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08/06/2023 | FRANCE | N°20/04048

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre expropriations, 08 juin 2023, 20/04048


ARRET RENDU PAR LA



COUR D'APPEL DE BORDEAUX



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Le : 08 Juin 2023





CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS



N° de rôle : N° RG 20/04048 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LYBM









Monsieur [P] [X]

Monsieur [M] [X]



c/



BORDEAUX METROPOLE

Monsieur Le COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

























Nature de la décision : AU FOND
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Grosse délivrée le :



à :





Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.



Le...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

--------------------------

Le : 08 Juin 2023

CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS

N° de rôle : N° RG 20/04048 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LYBM

Monsieur [P] [X]

Monsieur [M] [X]

c/

BORDEAUX METROPOLE

Monsieur Le COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

Le 08 Juin 2023

Par Madame Catherine ROUAUD-FOLLIARD, Présidente

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE DE L' EXPROPRIATION, a, dans l'affaire opposant :

Monsieur [P] [X], demeurant [Adresse 2]

Monsieur [M] [X], demeurant [Adresse 1]

représentés par Maître Guillaume ACHOU-LEPAGE, avocat au barreau de BORDEAUX

Appelants d'un arrêt rendu le 23 septembre 2020 par le juge de l'expropriation du département de la Gironde suivant déclaration d'appel en date du 20 octobre 2020,

à :

[Localité 7] METROPOLE,

[Adresse 9]

représentée par Maître Clotilde GAUCI de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de BORDEAUX

Monsieur Le COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT,

[Adresse 8]

Comparant en la personne de Monsieur [U] [D], inspecteur divisionnaire des finances publiques.

Intimés,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue le 26 avril 2023 devant :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Sophie MASSON, Conseillère, Madame Marie GOUMILLOUX, Conseillère,

Greffier lors des débats : François CHARTAUD

en présence de Monsieur [U] [D], inspecteur divisionnaire, entendu en ses conclusions,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du siège ci-dessus désignés.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le préfet de la Gironde a, par arrêté du 17 juin 2017, déclaré d'utilité publique au profit de l'établissement public [Localité 7] Métropole le projet de « requalification des espaces emblématiques du centre-ville de la commune de [Localité 10] ».

Dans ce cadre, [Localité 7] Métropole a été chargé d'acquérir une surface de 42 m², détachée de la parcelle AT n° [Cadastre 4], d'une superficie totale de 612 m² et située [Adresse 1], appartenant en indivision à Messieurs [M] et [P] [X].

Bordeaux Métropole a, le 27 avril 2017, notifié une offre totale de 5.040 euros à Messieurs [X], laquelle a été rejetée par courrier du 5 mai 2017.

Bordeaux Métropole a saisi le juge de l'expropriation le 9 janvier 2018.

Par jugement prononcé le 3 mai 2018, le juge de l'expropriation du département de la Gironde a statué ainsi qu'il suit :

- fixe comme suit le prix de l'emprise d'une superficie de 42 m², à détacher de la parcelle cadastrée section AT n°[Cadastre 4] située [Adresse 1], devant revenir à Messieurs [P] et [M] [X] :

- indemnité principale : 42 m² x 250 euros = 10.500 euros,

- indemnité de remploi : 1.825 euros,

- indemnité de reconstruction de la clôture au nouvel alignement : 8.249,63 euros toutes taxes comprises,

- indemnité de reconstitution des végétaux : 3.672 euros toutes taxes comprises,

soit un montant total de 24.246,63 euros.

- condamne [Localité 7] Métropole à payer à Messieurs [P] et [M] [X] la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile :

- condamne [Localité 7] métropole aux dépens ;

- déboute Messieurs [P] et [M] [X] du surplus de leurs demandes.

