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28/04/2006 | FRANCE | N°05/01224

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Troisième chambre correctionnelle, 28 avril 2006, 05/01224


AMP DU 28 AVRIL 2006 No DU PARQUET : 05/ 01224 No D'ORDRE : M. P. C/ X... Christophe Y... Gilles Z... Dominique A... Raymond B... Manuel C... Eric
LE VINGT HUIT AVRIL DEUX MILLE SIX LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX
En l'audience publique de la Troisième Chambre Correctionnelle tenue par :
Monsieur LOUISET, Conseiller faisant fonction de Président de la Chambre des Appels Correctionnels,
En présence de Monsieur D..., Substitut de Monsieur le Procureur Général.
Et avec l'assistance de Mademoiselle PAGES, Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE : Monsieur le

Procureur Général près la Cour d'Appel de BORDEAUX
ET : X... Christop...

AMP DU 28 AVRIL 2006 No DU PARQUET : 05/ 01224 No D'ORDRE : M. P. C/ X... Christophe Y... Gilles Z... Dominique A... Raymond B... Manuel C... Eric
LE VINGT HUIT AVRIL DEUX MILLE SIX LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX
En l'audience publique de la Troisième Chambre Correctionnelle tenue par :
Monsieur LOUISET, Conseiller faisant fonction de Président de la Chambre des Appels Correctionnels,
En présence de Monsieur D..., Substitut de Monsieur le Procureur Général.
Et avec l'assistance de Mademoiselle PAGES, Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE : Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de BORDEAUX
ET : X... Christophe âgé de 38 ans, demeurant ...24250 SAINT CYBRANET né le 19 Juillet 1967 à SARLAT (24) Filiation ignorée, de nationalité française, Célibataire, Restaurateur, Jamais condamné, PRÉVENU, intimé, cité le 22 décembre 2005 à personne, libre, absent, représenté par Maître MAGRET, avocat au Barreau de Bergerac. (muni d'un pouvoir) ;
Y... Gilles âgé de 42 ans, demeurant ... 24200 MARCILLAC SAINT QUENTIN né le 2 août 1963 à SARLAT LA CANEDA (24) Filiation ignorée, de nationalité française, Restaurateur, Jamais condamné, PREVENU, appelant, cité le 12 décembre 2005 à personne, libre, présent, assisté de Maître DUCOS-ADER, avocat au Barreau de Bordeaux.
THION Eric, poursuivi comme prévenu :
C... Eric, poursuivi comme prévenu :
- d'avoir à Sarlat la Canéda (24), durant l'année 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, sciemment recélé 500 kg de foies gras congelés, 50 kg de morilles congelées, 500 kg de magrets congelés, 500 kg de cuisses congelées et 200 kg de cèpes congelés, qu'il savait provenir d'un délit commis au préjudice des Entrepôts Frigorifiques Sarladais et de sa clientèle,
Infraction prévue par les articles 321-1, 311-4 AL 1 et 311-1 du Code Pénal et réprimée par les articles 321-1 AL 3, 321-3, 321-9, 321-10, 311-4 AL 1, 311-1 1o, 2o, 3o, 4o du Code Pénal.
LE TRIBUNAL
Sur l'action publique :
A renvoyé Messieurs Z..., X..., C... et B... des fins de la poursuite sans peine ni dépens,
A déclaré Messieurs F... (prévenu non appelant), Y... et A... coupables des faits qui leur sont reprochés sauf à ramener les quantités détournées à 12 tonnes 5 pour F..., à environ 90 kg pour A...,
En répression, a condamné :
- F... Patrick (prévenu non appelant), et Y... Gilles à la peine de deux ans d'emprisonnement dont dix huit mois avec sursis mise à l'épreuve durant deux ans avec obligation particulière d'indemniser les victimes,
- A... Raymond à trois mois d'emprisonnement avec sursis,
Sur l'action civile :
A donné acte à la Sarl Entrepôts Frigorifiques Sarladais de sa constitution de partie civile au soutien de l'action publique,
A reçu les autres parties civiles en leur constitution, Z... Dominique âgé de ans, demeurant Hôtel du Parc 24290 THONAC né le 9 août 1961 à ORLEANS (45) Filiation ignorée de nationalité française, Jamais condamné, PREVENU, intimé, cité le 30 janvier 2006 à personne, libre, présent, assisté de Maître DANIEL-LAMAZIERE, avocat au Barreau de Périgueux.
