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24/01/2008 | FRANCE | N°05/02716

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0163, 24 janvier 2008, 05/02716


ARRET RENDU PAR LA

COUR D' APPEL DE BORDEAUX

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Le : 24 Janvier 2008

CHAMBRE SOCIALE- SECTION B

BAUX RURAUX

No de rôle : 05 / 02716

VB / BFL

Monsieur Guy X...
Mademoiselle Annie X...

c /

Monsieur Dominique Y...

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par lettre simple le :

Grosse délivrée le :

à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues

au deuxième alinéa de l' article 450 du nouveau Code de procédure civile,

Le 24 Janvier 2008

Par Monsieur Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président,
en p...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D' APPEL DE BORDEAUX

--------------------------

Le : 24 Janvier 2008

CHAMBRE SOCIALE- SECTION B

BAUX RURAUX

No de rôle : 05 / 02716

VB / BFL

Monsieur Guy X...
Mademoiselle Annie X...

c /

Monsieur Dominique Y...

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par lettre simple le :

Grosse délivrée le :

à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du nouveau Code de procédure civile,

Le 24 Janvier 2008

Par Monsieur Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président,
en présence de Madame Chantal TAMISIER, Greffier,

La COUR D' APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION B, a, dans l' affaire opposant :

Monsieur Guy X... demeurant...- 33410 GABARNAC
Mademoiselle Annie X... demeurant...- 33410 GABARNAC

représentés par la SCP MAGRET et JANOUEIX, avocats au barreau de LIBOURNE

Appelants d' un jugement rendu le 11 avril 2005 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de BORDEAUX suivant déclaration d' appel en date du 04 Mai 2005,

à :

Monsieur Dominique Y... demeurant...- 33490 PIAN SUR GARONNE

représenté par Maître Guy GRAVELLIER, avocat au barreau de BORDEAUX

Intimé,

rendu l' arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 17 Janvier 2008, devant :

Monsieur Benoit FRIZON DE LAMOTTE, Président,
Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,
Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,
Madame TAMISIER, Greffier,

et qu' il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci- dessus désignés.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 18 juillet 1994 Monsieur et Madame X... ont donné à bail à ferme pour une durée de 9 années à compter du 1er janvier 1994 à Monsieur Y... une exploitation viticole située à SEMENS (parcelles A109- 110, 114 et 119) et GABARNAC (parcelles B 177- 1003- 052- 053- 0166- 0866- 0874- 0074- 0175) d' une superficie de 7 ha 73 ca 56 ca ;
l' état d' entrée dans les lieux précise : " on peut considérer que les parcelles de rouge ont entre 10 et 30 ans et sont dans un état normal avec peu de pieds manquants à part sur une petite parcelle de Merlot où il manque environ 200 pieds. Pour les vignes blanches, elles ont entre 30 et 50 ans et certaines des plus vieilles ont besoin d' être remontées en vigueur. Il manque un peu plus de pieds mais cela reste normal entre 2 et 5 %... "
ce bail s' est trouvé renouvelé le 31 décembre 2002 pour 9 ans.

Par acte du 3 mars 2004 Monsieur et Madame X... ont fait commandement à Monsieur Y... d' avoir à assurer la bonne exploitation du fonds, invoquant un rapport d' expertise amiable de Monsieur Z... du 7 avril 2003.

Le 19 août 2004 Monsieur et Madame X... ont saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BORDEAUX d' une demande en résiliation du bail pour mauvaise exploitation des fonds par application des articles 1766 du Code Civil et L- 411- 27 du Code Rural.

