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20/05/2008 | FRANCE | N°04/01767

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0596, 20 mai 2008, 04/01767


ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

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Le : 20 MAI 2008

PREMIERE CHAMBRE SECTION B

No de rôle : 04/01767

LE G.F.A. CHATEAU PEYREDOULLE,

c/

LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINE,

Monsieur Jacques X...

Madame Josette Y... épouse X...

Monsieur Bernard X...

LE DEPARTEMENT DE LA GIRONDE,

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalableme

nt avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 20 MAI 2008

Par Monsieur Michel BARRAILLA, C...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

---------------------------

Le : 20 MAI 2008

PREMIERE CHAMBRE SECTION B

No de rôle : 04/01767

LE G.F.A. CHATEAU PEYREDOULLE,

c/

LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINE,

Monsieur Jacques X...

Madame Josette Y... épouse X...

Monsieur Bernard X...

LE DEPARTEMENT DE LA GIRONDE,

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 20 MAI 2008

Par Monsieur Michel BARRAILLA, Conseiller,

en présence de Madame Armelle FRITZ, Greffier,

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

LE G.F.A. CHATEAU PEYREDOULLE, pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis ...,

Représenté par la S.C.P. Annie TAILLARD et Valérie JANOUEIX, Avoués Associés à la Cour, et assisté de Maître Armand LE CHEVALLIER, Avocat au barreau de BORDEAUX,

Appelant d'un jugement rendu le 18 mars 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 29 Mars 2004,

à :

1o/ LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL D'AQUITAINE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis 304, Boulevard du Président Wilson 33076 BORDEAUX CEDEX,

Représentée par la S.C.P. Sophie LABORY-MOUSSIE et Eric ANDOUARD, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Thierry WICKERS, Avocat au barreau de BORDEAUX,

Intimée,

2o/ Monsieur Jacques X..., né le 12 Juin 1931 à SAINT ANDRE DE CUBZAC (33), de nationalité française, demeurant ...,

Représenté par la S.C.P. FOURNIER, Avoués à la Cour, et assisté de Maître Anne TOSI, Avocat au barreau de BORDEAUX,

Intimé,

3o/ Madame Josette Y... épouse X..., née le 30 Décembre 1946 à SAINT ANDRE DE CUBZAC (33), de nationalité française,

4o/ Monsieur Bernard X..., né le 10 Mars 1946 à SAINT ANDRE DE CUBZAC (33), de nationalité française,

lesdits époux demeurant ensemble ...,

Représentés par la S.C.P. Michel PUYBARAUD, Avoués à la Cour, et assistés de Maître Serge DREVET, Avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

Intimés,

5o/ LE DEPARTEMENT DE LA GIRONDE, pris en la personne de Monsieur le Président du Conseil Général domicilié en cette qualité Esplanade Charles de Gaulle, Hôtel du Département 33000 BORDEAUX,

Représenté par la S.C.P. Stéphan RIVEL et Patricia COMBEAUD, Avoués Associés à la Cour, et assisté de Maître Jacques VIEILLEVILLE, Avocat au barreau de PARIS,

Intimé,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue, en audience publique le 11 Décembre 2007 devant :

Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président,

Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller,

Monsieur Michel BARRAILLA, Conseiller,

Monsieur Bernard OLIVIER, Adjoint d'Administration Principal assermenté faisant fonction de Greffier,

Et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats :

Par acte sous seing privé du 13 novembre 1986, la CRCAM DE LA GIRONDE, aujourd'hui CRCAM D'AQUITAINE, a prêté à la SARL SOGEVI une somme de 840.000,00 F, fonds dont la destination contractuelle était spécifiée sous la terminologie "gelées vignes 1985", remboursable en 15 ans dont un différé de trois ans au taux normal de 6 % et de retard de 9 % l'an, sous une garantie intitulée "caution du département", et le cautionnement solidaire de quatre intervenants identifiés comme étant Jacques, Josette, Bernard et Pierrette X....

La SARL SOGEVI, transformée en 1987 en société anonyme sous la dénomination de SA GERMAIN, a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de BLAYE le 28 janvier 1994, puis en liquidation judiciaire le 11 février 1994.

