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23/10/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007630953

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0063, 23 octobre 2006, JURITEXT000007630953


ARRET RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX---------------------------Le : PREMIERE CHAMBRE SECTION B

No de rôle : 06/04178Monsieur Pierre MALRIEUXMadame Nicole Mauricette X... épouse Y.../Madame Jeanne Z... de la décision : AU FOND

JONCTION DU DOSSIER No 06/4433 AU DOSSIER No 06/4178

Grosse délivrée le :aux avoués

Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le

Par Monsieur Louis MONTAMAT, Président,
r>en présence de Madame Armelle A..., Greffier,

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION B,...

ARRET RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX---------------------------Le : PREMIERE CHAMBRE SECTION B

No de rôle : 06/04178Monsieur Pierre MALRIEUXMadame Nicole Mauricette X... épouse Y.../Madame Jeanne Z... de la décision : AU FOND

JONCTION DU DOSSIER No 06/4433 AU DOSSIER No 06/4178

Grosse délivrée le :aux avoués

Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le

Par Monsieur Louis MONTAMAT, Président,

en présence de Madame Armelle A..., Greffier,

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

1o/ Monsieur Pierre B..., né le 13 Septembre 1920 à VILLEFRANCE DE QUEYRAN (47), artiste peintre,

2o/Madame Nicole Mauricette X... épouse B..., née le 6 Janvier 1941 à PESSAC (33),

lesdits époux demeurant ensemble 3, Allée des Bouvreuils 33950 LEGE CAP FERRET,

Représentés par la S.C.P. Marc-Jean GAUTIER et Pierre FONROUGE, Avoués Associés à la Cour, et assistés de Maître Lionel RIVIERE, Avocat au barreau de BORDEAUX,

Appelants d'un jugement rendu le 22 juin 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 3 Août 2006, suivie d'une assignation à jour fixe en date du 9 Aout 2003

à :

Madame Jeanne C..., née le 5 Septembre 1918 à BORDEAUX (33), de nationalité française, demeurant 56, avenue de l'Océan 33950 LEGE CAP FERRET,

Représentée par la S.C.P. Luc BOYREAU et Raphaùl MONROUX, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Joùlle LAPORTE, Avocat au barreau de BORDEAUX,

Intimée,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue, en audience publique le 25 Septembre 2006 devant :

Monsieur Louis MONTAMAT, Président,

Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller,

Monsieur Michel BARRAILLA, Conseiller,

Madame Armelle A..., Greffier,

Et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats :

La Cour est saisie d'un appel régulièrement déclaré par les époux B... à l'encontre d'un jugement contradictoire rendu par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX le 22 JUIN 2006, dans les circonstances de faits suivantes :

1o/ Madame Jeanne C..., succédant à un sieur D..., a donné à bail commercial à Monsieur B..., époux de dame Nicole X..., suivant acte sous seing privé en date du 1er AVRIL 1989 un magasin dans lequel il exerçait une activité de coiffure mais aussi celle de vente et d'exposition d'objets artisanaux ou autres, objets de décoration, et un logement, l'ensemble situé 56, Avenue de l'Océan au CAP FERRET.

Le bail était conclu pour la durée de 9 ans expirant donc le 31 mars 1998.

Courant 1997, Monsieur B... ouvrait, dans d'autres locaux, situés 3, Boulevard de la Plage au CAP FERRET une "galerie de création et atelier".

2o/ Par acte du 18 SEPTEMBRE 2002, Monsieur B... a sollicité le bénéfice du renouvellement du bail qui a pris fin le 31 MARS 1998 et s'est donc poursuivi depuis cette date, sous l'effet de la tacite reconduction de l'article 145-9 du Code de Commerce.

3o/ Le 27 NOVEMBRE 2002, Madame C... notifiait à son tour aux époux B... son refus de renouvellement du bail, sans indemnité

d'éviction, pour le double motif de défaut d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers et de travaux exécutés par le preneur sur les lieux loués, sans autorisation du bailleur.

4o/ Monsieur B... assignait donc, par acte du 26 DECEMBRE 2002, Madame C... en contestation des motifs légitimes et graves invoqués par cette dernière pour refuser le renouvellement du bail commercial, ainsi que pour la voir condamner au paiement d'une indemnité d'éviction.