Par jugement du 11 avril 2005 le Tribunal Paritaire a statué ainsi :
" Déboute Monsieur et Madame X... de leur demande en résiliation de bail,
Condamne Monsieur Y... à procéder à ses frais au remplacement du vignoble rouge âgé de moins de 25 ans au jour du présent jugement,
Condamne Monsieur et Madame X... à procéder au remplacement des vignes blanches et rouges à leur frais exclusifs âgés de plus de 25 ans. "

Monsieur et Madame X... ont régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par arrêt du 25 janvier 2007 la présente Cour a ordonné une expertise sur l' état d' entretien des fonds ;
l' expert Monsieur A... a déposé son rapport le 14 août 2007 ;
il a conclu ainsi :
" Le bail écrit de 1994, auquel s' est ajouté le bail verbal de 2001, concernait en très grande majorité des vieilles vignes. Leur âge et leur état précis sont indéterminés à ces dates en raison d' un état des lieux d' entrée succinct ou absent. Les témoignages de voisins apportés par le bailleur indiquent un état normal avec peu de manquants en 1994. La présence de chiendent attestée permet toutefois de supposer un défaut de contrôle de cette mauvaise herbe antérieurement à cette date. Le chiendent est en effet combattu car il contribue à l' affaiblissement des pieds. Aujourd' hui âgées pour la plupart entre 35 et 50 ans, la mortalité naturelle est d' autant plus visible que certaines vignes sont sensibles à l' Eutypiose d' une part, et qu' aucun remplacement des pieds n' a été effectué d' autre part. La parcelle 1003p2 contenant 50 % de manquants est susceptible d' être déclassée par l' INAO en cas de contrôle en raison des manquants trop importants. L' exploitant pourrait être tenu par cet organisme de l' arracher et de la replanter. Ce problème risque également de se poser pour les parcelles A 119p2, B 177 et B 153p2. L' ensemble représente environ 1 ha. Pour les autres parcelles, un programme massif de complantation doit être engagé rapidement pour que les manquants ne dépassent pas 5 %. L' entretien du palissage est suivi et le contrôle des mauvaises herbes, à l' exception d' une parcelle, paraît correct. Des modifications et un manque d' entretien dans les aménagements canalisant les écoulements des eaux de ruissellement ont pu être constatés. Leur ampleur est cependant impossible à mesurer du fait de l' absence de l' indication de ces aménagements tant sur l' état des lieux d' entrée 1994 que pour la prise à bail de 2001. Les témoignages apportés par Monsieur X... ne permettent que de confirmer le manque d' entretien. En conclusion, à l' exception d' un hectare de vignes dont les manquants pourraient remettre en question tout ou partie de leur classement, l' état actuel du vignoble pris à bail, renouvelé en 2003, ne compromet pas à court terme la bonne exploitation du fonds. Des travaux d' arrachage et replantation (parcelle 1003p2 en particulier), de complantation, et d' aménagements fonciers pour éviter un excès d' érosion des sols, doivent toutefois être entrepris sans délai pour éviter la dégradation rapide du fonds ".

Monsieur et Madame X... par conclusions écrites et développées à l' audience auxquelles il convient de se référer, demandent à la cour de :
" Réformer le jugement rendu par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BORDEAUX le 11 avril 2005.
Vu les articels 1766 du Code Civil, L 411- 27 et L 411- 53 du Code Rural,
Vu l' arrêté Préfectoral du 8 septembre 2000.
A titre principal
Prononcer la résiliation du bail conclu entre les parties le 18 juillet 1994.
Condamner Monsieur Y... à verser aux consorts X... la somme de 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts.
A titre subsidiaire,
Débouter Monsieur Y... de l' intégralité de ses demandes reconventionnelles,
Condamner Monsieur Y..., sous astreinte, à exécuter à ses frais exclusifs les travaux préconisés par l' Expert pour préserver la bonne exploitation du fonds tant en ce qui concerne les complantations qu' en ce qui concerne les aménagements fonciers.
Condamner Monsieur Y... à verser aux consorts X... la somme de 2. 000 euros sur le fondement des dispositions de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

De son côté Monsieur Y... par conclusions écrites et développées à l' audience auxquelles il convient de se réferer demande à la Cour de :
" Déclarer Monsieur et Madame X... irrecevables et en tout cas mal fondés en l' appel qu' ils ont formé contre le jugement du 11 avril 2OO5.
Constater que Monsieur et Madame X... à qui incombe la charge de la preuve, ne démontrent aucunement un quelconque fait fautif imputable à leur fermier, a fortiori un quelconque " agissement de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ".
Dire et juger, au vu notamment du rapport d' expertise judiciaire, que la pérennité du bien loué n' est nullement compromise.

