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26/05/2016 | FRANCE | N°14/01524

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Premiere chambre sectiona, 26 mai 2016, 14/01524


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



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ARRÊT DU : 26 MAI 2016



(Rédacteur : Françoise ROQUES, conseiller,)





N° de rôle : 14/01524







[N] [R] épouse [W]



c/



[Z] [J] épouse [C]

[X] [C]



























Nature de la décision : AU FOND













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Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 janvier 2014 par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME (chambre : 1, RG : 12/02150) suivant déclaration d'appel du 14 mars 2014





APPELANTE :



[N] [R] épouse [W]

née le [Date naissance 4] 1957 à [Localité 6] (R...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 26 MAI 2016

(Rédacteur : Françoise ROQUES, conseiller,)

N° de rôle : 14/01524

[N] [R] épouse [W]

c/

[Z] [J] épouse [C]

[X] [C]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 janvier 2014 par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME (chambre : 1, RG : 12/02150) suivant déclaration d'appel du 14 mars 2014

APPELANTE :

[N] [R] épouse [W]

née le [Date naissance 4] 1957 à [Localité 6] (ROUMANIE)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 7]

représentée par Maître Karim KANANE, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de la SCP ROUET- HEMERY & ROBIN, avocat plaidant au barreau de CHATEAUROUX

INTIMÉ S :

[Z] [J] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 6] (ROUMANIE)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3]

[X] [C]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 5] (16)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3]

représentés par Maître Jean-françois CHANGEUR de la SCP CALMELS/MOTARD/CHANGEUR/POUZIEUX, avocat au barreau d'ANGOULEME

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 février 2016 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Françoise ROQUES, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Catherine FOURNIEL, président,

Jean-Pierre FRANCO, conseiller,

Françoise ROQUES, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

À la suite du décès de son époux survenu en 2005, Mme [N] [R] a résidé pendant plusieurs mois au domicile des époux [X] [C].

Mme [N] [R] a consenti en décembre 2005 une procuration sur l'ensemble de ses comptes bancaires au profit de [Z] [J] épouse [C].

Considérant que de nombreux retraits injustifiés avaient été effectués sur ses comptes entre le 1er octobre 2005 et le 1er décembre 2006, [N] [R] a déposé plainte le 1er juillet 2008 à l'encontre des époux [C].

Aux termes de l'enquête, les époux [C] ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel d'Angoulême du chef d'abus frauduleux de l'état d'ignorance de la situation de faiblesse d'autrui.

Selon jugement en date du 15 juin 2010, le tribunal correctionnel a renvoyé les époux [C] des fins de la poursuite et a en conséquence rejeté les demandes formées par [N] [R] au titre de son action civile.

Par assignation en date du 24 octobre 2012, [N] [R] a fait assigner les époux [C] devant le tribunal de grande instance d'Angoulême aux fins de les voir condamnés à lui rembourser les sommes qu'ils auraient indûment prélevées sur ses comptes bancaires, ce au visa des dispositions des articles 1992 et 1993 du code civil.

Selon jugement en date du 23 janvier 2014, le tribunal de grande instance d'Angoulême a déclaré [N] [R] irrecevable en ses demandes, a dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné [N] [R] aux entiers dépens de l'instance.

Madame [N] [R] a relevé appel du jugement le 14 mars 2014 .

Selon dernières conclusions en date du 12 juin 2014, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de :

- déclarer recevable son action sur le fondement des articles 1992 et 1993 du Code civil,

- dire que les époux [C] ont fait montre d'une gestion fautive des comptes sur lesquels elle leur avait donné une procuration,

- condamner en conséquence les époux [C] à lui restituer la somme de 65 199,19 € somme à parfaire avec les fruits et revenus produits par cette somme ou à titre de dommages et intérêts, avec application du taux d'intérêt légal à compter de l'année 2006,

- les condamner chacun au paiement de la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Alexandre Chrétien.

Selon dernières conclusions en date du 28 janvier 2016, les époux [C] demandent à la cour de :

- confirmer du jugement entrepris,

- débouter [N] [R] de ses demandes,

- la condamner à leur verser la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est référé aux dernières écritures susvisées.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 février 2016

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'action de Mme [N] [R] :

[N] [R] soutient qu'elle est recevable à rechercher la responsabilité contractuelle des époux [C] en ce que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement.

Elle fait valoir que sa demande devant le juge pénal était autre en ce qu'elle était fondée sur la responsabilité délictuelle des époux [C].

Le premier juge a dit qu'il incombait à la demanderesse de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'elle estimait de nature à fonder celle-ci et que le principe de la concentration des moyens avait également vocation à s'appliquer entre juridictions répressives et juridiction civile.