5o/ Monsieur E... était désigné en qualité d'expert par ordonnance du Juge de la Mise en Etat du 8 AVRIL 2004 pour, à la requête de Madame C..., décrire les transformations et travaux effectués par le preneur. Monsieur E... déposait son rapport le 3 JUIN 2005.

6o/ Par conclusions récapitulatives du 14 AVRIL 2006, Madame C... a sollicité à titre subsidiaire, la résiliation du bail commercial.

7o/ Par jugement rendu le 22 JUIN 2006, le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX a statué ainsi :

- Déboute Madame C... de sa demande de validation du refus de renouvellement du bail commercial du 1er AVRIL 1989, sans paiement d'une indemnité d'éviction,

- Prononce la résiliation du bail commercial du 1er AVRIL 1989, aux torts exclusifs de Monsieur B...,

- Déboute ce dernier de sa demande de paiement d'une indemnité d'éviction,

- Ordonne l'expulsion de Monsieur Pierre B... et de tous occupants de son chef des locaux objet du bail sis 56, Avenue de l'Océan au CAP FERRET dans le mois de la signification de ce jugement,

- Déclare Madame C... recevable en sa demande de paiement d'une

indemnité d'occupation annuelle,

- Condamne Monsieur B... au paiement en deniers ou quittances d'une indemnité d'occupation annuelle de 14.700,00 Euros à compter du 1er OCTOBRE 20002 jusqu'à la libération complète des lieux,

- Condamne Monsieur B... au paiement des intérêts au taux légal sur la différence entre les sommes versées et, les indemnités d'occupation dues à compter du 10 NOVEMBRE 2003 et, au fur et à mesure de chaque échéance, jusqu'au prononcé de la résiliation du bail,

- Ordonne la capitalisation des intérêts dus depuis au moins un an à compter du 10 NOVEMBRE 2003,

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

- Condamne Monsieur B... à payer à Madame C... la somme de 3.000,00 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Ordonne l'exécution provisoire.

8o/ Les époux B... interjetaient appel, comme énoncé ci-dessus, de cette décision le 3 AOUT 2006. Cette affaire était enrôlée au greffe de la Cour sous le numéro 06/4178. Cependant, par ordonnance du Premier Président de cette même Cour, ils étaient autorisés à assigner à jour fixe, vu l'urgence, Madame C..., pour l'audience du 25 SEPTEMBRE 2006.

Cette affaire étant enrôlée sous le numéro 06/4433.

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il échet de joindre les deux instances, pour statuer par un seul arrêt.

9o/ Les appelants ont par écritures du 25 SEPTEMBRE 2006 conclu à la réformation du jugement qu'ils attaquent. Ils font valoir, pour l'essentiel :

- Madame B... : sa mise hors de cause,

- Monsieur B... demande à la Cour de dire que :

a) le bail s'est renouvelé à compter du 1er OCTOBRE 2002, au prix du loyer antérieur,

b) en tant que de besoin de déclarer nul et de nul effet l'acte de refus de renouvellement du bail notifié à lui le 27 NOVEMBRE 2002,

En conséquence, il réclame condamnation de Madame C... à lui verser une somme de 15.000,00 Euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure de 9.000,00 Euros.

Subsidiairement, la condamnation de la bailleresse à lui payer une indemnité d'éviction de 150.000,00 Euros, sauf à ordonner une expertise pour la mieux évaluer.

10o/ Madame C... a conclu le 21 SEPTEMBRE 2006. Ses écritures extrêmement développées s'analysent ainsi :

- la demande de renouvellement judiciaire du bail du 1er OCTOBRE 2002 constitue une demande nouvelle et comme telle est irrecevable au visa de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- les époux B... doivent être déclarés mal fondés en leurs demandes, mais subsidiairement :

- le jugement doit être réformé :

a) - en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de validation du refus de renouvellement du bail, pour défaut de mise en demeure préalable.

- en conséquence, au vu des articles 145-1 et 145-8, 145-17-1 du Code de Commerce, valider le refus de renouvellement sans indemnité d'éviction à effet au 1er OCTOBRE 2002,

b) - en ce qui concerne le point de départ du paiement de l'indemnité d'occupation annuelle qui devra courir, soit à compter de la date d'effet du refus de renouvellement, le 1er OCTOBRE 2002, soit à compter de la date de la résiliation judiciaire le 22 JUIN 2006 date du jugement, mais assurément pas dans le cas de résiliation judiciaire telle que prononcé par le Premier Juge, au 1er OCTOBRE

2002, mais à la date du 22 JUIN 2006,

c) - en ce qui concerne la réévaluation du montant annuel de ladite indemnité d'occupation en fonction de l'évolution de l'indice I.N.S.E.E. du coût de la construction,

- le jugement sera confirmé en toutes ses autres dispositions.