Débouter en conséquence Monsieur et Madame X... de leur demande en résiliation de bail, comme de leurs autres demandes.
Faisant droit à l' appel incident de Monsieur Y..., réformer le même jugement en ce que le Tribunal a condamné Monsieur Y... " à procéder à ses frais au remplacement du vignoble rouge âgé de moins de 25 ans au jour du présent jugement.
Dire et juger que les frais de remplacement du vignoble incombent intégralement au bailleur.
Dire et juger que l' obligation de remplacement des pieds manquants, dont l' absence ou la mortalité est constatée par l' expert des bailleurs le 1er avril 2003, incombe nécessairement au bailleur dès lors que l' arrêté préfectoral du 8 septembre 200 portant approbation du contrat- type départemental de bail à ferme n' est devenu applicable dans les relations contractuelles entre les parties qu' au 1er janvier 2003, date de renouvellement du bail.
Condamner en conséquence Monsieur et Madame X..., sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l' arrêt à intervenir, à faire procéder à leurs frais exclusifs au remplacement des pieds manquants ou morts.
Les condamner également au paiement d' une indemnité de 5. 000 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu' aux entiers dépens sur le fondement de l' article 696 du même code. "

DISCUSSION

La contestation est limitée par les parties au bail du 18 juillet 1994,
il convient d' en prendre acte.

Sur la résiliation du bail

Par application de l' article L. 411- 53- 2o du Code Rural, le bailleur est recevable à poursuivre la résiliation du bail au cas ou
" 2o les agissements du preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation en fonds ",
et les motifs de la résiliation doivent être appréciés au jour de la demande en justice.

Monsieur et Madame X... à l' appui de leur appel font d' abord valoir :
- que la rigole aménagée sur la parcelle A119 a été comblée, les eaux s' écoulant désormais entre deux rangs au bas de la parcelle,
- que sur cette même parcelle le talus n' existe plus et doit être rétabli,
- que sur la parcelle A114p2 le drain cassé doit être réparé,
- que sur le haut de la parcelle B 166, le fossé n' a jamais été entretenu,
- que dans la parcelle B153p2 le ruissellement des eaux naturelles entraîne certains éléments fins du sol et ce qui doit être réparé,
- que ce défaut d' entretien est imputable au preneur selon l' arrêté préfectoral du 8 septembre 2000, applicable lors du renouvellement du bail le 9 novembre 2002 qui précise : " charges et conditions le preneur s' engage à jouir des biens loués suivant leur destination, en fermier soigneux et de bonne foi, conformément à l' usage des lieux... Il fera en temps et saison convenables tous les fossés, rigoles et saignées nécessaires à l' assainissement des terres et des prés et maintiendra le bon écoulement des eaux ",
- qu' il n' a pas été remédié à ces défauts d' entretien malgré mise en demeure,
- que sont ainsi caractérisés les agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds justifiant la résiliation du bail au sens des dispositions de l' article 411- 53- 2 du Code Rural.

Toutefois Monsieur Y... fait justement valoir :
- que selon les constatations de l' expert, " la plupart des parcelles se trouvent plantées dans des pentes plus ou moins marquées sur des sols sensibles à l' érosion ",
- qu' il n' est rien précisé dans l' état des lieux sur les aménagements préexistants,
- que selon les constatations précises de l' expert le rétablissement du fossé et du talus dans la parcelle A119 entraînant une légère érosion, tout comme le drain qui doit être réparé sur la parcelle A114p2, le récurage du fossé de la parcelle B166, entrainent des travaux d' entretien et ne caractérisent pas des agissements du preneur susceptibles de fonder la résiliation du bail.