Après avoir vainement tenté d'obtenir des cautions le règlement amiable de sa créance, la CRCAM D'AQUITAINE a fait assigner devant le tribunal de grande instance de BORDEAUX le GFA CHATEAU PEYREDOULLE par acte du 2 décembre 1997, puis les consorts Jacques, Bernard et Josette X..., par ailleurs associés au sein du GFA, par actes des 3 et 5 février 1999.

Le GFA CHATEAU PEYREDOULLE a appelé en cause le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE par acte du 26 mai 2000.

Dans le dernier état de ses écritures, la CRCAM D'AQUITAINE sollicitait la condamnation solidaire du GFA CHATEAU PEYREDOULLE et du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE à lui payer les sommes dues au titre du cautionnement de la SA GERMAIN, et subsidiairement, dans l'hypothèse d'une mise hors de cause du GFA, la condamnation solidaire du département et de Jacques X..., Bernard X... et Josette X....

Par jugement du 18 mars 2004, le tribunal de grande instance de BORDEAUX a :

- déclaré la CRCAM D'AQUITAINE recevable en son action contre le GFA CHATEAU PEYREDOULLE,

- débouté la CRCAM D'AQUITAINE de ses demandes à l'encontre des consorts X... et du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE,

- condamné le GFA CHATEAU PEYREDOULLE à payer à la CRCAM D'AQUITAINE la somme de 94.850,13 €, avec intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 1997,

- ordonné la capitalisation des intérêts dus par année entière à compter du 9 mars 2000,

- débouté le GFA CHATEAU PEYREDOULLE, Jacques X..., Bernard X... et le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE de leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- rejeté les demandes du GFA CHATEAU PEYREDOULLE , des consorts X... et du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE au titre des frais irrépétibles,

- condamné le GFA CHATEAU PEYREDOULLE à payer à la CRCAM D'AQUITAINE la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

- condamné le GFA CHATEAU PEYREDOULLE aux dépens, à l'exception de ceux relatifs à l'appel en cause du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE, laissés à la charge de la CRCAM D'AQUITAINE.

Le GFA CHATEAU PEYREDOULLE a relevé appel de ce jugement, dans des conditions de régularité non contestées, par déclaration remise au greffe de la cour d'appel le 29 mars 2004.

Par conclusions signifiées le 29 juillet 2004, il demande à la Cour de :

- dire et juger éteinte la créance de la CRCAM D'AQUITAINE au visa des dispositions de l'article L.621-46 du Code de commerce,

- débouter, comme irrecevable et mal fondée, la CRCAM D'AQUITAINE,

- en toute hypothèse, la condamner au paiement de la somme de 15.250,00 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

- la condamner également au paiement de la somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et aux dépens.

Par conclusions signifiées le 3 octobre 2005, le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE sollicite le rejet des demandes formées à son encontre par la CRCAM D'AQUITAINE, et la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 23 novembre 2006, la CRCAM D'AQUITAINE demande à la Cour de :

- réformer partiellement le jugement du tribunal de grande instance en date du 18 mars 2004 sur le montant des sommes dues et l'engagement du CONSEIL GENERAL,

- condamner solidairement le consorts X... et le GFA CHATEAU PEYREDOULLE à lui payer la somme de 116.182,64 €, arrêtée au 13 février 1998, outre intérêts de retard au taux conventionnel de 9 % sur le capital de 622.176,04 € à compter de la date d'arrêté de compte, ou à défaut à compter respectivement pour chacun d'entre eux de la première mise en demeure qui leur a été adressée et jusqu'au parfait paiement au titre du prêt du 13 novembre 1986,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière à compter de la première demande faite (9 mars 2000),

- si la mise hors de cause du GFA CHATEAU PEYREDOULLE devait être ordonnée, condamner solidairement Jacques X..., Bernard X... et Josette X... au paiement de la somme principale de 116.182,64 € arrêtée au 13 février 1998, augmentée des intérêts normaux et de retard au taux conventionnel à compter respectivement pour chacun d'entre eux de la première mise en demeure qui leur a été adressée et jusqu'au parfait paiement au titre du prêt du 13 novembre 1986,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière à compter de la première demande faite (9 mars 2000),

