La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/09/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006945956

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0075, 15 septembre 2005, JURITEXT000006945956


ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : 15 Septembre 2005 CHAMBRE SOCIALE SECTION C PRUD'HOMMES No de rôle : 03/01538 LM Madame Annick X... c/ La S.A.S. CODIS Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le : LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à : La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier). Certifié par le Greffier en Chef, Grosse délivrée le : à :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant

été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa d...

ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : 15 Septembre 2005 CHAMBRE SOCIALE SECTION C PRUD'HOMMES No de rôle : 03/01538 LM Madame Annick X... c/ La S.A.S. CODIS Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le : LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à : La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier). Certifié par le Greffier en Chef, Grosse délivrée le : à :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile

Le 15 Septembre 2005

Par Monsieur Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président,

assisté de Mademoiselle France Y..., Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION C, a, dans l'affaire opposant :

Madame Annick X..., profession :

responsable caissière, demeurant 1 impasse Saint Ausone - 16100 COGNAC

régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception, assistée de Monsieur Claude Z... (Délégué syndical ouvrier), muni d'un pouvoir régulier.

Appelante d'un jugement rendu le 13 janvier 2003 par le Conseil de Prud'hommes de Cognac, Section Commerce, suivant déclaration d'appel en date du 14 février 2003,

à :

La S.A.S. CODIS, Activité : Supermarché, ayant son siège social sis 105 rue Basse Saint-Martin - 16100 COGNAC

régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception, assistée de Maître Christine SOURNIES (avocat au barreau

de Poitiers).

Intimée,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 30 Juin 2005, devant :

Monsieur Benoit FRIZON DE LAMOTTE, Président,

Madame Raphaùlle DUVAL-ARNOULD, Conseiller,

Monsieur Pierre A..., Vice Président placé,

Mademoiselle France Y..., Greffier,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par contrat écrit du 25 août 1980 la S.A. Codis, qui exploite un supermarché à Cognac, a engagé Madame Annick X... comme "caissière gondolière" ;

Madame Annick X... était promue "caissière responsable" en 1987, puis "chef de secteur caisse" en 1990.

Le 23 mars 1999, Madame Annick X... était convoquée à un entretien préalable à une sanction ;

après entretien, par lettre, la S.A. Codis a notifié à Madame Annick X... qu'aucune sanction ne serait prononcée, précisant "j'attire votre attention sur le devoir de réserve qu'impose un poste de manager caisses et je vous demande à l'avenir de ne pas dévoiler quelques informations que vous puissiez avoir en votre possession compte tenu de votre poste dans l'entreprise".

Par e-mail du 14 août 2001, Madame B... s'est plainte à la S.A. Codis dans les conditions suivantes :

"C... un petit souci avec le magasin E. Leclerc de Cognac, et surtout avec une personne qui est responsable de caisse Madame X... C... travaillé 4 mois en tant qu'hôtesse de caisse dans ce magasin. Je suis tombée malade et quand je suis revenue pour travailler, Madame

X... m'a dit qu'elle ne me gardait pas car je n'était qu'une remplaçante et que les remplaçants ne doivent pas tomber malade. Un jour, je suis passée à une caisse et l'hôtesse de caisse m'a dit que Madame X... ne voulait plus que je passe à sa caisse car je lui disais bonjour comme à toutes les autres que j'ai connu pendant 4 mois. Alors je suis allée parler à Madame X... pour avoir des explications en lui demandant avec qui je devais passer à la caisse et elle m'a répondu que je n'avais qu'à aller faire mes courses ailleurs. Ce que je n'apprécie pas du tout car je ne veux en aucun cas faire mes courses ailleurs." ;

à la suite de ce courrier, la S.A. Codis a convoqué Madame Annick X... à un entretien préalable à une sanction le 31 août 2001 ;

à la suite de cet entretien, aucune sanction n'était prononcée.

Par lettre du 29 octobre 2001, la S.A. Codis a écrit à Madame Annick X... sans entretien préalable :

"Vous n'êtes pas sans savoir qu'avec le passage à l'Euro nous allons rentrer dans une période cruciale pour la vie de l'entreprise.

Votre service y étant étroitement associé, il est donc primordial que tout soit mis en oeuvre pour que nos Hôtesses de Caisse travaillent dans les meilleures conditions.

