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21/06/2022 | FRANCE | N°19/06182

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 4ème chambre commerciale, 21 juin 2022, 19/06182


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 21 JUIN 2022









N° RG 19/06182 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKPC







SAS FRANCE ROL





c/



Société UMUR BASIM SANAYI VE TICARET AS























Nature de la décision : AU FOND






















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Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 octobre 2019 (R.G. 2018F01088) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 25 novembre 2019





APPELANTE :



SAS FRANCE ROL, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 21 JUIN 2022

N° RG 19/06182 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKPC

SAS FRANCE ROL

c/

Société UMUR BASIM SANAYI VE TICARET AS

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 octobre 2019 (R.G. 2018F01088) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 25 novembre 2019

APPELANTE :

SAS FRANCE ROL, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]

représentée par Maître Christine COMBEAU de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Bernard QUESNEL, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Société UMUR BASIM SANAYI VE TICARET AS, société de droit turc, agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siége sis, [Adresse 2]

représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Bengu SULUSOGLU de la SELARL FOUCAUD TCHEKHOFF POCHET et Associés, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 10 mai 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Elisabeth FABRY, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie PIGNON, Présidente,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE :

La société France Rol a pour activité la fabrication et le négoce d'articles de papeterie. La société Umur Basim Sanayi Ve Ticaret AS (la société Umur Basim) a pour activité la fabrication et le façonnage de rouleaux de papier thermique.

A partir de février 2016, la société France Rol a acheté des rouleaux thermiques auprès de la société Umur Bassim.

La société France Rol, invoquant la non-conformité de certaines livraisons et soulevant plusieurs griefs notamment en matière de concurrence déloyale, a refusé de s'acquitter de certaines factures établies entre avril et novembre 2017 pour un montant total de 454 830 euros.

Par courrier recommandé du 1er mars 2018, la société Umur Basim a mis en demeure la société France Rol de lui régler le solde des factures impayées et lui avoir proposé de reprendre la marchandise défectueuse. Elle a ensuite saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Bordeaux qui, par ordonnance du 07 août 2018, s'est déclaré incompétent et a invité les parties à mieux se pourvoir au fond.

Par exploit d'huissier du 05 novembre 2018, la société Umur Basim a assigné la société France Rol en paiement devant le tribunal de commerce de Bordeaux.

Par jugement contradictoire du 24 octobre 2019, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- condamné la société France Rol à payer à la société Umur Basim la somme de 454 830,00 euros, outre intérêts égaux à trois fois le taux légal, à compter du 16 avril 2018,

- ordonné l'anatocisme,

- débouté la société Umur Basim de sa demande au titre de la résistance abusive,

- condamné la société Umur Basim à payer à la société France Rol la somme de 44 041,20 euros au titre des 17 factures injustement majorées,

- condamné la société Umur Basim à payer à la société France Rol la somme de 153 600,00 euros au titre de la violation de la clause de confidentialité,

- ordonné la compensation entre les sommes mutuellement dues par les parties,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties,

- ordonné l'exécution provisoire.

La société France Rol a relevé appel du jugement par déclaration du 25 novembre 2019 énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société Umur Basim, enregistrée sous le n° RG 19/06182.

La société Umur Basim a aussi relevé appel du jugement par déclaration du 27 décembre 2019 énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société France Rol, enregistrée sous le n° RG 19/06813.

Les deux dossiers ont été joints par mention au dossier sous le n° RG 19/06182.

Le 24 janvier 2020, une mesure de médiation judiciaire a été proposée aux parties, qui ne se sont pas accordées sur le principe d'une acceptation.

