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01/06/2007 | FRANCE | N°06/00797

France | France, Cour d'appel de Bourges, 01 juin 2007, 06/00797


SD / CG




R.G : 06 / 00797




Décision attaquée :
du 12 octobre 2005
Origine : conseil de prud'hommes de BOURGES










M. Norredine X...





C /


Société FERMOBA CENTRE INDUSTRIES
S.A.R.L. ENTRAIDE TRAVAIL TEMPORAIRE










Notification aux parties par expéditions le :














Me NONIN-Me PELVOIZIN


Copie : 1. 6. 07 1. 6. 07


Expéd. :


Grosse :

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COUR D'APPEL DE BOURGES


CHAMBRE SOCIALE


ARRÊT DU 1er JUIN 2007


No 190-7 Pages




APPELANT :


Monsieur Norredine X...


...


...

18000 BOURGES


Représenté par Me Serge NONIN (avocat au barreau de BOURGES)


INTIMÉES :


Société FERMOBA CEN...

SD / CG

R.G : 06 / 00797

Décision attaquée :
du 12 octobre 2005
Origine : conseil de prud'hommes de BOURGES

M. Norredine X...

C /

Société FERMOBA CENTRE INDUSTRIES
S.A.R.L. ENTRAIDE TRAVAIL TEMPORAIRE

Notification aux parties par expéditions le :

Me NONIN-Me PELVOIZIN

Copie : 1. 6. 07 1. 6. 07

Expéd. :

Grosse :

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 1er JUIN 2007

No 190-7 Pages

APPELANT :

Monsieur Norredine X...

...

...

18000 BOURGES

Représenté par Me Serge NONIN (avocat au barreau de BOURGES)

INTIMÉES :

Société FERMOBA CENTRE INDUSTRIES
ZI des Grands Champs
Rue des 2 passages à niveaux
18230 ST DOULCHARD

et

S.A.R.L. ENTRAIDE TRAVAIL TEMPORAIRE
261 Route de St Michel
BP 4007
18028 BOURGES CEDEX

Représentées par Me PELVOIZIN, membre de la SELAFA FIDAL (avocats au barreau de BOURGES)

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT : Mme VALLÉE

CONSEILLERS : Mme GAUDET
Mme BOUTET

1er juin 2007

GREFFIER D'AUDIENCE : Mme DELPLACE

DÉBATS : A l'audience publique du 4 mai 2007, le président ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 1er juin 2007 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : contradictoire-Prononcé publiquement le 1er juin 2007 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant cinquante contrats de mission, Monsieur X... a été mis à disposition de la société Fermoba par la société Entraide Travail Temporaire, de façon discontinue, sur la période du 14 avril 2003 au 4 juin 2004.
Il a saisi le 19 mai 2005 le conseil de prud'hommes de Bourges d'une demande de requalification de sa mission de travail temporaire en contrat à durée indéterminée et de diverses indemnités liées à la requalification et à la rupture abusive du contrat de travail.

Par jugement du 12 octobre 2005, le conseil de prud'hommes de Bourges a déclaré les demandes de Monsieur X... irrecevables à l'encontre de la société Entraide Travail Temporaire mais recevables à l'encontre de la société Fermoba. Il a cependant dit que les missions successives d'intérim étaient fondées et a débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes.

Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement.

Suivant écritures du 4 mai 2007 reprises à l'audience et auxquelles il est renvoyé, Monsieur X... demande la condamnation de la société Entraide Travail Temporaire et de la société Fermoba, l'une et l'autre, ou l'une à défaut de l'autre, à lui payer
– 1450,15 € à titre d'indemnité de requalification
– 1450,15 € pour non-respect de la procédure de licenciement
– 1450,15 € à titre d'indemnité de préavis outre 145,01 € de congés payés afférents
– 5   800 € de dommages et intérêts pour rupture abusive
– 1525 € pour ses frais irrépétibles.
Il soutient que seules sont applicable à ses relations de travail les règles du travail temporaire, à l'exclusion de celles régissant les

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contrats d'insertion. Il fait valoir que les dispositions d'ordre public de l'article L124-3 du code du travail n'ont pas été respectées, et qu'au surplus, le motif imprécis du recours " surcharge de travail " invoqué dans tous les contrats de mission ne se vérifie pas, ceux-ci ayant en réalité servi à pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de la société Fermoba.

Reprenant à l'audience ses écritures du 3 mai 2007 auxquelles il est renvoyé, la société Entraide Travail Temporaire demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Monsieur X... à lui payer 2000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle prétend que la contestation relative au motif du recours aux contrats précaires ne peut être faite qu'à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, et que les contestations relatives à la forme des contrats de mission ne sont pas sérieuses.

