COUR D'APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 01 JUIN 2023
N° RG 21/00185 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L4CS
Monsieur [M] [E]
c/
CREDIT FONCIER DE FRANCE
Nature de la décision : ABSENCE EFFET DÉVOLUTIF APPEL
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 octobre 2020 (R.G. 2019F01104) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX/ FRANCE suivant déclaration d'appel du 12 janvier 2021
APPELANT :
Monsieur [M] [E], né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 5], de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Océanne AUFFRET DE PEYRELONGUE de la SELARL AUFFRET DE PEYRELONGUE, avocat au barreau de BORDEAUX et assisté par Maître Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
CREDIT FONCIER DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 3]
représenté par Maître Carolina CUTURI-ORTEGA de la SCP JOLY ' CUTURI ' WOJAS ' REYNET DYNAMIS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX et assisté par Maître Caroline GERAULT de l'Association d'Avocats WEIL - JOURDE, avocat a barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 avril 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE
[M] [E] a accepté une offre de deux prêts émanant du Crédit Foncier de France du 14 juin 2010 dans le but de financer l'acquisition d'un terrain et l'édification d'un immeuble sur celui-ci à [Localité 4] (33).
Cette offre était divisée en :
- un prêt à taux 0% de 50 160 euros ( Prêt n°4725249),
- un prêt dit prêt liberté de 74 800 euros à taux fixe de 4,05 %.( Prêt n°4725250)
Les deux prêts étaient déblocables au fur et à mesure de l'avancement du chantier. Le prêt à taux 0% bénéficiait d'une période d'amortissement de 12 mois et celui au taux fixe de 4,05 % de 36 mois.
Par courrier du 25 février 2019, M. [E] a dénoncé à la banque la non-conformité de son prêt aux motifs suivants :'TEG erroné: mauvaise intégration de la phase de préfinancement ' et 'les intérêts n'ont pas été calculés sur l'année civile', la mettant en demeure ' de l'informer de sa position'.
Puis par acte d'huissier de justice du 26 septembre 2019, il a assigné la société Crédit Foncier de France devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de voir constater que les intérêts du prêt °4725250 n'avait pas été calculé sur la base d'une année civile et que les frais de la période d'anticipation n'avaient pas été intégrés dans le calcul du TEG et de voir ainsi substituer à l'intérêt conventionnel, l'intérêt légal.
Par jugement contradictoire du 08 octobre 2020, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- déclaré l'ensemble des actions de M. [E] prescrits selon les dispositions de l'article 2224 du code civil,
- dit M. [E] irrecevable en l'ensemble de ses demandes principales et subsidiaires,
- condamné M. [E] à payer à la société Crédit Foncier de France la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [E] aux entiers dépens.
Le tribunal a considéré que l'action était prescrite, le point de départ de la prescription quinquennale étant la date de conclusions du contrat, et non celle du dépôt du rapport d'expertise.
Par déclaration du 12 janvier 2021, M. [E] a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société Crédit Foncier de France.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières écritures notifiées par RPVA le 15 mars 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, M. [E], demande à la cour de :
- vu l'article 1907 du code civil,
- vu les articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation et les articles R. 313-1 et suivants du même code,
- déclarer son appel formé recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement en ce qu'il :
- déclare l'ensemble des actions de M. [E] prescrits selon les dispositions de l'article 2224 du code civil,
- dit M. [E] irrecevable en l'ensemble de ses demandes principales et subsidiaires,
- condamne M. [E] à payer à la société Crédit Foncier de France la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne M. [E] aux entiers dépens,
- statuant à nouveau,
- déclarer ses demandes recevables et bien fondées,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel depuis la souscription du contrat initial souscrit par lui,
- enjoindre à la société Crédit Foncier de France d'établir de nouveaux tableaux d'amortissement tenant compte de la substitution du taux légal au taux conventionnel, depuis la date de souscription du prêt, des éventuels avenants, les échéances restant à courir sur le prêt jusqu'à son terme devant porter intérêts au taux légal année par année, le cas échéant semestre par semestre,
- condamner la société Crédit Foncier de France à lui restituer le trop-perçu correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel du prêt n°4725250 et les intérêts au taux légal, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner que lesdites sommes devront être actualisées au regard des tableaux d'amortissement qui seront établis par la société Crédit Foncier de France, au taux légal année par année, le cas échéant semestre par semestre, depuis la date de souscription du contrat,
- subsidiairement, si par impossible la substitution des intérêts légaux aux intérêts conventionnels devait être écartée,
- vu l'article L. 312-33 du code de la consommation, désormais codifié à l'article L. 341-34 du même code,
- prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels du prêt 4725250 souscrit auprès de la société Crédit Foncier de France par lui,
- en tout état de cause,
- condamner la société Crédit Foncier de France à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté contractuelle,
- condamner la société Crédit Foncier de France à lui payer la somme de 3 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeter toutes demandes et prétentions plus amples ou contraires aux présentes,
- condamner la société Crédit Foncier de France aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel.
