COUR D'APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 02 JUILLET 2024
N° RG 24/00907 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NU4K
S.A.S. YAN -SERVICES
c/
S.E.L.A.R.L. EKIP
CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA GIRONDE
Nature de la décision : AU FOND
Notifié par LRAR le :
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 février 2024 (R.G. 2023003407) par le Tribunal de Commerce de LIBOURNE suivant déclaration d'appel du 27 février 2024
APPELANTE :
S.A.S. YAN-SERVICES, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 5] - [Localité 3]
représentée par Maître Nicolas CARTRON de la SELARL RODRIGUEZ & CARTRON, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉES :
S.E.L.A.R.L. EKIP, ès qualité de mandataire judiciaire de la SAS YAN-SERVICES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 6] - [Localité 4]
Non représentée, assignée à personne habilitée
CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA GIRONDE (MSA GIRONDE), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1] - [Localité 2]
représentée par Maître Lou Andréa VIENOT substituant Maître Louis COULAUD de la SELARL COULAUD-PILLET, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 juin 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE:
La société YAN-SERVICES est affiliée à la MSA depuis le 1er septembre 2021 en qualité d'entreprise de travaux agricole; elle est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Libourne avec pour activités des prestations de services viticoles agricoles mécanisés et manuels, élagage, abattage, entretien de parcs et jardins, travaux généraux de maçonnerie, services à la personne, import-export, achat vente de tous produits alimentaires.
Par acte du 25 juillet 2023, la MSA de la Gironde a fait signifier une contrainte d'un montant de 2.770,74 euros à la société YAN-SERVICES au titre de cotisations et contributions obligatoires.
Puis, par acte du 7 décembre 2023, la MSA de la Gironde a fait assigner la société Yan - Services devant le tribunal de commerce de Libourne en sollicitant à son égard l'ouverture d'une procédure collective au motif qu'elle n'avait pu obtenir le recouvrement de sa créance malgré l'engagement de voies d'exécution.
La société Yan-Services n'a pas comparu devant le tribunal.
Par jugement réputé contradictoire du 19 février 2024, le tribunal de commerce de Libourne a prononcé l'ouverture du redressement judiciaire de la société Yan Services en fixant provisoirement la date de cessation des paiements au 16 novembre 2023 et en désignant la SELARL Ekip' en qualité de mandataire.
Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a relevé que les créances certaines liquides et exigibles s'élevaient à la somme de 3216,46 euros, et que les procédures en recouvrement s'étaient avérées infructueuses de sorte que l'état de cessation des paiements était établi.
Par déclaration du 27 février 2024, la société Yan Services a relevé appel de ce jugement en ses chefs expressément critiqués.
Par dernières conclusions notifiées le 10 avril 2024, la société Yan-Services demande à la cour :
Vu notamment les articles 6 et 9 du code de procédure civile, L.631-1 et suivants du code de commerce, 1353 du code civil,
-Infirmer le jugement du 19 février 2024 en toutes ses dispositions, en ce qu'il a :
-ouvert le redressement judiciaire de la SAS Yan-Services ;
-désigné M. Besier, juge commissaire, et M. Lalle, juge commissaire suppléant
-fixé provisoirement au 16 novembre 2023 la date de cessation des paiements -fixé à 6 mois la période d'observation ;
-invité le comité d'entreprise, ou les délégués du personnel ou les salariés à désigner un représentant des salariés ;
-nommé la SELARL Ekip' en la personne de Me [G] en qualité de mandataire judiciaire ;
-fixé au 15 avril 2024 la prochaine audience pour se prononcer sur la poursuite ou non de la période d'observation ;
-dit que le mandataire judiciaire devra déposer la liste des créanciers dans un délai de 10 mois;
-désigné Me [J] pour dresser l'inventaire et réaliser prisée ;
- ordonné à la SAS YAN-SERVICES de remettre la liste des biens gagés, nantis ou placés sous sujétion douanière, ou en dépôts, location ou crédit-bail ou sous réserve de propriété, etc' ;
-dit que l'inventaire sera déposé au greffe ;
- dit que le jugement sera notifié et fera l'objet des publicités prévues à l'article R.621-8 du code de commerce ;
-ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure.
Ce faisant et statuant à nouveau ;
-constater le paiement par la SAS Yan-services des créances invoquées par la MSA de la Gironde,
-dire n'y avoir lieu à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire de la Sas Yan Services,
-débouter la MSA de la Gironde de son action, de ses prétentions et réclamations,
-condamner la MSA de la Gironde à payer à la SAS Yan-services une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens tant de première instance que d'appel.
