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03/01/2012 | FRANCE | N°11/01670

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, SixiÈme chambre civile, 03 janvier 2012, 11/01670


COUR D'APPEL DE BORDEAUXSIXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU : 03 JANVIER 2012(Rédacteur : Franck LAFOSSAS, Président)

No de rôle : 11/01670
Jean X...
c/
Anne-Marie Y... divorcée X...
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avoués :Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 janvier 2011 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (cabinet 1, RG no 09/10219) suivant déclaration d'appel du 16 mars 2011

APPELANT :

Jean X...né le 28 Octobre 1927 à SAINT DENIS (93)de nationalité Françaisedemeurant ...33520 BRUGE

S

représenté par la SCP CASTEJA CLERMONTEL ET JAUBERT, avoués à la Courassisté de Me Rajaa KRATA, avocat au ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUXSIXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU : 03 JANVIER 2012(Rédacteur : Franck LAFOSSAS, Président)

No de rôle : 11/01670
Jean X...
c/
Anne-Marie Y... divorcée X...
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avoués :Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 janvier 2011 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (cabinet 1, RG no 09/10219) suivant déclaration d'appel du 16 mars 2011

APPELANT :

Jean X...né le 28 Octobre 1927 à SAINT DENIS (93)de nationalité Françaisedemeurant ...33520 BRUGES

représenté par la SCP CASTEJA CLERMONTEL ET JAUBERT, avoués à la Courassisté de Me Rajaa KRATA, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

Anne-Marie Y... divorcée X...née le 10 Mars 1948 à SAUGNAC ET MURET (40)de nationalité Françaisedemeurant ...33360 CARIGNAN DE BORDEAUX

représentée par la SCP TAILLARD Annie JANOUEIX Valérie, avoués à la Courassistée de Me Hélène FOUGERE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du CPC, l'affaire a été débattue le 08 novembre 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Franck LAFOSSAS, Président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :Franck LAFOSSAS, Président,Anne-Marie LEGRAS, Conseiller,Bruno CHOLLET, Conseiller,

Greffier lors des débats : Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.

Faits et procédure antérieure :