Enfin Madame C... réclame contre les époux B... le bénéfice d'une indemnité de procédure de 10.000,00 Euros.

La Cour se réfère en ce qui concerne les faits, la procédure, les moyens et prétentions des parties au jugement entrepris et aux conclusions des parties.

CECI ETANT :

A/ Sur le refus opposé par Madame C... en renouvellement du bail, et corrélativement sur l'indemnité d'éviction due à Monsieur B... :

Attendu que les appelants soutiennent que Madame C... a donné son accord au renouvellement du bail, dans une lettre qu'elle adressait le 12 OCTOBRE 2002 à Monsieur B... et dont il convient, en raison de la relation tronquée faite par l'intimée dans ses écritures (page 12/35), d'en rapporter le texte intégral :

"Monsieur,"Je fais suite à notre entretien à votre domicile du 5 OCTOBRE dernier à 15 "heures en présence de votre épouse et de mon fils, Roger Noùl C..., "concernant l'affaire citée en objet""Je vous ai confirmé que je n'était pas opposé (sic) au renouvellement de votre "bail et vous demandais de bien vouloir vous rapprocher de votre avocat, Maître "PUYBARAUD, pour qu'il me prépare quatre dates, afin de nous rencontrer "chez mon Conseil à BORDEAUX""Je ne fais qu'accéder à votre proposition que je cite""Qu'à cette fin, il est tout disposé à la rencontrer" (Madame Brigitte F..., Avocat) "ou à négocier avec elle, par l'entremise "de son conseil" "Vous m'indiquez aujourd'hui que votre avocat vous conseille de ne

pas vous "déplacer""Mon Conseil est tout à fait prêt à le faire en l'étude de Maître PUYBARAUD "à BORDEAUX""Dans l'attente de votre réponse","Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées".

Attendu que les termes de ce courrier expriment un accord de principe et, en tout cas, une réponse de la part de la bailleresse tout à fait disposée à renouveler le bail ; que cet accord - qui trouvait nécessairement son terme, à l'issue d'un délai raisonnable permettant aux Conseils des parties de se rapprocher pour convenir des modalités du bail renouvelé, et bien sûr du nouveau montant du loyer - n'a pu en définitive être formalisé, de sorte que la bailleresse se trouvant déliée de son engagement, celle-ci était parfaitement redevable et fondée à opposer par la suite un refus au renouvellement du bail, peu important dès lors le moyen par elle soulevé, tiré de la prétendue irrecevabilité de cette demande de renouvellement, au motif qu'il s'agissait d'une demande nouvelle, apparue pour la première fois, en cause d'appel ; qu'à titre infiniment superfétatoire, la Cour observe, malgré tout, que Monsieur B... avait présenté une telle réclamation par acte du 18 SEPTEMBRE 2002 ;

Attendu que Madame C... fondait son refus, d'une part sur la déchéance du preneur de son droit au maintien dans les lieux, pour défaut d'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés, ou au Répertoire des Métiers, et d'autre part sur la réalisation des travaux irrégulièrement entrepris par Monsieur B..., en violation des clauses du bail ;

Attendu qu'un artiste peintre n'est ni un commerçant, ni un artisan, de sorte que, dans la cadre de l'exercice de son art, il n'a point l'obligation d'être inscrit au Registre du Commerce, ni au Répertoire des Métiers ;

Que cependant pour pourvoir bénéficier de l'application du statut des

baux commerciaux, il doit remplir les conditions prévues à l'article L 145-2-1-6 du Code de Commerce et, Monsieur B... satisfait en effet aux exigences de ce texte en produisant sa carte d'affiliation au régime de la Sécurité Sociale des artistes, peu important que figure sur celle-ci une adresse à SETE, l'essentiel d'un tel document étant d'établir l'assujetissement de son titulaire à un organisme social obligatoire et non de constituer un justificatif de domicile ; qu'ensuite, Monsieur B... a produit certes dans la procédure d'appel, ses déclarations de revenus B.N.C., imprimé 2035 et, les redressements fiscaux dont il a été l'objet les 17 DECEMBRE 1992 et 17 SEPTEMBRE 1993 et l'Administration n'a jamais remis en cause son statut fiscal, dérogatoire au régime général ;