La société Fermoba, s'appuyant à l'audience sur ses écritures du 3 mai 2007 auxquelles il est renvoyé, demande également la confirmation du jugement déféré, et la condamnation de Monsieur X... à lui payer 100 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle soulève l'irrecevabilité de la demande de Monsieur X... formée alors qu'aucun contrat de mission n'était en cours. Elle invoque la réglementation spécifique liée aux entreprises d'insertion par le travail, qui ne permettent pas la requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée en cas de violation des articles régissant le travail temporaire. Enfin, concernant le motif du recours au travail temporaire, elle soutient que la mention de " surcharge de travail " est suffisante, et qu'elle s'explique par la demande exceptionnelle de volets battants en début 2003, qui l'ont contrainte à accroître de façon temporaire son effectif, la chaîne des volets battants ayant été stoppée en juin 2004.

SUR QUOI LA COUR :

Attendu que l'article L124-7-1 du code du travail prévoit que lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'une mission d'intérim en contrat à durée indéterminée, il doit statuer directement en formation de jugement, au fond, dans le délai d'un mois suivant sa saisine ; que cette procédure d'urgence ne pose cependant pas comme condition que le contrat de mission d'intérim soit en cours d'exécution lors de la
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saisine ; qu'un salarié peut toujours se prévaloir de l'inobservation des dispositions légales édictant pour sa protection les cas et les conditions dans lesquelles un contrat de travail temporaire peut être conclu ; que la demande de Monsieur X... est ainsi recevable ;

Attendu que pour s'opposer aux demandes de Monsieur X..., la société Fermoba invoque la réglementation spécifique pour les entreprises d'insertion par le travail ;
Mais attendu d'une part que les contrats de mission conclus avec Monsieur X... visent tous et exclusivement les dispositions légales régissant le travail temporaire, sans faire référence à des contrats d'insertion ; que de deuxième part, la société Entraide Travail Temporaire ne justifie pour les années 2003 et 2004 d'aucune convention avec l'État pourtant prévue par la loi et les circulaires pour bénéficier des aides liées aux contrats d'insertion ; que de troisième part, il n'est produit aucun agrément de l'ANPE concernant Monsieur X..., ni aucun dossier de suivi, indispensables pour les contrats d'insertion ; que les attestations de Mesdames B... et C..., salariées de la société Entraide Travail Temporaire, qui ne portent pas sur le cas particulier de Monsieur X..., font état de leur activité d'accompagnement mais à la date de leurs attestations soit en février 2007 seulement, étant précisé que la société Entraide Travail Temporaire justifie avoir bénéficié d'une convention avec l'État, mais seulement en 2005, qui a pu se poursuivre ensuite ;
Attendu qu'en conséquence, les relations de travail de Monsieur X... avec les deux sociétés intimées ne relèvent pas des contrats d'insertion, mais sont exclusivement régies par les dispositions du travail temporaire ;

Attendu que Monsieur X... produit un contrat de mission prévoyant une durée du 5 avril au 9 avril 2004 inclus ; que ce contrat, signé par le salarié et un représentant de la société Entraide Travail Temporaire, est très lisiblement daté du 9 avril 2004 ; que la société Entraide Travail Temporaire produit un autre exemplaire de ce contrat en soutenant que le contrat a bien été édité le 5 avril pour un commencement à la même date ; que l'examen très attentif de ce deuxième exemplaire ne permet aucunement de conclure à une date du 5 avril 2004 ; qu'en effet la date qu'il porte est illisible, ceci résultant de la multiplication des feuilles à renseigner et du carbone, ainsi que l'explique la société Entraide Travail Temporaire ; qu'il ne peut donc être sérieusement contesté que le contrat a été établi le vendredi 9 avril 2004 pour un commencement le lundi 5 avril 2004 ; qu'il s'agit là d'une violation caractérisée des dispositions d'ordre public de l'article L124-3 du

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code du travail qui prévoit notamment que le contrat doit être conclu par écrit au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant la mise à disposition ; que cette omission entraîne, à la demande de Monsieur X..., la requalification de son contrat de travail en contrat de droit commun à durée indéterminée ;
Attendu qu'ainsi, les demandes de requalification et d'indemnisations, y compris celles liées à la rupture abusive, sont valablement dirigées contre la société Entraide Travail Temporaire ;