A... Raymond, âgé de 58 ans, demeurant ...24200 SARLAT LA CANEDA né le 27 juin 1947 à SAINT GENIES (24) Filiation ignorée, de nationalité française, Jamais condamné, PREVENU, intimé, cité le 21 novembre 2005 à personne, libre, présent, assisté de Maître MAGRET, avocat au Barreau de Bergerac.
B... Manuel âgé de 56 ans, demeurant Auberge de Mirandol 7 rue des Consuls 24200 SARLAT LA CANEDA né le 3 février 1950 à SEVER DO VOUGA (PORTUGAL) Filiation ignorée de nationalité française, Jamais condamné, PREVENU, intimé, cité le 23 novembre 2005 à personne, libre, présent, assisté de Maître REY, avocat au Barreau de Bergerac.
C... Eric âgé de 42 ans, demeurant ...24200 SARLAT LA CANEDA né le 15 mai 1963 à AUBAGNE (13) Filiation ignorée, de nationalité française, Déjà condamné, PREVENU, intimé, cité le 20 décembre 2005 à mairie, libre, présent, sans avocat.
ET : SA VALETTE FOIE GRAS, Avenue Georges Pompidou-46300 GOURDON
PARTIE CIVILE, appelante, citée le 9 décembre 2005 à personne habilitée, absente, représentée par Maître JOLY, avocat au Barreau de Bergerac.
SAS PARIS SAVEURS, 5 rue de Lille-bâtiment E4 94150 RUNGIS
PARTIE CIVILE, intimée, citée le 17 novembre 2005 à mairie (AR signé), absente, défaillante.
A dit que, par leur négligence, elles ont contribué pour moitié à la réalisation de leur propre dommage,
A déclaré F... et Y... solidairement responsables de la part de préjudice subi par les parties civiles laissée à leur charge par le Tribunal,
En conséquence, a condamné, solidairement, F... et Y... à payer :- à la SAS PARIS SAVEURS................................ 5 000 euros,- à la SAS ROUGIE BIZAC INT.......................... 48 000 euros,- à la SAS LA TRUFFE PERIGOURDINE.......... 6 150 euros,- à la SA VALETTE FOIE GRAS....................... 29 706 euros.
A condamné les prévenus Y... et F..., solidairement, à payer 300 euros à la SA VALETTE et SAS ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale,
A débouté la SA VALETTE FOIE GRAS de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice commercial,
A condamné, solidairement, Messieurs F... et Y... aux entiers dépens de l'action civile,
Sur ces appels et selon citations de Monsieur le Procureur Général, l'affaire a été appelée à l'audience publique du 24 Février 2006, la
Cour étant composée de Monsieur LOUISET, Conseiller faisant fonction de Président en remplacement du titulaire légitimement empêché, Madame CHAMAYOU-DUPUYet Monsieur BERTHOMME, Conseillers, assistée de Mademoiselle PAGES, Greffier,
A ladite audience, les prévenus Y... Gilles, Z... Dominique, A... Raymond, B... Manuel et C... Eric ont comparu et leur identité a été constatée ; X... Christophe n'a pas comparu mais était représenté par son conseil ;
Madame le Conseiller CHAMAYOU-DUPUYa fait le rapport oral de l'affaire ;
SAS ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL, Avenue du Périgord-24200 SARLAT LA CANEDA
PARTIE CIVILE, appelante, citée le 22 novembre 2005 à personne habilitée, absente, représentée par Maître LOPY loco Maître LAPIQUE, avocat au Barreau de Tarbes.
