COUR D'APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 02 SEPTEMBRE 2024
N° RG 22/02904 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MYCM
Monsieur [V] [X]
Madame [I] [O] épouse [X]
c/
CREDIT MUTUEL DE [Localité 7]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 mai 2022 (R.G. 2021F00474) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 15 juin 2022
APPELANTS :
Monsieur [V] [X], né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 5] (33), de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]
Madame [I] [O] épouse [X], née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 6] (SENEGAL), de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]
représentés par Maître Benjamin BLANC de l'AARPI ROUSSEAU-BLANC, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
CREDIT MUTUEL DE [Localité 7], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
représentée par Maître Sylvie MICHON de la SELARL CABINET FORZY - BOCHE-ANNIC - MICHON, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 mai 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE
La société Au Houblon de la Reine a souscrit le 29 mai 2018 un prêt professionnel auprès de la société Caisse de crédit mutuel de [Localité 7] d'un montant de 60 000 euros remboursable en 84 mois afin de financer la création d'un fonds de commerce de débit de boisson.
Mme [I] [X] et M. [V] [X], associés de la société, se sont portés chacun caution personnelle et solidaire de ce prêt à hauteur de 15 000 euros pour une durée de 108 mois.
Un nantissement sur le fonds de commerce a également été pris par la banque.
Suite à une mise en demeure demeurée infructueuse de régler les mensualités impayées du prêt, la société Caisse de crédit mutuel de [Localité 7] a, par courrier du 26 janvier 2021,prononcé la déchéance du terme et a mis en demeure l'emprunteuse de lui verser la somme de 51.806,68 euros.
Par courrier du même jour, elle a notifié à chacune des cautions la déchéance du terme du prêt et les a mis en demeure chacune de lui verser la somme de 15 000 euros en exécution de leur engagement respectif de caution.
Par jugement du 4 mars 2021, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société au Houblon de la Reine. La banque a déclaré sa créance à hauteur de 52.030,10 euros, majorée des intérêts au taux de 4.30% à titre privilégié, auprès du mandataire liquidateur.
Après avoir à nouveau mis en demeure chacune des cautions de lui régler la somme de 15 000 euros par courrier du 11 mars 2021, la société Caisse de crédit mutuel de [Localité 7] a, par actes du 20 avril 2021, fait assigner M. [X] et Mme [X] aux fins d'obtenir la condamnation de chacun à lui verser la somme de 15 000 euros.
Par jugement contradictoire du 3 mai 2022, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- rejeté la disproportion invoquée par Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O],
- débouté Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] de leur demande que la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] soit condamnée à leur payer la somme de 10.000,00 euros chacun pour manquement à son devoir de mise en garde,
- débouté Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] de leur demande que la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] soit condamnée à leur payer la somme de 10.000,00 euros chacun du fait de son manquement à son obligation d'information précontractuelle quant au fonctionnement de la contre-garantie France Active Garantie auprès des cautions,
- débouté Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] de leur demande que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7],
- condamné Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] à verser à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] une somme de 15.000,00 euros chacun, majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 mars 2021 et jusqu'au parfait paiement, au titre de leurs engagements de caution du prêt consenti à la société au Houblon de la Reine,
- dit que Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] pourront s'acquitter de leur dette en 24 versements mensuels égaux, le premier intervenant à échéance de 2 mois après signification du présent jugement, le dernier comportant outre le solde de la créance, les intérêts et les frais,
- dit qu'à défaut d'un seul versement à son échéance, la totalité des sommes restant dues en principal et frais, deviendra de plein droit immédiatement exigible,
- ordonné la capitalisation des intérêts dus par les époux [X],
- condamné solidairement Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7], la somme de 2.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné solidairement Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] aux entiers dépens.
