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25/05/2010 | FRANCE | N°09/01189

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Premiere chambre civile-section b, 25 mai 2010, 09/01189


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIERE CHAMBRE CIVILE-SECTION B
--------------------------
ARRÊT DU 25 MAI 2010
(Rédacteur : Monsieur Pierre Louis Crabol, conseiller,)
No de rôle : 09/ 01189
Monsieur Louis X...
c/
LA S. A. FRANCE TELECOM
Nature de la décision : AU FOND
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 06 mars 2007 (R. G. 06-003616) par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 4 mars 2009,
APPELANT :
Monsieur Louis X..., né le 26 Mars 1931 à CHAMALIERES (63), de nationalité française, demeurant ... 24

220 SAINT CYPRIEN,

Présent aux débats,
Assisté par la S. C. P. Marc-Jean GAUTIER et Pierre FON...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIERE CHAMBRE CIVILE-SECTION B
--------------------------
ARRÊT DU 25 MAI 2010
(Rédacteur : Monsieur Pierre Louis Crabol, conseiller,)
No de rôle : 09/ 01189
Monsieur Louis X...
c/
LA S. A. FRANCE TELECOM
Nature de la décision : AU FOND
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 06 mars 2007 (R. G. 06-003616) par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 4 mars 2009,
APPELANT :
Monsieur Louis X..., né le 26 Mars 1931 à CHAMALIERES (63), de nationalité française, demeurant ... 24220 SAINT CYPRIEN,

