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20/06/2022 | FRANCE | N°19/05990

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 4ème chambre commerciale, 20 juin 2022, 19/05990


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 20 JUIN 2022









N° RG 19/05990 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LJ6U







SA CM-CIC BAIL





c/



Monsieur [U] [H]























Nature de la décision : AU FOND

























Grosse délivrÃ

©e le :



aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 octobre 2019 (R.G. 2018F01181) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 14 novembre 2019





APPELANTE :



SA CM-CIC BAIL, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège sis, [...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 20 JUIN 2022

N° RG 19/05990 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LJ6U

SA CM-CIC BAIL

c/

Monsieur [U] [H]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 octobre 2019 (R.G. 2018F01181) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 14 novembre 2019

APPELANTE :

SA CM-CIC BAIL, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]

représentée par Maître Carolina CUTURI-ORTEGA de la SCP JOLY - CUTURI ' WOJAS AVOCATS DYNAMIS EUROPE (ADE), avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur [U] [H], né le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 4], de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Patrick TRASSARD de la SELARL TRASSARD & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 mai 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie PIGNON, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie PIGNON, Présidente,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat du 19 mai 2011, la société CM-CIC BAIL a consenti à la société Alu bois menuiserie un crédit-bail destiné au financement d'une table de montage pour un montant de 39 468 euros.

M. [U] [H], gérant de la société Alu bois menuiserie, s'est porté caution solidaire de cet engagement à hauteur de la somme de 47 361,60 euros dans la limite de 84 mois.

Par jugement du 14 novembre 2012, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Alu bois menuiserie, mesure convertie en liquidation judiciaire par jugement du 9 janvier 2013.

La société CM-CIC BAIL a déclaré sa créance auprès du mandataire liquidateur pour un montant de 1.003,07 euros à titre des loyers impayés pendant la période d'observation du redressement judiciaire et la somme de 30 187,60 euros à titre des loyers restant à échoir, outre la clause pénale et la valeur résiduelle.

Le 22 février 2013, après requête de la société CM-CIC BAIL, le mandataire liquidateur a procédé à une restitution de l'équipement.

Suite à la vente de l'équipement, la société CM-CIC BAIL a actualisé sa créance à hauteur de la somme de 1 003,07 à titre des loyers impayés et 25 187,60 euros à titre des loyers restant à échoir.

Par courrier recommandé du 16 mai 2014, la société CM-CIC BAIL a informé M. [H], en sa qualité de caution, de l'actualisation de sa créance et l'a mis en demeure de lui régler la somme de 26 190,76 euros.

Par jugement du 13 février 2018, le tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire de la société Alu bois menuiserie pour insuffisance d'actif.

Par acte du 2 novembre 2018, la société CM-CIC BAILa assigné M. [H] devant le tribunal de commerce de Bordeaux, lequel, par jugement contradictoire du 25 octobre 2019, a :

- débouté la société CM-CIC BAIL de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société CM-CIC BAIL à régler à M. [U] [H] la somme de 1.500 euros sur le fondement de I'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société CM-CIC BAIL aux dépens.

Par déclaration du 14 novembre 2019, la société CM-CIC BAIL a interjeté appel de cette décision à l'encontre de l'ensemble des chefs qu'elle a expressément énumérés, intimant M. [H].

Prétentions des parties

Par dernières conclusions transmises par RPVA le 4 mai 2020, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la société CM-CIC BAIL demande à la cour de:

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en date du 25 octobre 2019 en toutes ses dispositions,

- et, statuant à nouveau :

- déclarer M. [H] irrecevable en ses demandes tendant à dire et juger que l'indemnité de résiliation contractuelle serait manifestement excessive et à la ramener à zéro euro,

- débouter M. [H] de l'intégralité de ses demandes,

- la déclarer recevable en son action en paiement à l'égard de Monsieur [H],

- condamner M. [H] à lui payer la somme de 26 190,76 euros, outre l'application du taux d'intérêt légal à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner M. [H] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société CM-CIC BAILfait notamment valoir que le point de départ de la prescription d'une action dirigée contre la caution suppose que son obligation de règlement soit exigible ; que la déclaration de créance interrompt la prescription, y compris à l'égard de la caution, notamment solidaire, de sorte que son action en paiement n'est pas prescrite.

Par dernières conclusions transmises par RPVA le 30 mars 2020, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, M. [H] demande à la cour de:

- le déclarer recevable et bien-fondé en ses demandes,

- en conséquence,

- à titre principal,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en date du 25 octobre 2019 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de CM-CIC BAIL à son encontre,

- à titre subsidiaire,

- constater que l'indemnité de résiliation contractuelle de 26 190,76 euros est une clause pénale au sens des articles 1231-5 du code civil,

- dire et juger que cette clause pénale est manifestement excessive et en conséquence, la ramener à zéro euro,

- à titre infiniment subsidiaire,

- lui accorder un report de deux années, et ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées portent intérêt à un taux réduit, et s'imputent d'abord sur le capital,

- à défaut,

- lui accorder des délais de paiement,

- dire et juger que le paiement de toute somme due à CM-CIC BAIL sera échelonné sur deux années, et ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées portent intérêt à un taux réduit, et s'imputent d'abord sur le capital,

- en tout état de cause,

- débouter la société CM-CIC BAIL de toute demande contraire,

- condamner la société CM-CIC BAIL à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [H] fait notamment valoir qu'en matière de crédit-bail consenti à une société commerciale, l'obligation est exigible à l'encontre de la caution à compter de la liquidation judiciaire entrainant la résiliation du contrat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 avril 2022 et le dossier a été fixée à l'audience du 16 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription

L'action en paiement porte sur un contrat de crédit bail par nature professionnel souscrit par la société Alu bois menuiserie pour les besoins de son activité commerciale auprès d'une société commerciale et le cautionnement consenti par M. [H] l'a été dans le cadre de son activité professionnelle de gérant. Il en résulte que la prescription en l'espèce est la prescription quinquennale des articles L.110-4 du code de commerce et 2224 du code civil.