Il a considéré que la partie civile qui avait fait le choix de porter son action civile devant la juridiction répressive sur le fondement de la responsabilité délictuelle ne pouvait plus agir, postérieurement à la décision de relaxe du juge pénal devant les juridictions civiles, en invoquant comme fondement juridique la responsabilité contractuelle des prévenus renvoyés des fins de la poursuite.

Le premier juge a conclu qu'il résultait de l'ensemble de ces éléments que le jugement de relaxe prononcée par le tribunal correctionnel d'Angoulême le 15 juin 2010 et l'autorité de la chose jugée qui y était attachée faisaient obstacle à l'introduction d'une nouvelle action devant la juridiction civile.

L'article 470-1 du code de procédure pénale ne donne compétence à la juridiction pénale pour statuer sur la demande de la partie civile en réparation de tous les dommages résultant des faits ayant fondés la poursuite que lorsqu'elle est saisie de poursuites exercées pour des infractions non intentionnelles dont elle prononce la relaxe.

En l'espèce les prévenus ont été relaxés d'une infraction volontaire.

Par conséquent le premier juge ne peut pas opposer l'obligation de concentration des moyens à la nouvelle demande en réparation formée par [N] [R] qui a fait le choix de saisir la juridiction civile sur le fondement des règles du mandat. Le juge pénal n'a pas le pouvoir de connaître d'une telle demande, mais seulement d'une action en responsabilité délictuelle.

En ce qui concerne l'autorité de la chose jugée proprement dite, la décision de relaxe du chef d'abus frauduleux de l'ignorance ou de la faiblesse d'une personne

vulnérable ne fait pas obstacle à une action en reddition de compte exercée par la mandant contre son mandataire.

Il s'ensuit que la décision du premier juge sera infirmée et il y a lieu de déclarer recevable l'action intentée par [N] [R] à l'égard des époux [C] sur la responsabilité contractuelle jusque-là exclue des débats devant la juridiction pénale.

Sur la responsabilité contractuelle des époux [C] :

L'enquête a mis en évidence que l'intéressée, récemment arrivée sur le territoire français, ne maîtrisait pas correctement la langue française.

C'est ainsi qu'[N] [R] a donné procuration sur ses comptes bancaires à sa compatriote roumaine [Z] [J] épouse [C] chez qui elle a résidé peu après le décès de son époux.

Il n'est pas allégué qu' elle a donné mandat à [X] [C] et il n'est invoqué à l'égard de ce dernier aucune défaillance susceptible d'engager sa responsabilité contractuelle. Il s'ensuit que la réclamation financière formée à son encontre sera rejetée.

L'article 1993 du code civil prévoit que le mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration. Il répond au regard de son mandat de l'inexécution de l'obligation qu'il a contractée et du préjudice qui en est résulté pour le mandant.

Les services enquêteurs ont mis en évidence des retraits et paiements suspects au cours de la période du 16 février 2006 au 23 octobre 2006.

Le préjudice démontré sera fixé à la somme de 31 000 € correspondant aux 6 retraits d'espèces et au bordereau de 22 000 € en date du 30 mars 2006 effectués avec la signature de [Z] [C] dès lors que cette dernière n'établit pas qu'elle a agi sur instruction et dans l'intérêt de sa mandante.

Il s'ensuit que [Z] [C] sera condamnée à payer à [N] [R] la somme de 31 000 € avec intérêts au taux légal à compter de la première mise en demeure correspondant à l'assignation devant le premier juge en date du 24 octobre 2012.

[Z] [C] qui succombe au principal supportera la charge des dépens d'appel et de première instance.

Il serait inéquitable qu'[N] [R] conserve à sa charge la totalité des frais irrépétibles exposés par elle à l'occasion de cette procédure. Il convient de lui allouer la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Infirme le jugement rendu le 23 janvier 2014 par le tribunal de grande instance d'Angoulême ;

Statuant à nouveau :

Déclare recevable la demande indemnitaire formée par [N] [R]

Condamne [Z] [J] épouse [C] à payer à [N] [R] :

1°) la somme de 31 000 € à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2012,

2°) la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute [N] [R] du surplus de ses demandes, en particulier celles formées à l'encontre de [X] [C];

Condamne [Z] [J] épouse [C] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés directement par Maître Kanane.

Le présent arrêt a été signé par Madame Catherine FOURNIEL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Premiere chambre sectiona
Numéro d'arrêt : 14/01524
Date de la décision : 26/05/2016

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 1A, arrêt n°14/01524 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-26;14.01524 ?
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