SAS TRUFFE PERIGOURDINE, Z. I. les Libraires 24100 BERGERAC
PARTIE CIVILE, intimée, citée le 1er décembre 2005 à personne habilitée, absente, défaillante.
RAPPEL DE LA PROCEDURE
Par actes reçus au Secrétariat-Greffe du Tribunal de Grande Instance de Bergerac, le Ministère Public (à l'encontre de Z... Dominique, X... Christophe, C... Eric et B... Manuel), en date du 29 juin 2005, les parties civiles SAS ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL, le 1er juillet 2005 et SA VALETTE FOIE GRAS, le 6 juillet 2005 ainsi que le prévenu, Y... Gilles, en date du 6 juillet 2005, ont relevé appel d'un jugement contradictoire, rendu par ledit Tribunal le 28 Juin 2005, à l'encontre de :
X... Christophe, poursuivi comme prévenu :
- d'avoir à Sarlat la Canéda (24), durant l'année 2004, sciemment recélé 500 kg de foies gras congelés et 50 kg de morilles congelées qu'il savait provenir d'un délit commis au préjudice des Entrepôts Frigorifiques Sarladais et de sa clientèle, Infraction prévue par les articles 321-1, 311-4 1o et 311-1 du Code pénal et réprimée par les articles 321-1 AL. 3, 321-3, 321-9, 321-10, 311-4 AL 1, 311-1 1o, 2o, 3o, 4o du Code pénal.
Y... Gilles, poursuivi comme prévenu :
- d'avoir à Carsac Aillac (24), durant l'année 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, soustrait frauduleusement au préjudice des entrepôts frigorifiques sarladais et de ses clients, les Sociétés ROUGIE BIZAC, SA VALETTE,
Les prévenus ont été interrogés ;
Maître JOLY, avocat de la SA VALETTE FOIE GRAS et Maître LOPY loco Maître LAPIQUE, avocat de la SAS ROUGE BIZAC INTERNATIONAL ont développé les conclusions des partie civiles ;
Les parties civiles, SAS PARIS SAVEURS et SAS TRUFFE PERIGOURDINE, régulièrement citées, ont fait défaut ;
Monsieur le Substitut de Monsieur le Procureur Général a été entendu en ses réquisitions ;
Maître MAGRET, avocat de X... Christophe et de A... Raymond, Maître DUCOS-ADER, avocat de Y... Gilles, Maître DANIEL-LAMAZIERE, avocat de Z... Dominique et Maître REY, avocat de B... Manuel, ont présenté les moyens d'appel et de défense des prévenus ; les prévenus ont eu la parole les derniers ;
C... Eric a présenté ses moyens de défense et a eu la parole le dernier ;
SUR QUOI,
Le Président a informé les parties présentes que l'affaire était mise en délibéré à l'audience publique du 28 avril 2006.
A ladite audience, Monsieur le Conseiller LOUISET ayant participé aux débats et au délibéré, a donné lecture de la décision suivante, en application des articles 485 et 486 du Code de Procédure Pénale :
RAPPEL DE LA PROCEDURE :
Le Ministère Public a relevé appel principal à l'encontre de Dominique Z..., Christophe X..., Eric C... et Manuel B... quant aux dispositions pénales du jugement déféré.
La société SA VALETTE FOIE GRAS, partie civile a relevé appel contre Gilles Y..., Patrick F..., Raymond A..., Dominique Z..., Christophe X..., Eric C... et Manuel B..., quant à ses intérêts civils.
La SAS ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL, partie civile, a relevé appel DELMOND, LAGREZE FOIE GRAS, PARIS SAVEURS, LA TRUFFE PERIGOURDINE, QUERCY PERIGORD FERMIER, des produits alimentaires congelés, en l'espèce : 8 007, 385 kg de foies gras congelés, 3 897, 962 kg de cuisses congelées, 2 267, 769 kg de magrets congelés, 620 kg de gésiers d'oie congelés, 700 kg de filets de canard congelés, 102, 686 kg d'aiguillettes de canards congelés, 640 kg de cèpes congelés et 504 kg de morilles congelées, avec cette circonstance que ces soustractions ont été commises par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteurs ou de complices,
Infraction prévue par les articles 311-4 AL 1, 311-1 du Code Pénal et réprimée par les articles du 311-4 AL 1, 311-14 1o, 2o, 3o, 4odu Code Pénal.