En vertu du caractère accessoire du cautionnement, l'exigibilité de la dette principale en vertu dudit contrat entraîne l'exigibilité du cautionnement.

En matière de crédit-bail consenti à une Société commerciale, l'obligation est exigible à l'encontre de la caution à compter de la liquidation judiciaire entrainant la résiliation du contrat selon les modalités définies au contrat.

En l'espèce, l'article 6 des conditions générales du contrat prévoit : 'La location sera résiliée et la notification en sera faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans qu'il soit besoin d'une quelconque mise en demeure dans les cas suivants : ...

- liquidation judiciaire'.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 mai 2014, la Société CM-CIC BAIL a déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la Société Alu Bois Menuiserie au titre de la résiliation du contrat avec effet au 09 janvier 2013, rendant exigibles les sommes dues, pour un montant de 30.187,60 euros.

Conformément à la jurisprudence antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014, applicable en l'espèce, et ainsi que le prévoit désormais l'article L.622-25-1 du code de commerce , la déclaration de créance interrompt la prescription jusqu'à la clôture de la procédure, un nouveau délai recommençant à courir à cette date.

En l'espèce, la déclaration de créance, moins de cinq années après l'engagement de caution a interrompu la prescription à l'égard de la caution jusqu'à la clôture de la procédure, intervenue en l'occurrence par le jugement du13 février 2018, ayant prononcé la clôture de la procédure de liquidation judiciaire, qui a mis fin à l'instance. L'acte introductif d'instance à l'encontre de M. [H] en qualité de caution solidaire a été délivré le 2 novembre 2018, soit dans le délai quinquennal.

L'action est en conséquence recevable, et le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a constaté la prescription de l'action de la société CM-CIC BAIL.

Sur le montant de l'indemnité de résiliation

Ainsi que le soulève à juste titre la société appelante, l'autorité de chose jugée attachée à la décision d'admission de la cérance au passif du débiteur principal est opposable à la caution solidaire en ce qui concerne l'existence, le montant et la nature de la créance.

En cas d'admission de la créance, la caution appelée en paiement ne peut donc contester le montant des sommes réclamées.

La créance de la société appelante ayant été admise pour la somme de 25.187,60 euros, et aucune contestation n'ayant été soulevée par M. [H], il convient de constater que l'autorité de chose jugée attachée à l'admission de la créance de la société CM-CIC BAIL rend irrecevable la contestation de la caution quant au quantum revendiqué.

La somme est justifiée pour 26 190,76 euros, outre l'application du taux d'intérêt légal à compter de la signification du présent arrêt.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du Code civil.

- Sur le report et les délais de paiement :

Aux termes de l'article l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, compte tenu de la situation dudébiteur et en considération des besoins du créancier.

Pour remplir les conditions de ce texte, le débiteur de l'obligation doit établir à la fois sa situation personnelle objective qui l'empécherait de satisfaire à ses obligations, et son comportement pour parvenir à y satisfaire.

En l'espèce, M. [H] justifie qu'il se trouve dans une situation précaire, désormais bénéficiaire seulement d'un revenu mensuel de 1.593 euros et supporter des charges fixes de plus de 1.600 euros par mois, ce qui justifie que lui soit accordés des délais de paiement d'une duréede deux années, le débiteur devant s'acquitter de sa dette dur deux ans, par 23 versements mensuels de 300 euros, le dernier du solde.

En cas de non paiement d'une seul échéance à son terme, l'intégralité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible.

Au regard du délai déjà écoulé depuis l'exigibilité de la créance, la demande de report doit en revanche être rejetée.

Compte tenu de la décision intervenue, les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de M. [H].

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société CM-CIC BAIL les frais irrépétibles qu'elle a exposés, et il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déclare recevable l'action de la société CM-CIC BAIL ;

Déclare irrecevable la demande de M. [U] [H] tendant à voir réduire le quantum de la demande de la société CM-CIC BAIL ;

Condamne M. [U] [H] à payer à la société CM-CIVC BAIL la somme de 26 190,76 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du Code civil ;

Autorise M. [H] à se libérer de sa dette sur deux ans à raison de versements de 23 versements mensuels de 300 euros, le dernier du solde comprenant le solde des intéréts et frais d'exécution , avant le 10 de chaque mois, le premier versement devant intervenir avant le
10 du mois qui suivra la signification du présent arrêt ;

Dit qu'en cas de non respect d'une seule échéance, l'intégralité de la somme due sera
immédiatement exigible ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne M. [H] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pignon, présidente, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19/05990
Date de la décision : 20/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-20;19.05990 ?
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