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29/04/2024 | FRANCE | N°22/01226

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 4ème chambre commerciale, 29 avril 2024, 22/01226


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 29 AVRIL 2024









N° RG 22/01226 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MSZY







S.A.R.L. LOA [Localité 3]





c/



S.A.S. PREIM EUROS























Nature de la décision : AU FOND

























Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 janvier 2022 (R.G. 18/11291) par le Tribunal judiciaire de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 10 mars 2022





APPELANTE :



S.A.R.L. LOA [Localité 3] prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 29 AVRIL 2024

N° RG 22/01226 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MSZY

S.A.R.L. LOA [Localité 3]

c/

S.A.S. PREIM EUROS

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 janvier 2022 (R.G. 18/11291) par le Tribunal judiciaire de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 10 mars 2022

APPELANTE :

S.A.R.L. LOA [Localité 3] prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]

Représentée par Maître Quentin DUPOUY, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.A.S. PREIM EUROS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 1]

Représentée par Maître Christophe GARCIA de la SELARL CHRISTOPHE GARCIA, avocat au barreau de BORDEAUX assistée par Maître Jerôme NORMAND avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 février 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Monsieur Nicolas GETTLER, Vice-Président Placé,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

La société Mercialys, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Preim Euros, a donné à bail commercial à la société CBMD, aux droits de laquelle vient la société Loa [Localité 3], un local dépendant d'un centre commercial situé à [Localité 3] par acte du 25 mai 2007 à effet au 1er juin 2007 pour une durée de 10 années pour y exercer une activité d'opticien sous l'enseigne 'Atol'. Le bail contient une clause d'indexation du loyer.

Par acte extrajudiciaire en date du 7 mars 2017, le bailleur a délivré à son preneur un congé pour le 30 septembre 2017 avec offre de renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2017.

Par acte en date du 21 novembre 2018, le preneur a assigné le bailleur, au visa de l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier à l'effet de déclarer non écrite la clause d'indexation stipulée dans le bail et de le condamner à restituer la somme de 6109,94 euros, sur le fondement de l'article 1376 du code civil, correspondant au montant de l'indû au titre des loyers arrêtés provisoirement au 30 septembre 2018.

Par jugement contradictoire du 20 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a statué comme suit :

- dit qu'il y a lieu de réputer non écrite la stipulation prévue par l'alinéa 3 de l'article VI.1 1 traitant de l'indexation, insérée dans le bail commercial signé par les parties les 25 mai et 11 juin 2007, ayant pour effet d'interdire la baisse du prix au-delà d'un plancher, et maintient les effets des autres dispositions de l'article VI,

- déboute la société Loa Saint-André-de-Cubzac de sa demande, ayant pour objet l'indu au titre de la clause d'indexation ainsi qu'au titre du remboursement des loyers payés durant la période du 14 mars au 11 mai 2020,

- dit que chaque partie conservera à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,

- condamne la société Preim Euros aux dépens.

La société Loa Saint-André-de-Cubzac a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 10 mars 2022.

La société Preim Euros a relevé appel incident.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières écritures notifiées par message électronique le 8 décembre 2022, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Loa Saint-André-de-Cubzac demande à la cour de :

Vu l'article L.112-1 du Code monétaire et financier,

Vu les articles L.145-15 et L. 145-39 du Code du commerce,

Vu les articles 1235 et 1376 du Code civil dans leur rédaction applicable au présent litige,

Vu l'article 1722 du Code civil,

- accueillir l'appelante en ses moyens, fins et conclusions,

Y faisant droit,

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux du 20 janvier 2022 en ce qu'il a :

* dit qu'il y a lieu de réputer non écrite la stipulation prévue par l'alinéa 3 de l'article VI.1 1 traitant de l'indexation, insérée dans le bail commercial signé par les parties les 25 mai et 11 juin 2007, ayant pour effet d'interdire la baisse du prix au-delà d'un plancher, et maintient les effets des autres dispositions de l'article VI,

* débouté la société Loa Saint-André-de-Cubzac de sa demande, ayant pour objet l'indu au titre de la clause d'indexation ainsi qu'au titre du remboursement des loyers payés durant la période du 14 mars au 11 mai 2020,

* dit que chaque partie conservera à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,

Statuant à nouveau,

- déclarer la clause d'indexation, stipulée à l'article VI 11) du bail, non écrite dans son ensemble ;

- constater l'absence de modification du loyer depuis le 1er juin 2007 ;