Par conclusions déposées en dernier lieu par le RPVA le 25 juin 2020 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la société France Rol demande à la cour de :

- la recevoir en son appel,

- l'y déclarer bien fondée,

- rejeter l'appel incident de la société Umur Basim,

- en conséquence,

- réformer la décision rendue par le tribunal de commerce de Bordeaux le 24 octobre 2019,

- condamner la société Umur Basim sur le fondement des articles 1604 et suivants du code civil à lui verser la somme de 396 768 euros HT,

- condamner la société Umur Basim à lui verser la somme de 63 098,84 euros HT au titre du défaut d'exécution de ses engagements,

- condamner la société Umur Basim à lui payer une juste indemnité de 307 200 euros HT au titre de la violation de la clause de confidentialité,

- condamner en outre la société Umur Basim à lui restituer les sommes exécutées au titre de la décision de première instance soit 279 546,31 euros,

- prononcer la compensation de ces sommes avec celles éventuellement dues par elle à la société Umur Basim et dire que la société Umur Basim devra lui verser la somme globale de 631 782,31 euros avec intérêts de droit à compter du 1er mars 2018,

- débouter la société Umur Basim de toutes ses demandes incidentes, fins et conclusions,

- condamner la société Umur Basim à payer une juste indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamner la société Umur Basim aux entiers dépens.

La société France Rol fait valoir que c'est elle qui est créancière de la Umur Basim compte tenu des sommes que celle-ci lui doit au titre des remises, des frais de port indus, de la surfacturation et des défauts des marchandises qu'elle a dû remplacer mais qu'elle n'a pas pu renvoyer en raison du coût de transport, avec des conséquences sur la clientèle dont elle justifie par des statistiques d'évolution qui confirment que ces clients ont réduit ou cessé toute commande ; que l'intimée a par ailleurs commis à son préjudice une violation d'une clause de confidentialité qui lui a fait perdre un client ancien ; que le préjudice s'établit classiquement à deux ans de perte de marge.

Par conclusions déposées en dernier lieu par le RPVA le 07 juillet 2021 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la société Umur Basim demandent à la cour de :

- rejeter l'appel de la société France Rol,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- condamné France Rol à lui payer la somme de 454 830 euros outre intérêts et ordonné l'anatocisme,

- rejeté les demandes reconventionnelles de France Rol relatives aux prétendus non conformités, aux frais de port et à la remise de fin d'année 2017,

- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il l'a :

- condamnée à payer à France Rol la somme de 44 041,20 euros au titre des ajustements de prix,

- condamnée à payer à France Rol la somme de 153 600 euros au titre de la violation de la clause de confidentialité,

- dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties,

- l'a déboutée du surplus de ses demandes, à savoir :

- condamner France Rol à lui payer les intérêts sur les condamnations prononcées à son encontre en sus de l'anatocisme, les intérêts au taux d'intérêt légal majoré de 10 points de pourcentage conformément à l'article L.441-6 du code de commerce, et ce dès le quatre-vingt dixième jour suivant la date des factures,

- constater que la résistance abusive de France Rol a entraîné pour elle un préjudice distinct de celui résultant du simple retard de paiement,

- condamner France Rol à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, pour résistance abusive,

- condamner France Rol à lui payer une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

- en conséquence, statuant à nouveau sur ces chefs de demande,

- sur ses demandes,

- condamner la société France Rol à lui payer les intérêts sur le montant de 454 830 euros de la condamnation en principal, au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage et ce à compter du trentième jour suivant la date de réception des marchandises et de prononcer la capitalisation de ses intérêts,

- constater que la résistance abusive de France Rol a entraîné pour elle un préjudice distinct de celui résultant du simple retard de paiement,

- condamner la société France Rol à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, pour résistance abusive,

- sur les demandes reconventionnelles de la société France Rol,

- à titre principal,

- juger irrecevable la demande reconventionnelle de France Rol relative à la prétendue violation de la clause de confidentialité,

- à titre subsidiaire,

- constater que la société France Rol n'apporte pas la preuve de violation de la clause de confidentialité par elle,

- rejeter la demande reconventionnelle de France Rol relative à la prétendue violation de la clause de confidentialité,

- en tout état de cause,

- débouter la société France Rol de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