Par arrêt du 15 mai 2019, la cour d'appel de Bordeaux a statué ainsi qu'il suit :

- déclare les recours recevables en la forme ;

- constate que les recours sont limités au prix du m², sur lequel seront calculées l'indemnité principale et l'indemnité de remploi et sur le principe et le montant de la dépréciation du surplus ;

Dans cette limite,

- confirme la décision déférée qui a rejeté le principe d'une indemnisation pour dépréciation du surplus ;

-infirme la décision déférée sur le montant de l'indemnité d'expropriation et la fixe à la somme

de 24.100 euros dont 21.000 euros pour l'indemnité principale et 3.100 euros pour l'indemnité de remploi ;

Y ajoutant,

- condamne [Localité 7] Métropole à payer aux consorts [P] et [M] [X] la somme de 3.000 euros pour frais irrépétibles ;

- condamne [Localité 7] Métropole aux dépens de l'instance.

Sur pourvoi de [Localité 7] Métropole, la Cour de cassation a statué ainsi qu'il suit :

- casse et annule, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement sur le montant de l'indemnité d'expropriation et la fixe à la somme de 24.100 euros pour l'indemnité principale et 3.100 euros pour l'indemnité de remploi, l'arrêt rendu le 15 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

- remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée.

***

La cour d'appel de Bordeaux, cour de renvoi, a été saisie le 20 octobre 2020 par l'établissement public [Localité 7] Métropole, intimée.

En considération de difficultés techniques persistantes affectant les échanges par RPVA entre les Conseils des parties et le greffe de la chambre des expropriations de la cour d'appel, Maître [R], Conseil de Messieurs [P] et [M] [X], appelants, a fait connaître son intervention par courriel le 9 novembre 2020 puis, le 5 janvier 2021, s'est constitué par RPVA.

Bordeaux Métropole lui a alors, le même jour, notifié son mémoire après cassation.

Le greffe a notifié le mémoire de l'intimée, daté du 11 décembre 2020, à Messieurs [P] et [M] [X] et au commissaire du gouvernement le 30 juin 2021, lesquels l'ont reçu le 1er juillet suivant pour les premiers et le 2 juillet suivant pour le second.

Bordeaux Métropole, intimée, a déposé un mémoire complémentaire le 30 janvier 2023, qui a été notifié par le greffe le même jour à Messieurs [P] et [M] [X] et au commissaire du gouvernement, lesquels l'ont tous reçu le 31 janvier suivant.

Les appelants ont déposé un mémoire au greffe le 20 avril 2023.

Le commissaire du gouvernement a déposé un mémoire au greffe le 24 avril 2023.

***

Par son dernier mémoire déposé le 30 janvier 2023, l'établissement public [Localité 7] Métropole demande à la cour de :

- déclarer recevable le mémoire après cassation déposé par [Localité 7] Métropole en tant que demanderesse à la saisine après cassation, et comme intimée et appelante incident devant la cour autrement composée après cassation ;

- réformer le jugement n°RG 18/0001 rendu le 03 mai 2018 par le juge de l'expropriation de la Gironde en ce qu'il a fixé l'indemnité principale à hauteur de 10.500 euros et l'indemnité de remploi à hauteur de 1.825 euros, pour un bien libre de toute occupation, revenant à Monsieur [P] [X] et Monsieur [M] [X], propriétaires de l'emprise de 42 m² à détacher de la parcelle cadastrée section AT n°[Cadastre 4] d'une contenance de 612 m², située [Adresse 1], sur le territoire de la Commune de [Localité 10] ;

- en conséquence de cette réformation, pour un bien libre de toute occupation, fixer à la somme de 4.200 euros (quatre mille deux cents euros) l'indemnité principale et à la somme de 840 euros (huit cent quarante euros) l'indemnité de remploi, dues par [Localité 7] Métropole et revenant à Monsieur [P] [X] et Monsieur [M] [X], propriétaires de l'emprise de 42 m² à détacher de la parcelle cadastrée section AT n°[Cadastre 4] d'une contenance de 612 m², située [Adresse 1], sur le territoire de la Commune de [Localité 10] ;