- condamner la société Preim Euros à payer à la société Loa Saint-André-de-Cubzac la somme de 35.666,32 euros au titre de la répétition de l'indu au titre des loyers, somme provisoirement arrêtée au 30 juin 2021 ;

- réduire de 50% le montant des loyers dus par la société Loa Saint-André-de-Cubzac pour la période du 14 mars au 11 mai 2020 ;

- condamner la société Preim Euros à payer à la société Loa Saint-André-de-Cubzac la somme de 5.129,00 euros au titre de la répétition de l'indu au titre des loyers et charges du 14 mars au 11 mai 2020 ;

- rejeter l'intégralité des demandes de la société Preim Euros et notamment celle formulée dans le cadre de son appel incident visant à voir réformer le jugement en ce qu'il a dit qu'il y avait lieu de réputer non écrite la stipulation prévue par l'alinéa 3 de l'article VI.1 1 relative à l'indexation ;

- condamner la société Preim euros à payer à la société Loa Saint-André-de-Cubzac une somme de 5.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

Par dernières écritures notifiées par message électronique le 8 mars 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Preim Euros demande à la cour de :

Vu les articles 1103 et 1104 du Code civil,

Vu l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier,

Vu la maxime « pas de nullité sans texte »,

- recevoir la société Preim Euros en son appel incident et l'y déclarée bien fondée ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* débouté la société Loa Saint-André-de-Cubzac de sa demande en répétition de l'indu,

* débouté la société Loa Saint-André-de-Cubzac de ses demandes de remboursement au titre de la période du 14 mars au 11 mai 2020,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit qu'il y avait lieu de réputer non écrite la stipulation prévue par l'alinéa 3 de l'article VI.1 1 relative à l'indexation ;

Et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- dire qu'il n'y a pas lieu à réputer non écrite la stipulation prévue par l'alinéa 3 de l'article VI.1 1 ;

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'il a maintenu les effets des autres dispositions de l'article VI, limitant ainsi la sanction du réputé non-écrit au seul alinéa 3 ;

En tout état de cause,

- réformer le jugement s'agissant des frais irrépétibles et, statuant de nouveau ;

- condamner la société Loa Saint-André-de-Cubzac à payer à la société Preim Euros une indemnité de 5.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- débouter purement et simplement la société Loa Saint-André-de-Cubzac de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions écrites déposées.

MOTIFS DE LA DECISION

- sur la demande du preneur visant à voir déclarée non écrite la clause d'indexation du loyer :

1- Aux termes de l'article L 112-1 du code monétaire et financier, sous réserve des dispositions du premier alinéa de l'article L. 112-2 et des articles L. 112-3 , L. 112-3- et L. 112-4, l'indexation automatique des prix de biens ou de services est interdite.

Est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision.

2- Aux termes de l'article L 112-2 du même code, dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties. Est réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national des statistiques et des études économiques ou, pour des activités commerciales ou artisanales définies par décret, sur la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié dans des conditions fixées par ce même décret par l'Institut national de la statistique et des études économiques.

3- Ces articles posent ainsi le principe de l'interdiction de l'indexation automatique des prix des biens ou des services sauf si l'indice est en relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties, et sous réserve que la période de variation de l'indice ne soit pas supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision.

4 - En l'espèce, la clause 11 du contrat de bail stipule que 'le loyer de base sera indexé sur l'indice trimestriel du coût de la construction publié par l'INSEE, que les parties choisissent d'un commun accord.

Cette indexation sera appliquée au 1er janvier de chaque année et la première fois à la date prévue à l'article XIV 13).

La variation de l'indice choisi sera prise en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, mais l'application de la présente clause d'indexation ne pourra en aucun cas entrainer un montant de loyer de base initial précisé aux conditions particulières.

Les indices qui seront utilisés seront les derniers indices connus et publiés, d'une part à la date de prise d'effet du bail initial ou du loyer de base réajusté et d'autre part, à la date prévue pour l'indexation annuelle'.

5- Le preneur ne conteste pas le principe même de l'existence d'une indexation du loyer sur l'indice trimestriel du coût de la construction mais demande à la cour de déclarer non écrite cette clause dans son intégralité et d'ordonner en conséquence la restitution des sommes versées en exécution de cette indexation compte tenu :

- d'une part, d'une distorsion entre la période de validité de l'indice, de 12 mois selon elle, et la durée s'étant écoulée entre la première prise d'effet du bail et la première révision de 12 mois,

- de l'existence d'un plancher à la variation à la baisse du loyer.