- condamner le CONSEIL GENERAL DE LA GIRONDE au paiement de la somme de 116.182,64 €, arrêtée au 13 février 1998, outre intérêts de retard au taux conventionnel de 9 % sur le capital de 622.176,04 € à compter de la date d'arrêté de compte, ou à défaut à compter de la première mise en demeure qui lui a été adressée et jusqu'au parfait paiement au titre du prêt du 13 novembre 1986,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière à compter de la première demande faite (9 mars 2000),

- débouter le GFA CHATEAU PEYREDOULLE, les consorts X... et le CONSEIL GENERAL DE LA GIRONDE de toute demande plus ample ou contraire,

- condamner le CONSEIL GENERAL DE LA GIRONDE et le GFA CHATEAU PEYREDOULLE ou à défaut les cautions solidairement, aux entiers dépens de l'instance et au paiement d'une indemnité de 4.126,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 24 novembre 2006, Bernard X... et son épouse Josette Y... demandent à la Cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il a considéré que l'acte de cautionnement pouvait effectivement contraindre les signataires, alors qu'il ne satisfait pas aux dispositions de l'article 2015 du Code civil,

- réformer le jugement en ce qu'il a considéré que la CRCAM D'AQUITAINE avait démontré l'existence et la validité de sa créance, alors qu'elle n'a en rien fourni la preuve que la créance litigieuse avait été déclarée et admise à la procédure collective,

- débouter en conséquence la CRCAM D'AQUITAINE de l'ensemble de ses demandes formées à leur encontre,

- condamner la CRCAM D'AQUITAINE au paiement de la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 24 novembre 2006, Jacques X... demande à la Cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il a considéré comme non éteinte la créance alléguée par la CRCAM D'AQUITAINE,

- statuant à nouveau au visa des articles L.621-46 du Code de commerce et 2036 du Code civil,

* dire et juger éteinte la créance de la CRCAM D'AQUITAINE,

* dire et juger qu'en conséquence, l'organisme bancaire ne peut poursuivre les prétendues cautions au titre de cette créance,

- réformer également le jugement en ce qu'il a déclaré valable l'engagement de caution figurant sur le prêt du 13 novembre 1986,

- statuant à nouveau :

* vu les articles 2015 et suivants du Code civil,

* prononcer la nullité de cet engagement de caution,

* constater également que la CRCAM D'AQUITAINE a renoncé à toute poursuite à l'encontre de Jacques X...,

* en conséquence, vu l'article 1234 du Code civil, débouter la CRCAM D'AQUITAINE de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

* condamner la CRCAM D'AQUITAINE au paiement de la somme de 15.000,00 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,

* la condamner au paiement de la somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 novembre 2007.

MOTIFS :

- Sur l'existence de la créance de la CRCAM D'AQUITAINE :

Le GFA CHATEAU PEYREDOULLE et les consorts X... soutiennent que la créance de la CRCAM D'AQUITAINE est éteinte en application de l'ancien article L.621-46 du Code de commerce, faute d'avoir fait l'objet d'une déclaration régulière entre les mains du liquidateur.

Ils font valoir que la CRCAM D'AQUITAINE a déclaré au titre des créances chirographaires une somme globale de 1.343.228,35 F incluant les créances dont elle était titulaire sur les liquidations de la SA GERMAIN et de la SA SAINCRIT qui avaient été jointes, sans être en mesure de rapporter la preuve dont la charge lui en incombe que ce montant englobait effectivement la créance dont elle poursuit le paiement; que la créance doit donc être considérée comme éteinte et que la demande en paiement formée contre les cautions doit être rejetée.