- condamner la société France Rol à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société France Rol aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Annie Taillard avocats, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La société Umur Basim fait valoir que c'est seulement le 16 janvier 2018 que pour la première fois la société France Rol a fait état de non conformités pour des factures d'avril à novembre 2017 ; qu'elle a refusé la reprise et la remise proposée et conservé les marchandises au motif que les frais étaient trop élevés alors qu'elle avait proposé de les prendre en charge ; qu'il n'y a pas de lien de causalité entre la perte de clients et les non conformités ; que les frais de port étaient inclus ; que la remise de fin d'année n'était due qu'à partir d'une valeur qui n'a pas été atteinte ; que la modification des prix était justifiée par les circonstances du marché ; qu'elle en a été avisé la société France Rol qui ne les a pas contestées au début mais les a au contraire acceptées par mail du 28 novembre 2017 et n'a pas annulé les commandes postérieures alors qu'elle aurait pu s'approvisionner ailleurs ; sur le litige Ticket KDo, que la demande est sans lien avec son action principale ; que l'accord de confidentialité n'a même pas été conclu entre les parties au litige puisque ce n'est pas elle qui l'a signé mais la société Label Media B.V ; qu'elle conteste le grief ; que la société France Rol ne prouve ni le préjudice ni le lien de causalité ; que le jugement doit être réformé sur le taux d'intérêts appliqué à sa créance ; que la société France Rol lui a causé un préjudice du fait de sa résistance abusive.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 19 avril 2022 et l'audience fixée au 10 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

sur la demande principale en paiement de la société Umur Basim :

La société Umur Basim produit aux débats des factures impayées pour un montant de 454 830 euros qui n'est pas contesté par la société France Rol, ce qui commande de confirmer le jugement qui a condamné cette dernière au paiement de cette somme.

Le jugement sera cependant infirmé en ce qu'il a assorti cette condamnation d'intérêts égaux à trois fois le taux légal alors que comme le soutient justement la société Umur Basim, en application des dispositions de l'article L.441-6 du code de commerce, le taux d'intérêt applicable est, sauf disposition contraire, celui "appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage" et ce à compter du trentième jour suivant la date de réception des marchandises.

sur les demandes de la société France Rol :

La société France Rol oppose la compensation entre cette somme, dont elle se reconnaît redevable, et celles dont elle soutient être créancière en invoquant diverses non-conformités sur :

- les remises de fin d'année ;

- la facturation des frais de port indus

- l'ajustement de prix de 7 factures

- des livraisons non conformes.

sur les remises de fin d'année :

La société France Rol fait valoir que les remises de fin d'année convenues à hauteur de 0,5 % du chiffre d'affaires n'ont pas été versées pour l'année 2017, de sorte que la société Umur Basim lui doit la somme de 9 501,24 euros HT pour un chiffre d'affaires de 1 900 248,50 euros.

La société Umur Basim oppose cependant à bon droit que selon l'accord de remise (sa pièce 37), cette remise est prévue à condition que la valeur totale des rouleaux commandés atteigne un montant qui n'a pas été atteint en 2017, de sorte qu'elle n'est pas due.

Le jugement qui a débouté la société France Rol de cette demande doit être confirmé.

sur la facturation des frais de port :

La société France Rol soutient par ailleurs que la société Umur Basim lui a indûment facturé des frais de port à hauteur de 9 556,68 euros.

Cependant, comme l'oppose la société Umur Basim, et comme l'a relevé le tribunal, ces frais de port étaient inclus dans le prix unitaire figurant sur les commandes, les factures contestées étant d'ailleurs en tous points identiques aux montants portés par la société France Rol elle même sur ses bons de commandes (pièces 29 à 32 de la société UB) de sorte qu'aucune facturation indue n'est établie. Le jugement sera confirmé, et la demande rejetée.

sur les ajustements de prix :

La société France Rol fait valoir ensuite que la société Umur Basim a modifié unilatéralement sept factures, pour un montant de 44 041,02 euros ne correspondant pas aux confirmations de commandes (pièce FR NC 2-3).