* sur la distorsion entre l'intervalle de variation indiciaire et la durée s'écoulant entre la prise d'effet du bail et la première révision de l'indice :

6- Le preneur expose que la première indexation a été réalisée sur le base de l'indice du 4ème trimestre 2006 et de celui du 2ème trimestre 2007, ce qui correspond à une période de variation des indices de trois trimestres pour une période de location écoulée entre le 1er juin 2007, date de prise du bail, et le 1er janvier 2008, date de la première indexation du loyer de 7 mois, et ce en contravention avec les dispositions de l'article l'article L 112-1 du code monétaire et financier. Il soutient qu'il n'y a pas lieu de retenir les dates de publication des indices mais les 'indices eux-mêmes'.

7- Le bailleur rétorque qu'il s'est écoulé 7 mois entre la date de prise d'effet du bail et la date de la première indexation tandis que la période de variation indiciaire s'étend entre le quatrième trimestre 2006 dont l'indice a été publié le 27 avril 2007 et le deuxième trimestre 2007 dont l'indice a été publié le 17 octobre 2007, soit un intervalle de cinq mois et 19 jours, inférieur par conséquent à la durée de sept mois, de sorte que les dispositions de l'article L 112-1 du code monétaire et financier ont été parfaitement respectées.

Sur ce :

8- En l'espèce, la première révision du bail est intervenue le 1er janvier 2008, soit sept mois après la prise d'effet du bail au 1er juin 2007.

9- Elle s'est effectuée en prenant pour base le dernier indice publié au 1er juin 2007 qui est celui du 4ème trimestre 2006 publié le 27 avril 2007 et celui connu au 1er janvier 2008 qui est celui du 2ème trimestre 2007 publié le 17 octobre 2007.

10- Le preneur soutient avec raison qu'il y a lieu de retenir la période sur laquelle porte l'indice et non la date de publication de celui-ci.

11- Il soutient en revanche à tort que l'intervalle entre les deux périodes indiciaires est de 9 mois ( 3 trimestres) alors qu'il est de 6 mois ( 2 trimestres) entre le 4ème trimestre 2006 courant du 1er octobre 2006 au 31 décembre 2006 et le 2ème trimestre 2007 courant du 1er avril 2007 au 31 juillet 2007.

12- Il n'existe ainsi aucune distorsion comme l'ont justement relevé les premiers juges.

13- En tout état de cause, la cour de cassation a jugé que seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite et que la cour d'appel, qui a constaté que la clause n'engendrait une telle distorsion que lors de la première révision, ne pouvait déclarer non écrite la clause dans son intégralité ( 3ème civ, 6 février 2020, 24.599).

14- La décision de première instance qui a rejeté la demande visant à voir déclarer 'réputée non écrite' la clause d'indexation sur ce fondement sera confirmée.

* sur la stipulation d'un loyer plancher à la variation à la baisse du loyer:

15- Le preneur expose que la clause d'indexation crée un plancher à la variation du loyer constitué par le loyer de base initial qui a pour effet de limiter le jeu normal de l'indexation. Elle doit en conséquence être déclarée non écrite sur le fondement des articles L 145-15 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014 qui est d'application immédiate et L 145-39 du code de commerce dans son intégralité, contrairement à ce qui a été jugé en première instance, la clause n'étant pas divisible.

16- Le bailleur rappelle que le montant du loyer d'un bail est librement fixé entre les parties et que la clause d'indexation est régulière au regard des dispositions de l'article L 112-1 du code monétaire et financier qui ne prohibe pas l'instauration d'un loyer minimal égal au loyer initial. La cour ne peut ainsi prononcer la nullité de la clause en dehors de tout texte la prévoyant. S'agissant des dispositions de l'article L 145-15 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, elles ne sont pas d'application immédiate contrairement à ce qui est soutenu. Elle ajoute que la version antérieure de cet article prévoyait une nullité de la clause, et non un caractère non écrit, mais que la preneuse est forclose à intenter une telle action. En outre, les dispositions de l'article L 145-39 du code de commerce ne sont pas applicables en l'espèce, le loyer comportant une partie fixe et une partie variable. Enfin, et à titre subsidiaire, elle fait valoir que les premiers juges ont parfaitement retenu que la clause était divisible.