La présente procédure concerne Anne-Marie Y... et Jean X... qui, mariés en 1984 sous régime de séparation de biens, ont ensuite divorcé par décision devenue définitive rendue par la Cour d'appel de Bordeaux le 2 décembre 2008.
Au cours du mariage, ils ont acquis plusieurs biens, notamment un immeuble indivis sis à Bruges et un véhicule de marque Citroën. Aucun accord global n'est intervenu sur la liquidation de leurs intérêt patrimoniaux découlant de la dissolution de leur régime matrimonial. Cela a été constaté par procès-verbal de difficultés du 20 juillet 2009.
Le juge aux affaires familiales de Bordeaux a tranché les divers points en litige par un jugement du 27 janvier 2011. Il a notamment dit que Jean X... est débiteur à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation de l'immeuble sis à Bruges à hauteur de 600 € par mois à compter de janvier 2009 et jusqu'au partage, dit que Anne-Marie Y... justifie de créances à l'encontre de son ex mari pour la cotisation d'assurance Abeille (398,57 €), le reversement d'un trop perçu sur impôts (445,53 €) et le prix de vente d'un véhicule (759,38 €) et dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Procédure d'appel :
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 16 mars 2011, Jean X... a relevé appel de cette décision, limité à l'indemnité d'occupation mise à sa charge et aux créances qu'il doit payer à son ex-femme au titre de la cotisation d'assurance et du prix de vente du véhicule.
Par ses dernières conclusions déposées le 20 septembre 2011, l'appelant demande à la cour :
.de dire n'y avoir lieu au paiement d'une indemnité d'occupation, ou, à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnité sollicitée, ou encore, à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une expertise afin de déterminer le montant de cette indemnité,.de débouter Anne-Marie Y... de ses demandes de paiement au titre de la cotisation d'assurance Abeille et de la vente du véhicule,.de la débouter de son appel incident, ainsi que du surplus de ses demandes, .outre la condamner au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions déposées le 13 octobre 2011, l'intimée demande à la cour :
.de débouter Jean X... de son appel limité, .de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné Jean X... au paiement d'une indemnité d'occupation de 600 € par mois, mais de fixer la date d'exigibilité de cette indemnité au 2 décembre 2008, et de constater que cette indemnité doit être arrêtée à la date du 27 janvier 2011,.de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Jean X... au paiement de créances dont elle justifie sur la cotisation d'assurance, le prix de vente du véhicule et le reversement de trop perçu d'impôts, .et sur appel incident de le condamner en outre au paiement de la somme de 313,95 € au titre des charges de copropriété sur l'immeuble de Juan-Les-Pins, ainsi qu'au paiement de la somme de 8.384,70 € au titre des fonds propres qu'elle a placés sur le livret A de Jean X..., .de confirmer le jugement pour le surplus .et de condamner Jean X... au paiement de la somme de 3.600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur quoi, la cour :
1) sur l'indemnité d'occupation :
Au soutien de sa demande de suppression de toute indemnité d'occupation, Jean X... fait valoir que, selon la jurisprudence, une indemnité d'occupation n'est due par l'un des indivisaires que s'il est justifié du caractère exclusif de sa jouissance privative de l'immeuble. Or, en l'espèce, il ne conteste pas avoir occupé effectivement l'immeuble mais affirme qu'Anne-Marie Y... y stockait ses meubles et effets personnels, profitant donc également de la jouissance de l'immeuble indivis. Il conteste avoir bénéficié d'une jouissance privative exclusive, supprimant toute redevance d'une indemnité d'occupation.
Il reproche au tribunal d'avoir fixé arbitrairement le montant de l'indemnité à la somme de 600 € par mois, alors que Anne-Marie Y... cantonnait sa demande au montant de 300 €. De plus, il verse aux débats une expertise immobilière selon laquelle l'immeuble ne répondrait pas aux critères du logement décent. À titre subsidiaire, il sollicite donc la diminution du montant de l'indemnité d'occupation. Il soutient enfin que cette indemnité n'est due qu'à compter du 2 janvier 2009 et jusqu'au 27 janvier 2011, date à laquelle l'acte de partage du 25 août 2011 a fixé la fin de jouissance divise de la maison.
Au contraire, Anne-Marie Y... soutient que son mari a établi sa résidence dans l'immeuble de Bruges depuis la séparation des époux courant 1998, ce dont il s'est prévalu pour demander son attribution préférentielle. À partir de cette date, elle n'a plus pu avoir accès à l'immeuble indivis, ni y récupérer ses meubles car l'ordonnance de non conciliation du 22 septembre 2008 interdisait à chacun de troubler l'autre conjoint en sa résidence et que Jean X... ne lui a jamais permis de venir procéder au déménagement de ces meubles. Selon elle, il a bénéficié de la jouissance privative exclusive de l'immeuble et il est redevable à ce titre d'une indemnité d'occupation.