Ce point n'est pas contesté par la société Umur Basim qui explique que la modification était justifiée par les circonstances du marché et notamment la pénurie des fournisseurs, ce dont elle a informé la société France Rol par un courriel du 13 juillet 2017 (sa pièce 33) ; que la société France Rol les a acceptées par mail 28 novembre 2017 (pièce 23) ; qu'elle n'a pas annulé les commandes postérieures alors qu'elle pouvait s'approvisionner ailleurs.

C'est cependant à bon droit que le tribunal a relevé qu'aucune clause contractuelle ni avenant ne prévoyait la possibilité pour la société Umur Basim de réviser unilatéralement le prix entre la confirmation de la commande et la facture dénitive, sans qu'il puisse être fait grief à la société France Rol d'avoir maintenu ses commandes compte tenu des relations qui les unissaient alors, dans un contexte de négociations en vue de cession.

Le jugement qui a condamné la société Umur Basim au paiement d'une somme de 44 041,02 euros à ce titre sera confirmé.

sur les livraisons non conformes :

La société France Rol se prétend enfin créancière d'une somme de 396 768 euros correspondant aux marchandises non conformes qui ont été refusées par ses clients et qu'elle a dû remplacer.

Elle produit pour en justifier des pièces (fiches de non conformité, tableaux etc - ses pièces NC à NC 2-5-7) volumineuses mais difficilement exploitables ainsi que le relève à juste titre la société Umur Basim qui, reprenant point par point chaque commande en cause, fait valoir que les demandes, dont les montants ont évolué en cours de procédure, présentent pour certaines des incohérences, cependant que ces documents, de la main de la société France Rol, comme les statistiques d'évolution qu'elle verse, ne permettent pas de rapporter la preuve des griefs allégués ni du lien de causalité entre les défauts allégués et la perte de ces clients.

La société Umur Basim peut aussi opposer justement qu'elle a proposé de reprendre ces marchandises en en assumant les frais, de sorte que la société France Rol ne peut utilement invoquer le coût élevé de ces renvois pour justifier son refus de les retourner.

Les pièces produites ne permettant de rapporter la preuve ni des non conformités alléguées, ni surtout de leur impact sur les relations commerciales de la société France Rol avec ses clients, c'est donc à bon droit que le tribunal a débouté la société France Rol de sa demande. Le jugement sera confirmé.

sur la demande reconventionnelle de la société France Rol :

La société France Rol réclame enfin une somme de 307 200 euros en indemnisation du préjudice subi du fait de la violation par la société Umur Basim d'une clause de confidentialité (ses pièces A4 et A5 - TK).

La société Umur Basim oppose à titre principal l'irrecevabilité de cette demande, en faisant valoir qu'elle ne se rattache pas à la demande principale par un lien suffisant ainsi que l'exige l'article 70 du code de procédure.

Ce moyen a été rejeté par le tribunal qui a considéré à bon droit qu'elle était en rapport avec la relation commerciale et fondait la demande de compensation. Le jugement mérite confirmation sur ce point.

Sur le fond, la société France Rol expose que dans le cadre de la négociation en cours, portant sur la cession des actifs (en 2014 puis en 2017), elle a divulgué des informations confidentielles notamment sur ses comptes clients et versé certains documents dans un Dataroom avec clause de confidentialité (lettre d'intention 03 mai 2017 art 8) ; que la société Umur Basim en a profité pour contacter directement la société Sheshy Media (nom commercial Ticket Kdo) pour lui proposer en direct un meilleur prix ; que cet acte de concurrence déloyale lui a fait perdre un client important ; que son préjudice doit être évalué à deux années de marge brute soit 307 200 euros.