Sur ce :

17- L'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, qui a substitué à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions des articles L. 145-37 à L. 145-41 du code de commerce leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours lors de l'entrée en vigueur de cette loi. ( Cass, 12 janvier 2022, 11.169).

18- Sur le fondement de cet article, il a été jugé que la clause d'indexation excluant toute réciprocité de la variation en prévoyant que l'indexation ne s'effectuerait que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse contrevenait aux dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce et devait être réputée non écrite par application de l'article L. 145-15 du même code (même arrêt).

19- En outre, en présence d'un bail commercial comportant une clause d' indexation annuelle prévoyant que celle-ci ne pourrait avoir pour effet de ramener le loyer révisé en dessous d'un loyer plancher , seule la stipulation créant la distorsion prohibée doit être réputée non écrite, et ce dès lors qu'elle s'avère dissociable des autres dispositions de la clause d'indexation considérée comme essentielle et déterminante pour les parties ( Cass, 3ème civ, 11 mars 2021, n°20-12.345).

20- L'appréciation du caractère essentiel et déterminant d'une clause du contrat relève de l'appréciation souveraine du juge du fond.

21- En l'espèce, la clause qui prévoit un loyer plancher en dessous duquel l'indexation ne peut pas jouer contrevient aux dispositions de l'article L 145-39 du code de commerce dès lors qu'elle a une nécessaire incidence sur le seuil de 25'% prévu par ce texte d'ordre public.

22- Elle doit être déclarée non écrite.

23- Contrairement à ce que soutient le preneur, cette disposition, qui n'a jamais eu à s'appliquer depuis la prise d'effet du bail, est dissociable des autres dispositions de la clause d'indexation même si elle ne figure pas dans une phrase distincte. Elle peut en effet être isolée sans que la cohérence du reste de la clause soit atteinte. Il n'est nullement justifié enfin que cette stipulation irrégulière quant à l'existence d'un loyer plancher était essentielle dans la volonté des parties de soumettre le loyer à une indexation.

24- La décision de première instance sera ainsi confirmée en ce qu'elle a déclaré reputée non écrite la seule stipulation relative au loyer plancher et a rejeté la demande de restitution des sommes perçues au titre de l'indexation.

- sur la demande de remboursement des sommes versées par le preneur pendant la période de confinement allant du 14 mars au 11 mai 2020 :

25- La preneuse explique avoir dû fermer son magasin pendant le premier confinement du 14 mars au 11 mai 2020, ce qui constitue une perte de la chose louée au sens de l'article 1722 du code civil, et justifie la réduction du montant des loyers à hauteur de 50%.

26- La bailleresse fait valoir que les commerces de détail d'optique font partie des commerces qui n'étaient pas concernés par l'interdiction de recevoir du public. En tout état de cause, la preneuse pouvait exercer une activité de retrait en boutique et de livraison. Elle ajoute l'interdiction de recevoir du public ne s'assimile pas à une destruction de la chose au sens de l'article 1722 du code civil.

Sur ce :

27- Aux termes de l'article 1722 du code civil, si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit; si elle n'est détruite qu'en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l'un et l'autre cas, il n'y a lieu à aucun dédommagement.

28- Sur le fondement de cet article, il a été jugé que l'interdiction de recevoir du public en période de crise sanitaire ne pouvait être assimilée à une perte de la chose louée au sens de l'article 1722 du code civil. En effet, cette interdiction était générale et temporaire, avait pour seul objectif de préserver la santé publique et était sans lien direct avec la destination du local loué telle que prévue par le contrat. (Cass. 3e civ., 30 juin 2022, n° 21-20.190, n° 21-20.127, n° 21-19.889).

29- Les commerçants n'étaient donc pas en droit de demander une réduction de leur loyer.

30- En l'espèce, même à supposer que la preneuse ait dû fermer son magasin qui se situait dans une galerie commerciale, elle ne peut revendiquer l'application des dispositions de l'article 1722 du code civil pour solliciter une réduction du loyer.

31- La décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle a débouté la preneuse de ce chef de demande.

- sur les demandes accessoires :

32- La société Loa [Localité 3] qui succombe sera condamnée aux dépens.

33- Elle sera condamnée à verser la somme de 3000 euros à la société Preim euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Confirme la décision rendue par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 20 janvier 2022,

y ajoutant,

Condamne la société Loa [Localité 3] aux dépens,

Condamne la société Loa [Localité 3] à verser la somme de 3000 euros à la société Preim euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 22/01226
Date de la décision : 29/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-29;22.01226 ?
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