Il ressort des pièces produites que par lettre du 7 avril 1994, Maître F..., mandataire judiciaire, a accusé réception auprès de la CRCAM D'AQUITAINE des déclarations de créances de cette dernière à hauteur des sommes de 2.167.833,06 F à titre privilégié et de 1.343.228,35 F à titre chirographaire dans le cadre de la liquidation judiciaire de la SA GERMAIN; que par lettre du 2 septembre 1998, le greffe du tribunal de commerce de BLAYE a informé la CRCAM D'AQUITAINE de ce que ses créances détenues à l'encontre de la SA GERMAIN et de la SA SAINCRIT figuraient au passif des liquidations de ces sociétés, à la suite de la décision du juge-commissaire prise sur propositions du liquidateur, pour la somme de 1.303.248,00 F à titre chirographaire et pour la somme de 417.746,82 F à titre privilégié; que si la déclaration a été faite pour un montant global incluant plusieurs créances, les bordereaux de déclaration joints par la CRCAM D'AQUITAINE permettent de vérifier que ce montant comprend les sommes restant dues au titre du prêt du 13 novembre 1986 à hauteur de 622.176,04 F en capital, ce qui conduit à écarter l'argument du GFA et des consorts X... selon lequel l'irrégularité de la déclaration, entraînant l'extinction de la créance, résulterait de ce que la CRCAM D'AQUITAINE n'aurait pas été en mesure de justifier de ce que les sommes dont elle poursuit le recouvrement de rattacheraient au prêt litigieux.

La discordance entre la somme initialement déclarée de 1.343.228,35 F et celle admise à hauteur de 1.303.248,00 F ne résulte pas d'un refus d'admission de la différence, mais d'une actualisation à laquelle a procédé la CRCAM D'AQUITAINE elle-même pour tenir compte de paiements récupérés entre temps au titre de créances DAILLY, ainsi que cela résulte d'un décompte actualisé transmis le 13 février 1998 au liquidateur, décompte accompagné de bordereaux dont il ressort que la créance litigieuse a été finalement admise pour un montant de 762.108,18 F supérieur à celui initialement déclaré, compte tenu des intérêts liquidés venus s'ajouter au capital de 622.176,04 F.

Il sera répondu au moyen tiré de l'absence de preuve selon laquelle la SA GERMAIN est venue aux droits et obligations de la SARL SOGEVI par la constatation selon laquelle la CRCAM D'AQUITAINE a versé aux débats un extrait Kbis relatif à la transformation de la SARL SOGEVI en société anonyme, ainsi qu'un avis publié aux Echos Judiciaires Girondins relatif au changement de dénomination de la SA SOGEVI en SA GERMAIN.

Il résulte de ces éléments que le GFA CHATEAU PEYREDOULLE et les consorts X... ne sont pas fondés à opposer à la CRCAM D'AQUITAINE l'extinction de sa créance.

- Sur la garantie du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE :

Le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE et la CRCAM DE LA GIRONDE ont conclu le 16 juin 1986 une convention aux termes de laquelle les prêts spéciaux accordés par le CREDIT AGRICOLE en faveur des victimes des calamités agricoles bénéficiaient de la garantie du département, sous certaines conditions et selon des modalités définies dans l'acte. L'article 7 de cette convention prévoyait que la garantie serait accordée "par le Comité d'Escompte de la Caisse Régionale auquel seront adjoints le Payeur Départemental et les représentants du Conseil Général, ces derniers ayant seuls pouvoir de décision pour accorder ou refuser la garantie du département."

Si la mention manuscrite "caution du département" se trouve incluse dans l'acte de prêt du 13 novembre 1986, aucun acte de caution contenant un engagement de cette nature souscrit par un représentant du département n'est produit aux débats.

Les seuls engagements de caution sont ceux qui figurent au bas de l'acte de prêt, et qui ont été souscrits par les consorts X....

Par ailleurs, le procès-verbal de la séance du Comité d'Escompte du 29 octobre 1986, à l'ordre du jour de laquelle figurait l'octroi du prêt de 840.000,00 F à la SARL SOGEVI, contient la mention "accord avec caution GFA". Les signatures portées sur ce document émanent toutes de représentants du CREDIT AGRICOLE. Ni le payeur départemental, ni des représentants du conseil général n'ont cosigné ce procès-verbal, ce dont il résulte que le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE n'a pas apporté sa garantie au prêt accordé à la SARL SOGEVI, qui n'a donc pas bénéficié de la convention du 16 juin 1986 dont la CRCAM D'AQUITAINE ne peut par suite se prévaloir pour prétendre faire jouer la caution du département.

Le tribunal a de surcroît relevé à juste titre que parmi les convocations produites par la CRCAM D'AQUITAINE, adressées à des membres du conseil général et au payeur départemental, aucune n'avait été émise en vue de la réunion du 29 octobre 1986, ce qui confirme que la prêt consenti à la SARL SOGEVI n'a pas bénéficié de la garantie du département.