- rejeter toute demande plus ample ou contraire ;

- condamner solidairement les consorts [X] aux dépens de l'instance et à verser la somme de 3.000 euros à [Localité 7] Métropole au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

Par leur mémoire déposé le 20 avril 2023, Messieurs [P] et [M] [X] demandent à la cour de :

- réformer le jugement du 3 mai 2018 n°RG 18/0001 ;

Statuant à nouveau,

- fixer les indemnités d'expropriation devant revenir à Messieurs [X] en contrepartie de la dépossession de 42 m² à détacher de la parcelle cadastrée section AT n°[Cadastre 4] d'une contenance de 612 m², située [Adresse 1] à la somme totale de 24.100 euros ;

- confirmer le surplus ;

- condamner [Localité 7] métropole à payer à Messieurs [X] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

Par son mémoire déposé le 24 avril 2023, le commissaire du gouvernement propose à la cour d'allouer aux consorts [X] une indemnité principale de 13.440 euros et une indemnité de remploi de 2.266 euros, soit une indemnisation totale hors indemnité accessoire de 15.706 euros pour l'expropriation du bien dont ils étaient propriétaires en indivision sis [Adresse 1] et cadastré AT n°[Cadastre 6].

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour rappelle qu'il est constant en droit que, par application combinée des articles R.311-26 du code de l'expropriation et 631 du code de procédure civile, les dispositions de l'article R. 311-26 précité ne s'appliquent pas aux conclusions devant la cour d'appel de renvoi et que l'instruction est reprise en l'état de la procédure non atteinte par la cassation.

A l'audience du 26 avril 2023, les parties et le commissaire du gouvernement ont expressément accepté que l'affaire soit retenue, nonobstant le fait que les appelants ont déposé leur mémoire le 20 avril précédent et le commissaire du gouvernement deux jours avant l'audience.

Il est également constant que, en exécution de l'arrêt de la Cour de cassation, la cour d'appel de Bordeaux statuant comme cour de renvoi n'est saisie que de la discussion relative à la détermination de l'indemnité d'expropriation, puisque la confirmation, par l'arrêt du 15 mai 2019, du débouté, par le juge de l'expropriation, de la demande au titre de l'indemnité de dépréciation n'a pas été atteinte par la cassation.

Il n'y a donc pas lieu d'examiner la demande de Messieurs [X] tendant à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a retenu que l'usage effectif du terrain exproprié était un terrain de complément, étant au surplus relevé que les appelants n'en tirent pas de conséquence indemnitaire.

Monsieur [M] [X] et Monsieur [P] [X] discutent l'indemnisation arrêtée par le premier juge au motif qu'ils ne peuvent identifier sur quels éléments objectifs de comparaison s'est fondé celui-ci.

L'intimée a formé un appel incident et fait valoir que le prix de 100 euros /m² doit être retenu compte tenu des trois termes de comparaison qu'elle produit aux débats.

La cour observe que le juge de l'expropriation, qui a visité les lieux le 27 février 2018, les a ainsi décrits :

« L'emprise expropriée consiste en une bande de terrain de forme irrégulière, le long de la voie d'accès à la place des Augustins depuis la rue Loustalot.

Elle est en nature de terrain d'agrément clôturé et arboré, libre de toute occupation. La clôture se présente sous deux aspects :

- sur la rue Loustalot, une barrière en bois sur muret en maçonnerie ;

- sur la voie d'accès à la place des Augustins, un grillage métallique fixé sur muret et poteau

en maçonnerie (posé par [Localité 7] Métropole lors d'une précédente expropriation).

La clôture est doublée par une haie arbustive.

En bordure de l'emprise, se trouve un portail en bois permettant l'accès carrossable, depuis la rue Loustalot, à la parcelle n°[Cadastre 4] et aux habitations et dépendances, situées sur les parcelles n°[Cadastre 5] et [Cadastre 3] et appartenant à Messieurs [X].

