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24/06/2015 | FRANCE | N°13/00029

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 24 juin 2015, 13/00029


COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 24 juin 2015

(Rédacteur : Madame Henriette FILHOUSE, Président,)

No de rôle : 13/ 6634



Monsieur Loris X...


c/

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME



Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 octobre 2013 par la Commission d'Indemnisation de Victimes du tribunal de grande instance de BORDEAUX (RG

13/ 00029) suivant déclaration d'appel du 14 novembre 2013,



APPELANT :

Monsieur Loris X..., né le 11 Octobre 1994 à BORDEAUX (33), de nationa...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 24 juin 2015

(Rédacteur : Madame Henriette FILHOUSE, Président,)

No de rôle : 13/ 6634

Monsieur Loris X...

c/

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 octobre 2013 par la Commission d'Indemnisation de Victimes du tribunal de grande instance de BORDEAUX (RG 13/ 00029) suivant déclaration d'appel du 14 novembre 2013,

APPELANT :

Monsieur Loris X..., né le 11 Octobre 1994 à BORDEAUX (33), de nationalité Française, demeurant ...-33160 SAINT MEDARD EN JALLES,

représenté par Maître BOUARD substituant Maître Henri BOERNER de la SCP H. BOERNER J. D. BOERNER, avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉ :

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME, pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 64, rue DEFRANCE-94682 VINCENNES CEDEX,

représenté par Maître Jean-Baptiste LANOT substituant Maître Thierry MIRIEU-DE-LABARRE, avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 mai 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Henriette FILHOUSE, Président,
Monsieur Bernard ORS, Conseiller,
Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,
qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Gwenaël TRIDON DE REY,
Greffier lors du délibéré : Madame Sylvie HAYET

Vu le visa du Ministère Public le 27 avril 2015 qui s'en rapporte

ARRÊT :

- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Monsieur Z...a été reconnu coupable par jugement du tribunal correctionnel de Bordeaux en date du 25 février 2011 de violences volontaires sur la personne de monsieur X...le 18 décembre 2010 à Mérignac.
Ce même jugement a reçu la constitution de partie civile, déclaré monsieur Z...entièrement responsable du préjudice, ordonné une expertise médicale et fixé à 1. 200 ¿ la provision à valoir sur le préjudice.
Le 4 juillet 2012, une nouvelle expertise a été ordonnée ainsi qu'une nouvelle provision fixée puis après dépôt du rapport d'expertise, le tribunal correctionnel a liquidé le préjudice.
L'expert, le docteur A...avait conclu comme suit :
- Déficit fonctionnel temporaire total de 4 jours
-Déficit fonctionnel partiel de 50 % de 58 jours
-Déficit fonctionnel partiel de 10 % de 201 jours
-Déficit fonctionnel permanent de 3 % (consolidé à 17 ans)
- Souffrances endurées de 2, 5/ 7
- Préjudice esthétique permanent de 2/ 7

Par requête du 20 janvier 2013, monsieur X...a saisi la CIVI
Le fonds de garantie a opposé la faute exclusive de droit à indemnisation.
Par décision du 16 octobre 2013, la CIVI a débouté monsieur X...de ses demandes,
- rappelant que les décisions pénales n'ont d'autorité sur le civil qu'en ce qui concerne l'existence du fait et la culpabilité mais pas sur la responsabilité et le montant de l'indemnité
-retenant qu'il ne s'était pas soustrait à la première bagarre, qu'après cette première bagarre, c'est lui qui est parti à la recherche de monsieur Z...qui se trouvait chez son père et qu'il l'a incité à venir se battre, qui a brisé le pare brise de la voiture de l'amie de monsieur Z...et a giflé cette amie provoquant la réaction de monsieur Z...

Monsieur X...a relevé appel de cette décision.
Le parquet général par avis inscrit sur dossier s'en est remis à justice, ce dont il a été donné connaissance oralement aux parties.
L'ordonnance de clôture a été rendue le29 avril 2015.

En ses dernières écritures du 3 février 2014, auxquelles il sera renvoyé pour complet exposé des motifs, monsieur X...a conclu à l'infirmation de la décision déférée et
-Au dire qu'il n'a pas commis de faute exclusive de la garantie du fonds de garantie
-A l'allocation d'une indemnité de 8. 721, 30 ¿ après déduction de la provision soit
déficit fonctionnel temporaire ¿ ¿ ¿. 1221, 30 ¿
déficit fonctionnel permanent ¿ ¿ ¿ 4. 200 ¿
souffrances endurées ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿.. 3. 000 ¿
préjudice esthétique permanent ¿ ¿.. 3. 000 ¿
article 700 ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿ ¿. 2. 000 ¿
Il invoque
-que le coup reçu sur le nez a été porté lors de la première altercation et que le raisonnement de la CIVI ne peut pas s'appliquer aux séquelles de ce coup,
- que le tribunal correctionnel n'a opéré aucun partage de responsabilité
-que devant la CIVI le parquet avait estimé sa part de responsabilité à hauteur de 40 %, que son alcoolisation ne saurait justifier une exclusion totale de son droit à réparation.

Le fonds de garantie, en ses dernières écritures du 20 décembre 2013, auxquelles il sera renvoyé pour complet exposé des motifs, a conclu à l'exclusion totale du droit à indemnisation de monsieur X...et au rejet de ses demandes ainsi qu'à sa condamnation à lui payer 1. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il oppose que
-la CIVI est une juridiction autonome qui n'est pas liée par les décisions prises par les juridictions pénales,
- la faute de monsieur X...résulte de la procédure de gendarmerie,
- la première altercation n'a donné lieu de part et d'autre qu'à des blessures légères, chacun repartant de son côté,
- les coups de la deuxième altercation sont les plus sérieux, deuxième altercation due à la volonté d'en découdre de monsieur X..., peu importe la disproportion de la réplique,
- la solidarité nationale n'a vocation d'indemniser que des victimes innocentes.
SUR QUOI
La CIVI est une juridiction autonome non tenue par les appréciations qu'à pu faire le tribunal correctionnel de la responsabilité civile de monsieur Z...et de monsieur X...

