCE IARD, assureur de la société LABATUT ALMENDRO :

Attendu que la Cie AXA FRANCE IARD qui assure la société LABATUT ALMENDRO par un contrat de responsabilité civile, n'est pas fondée à opposer à cette dernière une exclusion de garantie pour les produits livrés qui se sont révélés défectueux ;

Que d'ailleurs, elle ne conteste pas sérieusement devoir sa garantie intégrale à la société LABATUT ALMENDRO puisqu'à titre subsidiaire elle entend seulement faire limiter celle-ci au plafond des capitaux disponibles en précisant que sur ce dernier point le Tribunal a omis de statuer en la condamnant pour la totalité des sommes qu'il mettait à la charge de la société LABATUT ALMENDRO ;

Qu'affirmant avoir effectué dans deux autres affaires objet d'un arrêt de la Cour d'Appel de RIOM du 13 mars 2003 (dossier QUILLIER) et d'un arrêt de la Cour d'Appel de RENNES du 10 avril 2003 (dossier GALLEN), des règlements qui auraient très largement entamé la garantie souscrite plafonnée à 2 millions de francs soit 304 898 € par sinistre et par année, elle prétend avoir trop payé au titre de l'exécution provisoire assortissant le jugement dont appel, et demande en conséquence à la Cie AZUR ASSURANCES de lui rembourser les sommes indûment perçues par celle-ci ;

Attendu qu'il résulte des conditions particulières du contrat responsabilité civile souscrit par la société LABATUT ALMENDRO auprès de la cie AXA FRANCE IARD, que pour les "produits livrés" (article 5-2-1 et 5-2-3) il est prévu le plafond de garantie suivant : "5 000 000 F par sinistre et par année dont 2 000 000 F pour les dommages matériels et immatériels consécutifs" ; qu'il est également prévu une franchise égale à "10 % du montant du sinistre avec mini : 2 500 F et maxi : 10 000 F" ;

Qu'en conséquence, la condamnation pécuniaire mise à la charge de la société LABATUT ALMENDRO in solidum avec son assureur la cie AXA FRANCE IARD, par le jugement dont appel, devra avoir pour limite le plafond de garantie tel que fixé par les conditions particulières sus mentionnées, avec application en outre de la franchise également prévue par celles-ci ;

Qu'en revanche, faute d'indication précise sur le montant des sommes prétendument versées en trop à la cie AZUR ASSURANCES du fait de ce plafond de garantie et de l'exécution provisoire assortissant ledit jugement, la cie AXA FRANCE IARD n'est pas fondée en sa demande de remboursement du trop perçu dont elle devra par suite être déboutée ;

Que la preuve n'est pas rapportée en effet que les sinistres objet des arrêts précités, différents de surcroît de l'actuel sinistre, aient fait l'objet d'une déclaration non seulement la même année, mais en outre, l'année du présent sinistre ;

5 - Sur les appels en garantie formés à l'encontre de la société REICHOLD :

Attendu que la preuve de l'intégration des résines de la société REICHOLD dans les panneaux litigieux par les sociétés DAGARD ou LABATUT ALMENDRO, n'est démontrée par aucune pièce ; que les experts G... et H... obligés de s'en remettre à leur intime conviction, n'ont d'ailleurs pu eux-mêmes affirmer avec certitude que la société REICHOLD avait bien fourni les produits utilisés pour la fabrication des peaux des panneaux défectueux ;

Qu'il ne peut davantage être reproché à cette dernière un manquement à ses obligations d'information et de conseil dans la mesure où "depuis 1991, certaines parties étaient très au courant qu'il existait des problèmes sur les panneaux similaires dans les laiteries" ainsi que l'ont relevé eux-mêmes les experts G... et H... (page 197 du rapport du 10 septembre 2003) ;

Que de plus, la société REICHOLD n'est absolument pas intervenue dans le processus de fabrication des peaux utilisées pour les panneaux DAGARD et elle ne connaissait pas la destination de ses résines ;

Qu'en ce qui concerne la notice d'utilisation de ces résines, les experts judiciaires ont également estimé que la société REICHOLD avait donné le 06 mars 1991 les limites des conditions de mise en oeuvre de son produit (page 197 du rapport du 10 septembre 2003) ;