Attendu que Monsieur X... dirige également ses demandes à l'encontre de la société utilisatrice ; qu'il convient donc de rechercher si, comme le soutient le salarié, la société Fermoba, sous couvert du motif constant de « surcharge de travail », équivalent à " accroissement temporaire de l'activité ", et matériellement vérifiable, a en réalité pourvu un emploi lié à son activité normale et permanente ;
Attendu que la société Fermoba invoque en début 2003 une demande exceptionnelle de volet battants, produit peu demandé, ajoutant que la chaîne des volets battants a d'ailleurs été stoppée en juin 2004, période à laquelle elle a mis fin à ses contrats de mise à disposition avec la société Entraide Travail Temporaire ; qu'elle produit un tableau qui retrace la production des volets battants entre 2000 et 2004, un autre qui présente les résultats de production de l'année 2003 et deux comptes-rendus de réunion du comité d'entreprise, le premier du 16 mars 2004, le second du 16 juin 2004, ainsi que 12 fiches de production mensuelle par chantiers ; que n'ont pas été remises à la cour les pièces numérotées dans le bordereau 1 (résultats de production 2004),9 (production du mois no1 Saint Mandé),1,16 et 18 (comptes rendus CE des 24 mai,14 juin et 16 novembre 2004) et 24 (listing octobre 2003) ;
Attendu que les pièces dont dispose la cour, et notamment le récapitulatif des résultats de production volets battants, sont suffisantes pour établir que cette production a été à son maximum pendant l'année 2003, avec un nombre de vantaux de 12   488, produit au rythme de 52 par jour, avant que la production ne cesse en 2004 ; que pour autant, ce pic de production ne caractérise pas un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ; qu'en effet la production de volets battants a progressé entre l'année 2000 et l'année 2003 de façon très régulière, le nombre de vantaux produits s'accroissant d'environ 2500 chaque année, signe d'une activité normale et permanente de l'entreprise ; qu'au surplus, il ne ressort pas des deux comptes-rendus communiqués, que la chaîne des volets battants ait été stoppée en juin 2004 ; que bien plus, le compte-rendu de réunion du comité d'entreprise du 16 juin 2004 met clairement en relation la baisse importante de recours à des 1er juin 2007

intérimaires non pas avec l'arrêt de la chaîne des volets battants, mais avec l'arrêt de l'équipe de nuit, lui-même motivé par les stocks de châssis et le problème général de livraison par les fournisseurs pour suivre la cadence ; qu'ainsi la preuve n'est pas rapportée que le recours aux contrats de mission de Monsieur X... ait été motivé par un accroissement limité dans le temps, de la production de volets battants en 2003 et 2004 ;
Attendu qu'en conséquence, Monsieur X... est fondé dans ses demandes de requalification et d'indemnisations, y compris celles liées à la rupture abusive, dirigées contre la société Fermoba ; que les condamnations doivent être prononcées in solidum à l'encontre des deux sociétés intimées ;

Attendu que compte tenu des derniers salaires perçus par Monsieur X... au titre des contrats de mission, il doit lui être alloué, pour indemnité de requalification, la somme de 1450,15 €, égale à un mois de salaire ;
Attendu que le contrat requalifié en contrat à durée indéterminée a été rompu sans respect de la procédure de licenciement et sans cause réelle et sérieuse ; que Monsieur X... est fondé à réclamer, après une ancienneté de près de 14 mois, une indemnité compensatrice de préavis de 1450,15 € outre congés payés afférents ; que le non-respect de la procédure de licenciement, pour un salarié ayant moins de deux années d'ancienneté et relevant des dispositions de l'article L122-14-5 du code du travail, conduit à lui allouer une indemnité de 500 € ; que pour la rupture abusive du contrat travail, au vu du préjudice invoqué par Monsieur X..., l'indemnité sera fixée à 1 500 euros ;

Les sociétés intimées, parties perdantes, supporteront in solidum les dépens de première instance et d'appel et verseront à Monsieur X... pour ses frais irrépétibles une somme de 1000 € ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement

INFIRME le jugement rendu le 12 octobre 2005 par le conseil de prud'hommes de Bourges ;

Statuant à nouveau,

1er juin 2007

REQUALIFIE les contrats de mission conclus entre Monsieur X... et la société Fermoba par l'intermédiaire de la société Entraide Travail Temporaire en un contrat à durée indéterminée ;

CONDAMNE in solidum la société Entraide Travail Temporaire et la société Fermoba à payer à Monsieur X...

– la somme de 1450,15 € à titre d'indemnité de requalification ;
– la somme de 1450,15 € à titre d'indemnité de préavis, outre 145,01 € de congés payés afférents ;
– la somme de 500 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;
– la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;
– la somme de 1000 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum la société Entraide Travail Entraide Travail Temporaire et la société Fermoba aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme GAUDET, conseillère ayant participé au délibéré, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA CONSEILLÈRE,

S. DELPLACE C. GAUDET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Numéro d'arrêt : 06/00797
Date de la décision : 01/06/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bourges


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-06-01;06.00797 ?
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