Au demeurant, la forme commerciale de la SARL SOGEVI excluait qu'elle pût entrer dans l'objet de la convention, destiné à fixer les conditions de la garantie du département pour le remboursement des prêts spéciaux consentis aux "agriculteurs et ostréiculteurs" sinistrés victimes des gelées du mois de janvier 1985.

Il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté la CRCAM D'AQUITAINE de sa demande formée contre le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE.

- Sur la demande formée à l'encontre du GFA CHATEAU PEYREDOULLE :

La CRCAM D'AQUITAINE conclut principalement à la condamnation en qualité de caution du GFA CHATEAU PEYREDOULLE, et subsidiairement, si la mise hors de cause de ce dernier devait être ordonnée, à la condamnation solidaire des associés Jacques, Bernard et Josette X... pris en leur nom personnel.

Le GFA CHATEAU PEYREDOULLE soutient que l'engagement de caution souscrit au pied de l'acte de prêt du 13 novembre 1986 ne saurait être le fruit du procès-verbal d'assemblée générale ordinaire du 31 octobre 1986 aux termes duquel la collectivité des associés a décidé de donner sa caution au prêt accordé à la SARL SOGEVI, dans la mesure où aucun des quatre signataires ne figure à l'acte en qualité de représentant du GFA, alors que seule la signature du gérant du GFA aurait suffi à engager ce dernier, ce dont il résulte que les signataires se sont engagés à titre personnel et non pour le compte du GFA.

L'appelant fait valoir après avoir renoncé à poursuivre l'une des cautions solidaires, Bernard X..., ce qui la privait au mieux de la part de sa créance correspondant à l'engagement de ce dernier, au pire de la totalité de celle-ci si elle n'avait pas réservé ses droits à l'encontre des autres coobligés, la CRCAM D'AQUITAINE a finalement choisi d'actionner le GFA pour lui permettre de récupérer la totalité de ses droits.

Le GFA fait encore état d'une lettre du 13 septembre 1996 par laquelle le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE aurait reconnu s'être porté caution du prêt, et des dispositions de l'article 12 de la convention du 16 juin 1986 selon lesquelles le département, après avoir désintéressé la Caisse, se réservait le droit "exclusif" de poursuivre les agriculteurs ayant provoqué sa garantie, ce dont il ressortirait que la CRCAM D'AQUITAINE ne pourrait s'adresser qu'au seul département pour recouvrer les sommes dues.

Si les formules manuscrites : "lu et approuvé, bon pour caution solidaire de la somme de huit cent quarante mille francs en principal" ont été portées au bas de l'acte de prêt sous les signatures de quatre personnes différentes sans précision de leurs noms ni qualités, il n'existe aucun doute sur l'identité des signataires qui sont Jacques, Josette, Bernard et Pierrette X..., par ailleurs associés au sein du GFA CHATEAU PEYCHAUD, devenu CHATEAU PEYREDOULLE suivant acte authentique de dépôt de procès-verbal de délibération du 25 février 1989.

Alors qu'aucun des consorts Jacques, Bernard et Josette X... ne conteste figurer parmi les rédacteurs et signataires des engagements de caution, et que l'authenticité des signatures se trouve en tant que de besoin confirmée par la similitude que révèle la comparaison entre celles de l'acte litigieux et celles portées sur le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du GFA CHATEAU PEYCHAUD du 31 octobre 1986, il ressort dudit procès-verbal que "la collectivité des associés" avait décidé de "donner sa caution au prêt plantation accordé par la CRCA de la Gironde, suite au gel climatique de 1984, à la SARL SOGEVI, d'un montant de 840.000,00 F."

Il ne peut être déduit de la circonstance selon laquelle tous les associés, et non le gérant seul, ont signé l'acte de cautionnement, la conséquence que les associés se sont engagés à titre personnel, alors qu'il est constant que le gérant figurait parmi les signataires, ce qui était de nature à engager le GFA, et que le rapprochement entre le cautionnement litigieux et les termes de la délibération du 31 octobre 1986, prise treize jours auparavant, atteste de ce que l'intention des parties a été d'apporter au prêt souscrit par la SARL SOGEVI le cautionnement du GFA CHATEAU PEYCHAUD, propriétaire des fonds qui avait intérêt à ce titre à la réalisation de l'opération.