- d'avoir à Sarlat la Canéda (24), au cours de l'année 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, par quelque moyen que ce soit, altéré frauduleusement la vérité d'un écrit ou de tout autre support d'expression de la pensée ayant pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques en l'espèce, en établissant de fausses factures avec des libellés imaginaires,
Infraction prévue par l'article 441-1 du Code Pénal et réprimé par les articles 441-1 AL 2, 441-10, 441-11 du Code Pénal.
- d'avoir à Sarlat la Canéda (24), au cours de l'année 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, fait usage sciemment d'un écrit ou tout autre support d'expression de la pensée ayant pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, en l'espèce l'utilisation de fausses factures avec des libellés imaginaires,
Infraction prévue par les articles 441-1 du Code Pénal et réprimée par les articles 441-1 AL 2, 441-10, 441-11 du Code Pénal.
Z... Dominique, poursuivi comme prévenu :
contre Gilles Y... et autres.
Gilles Y..., prévenu, a enfin relevé appel de cette décision, tant sur les dispositions pénales que civiles.
Ces appels sont recevables.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SAS PARIS SAVEURS, partie civile, ne comparait pas bien que régulièrement citée. Il sera statué à son égard par arrêt de défaut. La SAS TRUFFE PERIGOURDINE, partie civile, ne comparait pas bien que régulièrement citée. Il sera statué à son égard par arrêt de défaut. La SAS ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL, partie civile, sollicite la condamnation solidaire de Raymond A..., Gilles Y... et Patrick F... à lui payer la somme de 95 681, 45 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation du préjudice subi et 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.
La SA VALETTE FOIE GRAS sollicite la condamnation solidaire de Gilles Y..., Patrick F..., Raymond A..., Dominique H... Christophe X..., Eric C... et Manuel B... à lui payer 98 825, 95 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice et 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.
Le Ministère Public requiert la condamnation des prévenus, contre lesquels il a relevé appel, aux peines prévues par la loi et la confirmation du jugement à l'encontre de Gilbert Y...
Gilbert Y..., prévenu appelant demande à bénéficier d'une application indulgente de la loi pénale qui tienne compte du contexte, très particulier, dans lequel il a commis les faits reprochés et notamment des difficultés financières aiguùs qui
-d'avoir à Sarlat la Canéda (24), courant 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, sciemment recélé 150 kg de foies gras congelés et 200 kg de magrets congelés, qu'il savait provenir d'un délit commis au préjudice des Entrepôts Frigorifiques Sarladais et de sa clientèle,
Infraction prévue par les articles 321-1, 311-4 AL 1 et 311-1 du Code Pénal et réprimée par les articles 321-1 AL 3, 321-3, 321-9, 321-10, 311-4 AL 1, 311-1 1o, 2o, 3o, 4o du Code Pénal.
A... Raymond, poursuivi comme prévenu :
- d'avoir à Sarlat la Canéda (24), durant l'année 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, sciemment recélé 1 200 kg de foies gras congelés et 70 kg de magrets congelés, qu'il savait provenir d'un délit commis au préjudice des Entrepôts Frigorifiques Sarladais et de sa clientèle,
Infraction prévue par les articles 321-1, 311-4 AL 1 et 311-1 du Code Pénal et réprimée par les articles 321-1 AL 3, 321-3, 321-9, 321-10, 311-4 AL 1, 311-1 1o, 2o, 3o, 4o du Code Pénal.
