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18/09/2001 | FRANCE | N°97/03092

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 18 septembre 2001, 97/03092


ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX Le : 18 septembre 2001 CINQUIEME CHAMBRE N° de rôle : 97/03092 La FONDATION BAGATELLE Madame le Docteur Anne X... SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCE Y... (S.H.A.M.) c/ Monsieur Z... Madame A... Z... Mademoiselle Alicia Z... Mademoiselle Aurélie Z... B... d'assurance ABEILLE ASSURANCES Le cabinet d'assurance AXA La C.P.A.M de la Gironde La mutuelle MATIS FRANCE Nature de la décision : C... FOND Grosse délivrée le : à : Prononcé en audience publique, Le 18 septembre 2001 Par Monsieur GABORIAU, Président en présence de Madame D..., Greffier La C

OUR d'APPEL de BORDEAUX, CINQUIEME CHAMBRE, a dans l'affa...

ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX Le : 18 septembre 2001 CINQUIEME CHAMBRE N° de rôle : 97/03092 La FONDATION BAGATELLE Madame le Docteur Anne X... SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCE Y... (S.H.A.M.) c/ Monsieur Z... Madame A... Z... Mademoiselle Alicia Z... Mademoiselle Aurélie Z... B... d'assurance ABEILLE ASSURANCES Le cabinet d'assurance AXA La C.P.A.M de la Gironde La mutuelle MATIS FRANCE Nature de la décision : C... FOND Grosse délivrée le : à : Prononcé en audience publique, Le 18 septembre 2001 Par Monsieur GABORIAU, Président en présence de Madame D..., Greffier La COUR d'APPEL de BORDEAUX, CINQUIEME CHAMBRE, a dans l'affaire opposant : La FONDATION BAGATELLE maison de santé protestante de BORDEAUX dont le siège est 201 rue Robespierre - 33400 TALENCE, agissant poursuites et diligences de son Président demeurant es qualité audit siège, Madame le Docteur Anne X..., épouse PIERROT E... le 27 août 1957 à BAYONNE, de nationalité française, Gynécologue demeurant 125 cours Gambetta - Bât. F Entrée 2 - 33400 TALENCE, représentées par la SCP TOUTON-PINEAU etamp; FIGEROU, avoués à la Cour assistées de Me Thierry MIRIEU DE LABARRE, avocat au barreau de BORDEAUX, appelantes d'un jugement rendu le 06 mai 1997 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 30 mai 1997, La SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCE Y... (S.H.A.M.) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège 74 rue Louis Blanc - 69000 LYON, représentée par la SCP LABORY-MOUSSIE etamp; ANDOUARD, avoués à la Cour assistée de Me Raymond-Luc LARNAUDIE, avocat au barreau de BORDEAUX, appelante du même jugement suivant déclaration d'appel en date du 23 juillet 1997, à : Monsieur Z... Yves F... le 28 janvier 1957 à Bordeaux (33), de nationalité française, Demeurant 7 rue Georges Braque - Lotissement G... églantiers - 33270 FLOIRAC Madame A..., Marie, Hilde Z... E... le 22 mai 1955 à Bordeaux (33),

de nationalité française, Demeurant 7 rue Georges Braque - Lotissement G... églantiers - 33270 FLOIRAC Madame A... Z..., prise tant en son nom personnel qu'ès qualité de représentante légale de ses filles, Mademoiselle Alicia Z..., née le 25 août 1991 à Talence, et Mademoiselle Aurélie Z..., née le 28 juin 1980, représentés par la SCP ARSENE-HENRY etamp; LANCON, avoués à la Cour assistés de Me Pierre SIRGUE, avocat au barreau de BORDEAUX, La compagnie d'assurance ABEILLE ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège 52 rue de la Victoire - 75000 PARIS et pour les besoins de la cause le cabinet Jean LE PAPE, dont le siège est rive gauche rue Cazade à DAX (40100) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège représentés par Me Daniel FOURNIER, avoué à la Cour assistés de Me Marie- Lucille HARMAND-DURON, avocat au barreau de BORDEAUX, Le cabinet d'assurance AXA, Pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège Avenue Haut Lévèque - Parc Technologique Europarc - 33600 PESSAC, représenté par Me Daniel FOURNIER, avoué à la Cour assisté de Me CAZENAVE, loco Me Yves DELAVALLADE, avocat au barreau de BORDEAUX, La C.P.A.M. de la Gironde, Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège place de l'Europe - 33017 BORDEAUX CEDEX représentée par la SCP BOYREAU etamp; MONROUX, avoués à la Cour assistée de Me CLISSON, loco Me Bertrand FAVREAU, avocat au barreau de BORDEAUX, La mutuelle SMATIS FRANCE, Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège 6 à 14 rue du Piave - 16000 ANGOULEME, non comparante, non représentée, Intimés, Rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause a été débattue en audience publique, le 19 juin 2001 devant : M. GABORIAU, Président, Mme MOLLET, Conseiller, Mme DE MALAFOSSE, Conseiller, assistés de Mme D..., Greffier, Et qu'il en a été délibéré par les