Ce terrain est implanté en centre-ville, à proximité des commerces, desservi par les transports en commun. Il se situe en zone UM 14 de tissus à dominante de grands ensembles et tissus mixtes. Faisant application de l'article L. 322-3 du code de l'expropriation, les parties sont d'accord sur le fait que ce terrain doit bien recevoir la qualification de terrain à bâtir en raison du classement du plan d'urbanisme et de l'accès aux différents réseaux.»

Il faut rappeler que, en l'état de la procédure non atteinte par la cassation, ne peuvent être prises en considération que les demandes formées par les appelants dans leur mémoire déposé le 10 octobre 2018, seul recevable comme ayant été déposé dans le délai de trois mois de leur déclaration d'appel, puisque le mémoire complémentaire du 19 mars 2019, qui élevait le montant de l'indemnité réclamée à l'autorité expropriante, a été déposé hors le délai de trois mois prévu par l'article R.311-26.

Or, il apparaît que Messieurs [X], qui demandaient le 10 octobre 2018, que l'indemnité totale de dépossession soit fixée à la somme de 15.706 euros, ont élevé leur demande à la somme de 24.100 euros le 19 mars 2019 et, par mémoire déposé le 20 avril 2023 devant la cour de renvoi, maintiennent leur demande en paiement d'une indemnité de dépossession de 24.100 euros.

Par ailleurs, c'est par des motifs pertinents, qui ne sont pas remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte, que le premier juge a souligné le fait que les termes de comparaison proposés par [Localité 7] Métropole concernent de très petites parcelles -quelques mètres carrés- acquises par l'expropriant, parfois à titre gratuit et les a écartés en ce qu'elles n'étaient pas significatives à titre de comparaison.

Toutefois, les appelants produisent un rapport d'expertise qui, ainsi que l'a noté le juge de l'expropriation, présente des éléments de comparaison suffisamment précis (localisation et superficie) pour être retenus aux débats. M. [T], expert saisi par Messieurs [X], a pu déterminer un prix de vente moyen de 320 euros/m² pour des biens comparables situés également à [Localité 10], dont 5 dans un secteur très proche. Il s'agit certes de ventes portant sur des terrains entiers construits mais il faut observer que la valorisation de la parcelle expropriée doit aussi prendre en considération la valeur que pourraient en attendre les appelants au prix du marché pour une vente de la totalité du bien, un morceau de terrain en bordure de voie routière n'ayant évidemment pas vocation à être cédé isolément.

La cour retiendra dès lors cette moyenne résultant des termes de comparaison versés aux débats par les appelants et, infirmant le jugement déféré, fixera l'indemnité de dépossession devant revenir aux propriétaires indivis de la parcelle expropriée à la somme de 13.440 euros au titre de l'indemnité principale (42 m² x 320 euros) et 2.266 euros au titre de l'indemnité de remploi, soit un montant total de 15.706 euros.

La cour condamnera [Localité 7] Métropole à payer les dépens de l'appel et à verser à Messieurs [X] une somme globale de 3.000 euros en indemnisation de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Dans les limites de la cassation,

Infirme le jugement prononcé le 3 mai 2018 par le juge de l'expropriation de la Gironde.

Statuant à nouveau,

Fixe l'indemnité de dépossession devant revenir à Monsieur [M] [X] et Monsieur [P] [X] à la somme de 15.706 euros, soit 13.440 euros au titre de l'indemnité principale et 2.266 euros au titre de l'indemnité de remploi.

Y ajoutant,

Condamne [Localité 7] Métropole à payer à Monsieur [M] [X] et Monsieur [P] [X] la somme globale de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne [Localité 7] Métropole à payer les dépens.

L'arrêt a été signé par Jean-Pierre FRANCO, Président et par François CHARTAUD, Greffier, auquel a été remis la minute signée de la décision.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre expropriations
Numéro d'arrêt : 20/04048
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;20.04048 ?
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