Au regard de la délibération adoptée au nom de la collectivité des associés, l'absence de précision, dans l'acte de caution, de ce que les signataires sont intervenus pour le compte du GFA n'est pas susceptible d'exclure qu'ils se soient engagés au nom de ce dernier, alors qu'ils en possédaient la qualité d'associés et qu'aucune mention n'a été incluse portant l'indication qu'ils avaient entendu contracter en leur nom personnel.

Le tribunal a par ailleurs observé à juste titre qu'une distinction a été opérée parmi les deux résolutions approuvées lors de l'assemblée générale du 31 octobre 1986, l'une donnant en effet pouvoir de la collectivité des associés à la gérance pour solliciter un prêt de 200.000,00 F destiné à financer l'achat de parcelles, l'autre contenant décision de la collectivité des associés de cautionner le prêt accordé à la SARL SOGEVI.

La nuance ainsi apportée dans la rédaction des deux résolutions est de nature à expliquer que le cautionnement litigieux ait été revêtu de la signature de tous les associés du GFA, plutôt que de celle de son seul gérant.

La renonciation alléguée de la CRCAM D'AQUITAINE à agir contre l'un des associés, en l'occurrence Jacques X..., ne ressort d'aucune des pièces versées aux débats, et ne saurait en particulier résulter de courriers émanant de son frère Bernard faisant état des seules affirmations de Jacques X... quant à la renonciation à poursuites dont ce dernier estimait avoir bénéficié de la part de la banque.

Au demeurant, la demande subsidiaire de condamnation formée par la CRCAM D'AQUITAINE à l'encontre des associés à titre personnel inclut Jacques X... au nombre de ces derniers, ce qui ôte tout crédit à l'argument proposé.

En conséquence, l'allégation du GFA CHATEAU PEYREDOULLE selon laquelle la CRCAM D'AQUITAINE ne l'aurait poursuivi qu'afin de pouvoir récupérer les droits que sa renonciation à poursuivre l'un des associés lui aurait fait perdre, ne peut être considérée comme pertinente.

La lettre du président du conseil général du 13 septembre 1996, contenant l'indication que le département s'était porté caution pour un prêt consenti à la SARL SOGEVI à la suite de calamités agricoles survenues en 1985, ne peut valablement suppléer l'absence d'acte de caution souscrit par le département, mais constituer tout au plus un commencement de preuve par écrit, dont les éléments d'information recueillis par ailleurs infirment la vraisemblance du fait qu'il allègue, et qui ne peut dès lors être valablement invoqué par le GFA CHATEAU PEYREDOULLE comme moyen de preuve de l'engagement du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE en qualité de caution.

Quant à l'article 12 de la convention du 16 juin 1986 passée entre la CRCA de la Gironde et le département, prévoyant qu'après avoir désintéressé la Caisse, le département se réservait le droit exclusif de poursuivre selon les règles de la comptabilité départementale les agriculteurs à l'origine de la mise en jeu de sa garantie, il n'a pas d'autre effet que celui de définir les modalités du recours du département subrogé dans les droits du créancier, le terme "exclusif" ne devant s'entendre que dans les rapports entre la collectivité territoriale et le CREDIT AGRICOLE, sans pouvoir être invoqué pour faire échec, comme semble vouloir le soutenir le GFA, aux actions exercées par la CRCAM D'AQUITAINE à l'encontre d'autres garants que le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE, en vertu de cautionnements distincts que la convention susvisée n'interdisait pas à la Caisse de conclure.

Il ressort de ces éléments que les cautionnements donnés par Bernard X..., Jacques X... et Josette X... au pied de l'acte de prêt du 13 novembre 1986 l'ont été au nom du GFA CHATEAU PEYREDOULLE et non à titre personnel, et il convient en conséquence de confirmer la décision des premiers juges qui ont prononcé condamnation à l'encontre du GFA.

