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25/10/2022 | FRANCE | N°20/00739

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 4ème chambre commerciale, 25 octobre 2022, 20/00739


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 25 OCTOBRE 2022









N° RG 20/00739 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LONO







Monsieur [P] [V]





c/



SA POINT P - BMSO























Nature de la décision : AU FOND

























Grosse dÃ

©livrée le :



aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 janvier 2020 (R.G. 2019F00970) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 10 février 2020





APPELANT :



Monsieur [P] [V], né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 4], de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]



rep...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 25 OCTOBRE 2022

N° RG 20/00739 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LONO

Monsieur [P] [V]

c/

SA POINT P - BMSO

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 janvier 2020 (R.G. 2019F00970) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 10 février 2020

APPELANT :

Monsieur [P] [V], né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 4], de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Frédéric BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SA POINT P - BMSO, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 3]

représentée par Maître Fabien DUCOS-ADER de la SELARL DUCOS-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Elisabeth FABRY, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie PIGNON, Présidente,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE :

La société Teneco Habitat SARL, dont M. [V] était le gérant, avait pour activité les travaux de maçonnerie générale et de gros 'uvre de bâtiment.

Entre avril et août 2018, la société Teneco a commandé du matériel auprès de la société Point P-BMSO.

M. [V] a signé le 11 mai 2018 pour le compte de la société Teneco deux lettres de change respectivement de 8 557,04 euros et 8 557,11 euros à échéance des 31 juillet et 31 août 2018, afin de garantir le paiement des achats effectués.

Les deux lettres de change ont été rejetées par la banque pour insuffisance de provision.

Par jugement du 31 octobre 2018, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert à l'égard de la société Teneco Habitat une procédure de redressement judiciaire qui a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 20 mars 2019. La SELARL Christophe Mandon a été désignée en qualité de liquidateur.

La société Point P-BMSO a régulièrement déclaré sa créance à la procédure à hauteur de la somme de 17 915,11 euros.

Par exploit d'huissier du 28 août 2019, après vaine mise en demeure, la société Point P-BMSO a assigné M. [V] devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de le voir condamner à lui payer la somme principale de 17 114,15 euros.

Par jugement réputé contradictoire du 06 janvier 2020, M. [V] n'ayant pas comparu, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- condamné M. [V] à payer à la société Point P-BMSO SA la somme de 17 114,15 euros assortie des intérêts au tanx contractuel à compter du 25 avril 2019 jusqu'à la date effective du paiement,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné M. [V] à payer à la société Point P-BMSO SA la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [V] aux dépens.

M. [V] a relevé appel du jugement par déclaration du 10 février 2020 énonçant les chefs du jugement expressément critiqués, intimant la société Point P-BMSO.

Par conclusions déposées en dernier lieu le 12 août 2022 par le RPVA auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. [V] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a :

- condamné à payer à la société Point P-BMSO la somme de 17 114,17 euros assortie des intérêts au taux contractuel à compter du 25 avril 2019 jusqu'à la date effective du paiement,

- condamné à payer à la société Point P-BMSO la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné aux dépens,

- statuant à nouveau,

- dire qu'il n'a pas souscrit d'acte d'aval à titre personnel concernant la lettre de change à échéance du 31 juillet 2018 d'un montant 8 557,04 euros,

- dire que la provision pour les deux lettres de change à échéance du 31 juillet et 31 août 2018 est inexistante faute de justification à hauteur du montant des traites,

- en conséquence,

- principalement,

- débouter la société Point P-BMSO de sa demande de condamnation au titre de deux lettres de change formulée à son encontre à hauteur de 17 114,15 euros assortie des intérêts au taux contractuel jusqu'à la date effective de paiement,

- condamner la société Point P-BMSO à lui rembourser la somme de 19 236,13 euros correspondant au montant saisi sur ses comptes en exécution du jugement rendu le 10 janvier 2020,

- subsidiairement,

- débouter la société Point P-BMSO de sa demande en paiement de la lettre de change à échéance du 31 juillet 2018 d'un montant 8 557,04 euros formulée à son encontre, n'ayant pas souscrit d'acte d'aval pour cette traite,

- condamner la société Point P-BMSO à lui rembourser la somme de 8 557,04 euros compte tenu de la saisie pratiquée sur ses comptes en exécution du jugement rendu le 10 janvier 2020,

- débouter la société Point P-BMSO de toutes ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la société Point P-BMSO à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Point P-BMSO aux entiers dépens de l'appel.