Par déclaration au greffe du 15 juin 2022, les époux [X] ont relevé appel du jugement intimant la société Caisse de crédit mutuel de [Localité 7]
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières écritures notifiées par message électronique le 20 février 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, les époux [X] demande à la cour de :
Déclarer l'appel recevable et bien fondé,
Réformer le jugement du tribunal de commerce en date du 3 mai 2022 en ce qu'il a :
Rejeté la disproportion invoquée par Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O],
Débouté Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] de leur demande que la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] soit condamnée à leur payer la somme de 10 000 euros chacun pour manquement à son devoir de mise en garde,
Débouté Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] de leur demande que la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] soit condamnée à leur payer la somme de 10 000,00 euros chacun du fait de son manquement à son obligation d'information précontractuelle quant au fonctionnement de la contre-garantie France Active Garantie auprès des cautions,
Débouté Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] de leur demande que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7],
Condamné Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] à verser à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] une somme de 15 000,00 euros chacun, majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 mars 2021 et jusqu'au parfait paiement, au titre de leurs engagements de caution du prêt consenti à la Société au Houblon de la Reine,
Ordonné la capitalisation des intérêts dus par les époux [X],
Condamné solidairement Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] la somme de 2 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamné solidairement Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] aux entiers dépens. »
Statuant à nouveau :
Vu les articles L. 313-49 et 332-1 du code de la consommation,
Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier,
Vu l'article 1345-5 du code civil,
Vu l'article L. 622-28 du code de commerce,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Débouter la banque de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre de Monsieur [X] et de Madame [X].
A titre principal,
Débouter la banque de l'ensemble de ses demandes au motif de la disproportion de son engagement de caution
A titre subsidiaire,
Condamner la banque à payer à Madame [X] et Monsieur [X] la somme de 10.000 euros chacun pour manquement à son devoir de mise en garde ;
Ordonner la compensation des sommes entre les parties ;
A titre très subsidiaire,
Constater que la banque n'a pas satisfait à son obligation d'information pré contractuelle quant au fonctionnement de la contre-garantie France Active Garantie auprès des cautions;
En conséquence,
Condamner la Banque à payer à Monsieur [X] et Madame [X] la somme de 10.000 euros chacun ;
Ordonner la compensation des sommes entre les parties ;
A titre infiniment subsidiaire,
Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier
Prononcer la déchéance du droit aux intérêts ;
En tout état de cause,
Débouter la Banque de sa demande tendant à voir ordonner la capitalisation des intérêts dus par Monsieur et Madame [X] ;
Débouter la Banque de sa demande tendant à voir condamner Monsieur et Madame [X] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la Banque à payer à Monsieur et Madame [X] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.
Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux en date du 3 mai 2022 en ce qu'il a :
Dit que Monsieur [V] [X] et Madame [I] [X] née [O] pourront s'acquitter de leur dette en 24 versements mensuels égaux, le premier intervenant à échéance de 2 mois après signification du présent jugement, le dernier comportant outre le solde de la créance, les intérêts et les frais ;
Dit qu'à défaut d'un seul versement à son échéance, la totalité des sommes restant dues en principal et frais, deviendra de plein droit immédiatement exigible.
Par dernières écritures notifiées par message électronique le 9 juin 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, la Caisse de crédit mutuel de [Localité 7] demande à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1103 et suivants du code civil (ancien
article 1134 du code civil),
Vu les dispositions des articles 2288 et suivants du code civil,
Dire et juger les époux [X] recevables mais mal fondés en leur appel,
En conséquence les débouter de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 3 mai 2022,
Y ajoutant,
Condamner les époux [X] à verser à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 mai 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 13 mai 2024, date à laquelle elle a été plaidée et mise en délibéré.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions écrites déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la disproportion manifeste du cautionnement :
1- Aux termes des dispositions de l'article L. 332-1 du code de la consommation dans sa version applicable à ce litige, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
2- Ce texte est applicable à toute caution personne physique, qu'elle soit ou non commerçante ou dirigeante de société. La sanction de la disproportion est non pas la nullité du contrat, mais l'impossibilité pour le créancier de se prévaloir du cautionnement.
3- Il appartient à la caution de prouver qu'au moment de la conclusion du contrat, l'engagement était manifestement disproportionné à ses biens et revenus. L'appréciation de la disproportion se fait objectivement, en comparant, au jour de l'engagement, le montant de la dette garantie avec les biens et revenus de la caution tels que déclarés par elle, dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude.
4- La disproportion manifeste du cautionnement s'apprécie au regard de la capacité de la caution à faire face, avec ses biens et revenus, non à l'obligation garantie, selon les modalités de paiement propres à celle-ci, mais au montant de son propre engagement.
5 - Si le cautionnement était manifestement disproportionné à la date de sa conclusion, il appartient alors à la banque, d'établir que le patrimoine de la caution, au moment où celle-ci est appelée, lui permet de faire face à son obligation.