Magistrats du Siège ayant assisté aux débats. Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 25 février 1997, Vu l'appel formé contre cette décision par la FONDATION BAGATELLE, maison de santé protestante de BORDEAUX et le Docteur Anne X... le 30 mai 1997, Vu l'appel formé contre cette décision par la Société Hospitalière d'Assurance Y... (S.H.A.M.) le 23 juillet 1997, Vu l'ordonnance du Conseiller de la Mise en l'Etat en date du 17 février 1999 joignant les deux procédures d'appel sous le même n° de rôle 97003092, Vu les dernières écritures de la FONDATION BAGATELLE et du Docteur X..., salariée de la fondation, signifiées et déposées au greffe de la Cour le 26 février 2001, Vu les dernières écritures de la S.H.A.M. signifiées et déposées au greffe de la Cour le 29 mai 2001, Vu les dernières écritures de Yves Z... et de A... Z... agissant en leur nom personnel et Madame Z..., également en qualité de représentante légale de ses filles Aurélie et Alicia Z..., signifiées et déposées au greffe de la Cour le 16 novembre 2000, Vu les dernières conclusions de la compagnie ABEILLE ASSURANCES, signifiées et déposées au greffe de la Cour le 25 mai 1999, Vu les dernières écritures de la compagnie AXA, signifiées et déposées au greffe de la Cour le 11 avril 2000, Vu les dernières écritures de la C.P.A.M. de la Gironde, signifiées et déposées au greffe de la Cour le 30 mai 2001, Vu l'ordonnance de clôture en date du 5 juin 2001, La Cour demeure saisie du litige dans les mêmes termes qu'en premier ressort : *Sur le rappel des faits A... Z..., maman d'une fille Aurélie née en 1980 a consulté le Docteur Anne X... le 28 mars 1991 afin d'obtenir confirmation de son état de grossesse. A la suite d'une première échographie pratiquée le 11 avril 1991 faisant apparaître un très discret dédoublement des parties molles de la région nuquale du fotus, une deuxième échographie réalisée le 26 avril 1991 a confirmé l'aspect anormal de

la nuque susceptible de révéler une anomalie chromosomique. A l'occasion d'une biopsie du placenta proposée par le Docteur H..., acceptée par Madame Z... en considération des risques inhérents à cette technique et, réalisée le 3 mai 1991, le praticien a constaté un décollement placentaire provoqué par la ponction, Le caryotype ne révèlera aucune anomalie chromosomique. Le 31 mai 1991, des métrorragies importantes ont nécessité l'hospitalisation d'urgence de Madame Z... à la clinique BAGATELLE où elle est restée sans discontinuer quelques jours après son accouchement le 25 août 1991 sous le contrôle du Docteur X... intervenant dans le cadre du service salarié qu'elle effectuait à mi-temps dans cet établissement. Le 1er juin 1991, une échographie a révélé à 17,5 semaines une vitalité fotale normale, un retard de croissance intra-utérin et une absence de liquide amniotique en raison d'une fissuration des membranes. Depuis cette date, les comptes rendus des échographies pratiquées chaque semaine ont relevé une diminution constante du liquide amniotique, cette diminution très importante confinant certaines semaines à l'anamnios, c'est à dire à l'absence totale de liquide. Le 11 juillet 1991, réalisé par le Docteur I..., une échographie morphologique de règle à 23 semaines et demi a permis au praticien de constater une vitalité normale du fotus, un retard de croissance intra-utérin et un oligo-amnios sévère mais le médecin n'a décrit aucune malformation. Le 15 août 1991 une menace d'accouchement prématuré a été écartée par des soins appropriés du Docteur X... qui a décidé cependant, le 25 août 1991 à 30 semaines de grossesse de pratiquer une césarienne sous anesthésie péridurale de Madame Z... en raison de plusieurs facteurs manifestant l'urgence de cette intervention : -mouvements du fotus paraissant diminués -liquide amniotique continuant à s'écouler -traces du monitorage commençant à s'altérer. L'intervention effectuée sans difficulté par le Docteur

