COUR D'APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 08 FEVRIER 2023
N° RG 20/02921 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LURE
S.A.S. FLAT LEASE GROUP
c/
S.A.R.L. BUREAU DE CONTROLE GIRONDIN
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 juillet 2020 (R.G. 2019F00797) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 04 août 2020
APPELANTE :
S.A.S. FLAT LEASE GROUP, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]
représentée par Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.R.L. BUREAU DE CONTROLE GIRONDIN, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2] / FRANCE
représentée par Maître Anaïs SAULNIER, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Magali ETCHEGARAY, avocat au barreau de BAYONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 décembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nathalie PIGNON, Présidente,
Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE
Le 15 novembre 2011, la société Bureau de Contrôle Girondin, a conclu un contrat de licence d'exploitation d'un site internet avec la société Sitti d'une durée de 48 mois comportant des mensualités de 98,60 euros par mois. Ce contrat comportait une clause de reconduction tacite, sauf dénonciation du contrat trois mois avant son échéance par le preneur.
Le site internet a été reçu par le client le 7 décembre 2011. Le contrat a commencé à courir au 1er janvier 2012.
Le contrat a été cédé par la société Sitti à la société Flat Lease Group selon facture du 14 décembre 2011 pour la somme de 3075,43 euros. La société Flat Lease Group l'a ensuite cédé à son tour à la société Ytreza pour la somme de 3634,18 euros selon facture du 30 mai 2012.
Préalablement à cette cession, selon un acte intitulé « promesse d'achat-vente » du 25 mai 2012, la société Flat Lease Group s'est engagée à racheter le site internet aux termes du contrat, soit au 31 décembre 2015.
Par courrier du 12 février 2018, la société Flat Lease Group a mis en demeure la société Bureau de Contrôle Girondin de lui régler les loyers impayés puis par courrier du 2 mai 2019 a procédé à la résiliation du contrat et a sollicité le paiement des loyers impayés et de la clause pénale. Elle a ensuite obtenu l'autorisation par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bordeaux d'effectuer une saisie conservatoire à hauteur de 3792 euros sur les comptes bancaires de la société Bureau de Contrôle Girondin.
Par acte d'huissier du 10 juillet 2019, la société Flat Lease Group a assigné la société Bureau de Contrôle Girondin devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins d'obtenir les loyers échus et non payés pour l'année 2017 et une indemnisation.
Par jugement contradictoire du 23 juillet 2020, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- dit que le contrat a été valablement dénoncé par la société Bureau de Contrôle Girondin le 12 octobre 2015 à échéance de fin 2016,
- débouté la société Flat Lease Group de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la société Flat Lease Group au paiement d'une amende civile d'un montant de 4 000 euros,
- condamné la société Flat Lease Group aux entiers dépens.
En substance, le tribunal a jugé que si le courrier de résiliation envoyé le 12 octobre 2015 n'a pas pu permettre une résiliation du contrat à l'issue de sa période initiale compte tenu de son envoi tardif, il a eu effet à l'issue de la période de reconduction tacite d'une année soit à la fin de l'année 2016.
Par déclaration du 04 août 2020, la société Flat Lease Group a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société Bureau de Contrôle Girondin.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 05 octobre 2020, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Flat Lease Group, demande à la cour de :
- vu les dispositions des articles 1104 et 1134 et suivants de l'ancien code civil,
- vu les dispositions des articles 1103 et suivants et 1231-1 et suivants du code civil,
- vu les dispositions de l'article L. 131-1 et suivants du code de procédure civile d'exécution,
- vu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de procédure civile d'exécution,
- vu l'article L. 111-1, alinéa 1er et suivants du code de la propriété intellectuelle,
- vu l'article L. 335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle,
- vu les conditions générales du contrat,
- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
- et la reformant,
- condamner la société Bureau de Contrôle Girondin à lui verser la somme principale de 3 696 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 06 septembre 2017, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 nouveau du code civil,
- condamner la société Bureau de Contrôle Girondin à lui verser une indemnité forfaitaire de 369, 60 euros TTC sur fondement de l'article 9.6 des conditions générales, outre intérêts au taux contractuel à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société Bureau de Contrôle Girondin à lui verser la so750 euros à titre de dommages et intérêts sur fondement de 'article 1231-1 et suivant du code civil tel que modifié par l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016,
- condamner la société Bureau de Contrôle Girondin à lui verser une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Bureau de Contrôle Girondin aux entiers dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, en ce compris les frais occasionnés par la saisie conservatoire, conformément aux dispositions de l'article L. 512-2 du code de procédure civile d'exécution, à son profit.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 04 janvier 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Bureau de Contrôle Girondin, demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 23 juillet 2020,
- y ajoutant,
- condamner la société Flat Lease Group à lui régler la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
- condamner la société Flat Lease Group aux entiers dépens.
