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07/02/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006951205

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Cinquieme chambre, 07 février 2006, JURITEXT000006951205


ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX-------------------------- Le : CINQUIEME CHAMBRE No de rôle :
04/ 05103 IT Monsieur X... exerçant à la Polyclinique Médicale de BORDEAUX CAUDERAN c/ Monsieur Marc Y... CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, AGRR PREVOYANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : aux avoués
Rendu le
Par mise à disposition au Greffe


Par Monsieur Patrick GABORIAU, Président
en présence de Monsieur Hervé GOUD...

ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX-------------------------- Le : CINQUIEME CHAMBRE No de rôle :
04/ 05103 IT Monsieur X... exerçant à la Polyclinique Médicale de BORDEAUX CAUDERAN c/ Monsieur Marc Y... CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, AGRR PREVOYANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : aux avoués
Rendu le
Par mise à disposition au Greffe
Par Monsieur Patrick GABORIAU, Président
en présence de Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, CINQUIEME CHAMBRE, a, dans l'affaire opposant :
Monsieur X... exerçant à la Polyclinique Médicale de BORDEAUX CAUDERAN demeurant Les Pins Françs... 33200 BORDEAUX Représenté par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assisté de Maître Anne-Marie CAMBRAY-DEGLANE, avocat au barreau de BORDEAUX
Appelant d'un jugement rendu le 08 septembre 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 29 Septembre 2004,
à :
Monsieur Marc Y... né le 20 Mars 1962 à BORDEAUX (33000) de nationalité Française demeurant ...33380 BIGANOS Représenté par la SCP Michel PUYBARAUD, avoués à la Cour assisté de Maître Catherine LATAPIE-SAYO avocat au barreau de BORDEAUX
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social place de l'Europe 33085 BORDEAUX CEDEX Représentée par
la SCP Luc BOYREAU et amp ; Raphael MONROUX, avoués à la Cour assistée de Maître ABDI loco SCP CIVILISE-FAVREAU avocats au barreau de BORDEAUX
AGRR PREVOYANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, 26, Place Gambetta 33000 BORDEAUX défaillante
Intimés,
Rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause a été débattue en audience publique, le 07 Février 2006 devant :
Monsieur Patrick GABORIAU, Président, chargé du rapport tenant seul l'audience pour entendre les plaidoiries, les Avocats ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, assisté de Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier.
Que Monsieur le Président en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, celle-ci étant composée de :
Monsieur Patrick GABORIAU, Président,
Madame Edith O'YL, Conseiller,
Madame Annie LEOTIN, Conseiller,
et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats.
Le 9 décembre 1996, Monsieur Marc Y... a subi une intervention chirurgicale à la Polyclinique de BORDEAUX-CAUDERAN, pratiquée par le Docteur Jean-Pierre X... chirurgien ORL et le Docteur B... anesthésiste en raison d'une obstruction nasale secondaire due à une déviation de la cloison nasale pour traitement post-traumatique.
A son réveil le patient s'est plaint d'une perte de vision de l'oeil gauche dont l'origine déterminée après consultation du Docteur H... Ophtalmologueest une occlusion de l'artère centrale de la rétine
rendant irrémédiable cette quasi cécité de l'oeil.
Le Professeur Claude F...désigné en qualité d'expert par ordonnance de référé du Président du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX pour déterminer les responsabilités éventuelles des médecins dans cette conséquence anormale de l'intervention du 9 décembre 1996 a clos ses opérations d'expertise le 8 octobre 2001 et déposé son rapport.
Par exploit d'huissier du 7 février 2003, Monsieur Marc Y... a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX Monsieur le Docteur Jean-Pierre X... la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Gironde l'AGRR Prévoyance
afin que le médecin soit déclaré responsable de l'atteinte oculaire qu'il a subi et qu'il soit condamné à indemniser le préjudice en résultant ainsi qu'à lui verser une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX du 8 septembre 2004 dont le dispositif est le suivant :
" Rejette la demande en nullité de l'expertise.
Dit que le Docteur Jean-Pierre X... a fait perdre à Monsieur Marc Y... une chance d'éviter l'atteinte oculaire subie suite à l'intervention pratiquée le 9 décembre 1996.
Dit que Monsieur X... devra réparer les préjudices subis par Monsieur Marc Y... à hauteur de 70 %.
Condamne le Docteur Jean-Pierre X... à payer à Monsieur Marc Y... :- la somme de 47 125, 60 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;- la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Constate que le recours de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de
la Gironde est exclu du protocole d'accord Organismes Sociaux et Entreprises d'Assurances du 24 mai 1983.
Condamne le Docteur Jean-Pierre X... à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Gironde :- la somme de1 391, 50 euros montant des prestations versées pour le compte de son assuré ;- la somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement.
Condamne Monsieur Jean-Pierre X... aux dépens ".
Vu l'appel régulièrement interjeté contre cette décision par Monsieur Jean-Pierre X... le 29 septembre 2004,
Vu les conclusions signifiées et déposées au greffe de la Cour :
- le 31 janvier 2005 par l'appelant
-le 17 novembre 2005 par Monsieur Marc Y...
- le 25 novembre 2005 par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Gironde £
Vu l'ordonnance de clôture du 24 janvier 2006 en l'absence de l'AGRR Prévoyance qui bien que régulièrement appelée, n'a pas constitué avoué,
La Cour demeure saisie du litige dans les termes suivants :
*Sur la nullité de l'expertise du Professeur F...:
L'appelant demande que l'expertise du Professeur F...soit déclarée nulle comme en première instance et à l'appui des mêmes arguments à savoir
-d'une part que l'expert n'a pas répondu au dire du Docteur D... qui l'assistait lors des opérations d'expertise
-d'autre part que le Professeur F...a fondé ses conclusions sur des documents non annexés au rapport d'expertise.