6- En l'espèce, les époux [X] soutiennent que leur engagement à chacun était manifestement disproportionné à la date de leur conclusion et qu'ils n'ont pas à ce jour de patrimoine ou de ressources leur permettant d'y faire face. La banque conteste.
Sur ce :
7-M. [X] a déclaré une retraite annuelle de 19 567 euros par an et une indemnité annuelle perçue pour l'exercice de ses fonctions de maire de 30 000 euros par an.
8- Il a souscrit un prêt destiné à l'acquisition d'un véhicule, un prêt à la consommation et un prêt personnel au titre desquels il reste dû un capital total de 26 090 euros. Il règle en outre un loyer de 7200 euros par an.
9- Mme [X] a déclaré des ressources constituées uniquement d' allocations familiales de 1558,32 euros par an. Elle produit l'avis d'imposition du couple aux termes duquel il est fait état la concernant de salaires annuels de 3276 euros pour l'année 2017 et de BIC de 983 euros.
10- Il n'est pas justifié de patrimoine immobilier commun du couple mais M. [X] possédait des biens en indivision sans que les pièces produites ne permettent de déterminer la quotité lui appartenant et donc l'étendue de ce patrimoine propre.
11- Dans l'hypothèse d'époux communs en biens, l'appréciation de la solvabilité doit se faire non au regard de la situation patrimoniale de chacun, mais de celle de la communauté (en ce sens Civ. 1re, 27 mai 2003).
12- En l'espèce, à la date à laquelle le couple marié sous le régime de la communauté, s'est engagé, les seuls revenus de M. [X] permettaient d'exclure l'existence d'une disproportion manifeste de l'engagement des cautions limité à la somme de 15 000 euros chacune. Il importe peu à cet effet qu'une partie de ces revenus soit constituée par une indemnité d'élu dont la perception était conditionnée à la réélection de M. [X] à l'issue de son mandat. La cour relève en tout état de cause que M. [X] justifie qu'il percevait toujours cette indemnité en 2020.
13- La décision de première instance sera ainsi confirmée de ce chef.
Sur l'obligation de mise en garde du banquier :
14- Les époux [X] soutiennent qu'ils étaient des cautions profanes et que la banque était donc tenue de les mettre en garde sur les risques de l'opération envisagée. Ils ont ainsi perdu une chance de ne pas contracter, ce qui justifie selon eux l'octroi de dommages et intérêts.
15- La banque soutient que M. et Mme [X] étaient des cautions averties. Par ailleurs, les cautions ne démontrent pas qu'il existait un risque d'endettement excessif pour l'emprunteuse résultant de l'opération dont les appelants se sont portés caution.
Sur ce :
16- Pour apprécier le caractère averti de la caution, il convient d'apprécier in concreto les connaissances, expériences et compétences de celle-ci dans le monde des affaires, le caractère averti de la caution ne pouvant se déduire de sa seule qualité de gérant.
17- En l'espèce, il n'est pas démontré que les époux [X] étaient rompus au monde des affaires et au droit bancaire et qu'ils avaient, de par leur parcours personnel ou professionnel des connaissances en matière de cautionnement. En effet, le fait que M. [X] était maire de la commune de [Localité 7] et associé dans une SCI familiale et que Mme [X] ait été vendeuse indépendante et mandataire immobilier, ne démontre pas qu'ils étaient avertis des mécanismes bancaires contrairement à ce que soutient la banque.
18- La caution non avertie, qui souhaite engager la responsabilité de la banque au titre du manquement de celle-ci à son obligation de mise en garde, doit établir qu'à la date à laquelle son engagement a été souscrit, celui-ci n'était pas adapté à ses capacités financières ou qu'il existait un risque d'endettement né de l'octroi du prêt, lequel résultait de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur. ( en ce sens, Cass com, 9 mars 2022, n°20-16.277).
19- En l'espèce, il a été démontré que l'engagement de cautionnement était adapté aux capacités financières de celles-ci.
20- S'agissant du risque d'endettement né de l'octroi du prêt d'un montant de 60 000 euros qui résulterait de l'inadaptation de celui-ci aux capacités financières de l'emprunteuse, la société Au Houblon de la Reine, les appelants ne font valoir aucun moyen et ne versent aux débats aucune pièce susceptible de permettre à la cour d'évaluer les risques de l'opération entreprise.