Que les revenus déclarés par Monsieur B... aux alentours de 115.000,00 Euros, rapportés par Madame C... (cf ses conclusions page 14/35) sont une somme, certes confortable mais hors du commun avec d'autres peintres, dont des ventes publiques de certaines de leurs toiles ont révélé la démesure de leur valeur ;

Que ce premier moyen opposé par Madame C... sera rejeté, lors même que Monsieur B... peut revendiquer le bénéfice du statut des baux commerciaux, le dispensant de toute inscription au Registre du Commerce et des Sociétés ou Répertoire des Métiers ;

Attendu ensuite que la bailleresse prétend que Monsieur B... a effectué des travaux dans les lieux loués et que la mise en demeure, préalable à la notification du refus de renouvellement, requise par l'article L 145-17 du Code de Commerce, pour permettre au preneur de régulariser sa situation, ne se justifiait pas au cas d'espèce, en raison du caractère irréversible des travaux entrepris ;

Or attendu que ce ne sera que bien plus tard, après la notification par Madame C... du refus de renouvellement (27 NOVEMBRE 2002), que l'expertise diligentée par Monsieur E... et qui a donné lieu, de sa

part, au dépôt d'un rapport d'expertise (3 JUIN 2005), révélera la véritable ampleur des travaux irrégulièrement réalisés par le preneur, qu'elle démontrera à ce seul moment que la nature de ces travaux était telle que l'infraction qu'il a commise ne pouvait cesser dans le mois suivant la mise en demeure, envisagé par le texte précité ; qu'ainsi lorsque Madame C... a le 27 NOVEMBRE 2002 notifié son refus de renouvellement de bail sans indemnité d'éviction pour notamment travaux irrégulièrement entrepris, la mise en demeure s'avérait indispensable;

Qu'il suit que c'est à bon droit que le Premier Juge a débouté pour ce second motif à défaut de mise en demeure Madame C... de sa demande de validation du refus de renouvellement, sans paiement d'une indemnité d'éviction, le jugement étant dès lors confirmé sur le chef de cette disposition ;

B/ Sur la demande subsidiaire de Madame C... de résiliation du bail :

1/ Sur la résiliation du bail :

Attendu que le bail à effet du 1er AVRIL 1989, énonce en son article 2: "le preneur ne peut faire aucun percement de mur ou de plancher, ni de "changement de distribution sans le consentement exprès et écrit de la "bailleresse, et, les travaux qui seraient réalisés devront avoir lieu sous la surveillance de l'architecte de la bailleresse" ;

Que le fondement juridique de ce second chef de demande repose sur les dispositions de l'article 1741 du Code Civil stipulant que le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leur obligation, entraîne la résiliation du contrat dont la clause résolutoire de l'article 1184 du Code Civil est toujours sous-entendue ;

Attendu que la mission d'expertise confiée à Monsieur E... était de

rechercher et décrire les travaux effectués, dans les lieux loués, par le locataire depuis le 1er AVRIL 1989, de dire si l'état des locaux a été modifié dans leur affectation et superficie, s'ils ont fait l'objet d'une autorisation de la bailleresse et d'une surveillance par son architecte , enfin de fixer la valeur locative des lieux loués, au 1er OCTOBRE 2002, avec réévaluation aux dates anniversaires, échues au jour du dépôt du rapport ;

Attendu que les constatations de l'expert sont les suivantes :

Depuis le 1er AVRIL 1989, Monsieur B... a :

- modifié et agrandi son atelier de peinture (34 mètres carrés),

- créé un garage et un abri de jardin (21 mètres carrés) avec accès direct sur la rue des Bouvreuils,

- accru la terrasse sud de façon importante (24 mètres carrés),

- que l'ensemble de ces travaux a augmenté la superficie louée de 79 mètres carrés ;

Attendu en réplique que Monsieur B... verse des attestations (SECARELLI et GUILHERM) relatant que ces deux personnes, se trouvant dans l'atelier du peintre, y ont également rencontré courant 2001, Madame C... en compagnie d'une jeune femme qu'elle avait présentée au peintre, pour recevoir des conseils artistiques ; qu'au motif qu'à l'occasion de cette visite, la bailleresse n'avait émis aucune protestation quant à l'extension, déjà réalisée, de l'atelier, Monsieur B... en déduit qu'elle l'a avalisée;

