La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/10/2006 | FRANCE | N°05/03050

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0289, 30 octobre 2006, 05/03050


ARRÊT RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX-------------------------- Le : 30 OCTOBRE 2006PREMIÈRE CHAMBRE SECTION ANo de rôle : 05 / 03050S. C. P. Z...-A...-C..., agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social c / Madame Annie X... de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : aux avoués
Rendu par mise à disposition au Greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450- 2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,
Le 30 Octobre 2006
Par Monsieur Alain C

OSTANT, Président,
en présence de Madame Chantal Y..., Greffier,
La COUR d'APP...

ARRÊT RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX-------------------------- Le : 30 OCTOBRE 2006PREMIÈRE CHAMBRE SECTION ANo de rôle : 05 / 03050S. C. P. Z...-A...-C..., agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social c / Madame Annie X... de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : aux avoués
Rendu par mise à disposition au Greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450- 2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,
Le 30 Octobre 2006
Par Monsieur Alain COSTANT, Président,
en présence de Madame Chantal Y..., Greffier,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :
S. C. P. Z...-A...-C..., agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis 10 cours de Gourgues-BP 591-33000 BORDEAUXreprésentée par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL et amp ; JAUBERT, avoués à la Cour, et assistée de Me Dominique LAPLAGNE subsituant Me Francis BARRIERE, avocats au barreau de BORDEAUX
Appelante d'un jugement rendu le 19 avril 2005 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 17 mai 2005,
à :
Madame Annie X... le 25 Août 1962 à FLOIRAC (17120), de nationalité Française, Profession : Employé de banque, demeurant...
FLOIRACreprésentée par la SCP GAUTIER et amp ; FONROUGE, avoués à la Cour, et assistée de Me Christine ROUSSEL, avocat au barreau de BORDEAUX
Intimée,
Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique, le 25 Septembre 2006 devant :
Monsieur Alain COSTANT, Président,
Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller,
Madame Elisabeth LARSABAL, Conseiller,
Assistés de Madame Chantal Y..., Greffier,
Et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats ; * * *
Par jugement du 19 avril 2005, auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, la première chambre civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX dans l'instance opposant Annie X... à la SCP de notaires Georges Z..., Martial A..., Marie-José C... tendant à rechercher la responsabilité civile professionnelle de celle-ci, a :
- dit que la SCP Z...-A...-C... a commis une faute engageant sa responsabilité civile ;
- l'a condamnée à payer à Annie X... la somme de 129. 561, 68 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'une indemnité de 2. 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les dépens.
Le 17 mai 2005, la SCP Z...-A...-C... a relevé appel de ce jugement.
Dans ses conclusions signifiées et déposées au greffe le 15 septembre 2005, elle demande à la Cour de :
- réformer la décision entreprise ;
- débouter Annie X... de l'intégralité de ses prétentions ;
- la condamner à lui payer une indemnité de 2. 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.
Elle fait valoir que la responsabilité civile professionnelle d'un notaire suppose la réunion de trois éléments, soit une faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux alors qu'elle n'a commis aucune faute.
Elle soutient qu'une clause d'accroissement en usufruit, voulue lors de la rédaction de l'acte par les concubins, confère à chacun des copropriétaires d'un bien immobilier un avantage aléatoire. Elle précise que les conséquences de la clause ont été exposées par le notaire instrumentaire et sont relatées dans l'acte lui même en page 3, ce qui fait que le notaire n'a commis aucune faute dans son obligation d'information. Elle souligne que même en l'absence de preuve qu'elle ait rempli son devoir d'information, Annie X... n'a subi qu'une perte de chance de choisir un autre mécanisme juridique, qui ne peut être évaluée qu'à un très faible taux dès lors que lors de la rédaction de l'acte les concubins
n'envisageaient pas le risque d'une séparation.
Dans ses conclusions signifiées et déposées au greffe le 23 décembre 2005, Annie X... demande à la Cour de :
- confirmer la décision entreprise ;
- condamner la SCP Z...-A...-C... à lui payer la somme supplémentaire de 2. 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.
Elle rappelle que selon une exigence jurisprudentielle, tout notaire doit prendre la précaution de se préconstituer les preuves de ses diligences et s'assurer que son devoir d'information est doublé d'une efficacité technique et pratique. Elle fait valoir qu'ayant été dans l'obligation dans le cadre d'une vente immobilière de s'adresser à un notaire, ce dernier devait conseiller utilement ses clients en attirant leur attention sur la portée et le risque de l'engagement souscrit, en évitant l'insertion dans l'acte d'une clause sans intérêt juridique, ni successoral, comme en l'espèce alors que d'autres formules étaient envisageables. Elle précise que l'obligation de conseil du notaire, d'ordre public, doit être complète, adaptée à l'âge des clients et à leur situation juridique, et doit attirer leur attention sur l'importance et les risques de leurs engagements, ce qui n'a pas été fait. Elle ajoute qu'elle a subi un préjudice direct, actuel et certain alors que seul Alain A... bénéficie de la jouissance de l'immeuble commun qu'elle a dû quitter lors de leur séparation et qui ne peut être partagé en raison de la clause litigieuse.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 septembre 2006. Motifs de la décision :
