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22/01/2001 | FRANCE | N°99/01689

France | France, Cour d'appel de bourges, 22 janvier 2001, 99/01689


22 JANVIIER 2001No 4 6 Vu le jugement dont appel rendu entre les parties le 16 septembre 1999 par le Tribunal de Grande Instance de BOURGES, qui a rejeté les demandes d'annulation des dépôts de marque et de modèles effectués par la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT et condamné la Sté SILAM à payer à la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT la somme de 400 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à raison de la contrefaçon et la somme de 500 000 F en réparation du préjudice subi en raison de la concurrence déloyale ; Vu les dernières conclusions en date du

10 octobre 2000 de LA SOCIETE INDUSTRIELLE LAITIERE D'AUVERGNE ET DE ...

22 JANVIIER 2001No 4 6 Vu le jugement dont appel rendu entre les parties le 16 septembre 1999 par le Tribunal de Grande Instance de BOURGES, qui a rejeté les demandes d'annulation des dépôts de marque et de modèles effectués par la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT et condamné la Sté SILAM à payer à la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT la somme de 400 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à raison de la contrefaçon et la somme de 500 000 F en réparation du préjudice subi en raison de la concurrence déloyale ; Vu les dernières conclusions en date du 10 octobre 2000 de LA SOCIETE INDUSTRIELLE LAITIERE D'AUVERGNE ET DE LA MARCHE (en abrégé SILAM), appelante, tendant avoir, par infirmation du jugement entrepris : - prononcer la nullité de la marque déposée par la Société LAITERIE HUBERT TRIBALLAT le 16 avril 1980, sous le n' 814 600 et enregistrée à l' I.N.P.1. sous le n' 14 925, renouvelée le 09.04.1991 ; - prononcer la nullité des deux modèles (500 g et 1 KG) de faisselles déposées le 20 juillet 1989 à l'I.N.P.I., sous le n' 894 C 63 ; - prononcer la nullité du modèle de quadrette de faisselles, déposé à l' I.N.P.1. le 23 novembre 1995 à PARIS et enregistré sous le n" 95 6431 avec toutes les conséquences qui s'y attachent ; - Dire que mention sera faite de la décision auprès de l'I.N.P.I., - Débouter la Société TRIBALLAT de ses demandes en dommages et intérêts fondées sur la contrefaçon et la concurrence déloyale à l'encontre de la société SILAM, - Condamner la Société TRIBALLAT au paiement d'une indemnité de 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens. Vu les dernières conclusions en date du 06 septembre 2000 de LA SOCIETE LAITERIES HUBERT TRIBALLAT, intimée, tendant à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la Sté SILAM à lui payer la somme de 30 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. 22 JANVIER 2001 No46

SUR CE, Sur le droit de marque Attendu qu'il est constant que la Sté TRIBALLAT a déposé le 16 avril 1981 et renouvelé le 09 avril 1991, une marque figurative représentant un pot de fromage en faisselle caractérisé notamment par les arrondis de la base du pot et de son couvercle surélevé ; Que pour qu'une marque soit valable, celle-ci doit reposer sur des signes distinctifs et non nécessaires pour l'usage ou 1'utilisation du bien concerné ; Que la distinctivité du signe doit s'apprécier au jour du dépôt de la marque, soit dans le cas d'espèce en 1981 ; Qu'à cette date, il est établi que l'emballage de la faisselle tel que déposé par la Sté TRIBALLAT n'était pas d'un usage courant général et prolongé de la part de l'autre fabricant ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que la Sté TRIBALLAT était la seule société à commercialiser ce type d'emballage de faisselle caractérisé par des bords arrondis ; Que le Premier Juge en a justement déduit que ce seul élément suffisait à caractériser l'existence d'un signe distinctif particulier au modèle déposé ; Que la Sté SILAM soutient que la forme arrondie de la base du pot et celle également arrondie de son couvercle, seraient exclusivement induites par la fonction, à savoir soutenir le fromage en cours d'égouttage ; qu'en particulier l'arrondi serait utilisé non pour des motifs esthétiques mais pour des raisons de facilité et de solidité de la fabrication liées au procédé de thermomoulage employé pour celle-ci -, Que la Sté TRIBALLAT oppose à juste titre que la quasi totalité des emballages obtenus selon ce procédé comporteraient alors des arrondis de la base et des couvercles similaires à ceux présentés par le récipient dont elle a déposé la marque, ce qui n'est pas le cas ; Qu'il doit être rappelé par ailleurs que le commentaire accompagnant le dépôt d'une marque n'a de valeur qu'indicative le seul signe protégé étant celui qui apparaît sur le modèle de la marque tel que déposé ; 22 JANVIIER 2001 N°46 Que la Société SILAM ne