Mais que cette visite effectuée par Madame C... ne répondait qu'à son seul désir de mettre, quelques instants, en relation une jeune artiste peintre avec le "Maître" et celui-ci ne saurait donc tirer du silence gardé par la bailleresse, quant à l'agrandissement de l'atelier - à supposer qu'elle l'ait constaté - la preuve d'une acceptation par celle-ci de la modification de ce lieu;

Que l'agrandissement de cette construction de l'atelier a été

pratiquée par Monsieur B... courant 1990, selon ce que les factures qu'il a produites, révèlent ;

Que de plus, l'expert souligne qu'il n'a trouvé au dossier "aucune autorisation paraissant correspondre aux travaux effectués après le 1er AVRIL 1989" ;

Qu'en second lieu relativement à la construction du garage et de l'abri de jardin avec accès direct sur la rue des Bouvreuils, l'expert a souligné également que " la nature du bâtiment ne paraît pas co'ncider avec une structure démontable" ; que de fait, il ressort, à la consultation de la facture de la société B.M.C. du 19 JUIN 1997 (communiquée par Monsieur B...) que, pour ce faire, l'entrepreneur a réalisé un dallage en béton armé de 10 centimètres d'épaisseur, ce qui à l'évidence est loin de correspondre à la notion d'ouvrage démontable ;

Que pour s'exonérer de toute critique, Monsieur B... invoque une autorisation écrite, donnée le 3 JUILLET 1992 par Madame C... qui autorise son locataire, Monsieur B..., à construire un mur au fond du jardin pour appui d'une "construction démontable" ;

Mais qu'une telle autorisation est postérieure à l'exécution de ces travaux qui, de surcroît, par la mobilité, au sens juridique du terme qu'ils devaient avoir, ne correspondent pas aux souhaits exprimés ultérieurement par Madame C..., le preneur ne rapportant également pas, la preuve que, lorsqu'elle a rédigé l'attestation produite, la bailleresse était pleinement convaincue de leur exacte nature ;

Qu'en troisième lieu, l'extension de la terrasse Sud, constituée selon Monsieur B... d'un dallage "posé sur le sable, de manière légère, pour permettre aux clients d'accéder de la rue au salon de coiffure, sans marcher sur le sable, a néanmoins nécessité un décaissement du terrain sur plus de 15 centimètres d'épaisseur, avec évacuation des gravats ;

Qu'en fait il s'agit d'un véritable ouvrage en béton armé de plus de 12 centimètres d'épaisseur sur une superficie de 21 mètres carrés, peu important qu'il ait été réalisé courant 1991 et que 10 ans plus tard, Madame C... invoque cette violation d'une clause du bail, à l'appui d'une demande de résiliation du contrat ;

Qu'enfin l'ensemble de ces travaux qui ont modifié l'état initial des lieux n'ont pas été - et pour cause d'ailleurs puisqu'entrepris à l'insu de la bailleresse- exécutés sous la surveillance de l'architecte de Madame C..., comme le bail le stipulait pourtant ;

Que de graves manquements aux dispositions contractuelles commandent au visa des articles 1741 et 1184 du Code Civil de confirmer purement et simplement la résiliation du bail commercial aux torts du preneur, Monsieur B... ;

2/ Sur l'indemnité d'occupation et sa réévaluation :

Attendu que le montant de celle-ci ne pose pas problème, Monsieur B... s'en reconnaissant

débiteur à concurrence de la somme annuelle hors taxes et hors charges de 14.700,00 Euros sauf réévaluation sur l'indice I.N.S.E.E. de la construction du 1er OCTOBRE 2003 au 1er OCTOBRE 2005 due à compter du jugement déféré en date du 22 JUIN 2006 jusqu'à libération complète des lieux loués ;

Que, comme le sollicite l'intimée, cette somme sera réévaluée annuellement sur la base de l'évolution de l'indice du coût de la construction ;

C/ Sur la mise hors de cause de Madame Nicole X... épouse B... :