B... Manuel, poursuivi comme prévenu :
- d'avoir à Sarlat la Canéda (24), durant l'année 2004, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, sciemment recélé 1 200 kg de foies gras congelés, 450 kg de magrets congelés, 1 500 kg de cuisses congelées, 200 kg de cèpes congelés et 200 kg de gésiers congelés, qu'il savait provenir d'un délit commis au préjudice des Entrepôts Frigorifiques Sarladais et de sa clientèle,
Infraction prévue par les articles 321-1, 311-4 AL 1 et 311-1 du Code Pénal et réprimée par les articles 321-1 AL 3, 321-3, 321-9, 321-10, 311-4 AL 1, 311-1 1o, 2o, 3o, 4o du Code Pénal. existaient pour sa famille et lui-même. Il insiste sur son absence d'antécédents judiciaires.
S'agissant des condamnations civiles éventuelles, il souligne les carences de l'enquête et des parties civiles, elles même, à établir le montant exact du préjudice qu'elles invoquent.
Eric C..., prévenu intimé sur l'appel du Ministère Public et sur le plan civil, soutient qu'il ignorait jusqu'au jour de l'arrestation de Gilbert Y... que les produits achetés avaient une origine délictueuse. Toutefois, il reconnaît qu'au moins à compter du jour où il a su que Gilbert I... avait été appréhendé, il a préféré les dissimuler et les conserver chez lui.
Manuel B..., prévenu intimé sur l'appel du Ministère Public et sur le plan civil, souligne qu'il était dans l'ignorance de l'origine délictueuse des produits acquis, il conteste l'acquisition de certains d'entre eux, visés à la prévention et demande la confirmation du jugement déféré sur l'action publique, mais aussi sur les dispositions civiles, compte tenu de l'indigence des éléments fournis par les parties civiles pour justifier du quantum de leurs préjudices. Enfin, il souligne qu'il ne saurait y avoir solidarité pour l'ensemble des produits détournés.
Raymond A..., intimé sur l'appel du Ministère Public et sur le plan civil et qui n'a donc pas contesté la condamnation pénale prononcée contre lui, soutient qu'il n'a toutefois rien à voir avec les faits poursuivis et fait également des critiques sur la méthode d'évaluation du préjudice des parties civiles, considérant qu'elle ne repose sur aucun élément sérieux.
Dominique Z..., intimé sur l'appel du Ministère Public et sur le plan civil, a déposé des conclusions, développées à l'audience, au terme desquelles il sollicite la confirmation de la décision déférée. Il fait valoir, en outre, qu'il a acquis très peu de marchandises vendues par Gilles Y... et qu'il l'a fait plus pour lui rendre service, que pour réaliser un bénéfice. Il verse aux débats des factures de l'année précédente émanant de Gilbert Y... et mentionnant des prix de vente identiques.
Christophe X..., intimé sur l'appel du Ministère Public et sur le plan civil, ne comparait pas, bien que régulièrement cité sur intérêts civils à la requête de la SA VALETTE FOIE GRAS. Son conseil, muni d'un pouvoir spécial, le représente. Il sollicite la confirmation du jugement entrepris. Il sera jugé contradictoirement. Patrick F... n'a pas été cité. Il n'était pas appelant, mais intimé sur les dispositions civiles. Il conviendra de disjoindre l'action civile et l'action publique afin que le prévenu puisse être utilement cité à une audience ultérieure afin qu'il soit statué sur les dispositions civiles du jugement déféré.
SUR L'ACTION PUBLIQUE
C'est par des énonciations suffisantes auxquelles la Cour se réfère que le premier juge a exposé les faits de la cause et a retenu la culpabilité de Gilles Y..., Patrick F..., Raymond A... sous d'exactes qualifications dont les débats d'appel n'ont pas modifié la pertinence.
Non seulement Gilbert Y... a, durant l'année visée à la prévention, commercialisé sur une grande échelle les produits volés dans les Entrepôts Frigorifiques Sarladais, mais encore a t-il falsifié pour améliorer la commercialité de ceux ci, des factures crées à partir de sociétés qui n'existaient pas, comme la Société CONSERVERIE du PERCHE ou la Société MARIA.