Monsieur et Madame X... ajoutent par ailleurs :
- que Monsieur Y... exploite au maximum les vignes prises à bail en 1994, se désintéresse de la pérennité du vignoble,
- que l' absence de complantation de la parcelle 1003p2 présente un nombre de manquants tel qu' elle pourrait faire l' objet d' un déclassement par l' INAO,
- que ces agissements du preneur justifient encore la résiliation du bail.

Toutefois il convient de constater :
- que les faits invoqués par le bailleur sont antérieures au renouvellement du bail accepté sans réserve par le bailleur,
- qu' en application des articles 1719- 4o du Code Civil et L415- 8 du Code Rural, en l' absence de dérogation de l' arrêté préfectoral, c' est le bailleur qui à la charge de préserver la qualité générale des plantations,
- qu' en vertu de l' arrêté préfectoral du 15 novembre 1993 applicable au bail initial.
" Dans le cas où le bail concerne le fermage des vignes le bailleur doit assurer la qualité et la permanence des plantations en application des articles 1719 du Code Civil et de l' article L. 415- 8 du Code Rural dans les conditions définies au paragraphe D de l' article 4 de l' arrêté préfectoral du 22 mai 1987 ",
- qu' en application de l' arrêté préfectoral du 8 septembre 2000, applicable lors du renouvellement du bail :
" Concernant la complantation ou racotage qui consiste au remplacement pied par pied des ceps victimes d' accident ou détruits par la maladie dont le preneur aura à sa charge exclusive les frais de racotage (plants, main d' oeuvre, piquets) jusqu' à la 25ème année de la plantation ",
- que les marquants constatés page 9 du rapport sur les parcelles A119p2, A114p3, B177, B1003p2, s' ils doivent être réparés, ne caractérisent en tout cas pas les agissements du preneur de nature à justifier la résiliation au sens des dispositions plus haut rappelées.

Sur les complantations ou racottages

Monsieur et Madame X... à l' appui de leur appel font valoir :

- que l' arrêté préfectoral du 8 septembre 2000 prévoit en son article 7- 3 précise que :
- " Concernant la complantation ou racotage qui consiste au remplacement pied par pied des ceps victimes d' accident ou détruits par la maladie dont le preneur aura à sa charge exclusive les frais de racotage (plants, main d' oeuvre, piquets) jusqu' à la 25ème année de la plantation ",
- " que bien que certains pieds de vigne soient âgés de plus de 25 ans, les frais de racottage doivent être mis intégralement à la charge du preneur qui par sa seule attitude a entraîné une dépréciation progressive et manifeste des lieux ".

Toutefois, il convient de constater :
- qu' il n' est démontré en l' état, aucun préjudice résultant du défaut de racottage pendant le cours du bail,
- qu' à l' exception de la parcelle A 114 plantée en partie en 1986, à la date de la demande du renouvellement du bail, toutes les vignes avaient plus de 25 ans,

Dès lors les obligations des parties doivent être fixées comme il suit au dispositif.

Sur les frais irrépétibles

Il est équitable par application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles exposés par elles.

DECISION

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement en ce que Monsieur et Madame X... ont été déboutés de leurs demandes en résiliation du bail consenti à Monsieur Y...,

Le réforme pour le surplus,

Condamne Monsieur Y... :
1o à procéder à ses frais à la restauration du fossé sur la parcelle A 119 et du talus en bas de parcelle, à la réparation du drain sur la parcelle A 114p2, et à la reprise du passage de charrue en bas de parcelle,
2o à procéder à ses frais exclusifs du remplacement des pieds manquants ou morts sur la parcele A114p1,

Condamne Monsieur et Madame X... à procéder à leurs frais exclusifs du remplacement des pieds manquants ou morts sur les autres parcelles,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Les condamne aux dépens de première instance et d' appel par moitié.

Signé par Benoît Frizon de Lamotte, Président, et par Chantal Tamisier, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Chantal Tamisier, Benoît Frizon de Lamotte,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0163
Numéro d'arrêt : 05/02716
Date de la décision : 24/01/2008

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-01-24;05.02716 ?
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