Par dernières conclusions notifiées le 30 avril 2024, la MSA de la Gironde a demandé à la cour de:
Vu les dispositions de l'article L.631-1 du code de commerce,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu ce qui précède,
-débouter la société Yan-services de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
-confirmer le jugement rendue par le tribunal de commerce de Libourne en date du 149 février 2024 ;
-inscrire au passif de la société Yan-services somme de 1.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Dans son avis du 15 mai 2024, le Procureur Général a conclu à la recevabilité de l'appel et à la confirmation du jugement, sauf production à l'audience d'éléments justifiant d'un paiement des cotisations dues, en ce compris les redressements de cotisations en raison de déclarations de salaire versé en 2023 et 2024.
La société appalente a fait signifier sa déclaration d'appel à la Selarl Ekip'es qualité par acte du 20 mars 2024, puis lui a signifié ses conclusions d'appelante le 11 avril 2024.
La Selarl Ekip' n'a pas constitué avocat mais a fait parvenir à la cour un courrier dans lequel elle indique ne pas disposer de fonds et ne pouvoir de ce fait assurer sa représentation, précisant qu'elle s'en rapporte à justice concernant les demandes.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DECISION:
1-La société Yan-Services soutient qu'elle que postérieurement à l'assignation du 7 décembre 2023, et par suite de la délivrance d'un ordre de virement, elle était à jour de ses cotisations envers la MSA, et ne se trouvait donc pas en état de cessation des paiements, de sorte qu'il n'y a pas lieu à ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.
2-La Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde réplique qu'à la date de l'audience,les causes de l'assignation n'avaient pas été intégralement réglées, en dépit d'un virement d'un montant de 14'109,76 euros effectuése à son profit le 20 décembre 2023.
Elle précise que la société Yan-Services n'était pas à jour du règlement de ses cotisations 19 février 2024, puisqu'elle s'abstenait de procéder à ses déclarations sociales nominatives depuis le mois de janvier 2023.
Elle ajoute que c'est seulement en s'abstenant volontairement de procéder aux déclarations sociales obligatoires que la société a pu prétendre être à jour de sa dette lors de l'ouverture du redressement judiciaire.
Sur ce:
3- Selon les dispositions de l'article L.631-1 du code de commerce, il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
4- La cessation des paiements est appréciée au jour où statue la juridiction, y compris en appel.
5- La charge de prouver que le débiteur est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible incombe au créancier qui demande ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à son égard.
6- Dans son assignation du 7 décembre 2023, à laquelle le tribunall a fait droit, a Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde avait invoqué l'existence d'une créance d'un montant de 3216,46 euros, au titre d'une contrainte délivrée le 2 juin 2023t pour les cotisations afférentes au quatrième trimestre 2021 et quatrième trimestre 2022, selon le détail suivant :
'cotisations : 2770,74 eurosi
' frais de procédure 425,22 euros
'émoluments A444-31: 20,50 euros.
7- Il ressort d'un courriel adressé le 9 janvier 2024 par le service contentieux de la MSA à la société Yan-Services que le virement effectué par celle-ci le 19 décembre 2023 pour un montant de 14'109,76 euros avait permis de solder la créance de la caisse en principal, mais que subsistait toutefois un solde exigible au titre des frais de procédure pour un montant de 445,72 euros, qui n'avait pas été réglé lors de l'audience du 22 janvier 2024, ce qui explique que la caisse ne se soit pas désistée.
8- La Caisse a produit devant la cour un courriel de son service de contrôle, en date du 10 avril 2024, dont il ressort que la société Yan-Services n'a pas procédé aux déclarations sociales nominatives (DSN) de son président (M. [R] [Z]) depuis plus d'un an, à l'exception des mois de février, juin et octobre 2023, ce qui implique un redressement des salaires non déclarés sur une somme totale de 28622 euros.
9- La société Yan-Services n'a pas contesté ce défaut de déclaration.
10- La Caisse a produit un relevé des soldes au 22 mars 2024, dont le montant cumulé s'élève à 46 789.51 euros, correspondant à des créances exigibles, et pour lesquelles l'appelante ne justifie pas de sa capacité de paiement, avec son actif disponible (aucune pièce comptable n'étant versée au débat).
11- Il en résulte que la cessation des paiements est avérée à la date à laquelle la cour statue, de sorte que le jugement doit être confirmé.
12- Il convient d'inscrire au passif de la société Yan-services somme de 1.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en dernier ressort :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 février 2024 par le tribunal de commerce de Libourne,
Y ajoutant,
Fixe à 1000 euros la créance de la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société Yan-Services,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de redressement judiciaire.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président