Il apparaît qu'il a vendu durant le court laps de temps visé à la prévention, pour 6 tonnes de foie gras, 2 tonnes de magrets, 2500 kg de cuisses de canard, 120 kg de morilles, 570 Kg de gésiers, 400 Kg de cèpes et a retiré un bénéfice net, qu'il a lui-même estimé à 38 112, 25 euros.
Dès lors, et même si son casier est vierge de toute condamnation, sa participation dans l'organisation d'un trafic de cette importance, en fait la principale cheville ouvrière, puisqu'il était le seul à pouvoir, compte tenu de ses activités antérieures de conserveur, rentrer en contact avec d'aussi nombreux " clients ", susceptibles d'écouler les marchandises volées.
En conséquence, la sanction infligée par le premier juge sera confirmée.
* * *
Dominique Z..., Christophe X..., Eric C... et Manuel B... ont été relaxés de la poursuite de recel de biens provenant d'un vol. Or, il résulte de la procédure que ces derniers, professionnels de la restauration dans la région en Dordogne et spécialement dans la région de Sarlat, se sont portés acquéreurs de produits dérobés par Gilles I... et Patrick F... dans les locaux des Entrepôts Frigorifiques du Sarladais.
Il convient d'examiner dans quelles conditions ces achats ont été effectués, afin de savoir si les prévenus étaient susceptibles d'avoir connaissance de leur origine délictueuse, ainsi que l'a affirmé Gilles Y..., leur fournisseur et co-prévenu.
Manuel B... a déclaré aux services de gendarmerie qu'il avait eu des doutes quant à l'origine frauduleuse des produits ainsi acquis, mais il a reconnu que les prix attractifs pratiqués lui permettaient d'accroître sa marge bénéficiaire.
Dès lors, il s'est contenté des affirmations de son vendeur lui affirmant que tout était légal pour oublier ses scrupules. Or, dans le même temps, il savait que la conserverie de Gilles Y... était fermée, que celui-ci avait besoin d'argent et lui livrait à la demande, des produits congelés dans un fourgon non frigorifique, en pratiquant des prix les plus bas du marché. Plus encore, il a admis qu'il pensait bien que les produits provenaient d'une " magouille " quelconque.
Le fait qu'il ait obtenu des factures, lui permettant de donner une apparence de régularité à la transaction, n'est pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité pénale, puisque c'est parce qu'il avait des doutes, tant sur l'origine des produits que sur leur conditions de commercialisation, qu'il les avaient exigées de Gilles Y..., dont il savait pourtant qu'il n'avait plus de société, celle-ci étant en liquidation de biens.
Par ailleurs, contrairement à ce qu'il a soutenu, ont été saisis chez lui sur son indication, des produits livrés dans ces conditions par Gilles I..., parmi lesquels les 12 cartons de cèpes congelés.
Dès lors, c'est en connaissance de l'origine délictueuse des produits que Manuel B... les a acquis de Gilles Y....
Les faits de recel relevés contre lui sont caractérisés en tous leurs éléments et il en sera déclaré coupable.
Il en est de même de Dominique Z... qui a reconnu qu'il se doutait " d'une combine " à l'origine de la fourniture des produits, mais a admis ne pas avoir été regardant sur leur provenance et avoir pensé que c'était " bon à prendre. " Lui même a bien reconnu qu'il avait commis une infraction qualifiée de recel au terme de son audition.
Le fait qu'il ait produit, par la suite et pour tenter d'éluder sa responsabilité pénale, des factures émises l'année précédente portant des prix comparables à ceux que lui avait fait ponctuellement Gilles Y... pour des produits litigieux, n'ôte rien à la connaissance qu'il avait au moment de leur acquisition de leur origine délictueuse.
Quant à Eric C..., s'il a discuté devant les gendarmes son implication dans le trafic, il a reconnu, tant devant eux qu'à l'audience, que lorsqu'il avait compris qu'il n'y avait pas de factures de la marchandise acquise, car elle provenait d'un vol, il l'a tout de même conservée, en tentant d'en dissimuler l'existence.
