ARRET RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX--------------------------Le : 21 Novembre 2006DEUXIÈME CHAMBRENo de rôle : 05/02936S.A. BANQUE POPULAIRE OCCITANEc/Maître Yannick GUGUENS.C.E.A. MOULIN DU LOTNature de la décision : AU FOND
SUR RENVOI DE CASSATIONGrosse délivrée le :à :
Rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 - 2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le 21 Novembre 2006
Par Monsieur Serge SAINT-ARROMAN, Président,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, DEUXIÈME CHAMBRE, a, dans l'affaire opposant :
S.A. coopérative BANQUE POPULAIRE OCCITANE venant aux droits et obligations de la BANQUE POPULAIRE DU QUERCY ET DE L'AGENAIS, suite à un traité de fusion, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, 52-54 place Jean Jaurès - 81000 ALBI
représentée par la S.C.P. CASTEJA-CLERMONTEL etamp; JAUBERT, avoués à la Cour, et assistée de Maître WICKERS, avocat au barreau de Bordeaux,
Demanderesse sur renvoi de cassation d'un arrêt (Y02-12.863) de la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de Cassation du 15 mars 2005, en suite d'un arrêt (RG 01/149) rendu le 16 janvier 2002 par la Cour d'appel d'Agen, sur un appel d'une ordonnance (96/103) du juge commissaire du Tribunal de Grande Instance d'Agen en date du 31 janvier 2001, suivant déclaration de saisine en date du 12 mai 2005,
à :
Maître Yannick GUGUEN, membre de la S.C.P. GUGUEN-STUTZ, ès-qualités de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la
S.C.E.A. MOULIN DU LOT, demeurant 22 boulevard Saint Cyr - B.P. 179 - 47304 VILLENEUVE SUR LOT
représenté par la S.C.P. RIVEL etamp; COMBEAUD, avoués à la Cour,
S.C.E.A. MOULIN DU LOT, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, "Verdier" - 47110 SAINTE-LIVRADE SUR LOT
représentée par la S.C.P. ARSÈNE-HENRY et LANOEON, avoués à la Cour, et assistée de Maître Catherine JOFFROY, avocat au barreau de Villeneuve sur Lot,
Défendeurs sur renvoi de Cassation,
rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue en audience publique et solennelle, le 10 octobre 2006 devant :
Monsieur Serge SAINT-ARROMAN, Président,
Monsieur Bernard ORS, Conseiller,
Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller,
Madame Véronique X..., Greffier,
et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats ;
Vu le visa de Madame le Substitut Général qui a été régulièrement avisée de la date d'audience.
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La S.C.E.A. Moulin du Lot a été placée en redressement judiciaire le 2 février 1996.
La Banque Populaire Occitane, ayant déclaré une créance de 1.958.188,77 francs se fondant sur 12 traites escomptées par elle, tirées sur la S.C.E.A. Moulin du Lot par le G.A.E.C. du Rouyre apparemment acceptées par la S.C.E.A. Moulin du Lot et non payées à leur échéance, la S.C.E.A. Moulin du Lot a contesté cette déclaration au motif qu'elle n'avait pas accepté les traites, celles-ci portant
de fausses signatures apposées par le dirigeant du G.A.E.C. du Rouyre, le tireur.
Attendu que le juge commissaire de la S.C.E.A. Moulin du Lot a été saisi et a statué par une ordonnance du 31 janvier 2001.
Il est établi que lorsque le juge commissaire a statué les signatures portées sur ces traites étaient de fausses signatures, le dirigeant du G.A.E.C. du Rouyre, Monsieur Y... ayant reconnu être l'auteur de ces fausses signatures au cours d'une information pénale.
Le juge commissaire a par suite décidé que la créance de la Banque Populaire Occitane ne pouvait être admise sur le fondement du droit cambiaire.
Attendu que la Banque Populaire Occitane demandait cependant au juge commissaire d'admettre sa créance pour une somme équivalente en soutenant que la S.C.E.A. Moulin du Lot avait participé à la création de son préjudice en acceptant dans le passé que le G.A.E.C. du Rouyre tire ainsi sur elle des traites non causées et imite sa signature afin de se procurer du crédit en les escomptant, pour ensuite lui verser par chèque le montant des traites à l'échéance afin de lui permettre de payer la banque escompteuse bénéficiaire.
Attendu que le juge commissaire a déclaré cette demande irrecevable comme supposant qu'il statue sur une question de responsabilité.
