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30/10/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007630940

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0289, 30 octobre 2006, JURITEXT000007630940


ARRÊT RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX--------------------------FRLe : 30 OCTOBRE 2006 PREMIÈRE CHAMBRE SECTION ANo de rôle : 06/03367Monsieur Jacques André Guy SENTEXMadame Catherine Michelle Agnès X... épouse Y.../S.A. CLAIRSIENNE D'HLM, pris en la personne de ses représentants légaux domicilié en cette qualité au siège social Nature de la décision : AU FOND

Jonction avec le numéro 06/02986

Grosse délivrée le :aux avoués

Rendu par mise à disposition au Greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'articl

e 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 30 octobre 2006

Par Monsieur A...

ARRÊT RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX--------------------------FRLe : 30 OCTOBRE 2006 PREMIÈRE CHAMBRE SECTION ANo de rôle : 06/03367Monsieur Jacques André Guy SENTEXMadame Catherine Michelle Agnès X... épouse Y.../S.A. CLAIRSIENNE D'HLM, pris en la personne de ses représentants légaux domicilié en cette qualité au siège social Nature de la décision : AU FOND

Jonction avec le numéro 06/02986

Grosse délivrée le :aux avoués

Rendu par mise à disposition au Greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 30 octobre 2006

Par Monsieur Alain COSTANT, Président,

en présence de Madame Chantal Z..., Greffier,

La A... d'APPEL de BORDEAUX, PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :

Monsieur Jacques André Guy B... le 26 Décembre 1950 à VILLENAVE D'ORNON (33140)de nationalité Française, demeurant 40 rue du Grand Lebrun - 33200 BORDEAUX

Madame Catherine Michelle Agnès X... épouse C... le 27 Avril 1959 à LA FALAISE (CALVADOS)de nationalité Française, demeurant 40 rue du Grand Lebrun - 33200 BORDEAUXreprésentés par la SCP GAUTIER etamp; FONROUGE, avoués à la Courassistés de Me Lionel RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX

Appelants d'un jugement rendu le 09 mai 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 12 juin 2006 et assignation à jour fixe du 23 juin 2006,

à :

S.A. CLAIRSIENNE D'HLM, pris en la personne de ses représentants légaux domicilié en cette qualité au siège social sis 223 avenue Emile Counord - 33081 BORDEAUX CEDEXreprésentée par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL etamp; JAUBERT, avoués à la A..., assistée Me Fabrice DELAVOYE substituant Me Yves DELAVALLADE, avocats au barreau de BORDEAUX

Intimée,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique, le 25 Septembre 2006 devant :

Monsieur Alain COSTANT, Président,

Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller,

Madame Elisabeth LARSABAL, Conseiller,

Assistés de Madame Chantal Z..., Greffier,

Et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats ;

Par jugement du 9 mai 2006, auquel la A... se réfère expressément pour l'exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, la Première Chambre Civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, dans l'instance introduite par Jacques D... et Catherine X..., son épouse, (ci-après les époux D...) à l'encontre de la S.A. CLAIRSIENNE d'H.L.M. afin de voir juger qu'ils

ont acquis par prescription trentenaire une servitude de surplomb du fait d'une corniche construite sur leur immeuble et de voir en conséquence ordonner la suspension des travaux envisagés par la S.A. CLAIRSIENNE d'H.L.M. portant atteinte à ce droit, a:

- déclaré les époux D... irrecevables en leur action possessoire;

- débouté la S.A. CLAIRSIENNE de sa demande reconventionnelle en démolition de la corniche ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- laissé à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés.

Les époux D... ont relevé appel de cette décision le 12 juin 2006. Cette procédure était enrôlée au greffe sous le numéro 2986 de l'an 2006.

Suite à une ordonnance rendue sur requête par le Premier Président le 16 juin 2006 les autorisant à assigner à jour fixe pour l'audience du 25 septembre 2006 à 14 heures, les époux D... ont fait assigner la S.A. CLAIRSIENNE D'H.L.M. selon procès-verbal de remise à l'étude d'huissier, ce dernier ayant relevé la certitude du domicile du destinataire de l'acte par la présence de son nom sur le tableau des occupants et par la présence d'une enseigne commerciale.

Cette procédure était enrôlée au greffe sous le numéro 3367 de l'an 2006.