saurait donc se prévaloir du commentaire joint au dépôt de marque, selon lequel : " la marque est constituée par la forme caractéristique du pot avec fond arrondi, comportant un couvercle surélevé pour contenir le fromage en cours d'égouttage" ; Que ce commentaire ne signifie aucunement que c'est la forme arrondie qui permet de contenir le fromage en cours d'égouttage, mais précise que c'est la surélévation du couvercle qui permet et autorise cette fonction ; Que de même, aucun élément technique ou fonctionnel ne justifie que la base du pot soit arrondie, le fromage ne reposant pas en effet directement dans le pot mais dans un panier surélevé dans le pot, dont la base ne se confond pas avec celle du pot, puisque ce panier a pour objet de permettre l'égouttage du fromage ; que la prise du fromage avec une cuillère, qui justifierait toujours selon l'appelante la forme arrondie de la base du pot laquelle répondrait ainsi à un impératif purement fonctionnel, ne se fait donc pas directement dans le pot, mais dans le panier qui le contient ; Que le Premier Juge a pu dès lors à bon droit considérer que l'arrondi du couvercle et de la base du pot déposé à titre de marque par la Sté TRIBALLAT, constituait une forme arbitraire totalement indépendante de la fonction Sur la validité des modèles Attendu qu'il est constant que le 20 juillet 1989 la Sté TRIBALLAT a fait pour le même récipient qu' examiné ci-dessus, une déclaration de dépôt de dessins et modèles, les deux modèles de faisselles ne se différenciant que par leur capacité (500 g et 1 kg) ; que le 23 novembre 1995, elle a également déposé à titre de modèle une quadrette de faisselles constituées par un jeu de quatre faisselles blanchâtres à opercule portant une décoration et anneau de regroupement de couleur unie et contrastant avec les faisselles, anneau qui est de plus clipsable ; Que la Société SILAM soutient encore que chacune des caractéristiques des deux modèles de faisselle déposés par la Sté TRIBALLAT aurait une

finalité utilitaire, les modèles en question n'apparaissant pas dès lors comme obéissant à des objectifs esthétiques, ou de fantaisie ; 22 JANVIER 2001 No4 6 Qu'il vient d'être démontré que les arrondis caractéristiques de la base et du couvercle du modèle déposé n'ont aucune finalité utilitaire, la forme et la fonction étant en l'espèce parfaitement séparables ; Que les récipients de faisselle utilisés par les sociétés concurrentes présentent d'ailleurs pour la plupart des bases et des couvercles à angles vifs aux lieu et place de la base et du couvercle arrondis, caractéristiques du modèle de pot de la Sté TRIBALLAT ; que celle-ci fabrique elle-même des faisselles pour pots à couvercle plat . Que le Premier Juge a pu dans ces conditions justement énoncer que les deux modèles de faisselle en cause devaient bénéficier de la double protection prévue par l'article L 511-3 du Code de la propriété intellectuelle ; Que s'agissant de la quadrette de faisselles, il convient de rappeler d'une part que la protection légale est accordée à des oeuvres pouvant présenter des éléments isolément connus mais dont la combinaison constitue une création originale ; que d'autre part une oeuvre, même présentant un caractère fonctionnel, est susceptible de recevoir protection, dès lors que cette fonctionnalité obéit également à un choix esthétique ; Que tel est bien le cas en l'espèce de l'utilisation de l'anneau pour regrouper les quatre faisselles, de la forme de celui-ci, ainsi que de sa couleur contrastant avec l'ensemble des faisselles ; Que la Sté SILAM n'apporte pas la preuve d'une complète dépendance des éléments constitutifs de la nouveauté du modèle à l'égard des caractéristiques propres à l'invention brevetable ; Qu'enfin, la protection accordée par le modèle ne porte pas en l'espèce sur l'un ou l'autre de ses éléments pris isolément, mais ainsi que déjà rappelé sur l'ensemble caractérisé par : "un jeu de quatre faisselles blanchâtres à opercule portant une décoration et