Par acte d'huissier de justice du 07 octobre 2020, la société FlatLease Group a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions à la société Bureau de Contrôle Girondin.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 novembre 2022 et le dossier a été fixé à l'audience du 14 décembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
* sur les demandes de la société Flat Lease Group :
1- La société Flat Lease Group soutient que la société Bureau de Contrôle Girondin ne justifie pas lui avoir adressé un courrier de résiliation du contrat de sorte que celui-ci s'est poursuivi par tacite reconduction. Elle affirme que la société Bureau de Contrôle Girondin ne justifie pas de la dénonciation du contrat qu'elle allègue à défaut de justifier de l'envoi et de la réception des courriers recommandés. Enfin, elle ajoute qu'elle n'a pas cédé le contrat à la société Ytreza mais seulement le bien objet du contrat de sorte que la dénonciation ne pouvait intervenir qu'entre ses propres mains.
2- La société Bureau de Contrôle Girondin soutient que le courrier de résiliation qu'elle a adressé à la société Ytreza le 12 octobre 2015 était régulier; que s'il n'a pas permis une résiliation au 31 décembre 2015, il doit être pris en compte à l'issue de la reconduction tacite.
3- Le contrat prévoit une reconduction tacite du contrat au-délà de sa période initiale pour une année sauf dénonciation de celui-ci trois mois avant son issue.
La société Bureau de Contrôle Girondin justifie avoir adressé le 12 octobre 2015 un courrier de résiliation du contrat à la société Ytreza dont celle-ci a accusé réception le lendemain (pièce 2).
Ce courrier est effectivement trop tardif de 12 jours pour que le preneur puisse prétendre à une résiliation du contrat au 1erjanvier 2016. Les premiers juges ont cependant à juste titre retenu que ce courrier de résiliation a fait effet à l'issue de la période d'un an de reconduction tacite, soit au 1erjanvier 2017.
La cour ajoutera que l'appelante ne peut soutenir sérieusement qu'elle a conservé la qualité de cocontractante au contrat de bail la liant à la société Bureau de Contrôle Girondin alors qu'elle reconnait qu'elle n'était plus propriétaire du bien loué à la date à laquelle le courrier de résiliation a été adressé à la société Ytreza. En tout état de cause, le preneur n'a pas été informé de la nécessité de procéder à une résiliation entre les mains de la société Flat Lease Group après la cession du bien loué à la société Ytreza.
Dès lors, la notification à la seule société Ytreza est régulière.
La décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle a débouté la société Flat Lease Group ses demandes ées au titre des loyers, de l'indemnité forfaitaire et de dommages et intérêts.
* sur l'amende civile :
4- L'appelante demande à la cour de réformer sa condamnation au paiement d'une amende civile au motif que sa demande en paiement des loyers était fondée.
5- Aux termes de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
En l'espèce, les juges de première instance n'ont pas caractérisé le caractère non seulement infondé mais également abusif de la procédure engagée par la société Flat Lease Group.
La décision de première instance sera infirmée de ce chef.
En revanche, il sera jugé que dans le cadre de cet appel, il est établi que la société Flat Lease Group a commis une erreur grossière équipollente au dol en persistant à refuser de tenir compte du courrier de résiliation adressé par le preneur plus d'un an avant le terme de la reconduction tacite, alors que la copie de ce courrier ainsi que la preuve de la bonne réception par la société Ytreza lui avait déjà été produite en première instance.
La société Flat Lease Group sera ainsi condamnée à une amende civile de 4000 euros.
* sur les autres demandes :
6- La société Flat Lease Group qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel.
7- Elle sera condamnée à verser la somme de 3000 euros à la société Bureau de Contrôle Girondin au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort
Confirme la décision rendue par le tribunal de commerce du 23 juillet 2020, sauf en ce qu'il a condamné la société Flat Lease Group au paiement d'une amende civile,
et statuant à nouveau
Dit n'y avoir lieu au paiement d'une amende civile,
y ajoutant
Condamne la société Flat Lease Group dans le cadre de cet appel au paiement d'une amende civile de 4000 euros,
Condamne la société Flat Lease Group aux dépens de la procédure d'appel,
Condamne la société Flat Lease Group à verser la somme de 3000 euros à la société Bureau de Contrôle Girondin au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Le présent arrêt a été signé par Mme GOUMILLOUX, conseiller, pour le président empêché, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par la magistrate signataire.