Les époux D..., demandent à la A..., réformant dans son intégralité le jugement déféré,

à titre principal,

- de faire interdiction à la S.A. CLAIRSIENNE de porter atteinte soit par démolition, soit en la masquant à la corniche de leur immeuble ;

à titre subsidiaire,

- de dire et juger qu'en application des articles 637, 2228 et 2229

du Code Civil la corniche de leur immeuble bénéficie d'une servitude de surplomb sur environ un mètre, sur les deux côtés de leur immeuble ;

- de condamner la S.A. CLAIRSIENNE à leur payer la somme de 3 000 euros au tire de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre tous les dépens.

Ils font valoir que la situation de la corniche de leur immeuble, surplombant le fonds voisin du côté où leur immeuble est en limite séparative, est la même depuis la construction de leur immeuble il y a une centaine d'années. Ils précisent que la S.A. CLAIRSIENNE D'H.L.M. a acquis les parcelles N.A. 44, 45, 46 et 47 en vue de la construction d'un ensemble immobilier au ras de leur immeuble côté Nord, ce qui aura pour effet de porter atteinte à la corniche par son arasement et ainsi à la servitude de surplomb acquise par usucapion. Ils soulignent que leur action possessoire en dénonciation de nouvel oeuvre a été accueillie par le Juge des Référés par ordonnance du 3 avril 2006. Ils soutiennent que le premier Juge, saisi d'une action possessoire, a à tort disqualifié celle-ci en action confessoire et cru devoir statuer au pétitoire, ajoutant que le Juge des référés avait pris soin de préciser "jusqu'à la décision au fond sur l'instance en dénonciation de nouvel oeuvre". Subsidiairement au fond sur l'action pétitoire il font valoir qu'aucun texte, ni aucune jurisprudence n'excluent le jeu de la servitude acquisitive lorsqu'elle porte sur un élément décoratif alors que de surcroît, imbriquée dans le mur où elle est construite, elle constitue un immeuble par destination. Ils soutiennent par ailleurs que cette servitude qui est du fait de l'homme, portant sur une chose susceptible de possession et qui est dans le commerce juridique est bien utile pour remplir les conditions de l'article 2229 du Code Civil.

La S.A. CLAIRSIENNE d'H.L.M. dans ses conclusions signifiées et déposées au greffe le 22 septembre 2006, demande à la A... de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux D... de leur action pétitoire après avoir déclaré irrecevable leur action possessoire. A défaut, de dire non fondée leur action possessoire alors qu'ils ne rapportent pas la preuve d'une servitude utile et que leur possession est entachée d'équivoque. Elle demande par contre à la A..., réformant le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle, de dire et juger que le surplomb de la corniche des époux D... sur son terrain constitue un empiétement et de condamner les époux D... à procéder à l'arasement de la corniche sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de quinzaine après notification de la décision à intervenir, ou en tout cas l'autoriser à procéder à cet arasement dans le cadre de ses travaux. Elle sollicite enfin la condamnation des époux D... à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre tous les dépens.

Elle soutient tout d'abord qu'en revendiquant la prescription acquisitive de la servitude de surplomb que leur confère la corniche, les époux D... ont exercé l'action pétitoire et ne sont plus recevables à agir au possessoire aux termes de l'article 1266 du Nouveau Code de Procédure Civile comme l'a justement retenu le Tribunal. Elle ajoute que les époux D... ne sauraient ainsi reprocher à ce dernier d'avoir violé la règle du non cumul du possessoire et du pétitoire dès lors qu'ils ont eux-mêmes fait évoluer le litige en formant des demandes au pétitoire.

Elle fait par ailleurs valoir alors qu'aucun titre ne fait état de la servitude qu'ils revendiquent, les époux D... ne sauraient invoquer l'acquisition de celle-ci par prescription trentenaire en l'absence de toute possession utile et d'acte positif de revendication à

l'égard du propriétaire du fonds voisin. Elle ajoute que les époux D... ne peuvent invoquer une possession affectée d'équivoque dès lors que le simple débord sans utilité de leur corniche ne peut révéler une volonté d'avoir une emprise sur le fonds voisin et d'usucaper.