Attendu que Madame X... épouse B..., attraite dans la procédure par Madame C..., le 23 MARS 2004, sollicite sa mise hors de cause ; qu'elle fait valoir qu'il s'agit d'un bail indivisible qui comporte un commerce et un logement, qu'elle est mariée sous le régime de la

séparation de biens et, que seul Monsieur B... est propriétaire du fonds de commerce ;

Que l'intimée considère qu'il s'agit d'une demande nouvelle, comme telle irrecevable, au visa de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile et subsidiairement invoque l'article 1751 du Code Civil ; que toutefois il sera rappelé que Monsieur et Madame B... ont tous deux par acte du 26 DECEMBRE 2002, contesté les justes motifs du congé et que les époux B... ont déclaré appel du jugement rendu, alors pourtant qu'aucune condamnation n'était prononcée contre l'épouse ;

Attendu qu'il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle, mais d'une conséquence juridique découlant de l'examen des faits soumis à l'analyse de la Cour ;

Que par ailleurs, il sera rétorqué à dame C... que s'agissant d'un local mixte, c'est à dire servant pour partie à l'habitation, pour partie à l'exercice d'une profession, l'article 1751 du Code Civil est sans application en l'espèce;

Qu'il suit que Madame Nicole X... épouse B... sera mise hors de cause ;

Qu'il n'y a pas lieu de lui allouer l'indemnité qu'elle a sollicitée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

D/ Sur la capitalisation des intérêts :

Attendu que l'indemnité d'occupation n'étant due qu'à compter de la résiliation judiciaire du bail, soit le 22 JUIN 2006, les conditions de l'article 1154 du Code Civil ne sont pas actuellement remplies ;

E/ Sur les frais irrépétibles :

Attendu qu'en équité il sera alloué à Madame C... une indemnité au titre des frais irrépétibles d'un montant égal à celui réclamé par Monsieur B... et auquel il aurait pu prétendre si sa demande

avait prospéré ;

Qu'ainsi Monsieur B... sera condamné à verser à l'intimée une somme de 9.000,00 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Joint l'instance enrôlée sous le numéro 06/4433 à l'instance enrôlée sous le numéro 06/4178 pour ne statuer que par un seul arrêt,

Déclare l'appel des époux B... recevable,

Le dit mal fondé,

Confirme le jugement déféré (Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX - 22 JUIN 2006) en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail commercial liant les parties, signé le 1er AVRIL 1989, aux torts exclusifs de Monsieur B..., par application des articles 1741 et 1184 du Code Civil, en ce qu'il a ordonné l'expulsion de Monsieur B... et de tout occupant de son chef, des locaux situés 56, Avenue de l'Océan au CAP FERRET dans le mois de sa signification,

Confirme ce jugement en ce qu'il a débouté Monsieur B... de sa demande en paiement d'une indemnité d'éviction,

Confirme ce jugement en ce qu'il a déclaré Madame C... recevable en sa demande d'une indemnité d'occupation et en ce qu'il a condamné Monsieur B... à payer en deniers ou quittances une indemnité d'occupation annuelle de 14.700,00 Euros, valeur 1er OCTOBRE 2002, jusqu'à complète libération des lieux,

Confirme le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur B... à payer à Madame C... une somme de 3.000,00 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Réforme le jugement déféré,

Dit que l'indemnité d'occupation annuelle de 14.700,00 Euros sera due à Madame C... à partir du 22 JUIN 2006, date de la résiliation

judiciaire du bail,

Dit que ladite indemnité d'occupation sera réévaluée sur la base de l'évolution de l'indice I.N.S.E.E. du coût de la construction en vigueur au 1er OCTOBRE 2006,

Dit que cette indemnité d'occupation due à partir du 22 JUIN 2006 produira intérêts au taux légal jusqu'à vidange de l'ensemble des locaux,

Dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article 1154 du Code Civil,

Y ajoutant :

Condamne Monsieur B... à payer à dame C... une indemnité de procédure de 9.000,00 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Met hors de cause Madame Nicole X... épouse B...,

Déboute cette dernière de sa réclamation au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne Monsieur Pierre B... aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise dont Madame C... a dû faire l'avance, dont distraction pour ceux d'appel au profit de la S.C.P. Luc BOYREAU et Raphaùl MONROUX, Avoués Associés à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure civile.

Signé par Monsieur Louis MONTAMAT, Président, et par Madame Armelle A..., Greffière.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0063
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007630953
Date de la décision : 23/10/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-10-23;juritext000007630953 ?
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