21- Par ailleurs, les premières mensualités du prêt ont été régulièrement honorées.
22- Les appelants ne justifient ainsi pas qu'il résultait un risque d'endettement né de l'octroi du prêt contre lequel la banque aurait dû les mettre en garde.
23- Les premiers juges ont pu à juste titre les débouter de leur demande à ce titre. La décision de première instance sera confirmée de ce chef.
Sur la mise en jeu de la responsabilité de la banque au titre de son défaut d'information précontractuelle quant à l'étendue de la garantie France Active :
24- Les appelants soutiennent que la banque a omis de les informer du caractère subsidiaire de la garantie France active et qu'ils ont pu ainsi légitiment croire qu'ils étaient garantis à hauteur de 50 % de leur engagement par celle-ci.
25- L'intimé réplique que les cautions avaient été averties que les sommes avancées par la garantie France Active ne pouvaient venir en déduction du montant de la dette de l'emprunteur.
Sur ce :
26- Les actes de cautionnement, paraphés sur toutes les pages, mentionnent que lorsque la créance garantie stipule l'intervention d'un organisme de caution mutuelle ou d'un autre organisme financier, la caution déclare être informée et accepter que les sommes avancées par cette organisme ne puissent jamais venir en diminution du montant de la dette de l'emprunteur.
27- Il en résulte que les cautions ont été dûment averties du fait que la garantie France Active ne pouvait en aucun cas venir en déduction de leur propre garantie.
28- La décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle a débouté les cautions de ce chef de demande.
Sur la demande de déchéance du droit aux intérêts formée sur le fondement de l'article L 313-22 du code monétaire et financier :
29- Il résulte des dispositions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier que les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de cette formalité emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.
30- Ce texte n'impose aucune règle à l'établissement de crédit pour informer la caution. Cette dernière peut dès lors être informée par courrier simple. L'établissement de crédit doit néanmoins prouver par tous moyens la preuve de l'envoi de cette information. Le texte ne lui impose pas d'établir la preuve de sa réception.
31- Les cautions soutiennent que la banque ne justifie pas leur avoir adressé le courrier d'information visé par ce texte, ce que celle-ci conteste.
Sur ce :
32- Les premiers juges ont pertinemment retenu que la banque justifiait de l'envoi des courriers d'information aux cautions pour les années 2019 à 2021 par la production d'une part, de chacun des courriers annuels qui contenaient ladite information et, d'autre part, les listes des lettres d'information adressées de 2019 à 2021 aux personnes s'étant portées caution au profit de la banque, sur lesquelles figurait le nom de M. et Mme [X], et des procès-verbaux de constat des envois dressés en mars 2019, mars 2020 et mars 2021 par un huissier de justice ayant procédé au contrôle par sondage de l'édition, du contenu, de la mise sous pli et de l'expédition des lettres d'information annuelle des cautions correspondant à la liste précitée, attestant ainsi globalement des envois annuels aux cautions.
33- La décision de première instance sera confirmée de ce chef.
Sur les sommes dues :
34- Le décompte produit par la banque n'est pas contesté.
35- La décision de première instance sera ainsi confirmée en ce qu'elle a condamné chacune des cautions à verser à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] une somme de 15.000,00 euros chacun, majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 mars 2021 et jusqu'au parfait paiement, au titre de leurs engagements de caution du prêt consenti à la société au Houblon de la Reine.
36- Elle sera également confirmée en ce qu'elle a ordonné la capitalisation des intérêts, les dispositions de l'article 313-49 du code de la consommation visées par les appelants et relatives au remboursement anticipé d'un prêt n'étant pas applicables.
Sur les autres demandes :
37- La cour relève que les deux parties sollicitent la confirmation de la décision en ce qui concerne les délais de paiement accordés par les premiers juges, étant relevé qu'aucune nouvelle demande de délais de paiement n'a été formée devant cette cour.
38- [V] [X] et [I] [X] qui succombent seront condamnés aux dépens de cette instance d'appel.
39- Ils seront condamnés à verser la somme de 2000 euros à la société Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort
Confirme la décision du 3 mai 2022 du tribunal de commerce de Bordeaux,
y ajoutant,
Condamne [V] [X] et [I] [X] aux dépens de cette instance d'appel,
Condamne [V] [X] et [I] [X] à verser la somme de 2000 euros à la société Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 7] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président