X... a permis l'accouchement d'une petite fille de 1,300 Kg en état de d "tresse respiratoire nécessitant une intubation, l'évacuation de l'enfant sur le centre de néonatologie de Libourne puis après 48 heures sur le centre de réanimation néonatale du C.H.U. de Bordeaux. La petite Alicia souffrant de malformations et de problèmes respiratoires a été hospitalisée jusqu'au 29 novembre 1991 en réanimation puis jusqu'au 16 mars 1992 dans le secteur de néonatologie.Sur le bien fondé de l'appel. G... appelants font grief à la décision attaquée d'avoir retenu la responsabilité de la Fondation BAGATELLE car selon eux, le Docteur X... n'aurait commis aucune faute de nature à justifier l'action des époux Z... et de leurs filles. Ils font valoir : que le Docteur X..., selon les experts non contredits sur ce point, n'a commis aucune faute médicale, que même si ce praticien n'a pas totalement rempli son obligation d'information, ce manquement ne pouvait avoir aucune conséquence : - d'une part, parce que les époux Z... n'ont jamais demandé à ce qu'il soit pratiqué une interruption volontaire de grossesse, - d'autre part, parce que ni Madame Z... ni l'enfant à naître n'étaient dans une situation permettant l'application des dispositions de l'article L. 162-12 du Code de la Santé Publique

alors en vigueur, qui n'autorisait l'interruption volontaire de grossesse pour motif thérapeutique au delà de 10 semaines que dans des conditions non remplies dans le cas d'espèce. Ils soutiennent à cet effet, que, certes, les experts ont précisés qu'il y avait un risque aggravé par l'état pathologique de la grossesse de Madame Z... mais que ce risque était celui d'une malformation ultérieure simplement éventuelle et en tout cas non encore constatée, que l'I.T.G. ne peut être justifiée que s'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic,, que cette condition n'existe que si l'affection probable est déjà identifiée et qu'on la détecte ou soupçonne au moment du diagnostic, qu'en l'espèce, aucune affection particulière n'a été déterminée et, le seul fait que le type de grossesse suivi (grossesse pathologique, oligo-amnios) comportant en lui même un risque aggravé de troubles futurs éventuels, ne permettait pas de remplir les conditions exigées par l'article L. 162-12 du Code de la Santé Publique. L... résulte de l'expertise des Professeurs PONTONNIER et JUSKIEWENSKI dont le rapport, contre lequel aucune critique médicalement fondée ne peut être retenue, peut servir de fondement à l'argumentation de la Cour qu'aucun des médecins étant intervenu dans le cadre de la grossesse et de l'accouchement de Madame Z..., dont le Docteur X..., n'a commis de faute médicale, G... experts ont cependant noté, dès le 1er juin 1991, et de la même façon par la suite, que les échographies pratiquées ont toujours montré une absence de liquide amniotique traduisant une fissuration des membranes, G... experts, ont même retenu que cette diminution très importante de liquide amniotique confinait certaines semaines à l'anamnios c'est à dire à l'absence totale de liquide. Certes, malgré un oligo-amnios sévère, le Docteur I... qui a pratiqué une échographie morphologique le 11 juillet