Par dernières écritures notifiées par RPVA le 22 mars 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Crédit Foncier de France, demande à la cour de :
- à titre principal,
- vu l'article 562 du code de procédure civile,
- se déclarer non saisie de l'appel interjeté par la déclaration d'appel formalisée le 12 janvier 2021 par les époux [E],
- subsidiairement,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- en tout état de cause,
- débouter M. [E] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [E] à lui verser la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux dépens dont distraction au profit de la société Joly Cuturi Wojas en application de l'article 699 du code de procédure civile.
L'affaire a été clôturée au jour de l'audience des plaidoiries fixée au 4 avril 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
1- Aux termes de l'article 462 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
2- Aux termes de l'article 901 du code de procédure civile dans sa dernière version applicable aux instances en cours, la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :
1° La constitution de l'avocat de l'appelant ;
2° L'indication de la décision attaquée ;
3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;
4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
3- Les articles 3 et 4 de l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d'appel modifié par l'arrêté du 25 février 2022 disposent que le message de données relatif à l'envoi d'un acte de procédure remis par la voie électronique est constitué d'un fichier au format XML destiné à faire l'objet d'un traitement automatisé par une application informatique du destinataire. Lorsque ce fichier est une déclaration d'appel, il comprend obligatoirement les mentions des alinéas 1 à 4 de l'article 901 du code de procédure civile. En cas de contradiction, ces mentions prévalent sur celles mentionnées dans le document fichier au format PDF visé à l'article 4. Lorsqu'un document doit être joint à un acte, ledit acte renvoie expressément à ce document.[Souligné par la cour]
4- L'intimée soutient que la cour n'est pas saisie par l'appel formé par [M] [E] car la déclaration d'appel comporte la seule mention 'Appel limité aux chefs de jugements critiqués' sans mentionner les chefs critiqués et sans renvoyer à une annexe.
5- L'appelante rétorque qu'elle a adressé avec sa déclaration d'appel une annexe portant la mention 'l'appel tend à faire réformer ou annuler par la cour d'appel la décision susvisée 'suivie des chefs critiqués. Elle soutient que cette annexe fait corps avec la déclaration d'appel conformément à l'avis rendu par la deuxième chambre civile de la cour de cassation le 13 janvier 2022.
6- L'avis de la cour de cassation le 13 janvier 2022 visé par l'appelante ne remet pas en cause l'exigence d'un renvoi exprès dans la déclaration d'appel au document annexé à celle-ci mais précise seulement qu'une annexe peut être jointe à la déclaration d'appel sans avoir à justifier d'un empêchement technique.
7- En l'espèce, la déclaration d'appel du 12 janvier 2021 ne comporte que la mention' appel limité aux chefs du jugement expressément critiqués'. Elle ne renvoie à aucun document de sorte que l'effet dévolutif de l'appel n'a pas joué.
8- Par ailleurs, l'appelant n'a pas régularisé la situation par une nouvelle déclaration d'appel dans le délai imparti pour conclure au fond.
9- Il n'y a pas lieu à indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
10-M. [E] sera condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort
Constate l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel;
Constate que la cour n'est saisie d'aucune demande principale ou incidente;
Déboute les parties de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne [M] [E] aux dépens d'appel dont distraction au profit de la société Joly Cuturi Wojas.
Le présent arrêt a été signé par M. Franco, président, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.