C'est cependant par des motifs complets et pertinents adoptés par la
Cour que les premiers juges ont retenu 1- que le Professeur F...contrairement aux affirmations de Monsieur Jean-Pierre X... a répondu aux dires du Docteur D... qui précisait que Monsieur Marc Y... avait été opéré sous anesthésie générale et que des anesthésiques locaux n'avaient pas été utilisés dans la région péri-nasale
"... cependant, comme nous l'avons précisé, il est noté que le Docteur X... n'a pas injecté de produit vaso constricteur aussi cette étiologie a donc, été éliminée ".
2- que l'expert a cité la source bibliographique à laquelle il se référait en citant expressément les références dans son pré-rapport et dans son rapport de ce document que le Docteur D... pouvait se procurer sans difficulté.
Sur la faute médicale du Docteur X... :
Le Docteur X... a pratiqué sur Monsieur Marc Y... une septoplastie
Selon le Professeur F...qui a procédé à une étude attentive complète et compétente du dossier médical de Monsieur Marc Y... et à l'audition des deux médocins concernés et de leur patient
-L'anesthésie était conforme aux règles habituelles de sécurité en particulier pas de phénomène d'hypotension artérielle ou de trouble
du rythme cardiaque.
- Le geste chirurgical ne montre pas d'anomalie ni pendant l'intervention ni dans les gestes post opératoires.
Selon l'expert, toujours si le trouble visuel dont reste atteint Monsieur Marc Y... est imputable à l'intervention pratiquée " au total il semble bien que pendant cette intervention une complication de l'acte chirurgical se soit produite, n'ayant pas donné lieu à des signes pouvant être reconnus par le praticien. Ce type de complication est rarissime pour les septoplasties, il est déjà reconnu comme exceptionnel dans les rhénoseptoplasties ".
Ainsi le Professeur F...ne relève aucune faute technique de nature à engager la responsabilité du chirurgien.
L'absence de communication du scanner du massif facial réalisé après l'intervention ne saurait constituer un élément fautif à l'encontre du chirurgien, ce document pouvant être aisément demandé à la Polyclinique de BORDEAUX-CAUDERAN par Monsieur Marc Y... ce qu'il n'a pas fait ou même tenter de faire.
Pour le Professeur F...et bien qu'il n'utilise pas le terme au profit de celui de risque, cette complication constitue un aléa thérapeutique.
Il s'agit d'événement exceptionnel imprévisible mais qui ne peut être maîtrisé et qui survient à l'occasion d'investigations nécessaires à l'administration d'une thérapie médicale ou chirurgicale.
Or, " la réparation des conséquences de l'aléa thérapeutique n'entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l'égard de son patient ".
2 Sur le défaut d'information de Monsieur Marc Y... par son médecin :
Le médecin doit informer le patient en vue d'éclairer son consentement aux soins et de lui permettre d'adapter sa conduite à la
thérapeutique prescrite.
Cette obligation d'information qui pèse sur le médecin en vertu du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine trouve également sa source dans l'application du code de déontologie médicale et a été réaffirmée par la charte du patient hospitalisé du 6 mai 1995.
De plus l'interprétation jurisprudentielle d'une même norme à un temps donné ne peut être différente selon la date des faits considérés et nul ne peut se prévaloir d'un droit acquis à une jurisprudence figée.
Selon cette obligation, un médecin est tenu de donner à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés et n'est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se réalisent qu'exceptionnellement.
En l'espèce, il est constant
En l'espèce, il est constant
que le Docteur X... a satisfait à son obligation d'information de manière incomplète puisqu'il n'a pas avisé son patient du risque de cécité qui s'est pourtant réalisé après la septoplastie pratiquée, que le praticien ne le soutient d'ailleurs pas et se borne à contester la possibilité pour le tribunal d'avoir statué sur le défaut d'information alors que ni l'assignation ni les conclusions de Monsieur Marc Y... n'y faisaient référence.
Les conséquences oculaires de l'intervention rarissimes pour le Professeur F...mais seulement relativement peu fréquentes pour le Professeur G...dans sa lettre au Docteur CAPSEC E... du 9 novembre 1998 devaient, cependant, être portées à la connaissance de Monsieur Marc Y... qui, comme l'ont très justement énoncé les
premiers juges dont l'argumentation doit être adoptée, a été privé de toute possibilité de choisir, subir, refuser, différer l'intervention ou d'obtenir d'autres avis médicaux.
Il convient de relever au surplus que la mission donnée à l'expert comportait en 3ème point " préciser si le consentement éclairé du patient a été recueilli ",
que le débat sur ce point a été complet en cause d'appel, la responsabilité de Monsieur X... pour faute impliquant tant en première instance que devant la Cour la recherche du respect de l'obligation d'information du médecin.
Enfin, c'est par une juste appréciation que le tribunal a évalué la perte de chance de Monsieur Marc Y... d'éviter son dommage résultant de sa cécité à 70 % eu égard à l'alea existant.
Sur les demandes annexes :
Il sera alloué-à Monsieur Marc Y... la somme de 1 500 euros ;- à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Gironde la somme de 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en cause d'appel.
Les intérêts légaux auront pour point de départ la date du jugement déféré.
Monsieur X... qui succombe supportera la charge des dépens
d'appel.
PAR CES MOTIFS : LA COUR
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Condamne Monsieur Jean-Pierre X... à payer :
- à Monsieur Marc Y... une somme de 1 500 euros ;
- à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Gironde une somme de 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en cause d'appel.
Rejette toute demande contraire ou plus ample des parties.
Condamne Monsieur Jean-Pierre X... aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick GABORIAU, Président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Cinquieme chambre
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006951205
Date de la décision : 07/02/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-02-07;juritext000006951205 ?
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