Attendu qu'il est constant que suivant acte reçu le 12 août 1994 par Maître Z..., notaire associé, Nicole SIMONNETa vendu à Alain
A... et à Annie X... une maison d'habitation moyennant le prix de 570. 000 francs soit 86. 895, 94 euros ; qu'était stipulée en page 3 du dit acte une clause d'ACCROISEMENT en USUFRUIT libellée de la manière suivante :
" Il est expressément convenu entre Monsieur A... et Madame X... sus nommés :
1 / d'une part ils jouiront en commun pendant leur vie de l'immeuble objet de la présente vente ;
2 / et d'autre part, à titre de clause aléatoire, que le premier mourant d'entre eux sera considéré comme n'ayant jamais eu un droit à jouissance de cet immeuble, dont l'usufruit appartiendra en totalité au dernier mourant d'entre eux, lequel sera considéré comme ayant eu seul la jouissance depuis l'acquisition de l'immeuble objet des présentes.
La présente clause est exclusive d'une indivision en jouissance de l'immeuble et aucun d'eux ne pourra disposer de l'immeuble sans le concours et le consentement exprès de l'autre.
Les héritiers et ayants droit de celui des acquéreurs qui viendra à décéder le premier auront la nue propriété de la moitié indivise acquise par leur auteur le jour de ce décès et le survivant des acquéreurs sera considéré comme unique et indiscutable usufruitier de l'immeuble vendu, dont le droit d'usufruit s'éteindra à son décès " ; Attendu que si le premier juge a retenu pour répondre à Annie X... que cette clause présentait un intérêt en ce qu'elle assurait au survivant des deux acquéreurs une garantie de jouissance paisible et totale du bien à usage d'habitation acquis en commun, il n'en a pas moins justement considéré que cette clause présentait des inconvénients majeurs en cas de rupture de la vie commune entre les acquéreurs, l'acquéreur évincé ne pouvant plus bénéficier de la
jouissance en commun, ni obtenir le paiement par l'occupant de l'immeuble d'une indemnité d'occupation, ni obtenir le partage ;
Attendu qu'il a tout autant justement retenu que Maître Z...ne justifiait par aucune pièce avoir satisfait à son devoir de conseil sur les inconvénients majeurs de cette clause ; que les appelants ne sauraient à cet égard sérieusement soutenir que l'information s'évinçait de la rédaction même de la clause dont le premier juge a justement souligné qu'elle était incompréhensible pour un non professionnel du droit " exclusive d'une indivision en jouissance de l'immeuble ", " aucun d'eux ne pourra disposer de l'immeuble " ce qui ne fait état ni d'une vente, ni d'un partage ; que le manquement de Maître Z...à son devoir d'information est d'autant plus avéré que lors de la vente des acquéreurs étaient âgés respectivement de 36 et 32 ans pour être nés le 25 septembre 1958 (Alain A...) et 25 août 1962 (Annie X...) ce qui permettait aisément d'envisager l'hypothèse d'une séparation et non d'une vie commune jusqu'au décès de l'un d'entre eux, ce qui fait que d'autres formules juridiques apparaissaient bien plus adaptées telle l'indivision dont Maître Z...ne justifie pas avoir informé les acquéreurs ;
Attendu que le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qui concerne la faute commise par le notaire ;
Attendu par ailleurs que cette faute a bien causé un préjudice à Annie X... ; qu'il résulte en effet des pièces régulièrement versées aux débats que cette dernière, évincée de l'immeuble par son ex-concubin après avoir déposé plainte à son encontre pour violences volontaires, a été déboutée par jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, du fait de la clause d'accroissement, de ses demandes en partage d'une indivision qui n'existe pas et en paiement d'une indemnité d'occupation alors qu'Alain A... a la jouissance du
dit immeuble et a fait échec à une tentative de partage ; qu'ainsi et contrairement à ce que soutiennent les appelants le préjudice subi par Annie X... ne se limite pas à l'indemnisation de la perte de chance de choisir une autre formule juridique ; que le manquement du notaire à son devoir de conseil au regard d'une clause totalement inadaptée à la situation des parties a causé un préjudice résultant pour Annie X... de la perte de jouissance de l'immeuble acquis en commun, de l'impossibilité d'obtenir le paiement d'une indemnité d'occupation par son ex-concubin et de l'impossibilité d'obtenir sa part sur la valeur du dit immeuble dans le cadre d'un partage ; qu'ainsi le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné la SCP Z...-A...-C... à payer à Annie X.... la somme de 129. 581, 68 euros à titre de dommages et intérêts, cette somme représentant la moitié de la valeur à ce jour de l'immeuble acquis en commun qui ne fait l'objet d'aucune contestation ;
Attendu que succombant en son appel la SCP Z...-A...-C... supportera les dépens et ne saurait voir accueillie sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'équité commandant qu'il soit fait application de ce texte au profit d'Annie X... en lui allouant la somme de 2. 000 euros ; PAR CES MOTIFS LA COUR,
Reçoit la SCP Z...-A...-C... en son appel régulier en la forme mais le dit non fondé.
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX du 19 avril 2005.
Y ajoutant :
Condamne la SCP Z...-A...-C... à payer à Annie X... la somme de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La condamne aux dépens et autorise la SCP GAUTIER-FONROUGE, avoué à la Cour, à recouvrer directement ceux dont elle a pu faire l'avance sans avoir reçu provision.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Alain COSTANT, Président, et par Madame Chantal Y..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0289
Numéro d'arrêt : 05/03050
Date de la décision : 30/10/2006

Références :

Décision attaquée : Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, 19 avril 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-10-30;05.03050 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award