Selon elle, la date d'effet de l'indemnité d'occupation ne doit pas être fixée à la date de l'assignation de la présente instance mais à la date du prononcé définitif du divorce, soit le 2 décembre 2008. Cette indemnité cesse d'être due à partir du 27 janvier 2011, comme prévu par l'acte de partage du 25 août 2011.
Selon elle, Jean X... n'apporte pas la preuve du montant excessif de l'indemnité d'occupation fixée par le tribunal, alors que, occupant l'immeuble, il est le seul à même de faire estimer sa valeur locative par un expert. Il n'y a donc pas lieu de réduire le montant de l‘indemnité. Elle signale avoir effectivement cantonné sa demande à la somme de 300 € par mois, mais cette somme correspondait à la moitié qui lui revenait sur les 600 € par mois dus à l'indivision au titre de cette indemnité d'occupation.
La cour constate que les époux se sont séparés, le mari restant au domicile conjugal, du mobilier appartenant à l'épouse s'y trouvant. Une procédure en divorce a alors été engagée. Nulle part le mari n'a émis la moindre réserve contre la présence de ce mobilier dont il ne prouve pas qu'il eût été encombrant ni qu'il eût gêné ou restreint de quelque façon que ce soit sa jouissance des lieux. La cour, par confirmation, juge qu'il a usé privativement de ce bien indivis et doit indemnité. Cette indemnité n'est demandée que depuis le prononcé du divorce, 2 décembre 2008, et il sera fait droit à cette demande.
Le premier juge a chiffré à 600 € par mois la valeur locative de l'immeuble évalué 200.000 € par les époux lors du partage, consistant en une maison individuelle située à Bruges en banlieue bordelaise, sur deux niveaux, comprenant au rez-de-chaussée une entrée, un séjour, une cuisine, un bureau, un cabinet de toilettes, un cellier, et à l'étage un palier, 3 chambres, une salle de bains avec WC. L'avis d'agent immobilier produit par l'appelant sur l'indécence du logement fait référence aux normes du décret du 30 janvier 2002 et signale une mauvaise étanchéité à la pluie, avec infiltrations, ainsi qu'un réseau gaz et électricité non conforme aux normes actuelles. La cour estime que ces restrictions diminuent la valeur locative d'un tel immeuble et que la somme retenue par le tribunal est réaliste.
Mais une indemnité d'occupation n'est pas une valeur locative et ne peut être chiffrée à l'identique, par seule référence au coût d'un loyer. En effet, notamment, les indivisaires ne supportent pas le risque d'absence de location et d'impayé, n'ont pas à supporter des frais d'agence immobilière, et l'indivisaire usant du bien peut être considéré comme directement intéressé à sa bonne conservation, réduisant le risque de dégradations. Tous ces éléments de fait permettent à la cour, par infirmation, de chiffrer l'indemnité d'occupation à la somme mensuelle de 500 €.
2) sur l'assurance Abeille :
L'intimée affirme avoir supporté le coût d'un retard de cotisation d'assurance personnelle à son mari pour un contrat Abeille, pour un montant de 2.614 F soit 398,57 €, le 18 mars 1999.
Il rétorque que la pièce no11 de la partie adverse, dans laquelle il s'engage à rembourser le montant de la cotisation d'assurance Abeille, ne prouve pas que cette somme ait été payée par elle, d'autant qu'il prouverait s'en être acquitté lui-même.
Mais la cour constate que l'intimée produit une reconnaissance de dette émanant de son mari à ce sujet, datée du 12 mars 1999, tandis que la pièce adverse no 13, constituée d'un écrit rédigé par lui et signalant le paiement, ne possède aucune force probante. La décision déférée, qui l'a condamné à payer cette somme, sera confirmée.
3) sur la voiture Citroën :
Jean X... estime rapporter la preuve de la propriété du véhicule Citroën et critique la décision déférée qui a retenu que la "carte grise" au nom des deux époux faisait présumer une indivision par moitié.
À l'inverse, l'intimée affirme qu'elle justifie avoir payé 23,72 % du prix du véhicule Citroën lors de son achat et en revendique le droit au même pourcentage du prix de revente, soit la somme de 759,38 €.
La cour constate que ce véhicule a été commandé au nom du seul mari qui a signé le bon de commande et que tous les documents afférents sont à son nom, y compris l'assurance, hormis la "carte grise" qui n'est pas un titre de propriété mais de circulation. S'étant mariés sous régime de séparation les deux époux avaient posé pour principe la séparation de leurs patrimoines.