1991 n'a décrit aucune malformation, Néanmoins, les Professeurs PONTONNIER et JUSKIEWENSKI ont pris soin de préciser que l'absence totale de liquide amniotique empêchait une bonne visualisation du fotus et qu'en ce cas le dépistage des malformations était moins fiable. Ils ont également constaté qu'aucune étude particulière de la morphologie des membres n'avait été réalisée et que si l'échographie du 21 août 1991 mesurait les citernes du liquide amniotique sans révéler d'anomalie, ce résultat devait être interprété avec prudence, étant en contradiction avec l'oligo-amnios présent pendant toute la grossesse et compte tenu du fait que cette mesure nécessitait une certaine habitude. G... praticiens nommés, ont ainsi retenu que dans ce contexte, le Docteur X... n'avait pas donné aux époux Z... une information complète puisque si elle a évoqué avec eux les risques de prématurité, elle a reconnu n'avoir jamais fait mention des possibilités de malformations ou malpositions des membres et de complications broncho-pulmonaires sévères pouvant secondairement entraîner une souffrance cérébrale par défaut d'oxygénation après la naissance. Or, il n'est pas contesté que la fuite précoce et chronique du liquide amniotique pendant la grossesse fait courir le risque de malformations et surtout une bronchodysplasie pouvant elle même entraîner des troubles sévères de l'oxygénation après la naissance susceptibles de léser le cerveau. G... experts, après avoir relevé que dans le cas particulier d'Alicia, les malformations des membres s'étaient produites ainsi que la bronchodysplasie, se sont interrogés sur le recours à une interruption thérapeutique de grossesse en ce cas particulier. Ils ont fait observer qu'en l'absence de liquide amniotique ou d'oligo-amnios sévère, les risques sont tels que l'interruption médicale peut être envisagée après quelques semaines d'observation pour vérifier si le liquide amniotique ne se reconstitue pas et que dans de telles situations une

discussion entre les différents spécialistes de diagnostic prénatal, obstétriciens, échographistes et pédiatres s'avérait indispensable ainsi que la participation des parents, complètement informés même si la décision relève in fine de l'accoucheur. G... experts ont admis que l'indication d'interruption de grossesse pouvait être posée étant donné la sévérité de l'oligo-amnios dans le cas d'Alicia, mais, que le Docteur X... avait assuré seule, en son âme et conscience, la responsabilité de ne pas interrompre. Or, les Professeurs PONTONNIER et JUSKIEWENSKI ont clairement précisé: "en cas d'oligo-amnios sévère, persistant jusqu'à la fin de la grossesse, il existe un pourcentage élévé de malformation des membres et de bronchodysplasie. K... cette dernière complication qui est le plus à craindre car elle est grave par ses éventuelles conséquences cardiaques et respiratoires et parce qu'elle est fréquente. Elle justifie, dans les cas d'oligo-amnios sévère, l'interruption de grossesse si les parents donnent leur accord". L... convient de retirer de l'ensemble de ses éléments, dans le cas d'Alicia: que dès le 1er juin et jusqu'à l'accouchement en date du 25 août 1991, les échographies pratiquées régulièrement ont toujours permis de constater une absence de liquide amniotique et certaines semaines une absence totale de liquide caractérisant un oligo-amnios sévère, qu'il existait un risque élevé de malformation des membres et une bronchodysplasie avec d'éventuelles mais fréquentes conséquences cardiaques et respiratoires pouvant donner lieu à des séquelles neurologiques, que cet oligo-amnios sévère constaté à plusieurs reprises durant la grossesse de Madame Z... justifiait l'interruption de grossesse avec l'accord des parents, que le Docteur X... ne s'est pas entouré d'avis techniques susceptibles de l'aider dans ce cas difficile, qu'au surplus, elle n'a pas tenu informé les parents des risques encourus par l'enfant en raison de cet oligo-amnios sévère alors que