Sur appel de la Banque Populaire Occitane qui soutenait qu'en fait il était établi par l'information pénale que sept traites seulement sur les dix portaient une fausse signature, et que les traites effectivement falsifiées n'étaient pas de véritables effets falsifiés mais des effets de complaisance dont il n'était pas possible de lui opposer la nullité dès lors qu'elle était porteur de bonne foi, la Cour d'appel d'Agen, par arrêt du 16 janvier 2002, a confirmé l'ordonnance en affirmant que la demande de dommages et intérêts fondée sur une prétendue faute de la S.C.E.A. Moulin du Lot avait un
fondement juridique distinct de celui qui autorise le juge commissaire à statuer sur l'admission de créances et n'entrait pas dans les prévisions de l'article 101 de la loi du 25 janvier 1985.
Cet arrêt a été cassé par arrêt de la Cour de cassation du 15 mars 2005 aux motifs :
- d'une part, qu'après avoir déclaré irrecevable la demande de dommages et intérêts de la banque au motif que celle-ci, fondée sur une prétendue faute commise par la S.C.E.A. Moulin du Lot, question ayant un fondement distinct et n'entrant pas dans les prévisions de l'article 101 de la loi du 25 janvier 1985 devenue l'article L 621-104 du code du commerce, elle était tenue de constater que la contestation ne relevait pas de la compétence du juge commissaire et devait inciter les parties à saisir le juge compétent ;
- d'autre part, qu'en retenant qu'aucun des chèques, ayant pour bénéficiaire la S.C.E.A. Moulin du Lot présentés comme venant en cours d'ouverture d'effets tirés sur cette dernière, ne comportait soit des sommes soit des dates correspondant exactement aux traites supposées devoir être réglées grâce à ces chèques, alors que le chèque de 52.875 francs tiré le 23 août 1995 avait exactement le même montant que la lettre de change tirée le 25 août par le G.A.E.C. du Rouyre sur la S.C.E.A. Moulin du Lot, la cour avait dénaturé les termes clairs et précis des deux documents.
La Cour de cassation a renvoyé la cause et les parties devant la Cour de céans.
La Banque Populaire Occitane a sollicité l'instruction de l'affaire au rôle le 12 mai 2005 et déposé ses dernières conclusions le 8 septembre 2006.
La S.C.E.A. Moulin du Lot a déposé ses dernières conclusions le 21 avril 2006.
Maître Guguen, ès-qualités de représentant des créanciers de la
S.C.E.A. Moulin du Lot, a déposé ses dernières conclusions le 20 janvier 2006.
Vu les dites conclusions.
MOTIFS
Attendu que la Banque Populaire Occitane soutient pour l'essentiel que les traites litigieuses sont en réalité des traites de complaisance émises avec l'accord de la S.C.E.A. Moulin du Lot, tirée, et que par suite celle-ci ne peut lui opposer leur nullité tenant à la fausseté de la signature figurant sur ces traites, dès lors qu'elle est elle-même porteur de bonne foi de ces traites.
Attendu qu'elle se fonde pour énoncer une telle affirmation sur la circonstance que la S.C.E.A. Moulin du Lot aurait par le passé honoré des traites revêtues d'une fausse mention d'acceptation et sur le fait qu'elle encaissait et portait à son compte ouvert dans les livres de la Banque Populaire Occitane les chèques que le bénéficiaire des escomptes frauduleux lui adressait à l'approche de l'échéance des traites pour lui permettre d'en régler le montant.
Attendu cependant que si ces faits établissent que la S.C.E.A. Moulin du Lot a pu par cette complaisance dans le passé provoquer la réitération par le G.A.E.C. du Rouyre de semblables agissements frauduleux avec l'émission des traites litigieuses et la falsification de la signature du tiré, il demeure constant que ces traites falsifiées ne peuvent être payées en application des règles du droit cambiaire faute de porter la signature du tiré.
Attendu que c'est donc à bon droit que le juge commissaire a refusé de prononcer l'admission de leur montant au passif.
Attendu que la question de savoir si, par sa prétendue complaisance par le passé, la S.C.E.A. Moulin du Lot a été à l'origine des tirages frauduleux et a engagé sa responsabilité au point qu'il soit permis de prononcer sa condamnation à régler le montant de ces traites sur
le fondement de l'article 1382 du code civil relève de la compétence du tribunal de grande instance d'Agen qu'il appartient aux parties de saisir.
Attendu que l'équité ne justifie pas l'allocation en l'état d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS,
la Cour,
confirme l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la déclaration de créance de la Banque Populaire Occitane fondée sur le droit cambiaire.
Dit que l'appréciation de la responsabilité de la S.C.E.A. Moulin du Lot relève de la compétence du tribunal de grande instance d'Agen.
Invite les parties à saisir cette juridiction.
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne la Banque Populaire Occitane aux dépens, application étant faite de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Serge SAINT-ARROMAN, Président, et par Madame Véronique X..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.