M. [V] fait valoir que dans le cadre de la lettre de change, la société Point P avait la qualité de tireur et la société Teneco celle de tiré, la banque étant le bénéficiaire ; qu'il en résulte qu'il était tiers à cette relation triangulaire ; qu'il peut opposer au tireur porteur l'absence de provision ; que l'intimée ne démontre pas l'existence d'une provision ; que la demande doit être rejetée ; qu'il y a lieu à titre subsidiaire de limiter sa condamnation à 8 577,11 euros en raison de l'ambiguité de la première lettre de change dont la rédaction, différente de celle de l'autre lettre, révèle une volonté divergente qui ne permet pas d'actionner sa garantie personnelle.

Par conclusions déposées en dernier lieu par le RPVA le 29 juillet 2020 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la société Point P-BMSO demande à la cour de :

- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement en toute ses dispositions,

- y ajoutant,

- condamner M. [V] à lui payer une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- le condamner aux entiers dépens.

La société Point P fait valoir que M. [V] s'est expressément engagé à garantir le paiement des achats de la société Teneco ; qu'il l'a fait à titre personnel, de manière parfaitement éclairée par des mentions manuscrites précisant qu'il s'engage à titre d'engagement cambiaire ; qu'il ne peut se déduire de la formule "bon pour accord" qu'il n'a pas voulu s'engager personnellement alors que l'article L.511-21 du code de commerce prévoit que l'aval est exprimé par les mots "bon pour aval" ou par toute autre formule équivalente ; que ces mentions sont portées au dos des lettres de change et se distinguent nettement de l'acceptation d'engagement de la société signé par lui en sa qualité de gérant au recto desdites lettres.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 23 août 2022 et l'audience fixée au 13 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

sur la demande principale :

La demande en paiement de la société Point P se fonde sur deux lettres de change respectivement de 8 557,04 euros et 8 557,11 euros, à échéance des 31 juillet et 31 août 2018, datées du 11 mai 2018 et signées par M. [V] pour le compte de la société Teneco.

M. [V] sollicite à titre principal le rejet des demandes au titre des deux lettres de change ; à titre subsidiaire, au rejet de la demande fondée sur l'une d'entre elles.

sur les demandes au titre des deux lettres de change :

L'appelant, au visa des article L.511-7 et L.511-21 du code de commerce, soutient que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, par une mauvaise interprétation des textes applicables, il n'a pas la qualité de tireur, mais de simple tiers à la relation triangulaire entre la société Point P, vendeur et donc tireur, la société Teneco Habitat, débitrice et donc tirée, et la banque CRCA, bénéficiaire.

Selon l'article L.511-7, " la provision doit être faite par le tireur (...). Il y a provision si, à l'échéance de la lettre de change, celui sur qui elle est fournie est redevable au tireur (...) d'une somme au moins égale au montant de la lettre de change. L'acceptation suppose la provision."

Il résulte des dispositions de l'article L.511-21 que le donneur d'aval, tenu de la même manière que celui dont il s'est porté garant, peut se voir opposer la présomption de provision qui s'attache à l'acceptation. Pour la combattre, il lui incombe comme au tiré accepteur d'établir le défaut de provision.

Il y a provision si, à l'échéance de la lettre de change, le tiré (ici la société Temeco) est redevable envers le tireur (ici la société Point P) d'une somme au moins égale au montant de la lettre de change. En l'absence de provision, le tiré non plus que le donneur d'aval ne sont tenus à l'égard du tireur/bénéficiaire.