un anneau de regroupement de couleur unie et contrastant avec les faisselles" ; Que de l'ensemble de ce qui précède, il résulte que c'est à bon droit qu'ont été rejetées par le Tribunal les demandes d'annulation de la Sté SILAM concernant la marque et les modèles déposés par la Sté TRIBALLAT ; que le jugement entrepris de ce chef doit être confirmé ; 22 JANVIER 2001 No46

Sur la demande reconventionnelle de la Sté TRIBALLAT Attendu que la Sté SILAM ne peut contester qu'elle a commercialisé du fromage blanc en faisselle sous un emballage présentant des similitudes avec celui utilisé par la Sté TRIBALLAT pour ses propres produits, commettant ainsi à l'égard de cette dernière des actes manifestes de contrefaçon de marque et de modèles déposés ; Que la Sté TRIBALLAT démontre que cela a duré d'Août 1997 à janvier 1998 ; Que le premier Juge a justement condamné la Sté SILAM à réparer le préjudice en résultant pour la Sté TRIBALLAT, dont il a toutefois majoré l'importance ; que réformant sur ce point le jugement entrepris, il convient d'allouer à la Sté TRIBALLAT une indemnité de 200 000 F; Attendu que cette dernière établit de même avoir subi à raison de la commercialisation de ces produits contrefaits, une concurrence déloyale ; Que la Sté SILAM a pu capter ainsi une clientèle sans effort de recherche et à moindre frais ; Qu'en se plaçant dans le sillage de la Sté TRIBALLAT grâce à la notoriété acquise auprès de la clientèle de cette dernière par le conditionnement spécifique de ses produits, elle s'est livrée à des actes de parasitisme commercial, justement sanctionnés comme tels par le Premier Juge ; Que l'indemnité réparatrice allouée de ce chef à la Sté TRIBALLAT, dépasse cependant le préjudice réellement subi parcelle-ci de sorte que réformant encore sur ce point le jugement entrepris, il convient de ramener à 300 000 F le montant de ladite indemnité ;

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser l'intimée supporter la charge de ses frais irrépétibles en cause d'appel, qui seront fixés à 15 000 F; Que l'appelante qui succombe à titre principal, aura la charge des dépens de l'instance ; 22 JANVLER 2001 No46

PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en celles ayant fixé le montant des dommages-intérêts alloués à la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT; Statuant à nouveau de ce chef, Condamne la Société SILAM à payer à la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT, à titre de dommages-intérêts, la somme de 200 000 F (soit 30 489,80 euros) en réparation du préjudice subi à raison de la contrefaçon, et celle de 300 000 F (45 734,70 euros) en réparation du préjudice subi à raison de la concurrence déloyale ;

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions Condamne la Sté SILAM à payer à la Sté LAITERIES HUBERT TRIBALLAT, la somme de 15 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne la même aux dépens d'appel; Accorde à Maître X..., Avoué, le droit prévu à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Ainsi fait jugé et prononcé, les jour, mois et an que dessus.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Numéro d'arrêt : 99/01689
Date de la décision : 22/01/2001

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Eléments constitutifs - Caractère distinctif - Appréciation

Pour qu'une marque soit valable, celle ci doit reposer sur des signes distinctifs et non nécessaires pour l'usage ou l'utilisation du bien concerné, la distinctivité du signe devant s'apprécier au jour du dépôt de la marque. Par ailleurs le com- mentaire accompagnant le dépôt d'une marque n'a qu'une valeur indicative, le seul signe protégé étant celui qui apparaît sur le modèle de la marque tel que déposé. La protection instaurée par l'article L 511-3 du Code de la propriété intellectuelle est accordée à des oeuvres pouvant présenter des éléments iso- lements connus mais dont la combinaison constitue une création originale et à une oeuvre même présentant un caractère fonctionnel dès lors que cette fonc- tionnalité obéit également à un choix esthétique


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2001-01-22;99.01689 ?
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