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19/05/2009 | FRANCE | N°08/02797

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0256, 19 mai 2009, 08/02797


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19 Mai 2009
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Khadija X... veuve Y... Z...
C /
Le Ministère de la défense
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08 / 02797
COUR D'APPEL DE BORDEAUX

COUR RÉGIONALE DES PENSIONS

ARRÊT DU :

dix neuf mai deux mille neuf

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

APPELANT :

d'un jugement (R. G. 05 / 131) rendu le 25 janvier 2

008 par le Tribunal Départemental des Pensions Militaires de la GIRONDE suivant déclaration d'appel en date du 25 février ...

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19 Mai 2009
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Khadija X... veuve Y... Z...
C /
Le Ministère de la défense
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08 / 02797
COUR D'APPEL DE BORDEAUX

COUR RÉGIONALE DES PENSIONS

ARRÊT DU :

dix neuf mai deux mille neuf

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

APPELANT :

d'un jugement (R. G. 05 / 131) rendu le 25 janvier 2008 par le Tribunal Départemental des Pensions Militaires de la GIRONDE suivant déclaration d'appel en date du 25 février 2008,

Madame Khadija X... veuve Y... Z...
...
...

absente,
représentée par maître Loïc CHAMPEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX, (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2008 / 010638 du 31 / 07 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

INTIME :

Le Ministère de la défense
Cité Administrative-Rue Jules Ferry BP 80
33090 BORDEAUX CEDEX,

représenté par Madame A..., Commissaire du Gouvernement

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Monsieur Bernard BESSET, Président de Chambre,
Monsieur Bernard ORS, Conseiller,
Monsieur Michel BARRAILLA, Conseiller,
désignés par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 12 décembre 2008,

En présence de Madame A..., Commissaire du Gouvernement,

Assistés de Madame Martine MASSÉ, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Novembre 2008, l'affaire a été mise en délibéré au 19 Mai 2009.

Après quoi, la Cour a rendu l'arrêt contradictoire suivant prononcé par Monsieur Bernard Besset, Président, à l'audience publique du 19 Mai 2009, après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats.

La cour régionale des pensions est saisie de l'appel régulièrement formé par Mme veuve Y... Z... née X... contre le jugement du tribunal des pensions militaires de la Gironde en date du 25 janvier 2008 l'ayant déboutée de son pourvoi à l'encontre de la décision ministérielle du 25 mai 2005 ayant rejeté sa demande d'attribution de pension de veuve.

Le conseil de Mme veuve Y... Z... a conclu à l'infirmation de la décision et à l'attribution d'une pension de veuve à compter du 19 février 2004, date de la demande. Il est soutenu que les articles 71 de la loi de finances du 26 décembre 1959 et 68 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2002 fixent des conditions restrictives dans lesquelles les ressortissants marocains peuvent prétendre à pension sont discriminatoires comme contraires à l'article 14 de la convention européenne et qu'il en résulte que la date de son mariage (15 février 1964) postérieure au 1er janvier 1961, ne peut être opposée à Mme veuve Y... Z... pour refuser la pension de veuve à la suite du décès de son mari survenu le 12 juin 2003.

Le commissaire du gouvernement a conclu à la confirmation de la décision déférée. Il indique qu'à la date de la demande (11 février 2004) les articles 71 de la loi de finances du 26 décembre 1959 et 68-6 de la loi de finances du 30 décembre 2002 ne permettaient pas à Mme veuve Y... Z... de bénéficier de la pension de veuve, la situation des ressortissants marocains devant s'apprécier au 1er janvier 1961, date à laquelle Mme veuve Y... Z... n'était pas encore mariée avec M. Y... Z..., militaire pensionné. Il ajoute que la loi de finances du 21 décembre 2006 a modifié cette situation et permet désormais à l'intéressée de bénéficier à la pension à compter du 1er janvier 2007.

