COUR D'APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 11 MAI 2023
N° RG 21/01354 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L7JA
S.A.S. AIRPORT DIFFUSION
c/
S.A.S. F.V.S.
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 février 2021 (R.G. 2020F00011) par le Tribunal de Commerce de BERGERAC suivant déclaration d'appel du 04 mars 2021
APPELANTE :
S.A.S. AIRPORT DIFFUSION, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]
représentée par Maître David LARRAT de la SELARL H.L. CONSEILS, avocat au barreau de PERIGUEUX
INTIMÉE :
S.A.S. F.V.S., prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2]
représentée par Maître Frédéric BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 mars 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE
La société Airport Diffusion exerce une activité de régie publicitaire.
Le 19 mars 2018, elle a passé commande auprès de la société FVS d'un vidéoprojecteur pour la somme de 15 725,75 euros afin d'installer celui-ci sur le terminal d'arrivée de l'aéroport de [Localité 3] dans le but de promouvoir la région.
Le 18 mai 2018, le matériel a été livré, sans réserve de la part de l'acquéreur. Ce dernier l'a fait installer par la société Publi-Sons.
Le vendeur a émis une facture le 20 mai 2018 dont l'acquéreur ne s'est que partiellement acquittée arguant de dysfonctionnement du matériel. La société FVS a ensuite saisi le président du tribunal de commerce de Bergerac, qui, par ordonnance du 29 janvier 2019, a enjoint à la société Airport Diffusion de payer à la société FVS la somme de 5725,75 euros au titre du solde de la facture.
Par courrier du 26 mars 2019, la société Airport Diffusion a formé opposition à ladite ordonnance.
Par acte d'huissier du 03 mars 2020, la société FVS a assigné la société Airport Diffusion devant le tribunal de commerce de Bergerac aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 5 725,75 euros et de la somme forfaitaire de 40 euros au titre des frais de recouvrement.
Par jugement contradictoire du 05 février 2021, le tribunal de commerce de Bergerac a :
- débouté la société Airport Diffusion de l'intégralité de ses demandes,
- condamné la société Airport Diffusion à payer à la société FVS la somme de 5 725,75 euros, outre les intérêts au taux d'intérêt légal à compter du 20 juillet 2018,
- condamné la société Airport Diffusion à payer à la société FVS la somme de 40 euros pour frais de recouvrement,
- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, la première capitalisation intervenant le 18 décembre 2020 et les capitalisations ultérieures au 18 décembre de chaque année jusqu'à parfait paiement,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Airport Diffusion aux dépens.
Par déclaration du 04 mars 2021, la société Airport Diffusion a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société FVS.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières écritures notifiées par RPVA le 1er juin 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Airport Diffusion, demande à la cour de :
- vu les articles 1217 et suivants du code civil,
- vu les pièces versées au débat,
- la déclarer recevable en son appel et bien fondée en ses demandes,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a :
- l'a débouté de l'intégralité de ses demandes,
- l'a condamné à payer à la société FVS la somme de 5 725,75 euros, outre les intérêts au taux d'intérêt légal à compter du 20 juillet 2018,
- l'a condamné à payer à la société FVS la somme de 40 euros pour frais de recouvrement,
- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, la première capitalisation intervenant le 18 décembre 2020 et les capitalisations ultérieures au 18 décembre de chaque année jusqu'à parfait paiement,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamné aux dépens, dépens taxés et liquidés pour les frais de greffe à la somme de 63,36 euros TTC,
- statuant à nouveau,
- constater l'exception d'inexécution,
- en conséquence,
- débouter la société FVS de l'ensemble de ses demandes plus amples et contraires,
- condamner la société FVS à lui payer la somme de 4 808,16 euros TTC au titre de la réparation des conséquences de l'inexécution ,
- condamner la société FVS à lui verser une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société FVS aux entiers dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile et, au surplus, à tous les frais d'exécution, en ce compris le droit proportionnel dû à l'huissier de justice sur le fondement de l'article A444-32 du code de commerce.
Par dernières écritures notifiées par RPVA le 13 juillet 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société FVS, demande à la cour de :
- vu les articles 1217 et suivants du code civil,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter la société Airport Diffusion de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Airport Diffusion à lui payer une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Airport Diffusion aux entiers dépens conformément aux dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile.