En l'espèce, l'appelant fait valoir qu'il ressort des factures établies entre le 14 avril et le 21 août 2018 produits par la société Point P (sa pièce 1) que sa créance représentait un montant total de 2 003,71 euros loin des sommes réclamées, d'autant qu'elle produit aussi trois avoirs pour 1 712,24 euros qui viennent en déduction, soit un restant dû de 291,47 euros; que sa carence à rapporter la preuve d'une provision commande de rejeter intégralement sa demande.

La provision requise par les articles L.511-7 et L.511-21 ne s'entend pas cependant du montant des dépenses réalisées par le débiteur/tiré entre la date d'émission de la lettre de change et sa date d'échéance, mais du montant de la dette du tiré à la date d'échéance. L'intimée peut ainsi opposer utilement qu'il résulte des attestations de rejet des deux chèques garantis et de l'extrait du Grand Livre Client certifié par le contrôleur financier (ses pièces 9 et 10) que la société Teneco était redevable d'une somme de 8 577,04 euros au 31 juillet 2018, et d'une somme de 8 577,11 euros au 31 août 2018.

M. [V] étant en conséquence tenu à l'égard de la société Point P de la même manière que la société Teneco, les demandes en paiement de la société Point P seront déclarées bien fondées.

sur la demande fondée sur la seconde lettre de change :

L'appelant demande à titre subsidiaire que sa condamnation soit limitée au paiement de la lettre de change du 11 mai 2018 d'un montant de 8 557,11 euros à échéance au 31 août 2018 en faisant valoir qu'alors que la formule de l'aval doit exprimer sans ambiguité l'intention de se porter avaliste, la seconde lettre de change ne comporte pas de mention indiquant qu'il signe à la fois comme représentant de la société et pour lui même comme avaliseur ; qu'en outre il a porté sur cette lettre la mention "bon pour accord" et non "bon pour aval" ; que cette formulation différente sur deux actes signés le même jour atteste d'une volonté divergente ; que sa garantie personnelle ne peut donc pas être actionnée pour le paiement de la lettre de change du 11 mai 2018 de 8 557,04 euros à échéance du 31 juillet 2018.

Pour s'engager en qualité d'avaliste, une simple signature suffit. Il se déduit de la présence de deux signatures d'une même personne que celle-ci s'engage à la fois pour la société (débiteur/tiré) et personnellement en qualité de donneur d'aval.

En l'espèce, M. [V] a signé les deux lettres de change à la fois au recto, sous la mention "bon pour acceptation" sous le RIB de la société Teneco, et au verso, sous la formule "bon pour aval (accord) pour le tiré Teneco Habitat à hauteur de la somme de (...) à titre d'engagement cambiaire" (pièce 2 de l'intimée).

La présence de deux signatures, à des emplacements bien distincts, atteste de son double engagement, à la fois en qualité de représentant de la société Teneco et d'avaliste de celle-ci. C'est par ailleurs à bon droit que la société Point P fait valoir qu'il ne peut se déduire de la formule "bon pour accord" figurant sur l'une des lettres de change que M. [V] n'a pas voulu s'engager personnellement alors que l'article L.511-21 du code de commerce prévoit que l'aval est exprimé par les mots "bon pour aval" ou par toute autre formule équivalente, cependant que la précision selon laquelle il s'engage " à titre d'engagement cambiaire " permet de lever toute ambiguité.

Le moyen sera donc rejeté, et le jugement qui a condamné M. [V] au paiement de la somme de 17 114,17 euros sera confirmé.

sur les demandes accessoires :

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société Point P-BMSO SA les sommes, non comprises dans les dépens, exposées par elle dans le cadre de l'appel. L'appelant sera condamné à lui payer, en sus de l'indemnité mise à sa charge par le tribunal, la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelant sera par ailleurs condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 06 janvier 2020

Condamne M. [V] à payer à la société Point P-BMSO SA la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

Condamne M. [V] aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pignon, présidente, et par M.Goudot, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20/00739
Date de la décision : 25/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-25;20.00739 ?
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