ses compétences médicales reconnues ne pouvaient lui faire ignorer les conséquences que l'on pouvait en attendre. Or, les époux Z..., en l'absence de toute information sur ces risques ne pouvaient bien évidemment se prononcer sur une interruption de grossesse par un choix clair et motivé. Inquiets cependant, de l'absence de liquide amniotique synonyme pour eux de graves risques pour l'enfant, ils ont néanmoins fait part très précisément à Madame X... de leur souhait de voir cette grossesse interrompue. A cet égard, et malgré les dénégations du Docteur X... qui n'a d'ailleurs pas mis les époux Z... en mesure de faire un choix éclairé, les attestations régulièrement établies les 8 novembre 1993 et 14 mai 1998 de Madame M... une voisine de chambre de Madame Z...,sont déterminantes. Aucun élément n'est susceptible d'entacher la véracité de ces témoignages au seul motif, au dire des appelants, qu'ils seraient tardifs alors que la première déclaration date d'un peu plus de 2 ans après les faits. Madame M... a clairement précisé que Madame Z... était "paniquée à cause de ces pertes anormales", qu'elle en a parlé, ainsi que son époux, au Docteur X..., qui s'est opposé, le 12 juin 1991 à leur demande d'interruption de grossesse et leur a précisé "qu'il n'y avait aucun risque que lebébé vienne au monde avec des dificultés anormales". L'inexécution de l'obligation d'information qui pesait sur le Docteur X... apparaît donc établie et constitue une faute dans l'exécution du contrat formé entre la fondation BAGATELLE dont elle était la salariée et Madame Z... N... lors que cette faute a empêché les époux Z... d'exercer leur choix d'interrompre la grossesse afin d'éviter la naissance d'un enfant atteint d'un handicap, ils peuvent demander réparation du préjudice subi. L'enfant né handicapé peut, également, demander réparation du préjudice résultant de son handicap si ce dernier est en relation de causalité directe avec la faute commise par le médecin

dans l'exécution du contrat formé avec sa mère et qui a empêché celle-ci d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse, et si au surplus, il est établi, dans le cas d'une interruption pour motif thérapeutique, que les conditions médicales présentes pour la mise en ouvre de cette mesure étaient réunies. L... n'est pas contesté que les séquelles dont reste atteinte la petite fille sont comme l'on retenu les experts en relation avec une pathologie liée à l'oligo-amnios sévère pour laquelle une interruption de grossesse pouvait être justifiée. C... vu des dispositions de l'article L. 162-12 du Code de la Santé Publique alors en vigueur, l'interruption volontaire de grossesse pour motif thérapeutique peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins attestent après examen et discussion "qu'il existe une forte probabilitéque l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic". G... experts, Professeur de gynécologie obstétrique pour l'un et Professeur de chirurgie infantile pour l'autre,de grande notoriété ont retenu en cas d'oligo-amnios sévère et persistant un pourcentage élevé de malformations des membres et de bronchodysplasie fréquente et grave par ses éventuelles conséquences cardiaques et respiratoires. La forte probabilité d'une affection d'une particulière gravité existait bien dans le cas de l'enfant à naître de Madame Z... G... malformations des membres inférieurs et supérieurs ainsi qu'une bronchodysplasie ont d'ailleurs été constatées chez la petite Alicia dont les séquelles résultant des malformations et de troubles neurologiques ne sont pas consolidés à ce jour. Le fait que la bronchodysplasie n'était pas constituée durant la grossesse est inopérant dans la mesure où elle ne pouvait se manifester qu'au moment de la naissance et entraîner d'éventuelles séquelles neurologiques par insuffisance respiratoire et d'irrigation du cerveau, mais qu'en raison de l'absence de liquide amniotique,

elle s'avérait fréquente et grave. G... Professeurs PONTONNIER et JUSKIEWENSKI, au regard de la législation en vigueur en matière d'interruption vonlontaire de grossesse pour motif thérapeutique se sont d'ailleurs clairement prononcés pour cette possibilité en cas d'oligo-amnios sévère, ce qui était le cas pour Madame Z... K... donc par des motifs pertinents et complets, adoptés en tant que de besoin par la Cour, que les premiers juges ont déclaré la FondationBAGATELLE responsable du dommage des époux Z... et de leur fille Alicia. *Sur les préjudices. 1)-Sur le préjudice moral de Monsieur et Madame Z... L... convient de confirmer sur ce point également et par adoption de motifs, la décision des premiers juges et d'allouer à chacun des parents en sus de la provision précédemment allouée de ce chef une provision complémentaire de 20.000 francs. 2)-Sur le préjudice corporel de Madame Z... C... vu des éléments médicaux qu'elle a communiqué pour justifier de sa demande et dans l'attente de la liquidation de son préjudice personnel par le Tribunal, il convient d'allouer à Madame Z... en sus de la provision précédemment allouée, une indemnité provisionnelle de 100.000F. 3)-Sur le préjudice d'Alicia Z... C... vu des éléments médicaux qui établissent que d'ores et déjà l'enfant subi un préjudice très important et reste actuellement atteinte de séquelles non consolidées, il convient d'une part de confirmer par adoption de motifs, la décision des premiers juges qui ont alloué aux époux Z... pour le compte de l'enfant une provision de 200.000 F et ordonné une expertise médicale d'Alicia et, d'autre part, d'allouer à Monsieur et Madame Z... es qualités d'administrateurs légaux de leur fille une nouvelle provision de 20.000 F. 4)-Sur le préjudice d'Aurélie Z... Sans méconnaître les profonds bouleversements qui ont affecté le milieu familial à la suite de la naissance de l'enfant handicapée et du retentissement psychologique et affectif subi par