Motifs de la décision

Il est établi que M. Y... Z..., militaire de l'armée française, a bénéficié le 3 juillet 1957 d'une pension militaire d'invalidité au taux de 60 % pour séquelles de fracture ouverte du péroné gauche et du tibia gauche. M. Y... Z... est décédé le 12 juin 2003. Sa veuve a sollicité le 11 février 2004 le bénéfice d'une pension de veuve à laquelle elle pouvait prétendre en application de l'article L 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, le taux minimum d'invalidité de 60 % étant acquis.

Aux termes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959, à compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur la budget de l'état ou établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'union française et à la communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation.

L'article 68-6 de la loi du 30 décembre 2002 prévoit que les prestations servies au titre de l'article 71 précédemment visé, peuvent faire l'objet à compter du 1er janvier 2003 d'une réversion, que l'application du droit des pensions et la situation de famille sont appréciés à la date d'effet des dispositions visées par l'article 71 pour chaque état concerné, soit pour le Maroc au 1er janvier 1961.

Mme X... ayant épousé M. Y... Z..., ressortissant marocain, le 15 février 1964 ne peut prétendre à pension de réversion en application de ces textes, le mariage étant postérieur au 1er janvier 1961.

Cependant comme l'ont relevé les premiers juges et le commissaire du gouvernement l'article 100 de la loi de finances du 21 décembre 2006 stipule que l'ouverture des droits à pension est désormais possible aux conjoints survivants, mariés après les dates de cristallisation (1er janvier 1961) dans les conditions de droit commun, ce qui autorise Mme veuve Y... Z... à bénéficier d'une pension de veuve à compter du 1er janvier 2007, de sorte que le litige concerne seulement la période du 11 février 2004 (date de la demande) au 1er janvier 2007.

Il convient de relever que les pensions militaires d'invalidité représentent le paiement d'une dette de reconnaissance de la nation envers ceux qui ont lutté pour la défense de la patrie ou ont été victimes de cette lutte. La différence de situation existant entre d'anciens militaires de la France, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'états devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet des pensions d'invalidité, une différence de traitement. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 26 décembre 1959 que les dispositions litigieuses avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance des pays mentionnés à cet article et de l'évolution désormais distincte de leurs économies et de celle de la France qui privait de justification la revalorisation de ces pensions en fonction de l'évolution des traitements servis aux agents de l'état. Cependant la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les bénéficiaires de pensions, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif.

Une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est à dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec l'objet de la loi.

Il en résulte que les dispositions des articles 71 et 68-6 précités créent une différence de traitement en fonction de la seule nationalité et qu'elles sont incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne qui prévoit l'absence de distinction fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

Le droit à pension de veuve doit être reconnu à Mme veuve Y... Z... à compter du 11 février 2004, la fin de non recevoir résultant de la seule date de son mariage le 15 février 1964 ne lui étant pas opposable.

La décision des premiers juges doit en conséquences être infirmée.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Vu le Code des Pensions Militaires d'Invalidité et des Victimes de Guerre ;

Vu le décret du 20 Février 1959, relatif aux juridictions des pensions ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement du tribunal des pensions militaires en date du 25 janvier 2008.

Alloue à compter du 11 février 2004 à Mme veuve Y... Z... une pension de réversion de la pension militaire d'invalidité accordée à son mari au taux de 60 %.

Signé par Bernard BESSET, Président, et par Martine MASSÉ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0256
Numéro d'arrêt : 08/02797
Date de la décision : 19/05/2009

Analyses

SECURITE SOCIALE, REGIMES SPECIAUX - Militaires - Assurances sociales

Les dispositions de l'article 71de la loi de finances du 26 décembre 1959 et de l'article 68-6 de la loi de finances du 30 décembre 2002, fixant notamment les conditions d'application du droit des pensions militaires pour les ressortissants marocains ayant combattu dans l'armée française, créent une différence de traitement en fonction de la seule nationalité et sont incompatibles avec les sti- pulations de l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme.


Références :

article 71de la loi de finances n° 71-1454 du 26 décembre 1959, article 68-6 de la loi de finances n° 2002-1575 du 30 décembre 2002, article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen.

Décision attaquée : Tribunal départemental des Pensions Miilitaires de la Gironde, 25 janvier 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2009-05-19;08.02797 ?
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