De toute façon, il n'ignorait pas davantage que les autres que Gilles I... était en liquidation et qu'il ne disposait pas d'un camion frigorifique pour transporter les marchandises congelées, ce qui aurait été le cas si cela avait constitué sa véritable activité.
Quant à Christophe X..., il a déclaré qu'il a focalisé sur son propre intérêt, puisque les produits de très bonne qualité étaient vendus à un prix inférieur au marché, bien qu'il ait pensé qu'ils étaient d'origine douteuse.
Ces professionnels de l'hôtellerie, qui ont réglé la marchandise en liquide, directement ou sur présentation de factures qu'ils savaient falsifiées, ont reconnu qu'ils avaient connaissance que celle-ci provenaient " d'une magouille ", " d'une combine ", " d'un procédé pas net ", enfin d'une origine délictueuse quels que soient les termes employés pour tenter de minimiser leur responsabilité. Ils ne pouvaient, de toute façon pas ignorer leur origine délictueuse, compte tenu des conditions qui entouraient leur commercialisation par un conserveur en liquidation, ayant cessé son activité et susceptible cependant de pouvoir livrer à la demande de grandes quantités de marchandises congelées, à des prix défiant toutes concurrence et en les amenant à ses clients en fourgon, non réfrigéré.
Leur culpabilité est donc établie et ce quand bien même ils ignoraient les circonstances du délit originaire ou la personne au préjudice de laquelle il avait été commis.
Dès lors, le jugement déféré sera réformé et Christophe X..., Dominique Z..., Manuel B... ET Eric C... seront déclarés coupables de recel de marchandises volées.
Ils seront condamnés, en repression, à trois mois d'emprisonnement avec sursis, à l'exception d'Eric C... qui ne peut bénéficier du sursis simple et sera condamné à trois mois d'emprisonnement assorti du sursis et mise à l'épreuve pendant 18 mois.
SUR L'ACTION CIVILE
Il convient de renvoyer la cause et les parties à une audience ultérieure, pour qu'il soit statué sur les dispositions civiles du jugement critiquées.
La SA ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL sera invitée à s'expliquer sur la portée de son recours.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant dans la limite des appels publiquement et contradictoirement à l'égard de Christophe X..., Gilles Y..., Raymond A..., Eric C..., Dominique Z..., Manuel B..., la SAS ROUGIE BIZAC et la SAS VALETTE FOIE GRAS et par arrêt de défaut à l'égard de la SAS PARIS SAVEURS et de la SAS TRUFFE PERIGOURDINE,
Déclare les appels recevables,
Sur l'action publique,
Réformant partiellement le jugement déféré en ce qu'il a renvoyé Dominique Z..., Christophe X..., Eric C... et Manuel B... des fins de la poursuite et, statuant à nouveau sur ce chef,
Déclare Christophe X..., Dominique Z... et Manuel B... coupables de recel de biens provenant d'un vol,
Les condamne, en répression, à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis,
Constate que l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code Pénal a pu être donné au prévenu sent lors du prononcé de l'arrêt.
Déclare Eric C... coupable de recel de biens provenant d'un vol et le condamne, en répression, à trois mois d'emprisonnement assorti du sursis avec mise à l'épreuve pendant 18 mois,
Confirme le jugement sur la déclaration de culpabilité et la peine infligée à Gilles Y...,
Constate que l'avertissement prévu par l'article 132-40 du Code Pénal a pu être donné aux prévenus sents lors du prononcé de l'arrêt.
Sur l'action civile,
Renvoie la cause et les parties à l'audience du 9 juin 2006, à 14 heures,
Invite la SAS ROUGIE BIZAC INTERNATIONAL à s'expliquer sur la portée de son appel incident,
La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de cent vingt Euros dont est redevable chaque condamné par application de l'article 1018 A du Code Général des Impôts.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur le Conseiller LOUISET et Mademoiselle PAGES, Greffier présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Troisième chambre correctionnelle
Numéro d'arrêt : 05/01224
Date de la décision : 28/04/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-04-28;05.01224 ?
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