Elle soutient que la corniche litigieuse constitue un empiétement portant atteinte à sa propriété et qu'elle est ainsi fondée à solliciter son arasement.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu qu'il convient tout d'abord d'ordonner la jonction des procédures suivies au greffe sous le numéros 2986 et 3367 de l'an 2006 qui ont trait à l'appel du même jugement ;

Attendu alors que dans leur assignation à jour fixe devant le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 2 mars 2006 les époux D... demandaient : "dire et juger que les époux D... sont recevables et fondés à revendiquer la prescription acquisitive de la servitude de surplomb que leur confère la corniche construite tout au long de leur immeuble" c'est par de justes motifs que la A... fait siens que le premier Juge a considéré que les époux D... exerçaient une action confessoire dès lors qu'au delà de la simple protection possessoire ils revendiquaient la prescription acquisitive de la servitude de surplomb que leur conférait la corniche de leur immeuble et qu'ils n'étaient en conséquence plus recevables à agir au possessoire, leur demande devant seulement être examinée au pétitoire ;

Attendu que selon l'article 637 du Code Civil, invoqué par les époux D..., une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire ; que les servitudes s'acquièrent par ailleurs par prescription dans le cadre des dispositions de l'article 2229 du Code

Civil aux termes duquel "pour pouvoir prescrire il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique non équivoque à tire de propriétaire" ;

Attendu alors qu'il n'était pas contesté que la corniche en cause avait été édifiée avec l'immeuble il y a plus de trente ans, les époux D... reprochent justement au premier Juge d'avoir estimé qu'ils ne justifiaient pas d'une possession utile pour prescrire dès lors que la corniche, élément décoratif, ne présentait aucune utilité pour la construction ; qu'il résulte en effet des photographies régulièrement produites aux débats que l'immeuble en cause de type "chartreuse", ancien et de caractère forme un tout sur le plan architectural dans lequel la corniche s'intègre à cet ensemble, faisant partie intégrante de l'immeuble pour être surmontée d'une balustrade en pierre dans laquelle est intégré un fronton ; qu'ainsi les époux D... pouvaient se prévaloir d'une possession utile pour prescrire, la corniche présentant un avantage pour l'usage, l'utilité et l'agrément de leur fonds en ce qu'elle faisait partie de l'architecture même de leur immeuble ;

Attendu que par ailleurs cette possession de la servitude de surplomb était bien continue, ininterrompue, paisible, publique et non équivoque dès lors que la corniche surplombait le fonds voisin depuis toujours au vu et au su des propriétaires successifs de celui-ci, ce qui fait qu'aujourd'hui l'intimée n'est pas fondée à soutenir que la servitude de surplomb n'était pas de nature à éveiller l'attention de ces mêmes propriétaires et de provoquer au besoin leur contradiction ;

Attendu qu'il convient dès lors, infirmant le jugement déféré, de faire droit aux demandes des époux D... dans les termes du dispositif ci-après, la S.A. CLAIRSIENNE d'H.L.M. étant corrélativement déboutée de toutes ses demandes ;

Attendu que succombant la S.A. CLAIRSIENNE supportera les entiers dépens et ne saurait voir accueillie sa demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'équité commandant qu'il soit fait application de celui-ci au profit des époux D... en leur allouant la somme de 2 000 euros ;

P A R C E S M O T I F SLA A...,

Ordonne la jonction des procédures suivies au greffe sous les numéros 2986 et 3367 de l'an 2006.

Reçoit les époux D... en leur appel et le dit bien fondé.

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :

Dit que du fait de la corniche intégrée à leur immeuble les époux D... bénéficient d'une servitude de surplomb sur le fonds voisin acquise par prescription.

Fait en conséquence interdiction à la S.A. CLAIRSIENNE d'H.L.M. de porter atteinte à la corniche dont s'agit soit par démolition, soit en la masquant.

Déboute la S.A. CLAIRSIENNE d'H.L.M. de toutes ses demandes.

Condamne la S.A. CLAIRSIENNE D'H.L.M. à payer aux époux D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel et, en ce qui concerne ces derniers, autorise la S.C.P. GAUTIER et FONROUGE, avoué à la A..., à recouvrer directement ceux dont elle a pu faire l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Alain COSTANT, Président, et par Madame Chantal Z..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0289
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007630940
Date de la décision : 30/10/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-10-30;juritext000007630940 ?
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