- Sur les demandes formées par les consorts X... :

Bernard X... et son épouse Josette Y..., ainsi que Jacques X... sollicitent la réformation du jugement en ce qu'il a considéré que l'acte de cautionnement pouvait contraindre ses signataires alors qu'il ne satisfaisait pas aux dispositions de l'article 2015 du Code civil, et en ce qu'il a considéré que la CRCAM D'AQUITAINE justifiait de l'existence et de la validité de sa créance.

Jacques X... sollicite en outre l'annulation de son engagement de caution pour dol et la condamnation de la CRCAM D'AQUITAINE à lui payer la somme de 15.000,00 € de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

Dans la mesure toutefois où les prétentions formées à titre principal par la CRCAM D'AQUITAINE à l'encontre du GFA CHATEAU PEYREDOULLE ont été accueillies, aucune condamnation ne sera prononcée contre les consorts X... dont l'engagement n'a été recherché qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le GFA CHATEAU PEYREDOULLE eût été mis hors de cause.

Dans ces conditions, les demandes formées par Bernard X..., Josette X... et Jacques X..., tant à titre principal pour voir rejeter les prétentions formées à leur encontre par le CREDIT AGRICOLE qu'à titre reconventionnel pour voir condamner ce dernier à des dommages et intérêts en réparation du dol qui lui est imputé, apparaissent dépourvues d'objet dès lors que seul le GFA CHATEAU PEYREDOULLE s'est trouvé engagé par le cautionnement litigieux, les consorts X... ne s'étant pas vu reconnaître, à titre personnel, la qualité de caution.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les consorts X... de leurs demandes.

- Sur l'appel incident formé par la CRCAM D'AQUITAINE :

La CRCAM D'AQUITAINE sollicite la réformation du jugement en ce qu'il a limité à la somme de 622.176,04 F la condamnation prononcée contre le GFA CHATEAU PEYREDOULLE, et demande que cette somme soit majorée des intérêts arrêtés à 116.182,64 F à la date du décompte actualisé du 13 février 1998.

Il ressort cependant des mentions de l'acte de cautionnement que l'engagement des associés s'est trouvé limité à hauteur de la somme de 840.000,00 F "en principal", sans mention d'intérêts ni d'accessoires.

L'article 2292 (ancien article 2015) du Code civil prévoyant que le cautionnement doit être exprès et qu'il ne peut être étendu au delà des limites dans lesquelles il a été contracté, la CRCAM D'AQUITAINE n'est pas fondée à réclamer au GFA CHATEAU PEYREDOULLE, qui ne s'est engagé qu'à hauteur du principal de la dette, les intérêts de celle-ci.

Il y a lieu dans ces conditions de débouter la CRCAM D'AQUITAINE de son appel incident.

- Sur les autres demandes :

Le GFA CHATEAU PEYREDOULLE, partie succombante, supportera les dépens de l'appel et sera condamnée à payer à la CRCAM D'AQUITAINE une somme de 2.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu à application des dispositions de ce texte au profit des consorts X... et du DEPARTEMENT DE LA GIRONDE.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Reçoit le GFA CHATEAU PEYREDOULLE en son appel,

Le déclare non fondé et l'en déboute,

Déboute la CRCAM D'AQUITAINE de son appel incident,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 18 mars 2004 par le tribunal de grande instance de BORDEAUX,

Y ajoutant :

Condamne le GFA CHATEAU PEYREDOULLE à payer à la CRCAM D'AQUITAINE la somme de 2.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Déboute les consorts X... et le DEPARTEMENT DE LA GIRONDE de leurs demandes formées en application de ce texte,

Condamne le GFA CHATEAU PEYREDOULLE aux dépens de l'instance d'appel dont distraction au profit de la S.C.P. Michel PUYBARAUD, Avoué à la Cour, de la S.C.P. Sophie LABORY-MOUSSIE et Eric ANDOUARD, de la S.C.P. Stéphan RIVEL et Patricia COMBEAUD, Avoués Associés à la Cour, et de la S.C.P. FOURNIER, Avoués à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Signé par Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président, et par Madame Armelle FRITZ, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0596
Numéro d'arrêt : 04/01767
Date de la décision : 20/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, 29 mars 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-05-20;04.01767 ?
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