Le tribunal a considéré qu'il ressortait des échanges (notamment un message du gérant de Ticket du 14 décembre 2017) qu'une offre plus avantageuse avait été émise par la société Umur Basim directement ou indirectement, que la clause avait été violée, et a alloué à la société France Rol une somme de 153 600 euros correspondant, selon des chiffres non contestés, à un an de marge brute.

Pour que la violation soit caractérisée, il appartient à la société France Rol de rapporter la preuve que la société Umur Basim a utilisé une information recueillie à titre confidentiel dans le cadre des négociations pour détourner un de ses clients.

Or, comme le relève d'abord la société Umur Basim, la demande se fonde sur un acte comportant un accord de confidentialité dont elle n'est pas la signataire(sa pièce 21). L'accord en question a en effet été régularisé entre la société Barled Finances, M. [Y], et la société Label Media BV dont les liens exacts avec la société Umur Basim ne sont pas précisés.

La société Umur Basi, qui explique qu'elle travaille avec plusieurs intermédiaires qui ont la liberté de contracter avec les entreprises de leur choix sans obligation de l'informer, et que la commande litigieuse ne pouvait provenir que d'un de ses revendeurs puisqu'elle n'a jamais été en relation directe avec cette société Ticket Kdo, est par ailleurs fondée à faire valoir que les pièces et échanges sur lesquels le tribunal s'est fondé ne permettent pas de déterminer l'origine exacte des produits, et ne prouvent ni un contact direct entre la société Umur Basim et la société Ticket Kdo ni l'utilisation par la société Umur Basim d'informations provenant du Dataroom pour détourner un client de France Rol (pièces FR TK 2 5 6 - 36). En conséquence, la preuve d'une faute de la société Umur Basim n'étant pas rapportée, la demande indemnitaire ne saurait prospérer, cependant que la société Umur Basim relève à juste titre, surabondamment, que la société France Rol, qui se fonde sur un chiffre d'affaires non certifié par son commissaire aux comptes, ne prouve ni la perte du client ni le montant de son préjudice.

Le jugement qui a fait droit, pour partie, à la demande de la société France Rol, sera donc infirmé, et la demande rejetée.

sur les autres demandes :

La société Umur Basim réitère sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de la société France Rol en faisant valoir qu'elle a multiplié les contestations artificielles pour tenter d'échapper à ses obligations.

Les pièces versées aux débats ne permettent pas cependant de caractériser la mauvaise foi de la société France Rol, et son échec à rapporter la preuve de ses allégations ne suffit pas à qualifier sa résistance d'abusive, cependant que compte tenu du taux d'intérêts pratiqué, la société Umur Basim ne rapporte pas la preuve d'un préjudice distinct du retard de paiement.

Le jugement qui a débouté la société Umur Basim de cette demande sera confirmé.

sur les demandes accessoires :

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société Umur Basim les sommes exposées par elle dans le cadre de l'instance et non comprises dans les dépens. La société France Rol sera condamnée à lui verser la somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société France Rol sera en outre condamnée aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 24 octobre 2019 en ce qu'il a :

- condamné la société France Rol à payer à la société Umur Basim la somme de 454 830,00 euros, outre intérêts égaux à trois fois le taux légal, à compter du 16 avril 2018,

- condamné la société Umur Basim à payer à la société France Rol la somme de 153 600,00 euros au titre de la violation de la clause de confidentialité,

Statuant à nouveau sur ces points,

Condamne la société France Rol à payer à la société Umur Basim la somme de 454 830,00 euros, majorée des intérêts au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage et ce à compter du trentième jour suivant la date de réception des marchandises

Déboute la société France Rol de sa demande de condamnation de la société Umur Basim au paiement de la somme de 307 200,00 euros au titre de la violation de la clause de confidentialité

Confirme le jugement pour le surplus

Condamne la société France Rol à payer à la société Umur Basim la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société France Rol aux entiers dépens de la procédure d'appel

Le présent arrêt a été signé par Mme Pignon, présidents, et par Monsieur Goudot, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19/06182
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;19.06182 ?
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