Je vous rappelle que dans le cadre de vos attributions et responsabilités, vous êtes tenue au respect de la législation, aux affichages obligatoires et à l'organisation des horaires.

Or, au vu des différents entretiens sollicités par des Hôtesses de Caisse, il s'avère que vous faites preuve d'importants dysfonctionnements, à savoir, sans que cette liste soit exhaustive :

- non respect du délai légal de communication des horaires, qui je vous le rappelle est fixé à 15 jours dans l'entreprise ;

- discrimination évidente entre les unes et les autres pour ce qui

est du nombre de fermeture, du travail des mercredis après-midi et samedi et des amplitudes de la journée ;

- non respect du repos tournant obligatoire toutes les 12 semaines.

Qui plus est, il vous est reproché d'avoir des propos blessants sur des sujets concernant la vie privée du personnel.

Je vous rappelle que vous avez à votre disposition tous les outils nécessaires pour que les points évoqués ci-dessus soient réglés au mieux des intérêts de chacun dans un délai que je souhaite le plus court possible.

L'ensemble de la direction se tient à votre disposition si vous avez besoins d'être conseillée.

J'attire votre attention sur le fait que de tels manquements pourraient justifier sans aucune difficulté votre licenciement pour faute grave.

Je prends en compte votre ancienneté et le surcroît de travail que déjà eu avec la direction des entretiens à ce sujet.

Ce courrier a donc valeur d'avertissement et je souhaite que vous vous ressaisissiez le plus rapidement possible." ;

par lettre du 31 octobre 2001, Madame Annick X... a répondu :

"Suite à votre courrier en recommandé du 29 octobre 2001, je viens par cette lettre vous demandez ma démission dans les délais prévus par votre convention" ;

elle ajoute : "n'acceptant pas les reproches cités dans votre courrier, je ne préfère en aucun cas nuire plus longtemps à l'entreprise" ;

par lettre du 6 novembre 2001, la S.A. Codis a répondu :

"Vous nous informez de votre décision de démissionner en citant notre courrier recommandé du 29 octobre 2001.

Nous vous rappelons que, par cette lettre du 29 octobre 2001, nous vous faisions part d'un certain nombre de reproches professionnels et

nous prenions à votre égard une sanction disciplinaire.

Notre courrier se terminait de la manière suivante :

"Ce courrier a donc valeur d'avertissement et je souhaite que vous vous ressaisissiez le plus rapidement possible.

Je vous remercie par avance de votre collaboration."

La poursuite de notre collaboration ne faisait donc à nos yeux aucun doute.

Vous avez certes la possibilité de ne pas accepter les reproches cités dans notre courrier mais nous n'aviez aucune obligation de prendre la décision de démissionner, décision notifiée par courrier recommandé.

Nous prenons acte de votre décision." ;

par lettre du 7 décembre 2001, Madame Annick X... a sollicité sa réintégration, sa démission ayant selon elle été faite "sur un coup de colère et de la pression des mois écoulés" ;

par lettre du 14 décembre 2001, la S.A. Codis a refusé celle-ci.

Le 11 mars 2002, Madame Annick X... a saisi le conseil des prud'hommes de Cognac d'une demande tendant à la condamnation de la S.A. Codis à lui payer des dommages et intérêts en suite de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement du 13 janvier 2003, le conseil des prud'hommes a :

- débouté Madame Annick X... de sa demande,

- condamné cette dernière à payer à la S.A. Codis la somme de 350 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Madame Annick X... a régulièrement interjeté appel de cette décision ;

par conclusions déposées le 19 janvier 2005 et développées à l'audience,

elle demande à la cour :

- de dire que "sa démission est étroitement liée à l'attitude de harcèlement moral et pression psychologique accrue de l'employeur en général et de son directeur, Monsieur Pascal D...", était irréfléchie et équivoque, que dès lors la rupture est imputable à la S.A. Codis, - de condamner celle-ci à lui payer les sommes de :

- 10.747 ç pour licenciement sans cause réelle et sérieuse par application de l'article L 122-14-4 du contrat de travail, outre intérêts,

- 3.582 et 358,20 ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis, avec incidence sur les congés payés, outre intérêts,

- 7.166 ç à titre de prime conventionelle de licenciement, outre itnérêts,

- 1.500 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- de condamner celle-ci enfin à lui remettre sous astreinte les documents légaux.