La proposition de recours à la médiation a été refusée par les deux parties à l'instance.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 février 2023 et le dossier a été fixé à l'audience du 13 mars 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
1- Aux termes de l'article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
Les articles 1219 et 1220 du code civil disposent qu'une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. Une partie peut suspendre l'exécution de son obligation dès lors qu'il est manifeste que son cocontractant ne s'exécutera pas à l'échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais.
2- L'appelante soutient qu'elle a signalé à plusieurs reprises à la société FVS des dysfonctionnements majeurs de l'appareil auxquels celle-ci n'a pas remédié. L'inexécution de ses obligations par sa cocontractante est selon elle établie et justifie le non paiement d'une partie du prix. Elle forme en outre à titre reconventionnel une demande de dommages et intérêts exposant avoir dû solliciter la société Publi-Sons pour démonter le video projecteur et le renvoyer à la société FVS qui lui a été facturée 561,60 euros, outre les frais de location d'une nacelle ( 196 euros) et le temps qu'elle a elle-même consacré à cette problématique (4050 euros).
3- L'intimée soutient avoir fait toutes les diligences utiles, que l'appareil fonctionne mais que la société Airport diffusion ne le paramètre pas correctement, ce qui ressort du rapport d'intervention du service après-vente. Elle rappelle que le vidéoprojecteur bénéficie d'une garantie du fabriquant, la société Digital Projection, ce dont elle a informé l'acquéreur suite à sa réclamation du 1er avril 2019.
4- Il appartient à l'acquéreur d'établir que le vendeur a manqué à son obligation de livraison conforme d'un produit en état de marche.
5- En l'espèce, le vidéoprojecteur a été réceptionné sans réserve.
6- Par mail du 10 juillet 2018, la société Airport diffusion indique à son vendeur qu'elle rencontre 'toujours' des difficultés avec le matériel livré sur l'arrêt et l'allumage automatique, un des responsables de l'aéroport étant de ce fait obligé chaque matin de procéder à l'allumage manuel du matériel. Elle conditionne le paiement du solde de la facture à la résolution de cette difficulté.
Par mail du 15 octobre 2018, la société Airport diffusion écrit à son vendeur pour lui indiquer que le problème lié à l'absence de rallumage automatique de l'appareil est réglé mais qu'une nouvelle difficulté est apparue ( à la fin de chaque cycle, le vidéo projecteur se met en mode off avec écran noir et ne reprend la diffusion qu'au bout d'une minute). Par mail du 1er février 2019, la société Airport diffusion fait état d'une panne puis par mail du 2 avril 2019 des anomalies constatées par le service technique.
La société FVS communique alors les coordonnées de la 'station technique' ( service après-vente) à qui le matériel est retourné. Il est diagnostiqué une panne du système de refroidissement. La pièce défectueuse est changée. A l'occasion de cette réparation, il est constaté que l'appareil a été utilisé en moyenne 9h30 par jour pendant une année et que suite à la mise à jour logicielle effectuée un an plus tôt, les heures d'allumage et d'extinction ont bien été programmées.
7- Il ressort des pièces produites que le problème de l'allumage automatique de l'appareil a été réglé dans le cadre du service après-vente mais que l'acquéreur a argué d'une nouvelle difficulté ('à la fin de chaque cycle, le vidéo projecteur se met en mode off avec écran noir et ne reprend la diffusion qu'au bout d'une minute') pour se soustraire à son obligation de paiement. La cour relève d'une part que ce dysfonctionnement n'est pas avéré et d'autre part, qu'il ne justifie pas en tout état de cause le non paiement de la facture mais la mise en oeuvre de la garantie du fabricant. Il n'est en outre nullement démontré que l'aéroport de [Localité 3] n'a pas pu utiliser la machine.
8- Les juges de première instance ont ainsi à bon droit jugé, dans leur décision très circonstanciée, que le matériel a fonctionné pendant une longue durée et qu'il n'est pas démontré que le matériel livré était défectueux.
9- La décision sera ainsi confirmée en ce qu'elle a condamné la société Airport Diffusion au paiement du solde de sa facture.
10- Celle-ci sera en outre déboutée de sa demande de dommages et intérêts formée à titre reconventionnel.
11- La société Airport Diffusion qui succombe sera condamnée aux dépens de cette instance d'appel.
12- Elle sera en outre condamnée à verser la somme de 2000 euros à la société FVS au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,
Confirme la décision rendue le 5 février 2021 par le tribunal de commerce de Bergerac,
Y ajoutant
Condamne la société Airport Diffusion aux dépens de cette instance d'appel.
Condamne la société Airport Diffusion à verser la somme de 2000 euros à la société FVS au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Franco, président, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.