La cour, qui applique leur loi commune, ne découvre pas en cela d'indice d'indivision. Les preuves de débits bancaires communiqués par l'épouse sont seulement susceptibles d'établir une faible participation de sa part au paiement. Sans autre élément, et alors que les deux époux devaient contribuer aux charges du mariage, la cour ne peut y trouver la preuve d'un pacte officieux d'indivision dans un rapport 76,28% - 23,72%. Par infirmation Anne-Marie Y... sera déboutée de sa demande de paiement au titre de la voiture Citroën.
4) sur la créance de 8.384,70 € :
Anne-Marie Y... affirme avoir versé le 24 octobre 1990 la somme de 55.000 F (8.384,70 €) sur le livret A de son mari après avoir perçu le prix de vente de parcelles qui lui appartenaient en propre. Elle conteste être l'auteur du retrait de la somme équivalente, effectué le 18 mai 1991, le livret A ne faisant pas apparaître l'identité de l'auteur du retrait. Selon elle, Jean X... lui doit donc toujours remboursement de la somme de 8.354,70 €.
À l'inverse, il dément ce versement par Anne-Marie Y... qu'il accuse de parler sans preuve.
Comme le premier juge, la cour constate que les écritures comptables du livret d'épargne en cause ne mentionnent pas l'identité de la personne effectuant le versement ou le retrait, titulaire du livret ou personne ayant procuration. En l'absence de production du bon de remise ou de retrait la cour ne peut donc savoir qui a matériellement pratiqué ces opérations bancaires. Comme le premier juge dont les autres motifs sont adoptés, la cour déboute Anne-Marie Y... de sa demande faute de preuve.
5) sur la rectification d'erreur matérielle :
Anne-Marie Y... fait valoir que, par ses conclusions de première instance, Jean X... s'est reconnu redevable envers elle de la somme de 313,95 € au titre de charges de copropriété sur l'immeuble de Juan Les Pins ; le tribunal en a également admis le principe dans les motifs du jugement dont appel mais a omis de reprendre cette créance dans son dispositif. En vertu de l'effet dévolutif de l'appel, elle s'estime fondée à former un appel incident sur ce point, nonobstant le fait qu'elle n'ait pas formé de requête en rectification du jugement de première instance.
À l'inverse Jean X... considère que la demande de Anne-Marie Y... relative aux charges de copropriété de l'appartement de Juan Les Pins doit être rejetée car l'intimée n'a pas déposé de requête en rectification d'erreur matérielle à ce propos.
L'appel a remis la chose jugée en question pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit. L'intimée est donc recevable, sur son appel incident, à faire juger ce que l'appelant ne conteste pas mais n'avait pas déféré à la cour par son appel principal limité. Il sera donc condamné, par infirmation, à lui payer la somme de 313,95 € au titre des charges de copropriété.
6) sur le reversement d'impôt :
L'intimée soutient que la condamnation en première instance de son ex mari au remboursement de la somme de 445,53 € au titre d'un reversement de trop perçu d'impôt doit être confirmée car ni l'appelant ni elle-même n'ont interjeté appel sur ce point.
Mais, précisément, parce qu'aucun appel n'en a été relevé, les différents appels étant limités, la cour n'est pas saisie de ce litige et ne confirmera pas la décision déférée de ce chef.
7) sur les frais et dépens :
Chacun des anciens époux reçoit partiellement satisfaction sur ses demandes, aucun ne peut être considéré comme ayant perdu ou gagné et chacun supportera la charge de ses entiers frais et dépens.
Par ces motifs :
Sur les seules questions déférées par appel principal limité à l'indemnité d'occupation, aux sommes dues au titre du contrat Abeille et de la voiture Citroën, et par appel incident aux charges de copropriété, à la somme de 8.384,70 €, aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,
Infirmant partiellement,
Condamne Jean X... à payer à l'indivision une indemnité d'occupation mensuelle de 500 € (cinq cents euros) du mois de décembre 2008 inclus au mois de janvier 2011 inclus,
Le condamne à payer à Anne-Marie Y... la somme de 313,95 € (trois cent treize euros et quatre vingt quinze centimes d'euro) au titre de charges de copropriété sur l'immeuble de Juan Les Pins,
Déboute Anne-Marie Y... de sa demande relative à la voiture Citroën,
Confirme sur le paiement de la somme due au titre du contrat d'assurance Abeille et sur la somme de 8.384,70 €,
Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse à chaque partie la charge de ses entiers dépens.
L'arrêt a été signé par le président Franck Lafossas et par Annie Blazevic, greffier auquel il a remis la minute signée de la décision.
Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : SixiÈme chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/01670
Date de la décision : 03/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2012-01-03;11.01670 ?
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