De son côté, la S.A.S. Codis, par conclusions déposées le 3 mars 2005, développées à l'audience, poursuit :

- la confirmation du jugement,

- la condamnation de Madame Annick X... à lui payer la somme de 2.000 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

elle fait valoir notamment :

- que Madame Annick X... a, dans son courrier manuscrit du 31 octobre 2001 établi à son domicile, démissionné de façon claire et

non équivoque,

- que pendant toute la durée de l'exécution de son préavis, elle n'a pas rétracté sa décision, ni cherché à joindre sa direction, précisant même à une collègue qu'elle ne reviendrait pas sur sa démission,

- que sa rétractation était tardive.

DISCUSSION

La lettre d'avertissement du 29 octobre 2001 impute à la salariée des faits que l'employeur n'hésite pas à qualifier de suffisamment graves pour pouvoir justifier un licenciement pour faute grave ;

elle n'a été précédée d'aucun entretien, même si cette procédure n'est pas indispensable eu égard à la sanction prononcée ;

elle concerne une salariée ayant plus de vingt ans d'ancienneté, dont la compétence avait été reconnue, et qui avait la responsabilité importante du secteur caisse.

Si ne sont pas justifiés le harcèlement au sens de l'article L 122-49 du contrat de travail et la contrainte morale viciant le consentement de la salariée, la lettre de rupture de la salariée du 31 octobre 2001 précise expressément qu'elle fait directement suite aux griefs émis dans la lettre du 29 octobre 2001, griefs jugés par la S.A. Codis suffisamment graves pour avoir pu même justifier un licenciement pour faute grave, griefs que Madame Annick X... dit ne pouvoir accepter,

dans ces conditions, la lettre de démission est circonstanciée et dès lors la salariée n'a pas pu manifester une volonté claire et non équivoque de démissionner ;

en l'espèce, les fautes énoncées dans la lettre du 29 octobre 2001 sont qualifiés de suffisamment graves pour justifier un licenciement pour faute grave,

or, à supposer leur matérialité même établie, ils ne pouvaient

justifier la rupture immédiate des relations de travail ;

d'autre part, Madame Annick X... avait su faire preuve de qualités éminentes puisque, embauchée en qualité de caissière, elle avait accédé à un poste de responsabilité et était notée très correctement selon les fiches de notation produites ;

par ailleurs, la menace de licenciement pour faute grave a été concomitamment utilisée le même jour pour d'autres motifs à l'égard d'un autre responsable ce qui est démonstratif de méthodes de management du personnel particulières ;

enfin, ne sont pas identifiés de façon précise les salariés concernés par la discrimination dite évidente, ou le non respect des repos, les propos blessants ;

au vu de ces éléments, il y a lieu de considérer que le licenciement est irrégulier et sans cause réelle et sérieuse ;

par application de l'article L 122-14-4 du contrat de travail, les préjudices subis seront fixés comme il suit ;

la rupture étant datée de la réception de la lettre du 31 octobre 2001, le préavis ayant été effectué et réglé, rien n'est dû à ce dernier titre ;

le harcèlement moral, et la contrainte invoquée n'étant pas fondés,

les demandes en dommages et intérêts présentées à cet égard doivent être rejetées ;

en revanche, la rupture s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée a droit à une indemnité conventionnelle de licenciement conformément à la demande ;

enfin, les intérêts sur les condamnations pécuniaires seront calculés comme il suit par application des articles 1153 et 1153-1 du Code civil.

DÉCISION

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

infirme le jugement,

condamne la S.A.S. Codis à payer à Madame Annick X... les sommes de :

1o - 10.747 ç à titre de dommages et intérêts par application de l'article L 122-14-4 du code du travail outre intérêts au taux légal à compter de ce jour,

2o - 7.166 ç à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, outre les intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2002,

3o - 1.500 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

ordonne la remise sans astreinte d'un bulletin de salaire comportant le montant de l'indemnité de licenciement,

déboute les parties de leurs autres demandes,

condamne la S.A. Codis aux dépens de première instance et d'appel.

Signé

Signé par Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président et par Mademoiselle France Y..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0075
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945956
Date de la décision : 15/09/2005

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2005-09-15;juritext000006945956 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award