Présent aux débats,
Assisté par la S. C. P. Marc-Jean GAUTIER et Pierre FONROUGE, Avoués Associés à la Cour,
INTIMÉE :
LA S. A. FRANCE TELECOM, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis 6, place d'Alleray 75015 PARIS,
Représentée par la S. C. P. Solange CASTEJA-CLERMONTEL et Hélène JAUBERT, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Patricia GRAVELLIER, substituant la S. C. P. Guy GRAVELLIER-Emmanuel GRAVELLIER-Philippe LIEF-Charlotte DE LAGAUSIE, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 mars 2010 en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président, Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller, Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON
ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Par la production d'une facture de téléphone en date du 14 février 1987, précisant au verso les modalités de paiement, par chèque ou en espèces en se présentant à l'agence des télécommunications ou au bureau de poste qui restitue un volet du document à titre de reçu, l'abonné Louis X... justifie de l'ancienneté de son contrat et des facultés de paiement offertes aux abonnés.
Or, il est constant que, refusant le paiement en numéraire dans ses agences depuis 2002 pour des motifs de sécurité, la S. A. France Télécom renvoie ses clients qui souhaitent régler en espèces à un tiers, la Poste, qui facture des frais supplémentaires pour mandat postal ou pour titre interbancaire de paiement en espèces.
Ainsi Louis X..., contraint de régler par mandat postal (3, 85 euros) son paiement en espèces contre reçu, a-t-il pris l'habitude de déduire le coût du mandat du montant de ses factures de téléphone.
Le défaut de paiement de la facture du mois de janvier 2006 et le cumul des déductions des mandats assimilé à un débit valaient à l'abonné la mise de sa ligne en service restreint à partir du 13 février 2006, période durant laquelle il était hospitalisé, puis, à partir du 23 février 2006, la suspension de la ligne qui sera finalement rétablie le 21 mars 2006, après paiement effectué le 27 février 2006.
Saisi, suivant assignation délivrée le 8 novembre 2006, par Louis X... contre la S. A. France Télécom d'une action tendant à être déchargé des frais des mandats postaux bimestriels, en paiement de dommages et intérêts (4. 500, 00 euros) et en restitution des documents communiqués, le tribunal d'instance de Bordeaux par jugement en date du 6 mars 2007, a débouté le demandeur.
Dans ses dernières écritures déposées le 3 février 2010 au soutien de son appel, Louis X... invoque son droit intangible de payer en espèces contre reçu libératoire et sa liberté de ne pas contracter un lien de droit avec un tiers (La Poste) pour conclure à l'illicéïté des conditions générales de la S. A. France Télécom Aquitaine qui rendent impossible le paiement en numéraire à ses agences et à la décharge de ses frais de mandat (178, 85 euros) ; il demande des dommages et intérêts (4. 470, 00 euros) pour le trouble d'existence durant la rupture de liaison téléphonique qui a retardé son rétablissement de six mois ; il réclame une indemnité de procédure (2. 000, 00 euros).
L'intimée la S. A. France Télécom Aquitaine soutient dans ses écritures du 2 novembre 2009 qu'elle ne refuse pas les espèces mais qu'elle renvoie le client au domicile d'un tiers, la Poste, et que les modalités de paiement figurant au verso des factures sont contractuelles et par suite que la domiciliation conventionnelle rend légalement les frais de paiement à la charge du débiteur ; elle conteste le préjudice ; elle conclut à la confirmation du jugement et réclame une indemnité de procédure (1. 500, 00 euros).
SUR CE :
Attendu en droit :
- que la loi du 12 août 1870 portant cours forcé des billets de banque dispose, en son article 1, qu'" à partir du jour de la promulgation de la présente loi, les billets de la Banque de France seront reçus comme monnaie légale par les caisses publiques et les particuliers ",
- que le décret impérial du 12 août 1870 porte publication de ladite loi,
- que l'article R 642-3 du code pénal érige en contravention le fait de refuser de recevoir des pièces de monnaie ou des billets de banque ayant cours légal en France,
- qu'après que l'article L 111-1 du code monétaire et financier a défini l'euro comme monnaie en France, l'article L 112-6 du même code n'interdit de régler en espèces que les sommes supérieures à 1. 100, 00 euros ;
Attendu en fait, qu'à supposer que la modification unilatérale des modalités de paiement imposées par la S. A. France Télécom à partir de l'année 2002 pour des raisons de sécurité puisse être opposable à l'abonné Louis X..., titulaire d'un contrat antérieur définissant un paiement en espèces à l'agence des Télécommunications, il n'en demeure pas moins que :
- la modification du contrat ne porte pas sur le lieu du paiement, au sens de l'article 1247 du code civil, mais sur l'obligation de recourir à un tiers pour encaisser le paiement,
- l'obligation de recourir à un tiers pour encaisser le paiement en espèces entraîne un effet équivalent à un refus du créancier d'accepter le paiement en numéraire proposé par son co-contractant ;
Attendu qu'en imposant à son co-contractant une monnaie scripturale qui oblige celui-ci à recourir aux services d'un tiers pour pouvoir payer en espèces et bénéficier d'un reçu pour satisfaire à l'obligation de prouver le paiement mise à sa charge par l'article 1315 du code civil, la S. A. France Télécom s'est livrée à une pratique illicite, qui a causé à l'abonné un préjudice égal au montant des mandats que le débiteur a dû établir pour satisfaire à son obligation de payement, alors que les frais qui eussent pu être évités ne sont dus qu'au comportement fautif de la S. A. France Télécom ;
Que le remboursement des mandats sera donc mis à la charge de la S. A. France Télécom à titre de dommages et intérêts ;
Qu'en revanche la suspension de la ligne trouve sa cause dans un défaut de règlement d'une facture et dans une compensation irrégulière des créances litigieuses, il n'y a pas de faute de la S. A. France Télécom à avoir procéder à la suspension de la ligne téléphonique, cause du trouble dans les conditions de vie de l'abonné récemment hospitalisé ;
Que la demande en dommages et intérêts formée par Louis X... sera donc rejetée ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Infirmant le jugement déféré et statuant par dispositions nouvelles,
Déclare illicites les modalités de paiement imposées par la S. A. France Télécom à Louis X... qui l'empêchent de procéder à un paiement en espèces à ses agences contre un reçu libératoire,
Condamne la S. A. France Télécom à payer à Louis X..., à titre de dommages et intérêts, la somme de cent soixante dix huit euros et quatre-vingt-cinq centimes (178, 85 euros), montant de ses frais de mandats postaux,
Rejette la demande de Louis X... en paiement de dommages et intérêts pour trouble d'existence par suite de la suspension de sa ligne téléphonique,
Condamne la S. A. France Télécom à verser à Louis X... une indemnité de procédure de cinq cents euros (500, 00 euros),
Condamne la S. A. France Télécom aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la S. C. P. Marc-Jean GAUTIER et Pierre FONROUGE, Avoués Associés à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Louis-Marie Cheminade, président, et par Madame Marceline Loison, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Premiere chambre civile-section b
Numéro d'arrêt : 09/01189
Date de la décision : 25/05/2010
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2010-05-25;09.01189 ?
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