Que par ailleurs, à aucun moment ils n'ont mis en cause un défaut de la qualité de ces mêmes résines pas plus qu'un vice intrinsèque pouvant les affecter ;

Qu'enfin, le seul fait que ces produits se soient révélés défectueux dans les conditions d'utilisation en milieu humide saturé puis impropres à leur destination, dont il appartenait aux sociétés S.E.I.C., DAGARD et LABATUT ALMENDRO de se préoccuper, serait insuffisant à engager la responsabilité de la société REICHOLD pour quelque raison que ce soit ;

Que dans ces conditions c'est à bon droit qu'ont été rejetées l'ensemble des demandes dirigées contre la société REICHOLD et son assureur, la cie AVIVA ASSURANCES, la décision entreprise de ce chef méritant encore confirmation ;

6 - Sur le partage des responsabilités et les appels en garantie :

Attendu que les experts G... et H... ont estimé pouvoir quantifier comme suit les erreurs techniques à l'origine du sinistre : "erreurs principales : société DAGARD 50 % ; erreurs de 2ème rang : société LABATUT ALMENDRO 20 % - Société REICHOLD 20 % ; erreurs secondaires : société S.E.T.C. 10 % " (page 198 du rapport du 10 septembre 2003) ;

Attendu que la société REICHOLD ayant été à juste titre exonérée par les premiers juges de toute responsabilité dans l'origine du sinistre, c'est tout aussi justement qu'au vu des éléments ci-dessus rappelés concernant la responsabilité des 3 autres sociétés, il a été décidé de répartir entre elles la charge des condamnations solidaires prononcées au profit de la Cie AZUR ASSURANCES, à raison de 10 % pour la société S.E.I.C., 50 % pour la société DAGARD et 40 % pour la société LABATUT ALMENDRO ;

Qu'il y a lieu de confirmer sur ce point le jugement entrepris, qui a également à bon droit, dès lors qu'elles ont toutes par leurs fautes personnelles contribué à la réalisation de l'entier dommage, débouté chacune de ces 3 sociétés de leur demande tendant à être garantie par les autres responsables tenus à réparation, des condamnations prononcées contre elle ;

7 - Sur les demandes accessoires et les dépens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts formée en cause d'appel par la Cie MMA IARD, le Tribunal ayant déjà ordonné à la demande de la cie AZUR ASSURANCES cette capitalisation pour tous les intérêts échus à compter du 31 janvier 2006 ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser la cie MMA IARD venant aux droits de la cie AZUR ASSURANCES, la société REICHOLD et la cie AVIVA ASSURANCES , supporter la charge de leurs frais irrépétibles en cause d'appel ;

Que la cie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES, qui succombe à titre principal, sera condamnée à payer au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, à la 1ère la somme de 10 000 € et à chacune des 2 dernières la somme de 3 000 € :

Qu'en raison encore de sa succombance principale, elle supportera les entiers dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Donne acte à la Cie MMA IARD de ce qu'elle vient aux droits de la Cie AZUR ASSURANCES ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf à préciser que la condamnation pécuniaire mise à la charge de la société LABATUT ALMENDRO et de son assureur, la cie AXA FRANCE IARD, aura pour limite le plafond de garantie fixé par la police d'assurance, et à dire qu'il sera fait application de la franchise contractuellement prévue ;

Déboute la cie AXA ASSURANCE IARD de ses demandes de remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire assortissant la décision de première instance ;

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties ;

Condamne la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES à payer au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile les sommes suivantes :

- 10 000 € à la Cie MMA IARD,

- 3 000 € à la société REICHOLD,

- 3 000 € à la cie AVIVA ASSURANCES ;

Condamne la même aux entiers dépens d'appel ;

Accorde aux avoués de la cause qui l'ont requis le droit prévu à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

L'arrêt a été signé par M. PUECHMAILLE, Président de Chambre et par Mme MINOIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

A. I....G. J....


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Numéro d'arrêt : 06/10734
Date de la décision : 20/09/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bourges


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-09-20;06.10734 ?
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