Il n'est pas contesté que les faits de violence se sont déroulés en deux temps après que monsieur X...et Monsieur Z...aient été conduits hors de la discothèque dans laquelle ils se trouvaient en raison de leur agressivité respective.
La première altercation sur le parking de la discothèque si l'on en croit un ami de monsieur X...a consisté en un échange de coups de poings et de pied de part et d'autre sans qu'il soit permis de tirer de ce témoignage la conclusion que monsieur Z...a été plus que monsieur X...à l'origine de ce premier échange de coups.
Les pièces produites ne permettent pas d'affirmer que les conséquences de la violence de monsieur Z..., telles que décrites et retenues par l'expert judiciaire, sont en lien avec les coups échangés uniquement lors de la première bagarre.
Monsieur B...ne permet pas dans son audition d'affirmer que l'essentiel des blessures ait été causé lors de cette première altercation, en tout cas ces blessures n'ont manifestement pas empêché monsieur X...de rechercher monsieur Z...et son amie Alexia
Alexia C...n'en dit pas plus, confirmant un échange de coups sans pouvoir préciser le siège des coups échangés, tout comme monsieur D....
Aucun des témoins ne relate des plaintes relatives à des douleurs nasales après la première bagarre
En ce qui concerne la deuxième altercation, les témoignages sont concordants
-sur le comportement de monsieur X...qui est parti à la recherche de monsieur Z...et qui a provoqué cette deuxième bagarre
-sur la violence de cette deuxième altercation notamment de la part de monsieur Z..., excédé, qui s'est déchaîné sur monsieur X...et qui au vu de la procédure ne se trouvait pas en légitime défense au sens pénal du terme.
La Cour ne peut que déduire des éléments sus rappelés que rien ne permet d'attribuer la pleine responsabilité de la première bagarre à Monsieur Z..., que Monsieur X...est l'unique responsable du déclenchement de la deuxième bagarre, que l'essentiel de ses blessures a été causé lors de cette deuxième bagarre, dont le déclenchement ne peut être attribué qu'à Monsieur X....
En conséquence, Monsieur X...a participé par ses fautes à une part importante de son préjudice à hauteur de 80 %, une exclusion totale ne pouvant lui être opposée en raison de la disproportion de la réplique de Monsieur Z....
Monsieur X...a présenté un traumatisme maxillo-facial avec fractures des os propres du nez, une hémorragie sous conjonctivale des deux yeux, un hématome péri orbitaire des deux yeux, un hématome derrière l'oreille droite, une fracture décollement épiphysaire Salter II du radius droit, une fracture du métacarpien droit
Le préjudice de Monsieur X...sera fixé ainsi qu'il suit, étant observé que l'évaluation faite par le Tribunal Correctionnel est conforme à la jurisprudence de la cour :
- déficit fonctionnel temporaire total de 4 jours : 92 ¿
- déficit fonctionnel temporaire partiel de 50 % de 58 jours : 667 ¿
- déficit fonctionnel temporaire partiel de 10 ù de 201 jours : 432, 30 ¿
soit au total pour le déficit fonctionnel temporaire : 1221, 30 ¿
- déficit fonctionnel permanent de 3 %, Monsieur X...

ayant été consolidé à l'âge de 17 ans, en lien avec un gêne
respiratoire très modérée due à la déviation de la cloison nasale
et à la petite limitation de quelques degrés de la flexion
du poignet droit : 4. 200 ¿
- souffrances endurées de 2, 5/ 7 compte tenu des lésions
initiales, des deux interventions chirurgicales, de la
rééducation et du choc psychologique
avec période de cauchemars : 3. 000 ¿
- préjudice esthétique permanent de 2/ 7
(cicatrices et déviation de la cloison nasale) : 3. 000 ¿

soit un total de : 11421, 30 ¿

Après réduction du droit à indemnisation à hauteur de 80 %, Monsieur X...aurait pu prétendre à recevoir une indemnité de 2284, 26 ¿
Or de son propre aveu, il a reçu de Monsieur Z...une provision à hauteur de 2. 700 ¿ de sorte qu'en définitive il a obtenu paiement intégral de l'indemnisation à laquelle il aurait pû prétendre du fonds de garantie. La décision de la CIVI qui a débouté Monsieur X...de sa demande en indemnisation doit être, en définitive, confirmée

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens sont à la charge du Trésor Public

PAR CES MOTIFS
la cour

Dit que le droit à indemnisation de Monsieur X...est réduit à hauteur de 80 %

Fixe le préjudice subi par Monsieur X...hors créance de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie à la somme de 11. 421, 30 ¿

Dit qu'en application de la réduction du droit à indemnisation à hauteur de 80 %, monsieur X...ne peut prétendre qu'à une indemnité à hauteur de 2. 284, 26 ¿

Constate que la somme de 2. 700 ¿ a été réglée à titre provisionnel par Monsieur Z...

Constate, en conséquence, qu'il a été rempli de son droit à indemnisation par l'auteur du dommage

En conséquence,

Confirme la décision déférée, en ce qu'elle a débouté Monsieur X...de sa demande en indemnité sur le fondement de l'article 706-3 du code de procédure pénale.

Le présent arrêt a été signé par Henriette Filhouse, Présidente, et par Sylvie Hayet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

S. Hayet H. Filhouse


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 13/00029
Date de la décision : 24/06/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-24;13.00029 ?
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