Aurélie Z..., il convient de rappeler comme l'ont fait les premiers juges que la perte de chance de pratiquer une interruption volontaire de grossesse ne peut concerner que le couple et leur enfant handicapé pour son préjudice directement lié à l'impossibilité de choix laissé à ses parents par suite du manquement du médecin à son devoir d'information. K... donc, à bon droit et par des motifs adoptés que les premiers juges ont déclaré la demande présentée au nom d'Aurélie Z..., aînée du couple, irrecevable. *Sur les appels en garantie dirigés contre la compagnie ABEILLE ASSURANCES, la compagnie AXA ASSURANCES et la SHAM. 1)-La compagnie ABEILLE-PAIX La mise hors de cause de la compagnie ABEILLE prononcée par les premiers juges n'est pas discutée. Cette compagnie qui assurait le Docteur X... pour son activité libérale et non la Fondation BAGATELLE responsable du dommage en raison de la faute de son salarié doit être maintenue hors de cause. 2)-La compagnie AXA Assurances et la SHAM La Fondation BAGATELLE a successivement souscrit une police d'assurance le 8 avril 1991 auprès de la compagnie LA PROVIDENCE, aux droits de laquelle vient la compagnie AXA Assurances et, une police de responsabilité civile auprès de la compagnie SHAM à effet du 1er mars 1993. L... en résulte qu'au moment où le fait à l'origine du dommage a été commis que ce soit durant la période de grossesse pathologique de Madame Z... ou l'accouchement d'un enfant handicapé, c'est la compagnie LA PROVIDENCE qui garantissait le risque de responsabilité civile et, qu'à la date où l'action en responsabilité a été engagée par les époux Z... contre la Fondation BAGATELLE, c'est la SHAM qui garantissait les dommages corporels engageant le responsabilité de son assuré en vertu d'une reprise du passé sous certaines conditions. Compte tenu de la réalisation du fait dommageable durant sa période de garantie, la compagnie AXA Assurances est tenu de prendre en charge les conséquences dommageables de ce fait, quels que

soit le moment où celles-ci se sont révélées et celui où la réclamation a été présentée. K... donc à tort que la compagnie AXA Assurances a été mise hors de cause par les premiers juges. La compagnie AXA Assurances fait cependant valoir que la SHAM doit également garantir le dommage cumulatif en raison des stipulations contractuelles de sa clause de reprise du passé. L... convient d'observer : que cette clause particulière par dérogation à l'article 11 des conditions générales du contrat prévoit la garantie des dommages corporels engageant la responsabilité de l'assuré et dont le fait générateur est antérieur à la date de prise d'effet du contrat à la double condition que : - d'une part, à la date de souscription du contrat, ledit fait générateur ait été inconnu des représentants légaux du sociétaire, - d'autre part, la réclamation écrite de la victime ait fait préalablement l'objet d'un refus de prise en charge écrit et motivé par l'assureur qui garantissait le risque au moment de l'événement. Or, si la première condition, ainsi que l'ont très justement apprécié les premiers juges, est remplie dans la mesure où aucun document produit ne peut être assimilé à une réclamation amiable des époux Z... vis à vis de la Fondation BAGATELLE, seule susceptible d'aviser celle-ci d'un éventuel sinistre, la deuxième condition qui exige une demande préalable de la victime à l'assureur garantissant le risque au moment de l'accident n'a pas été satisfaite. En effet, la réclamation écrite des époux Z... ne résulte que de l'assignation en référé qui a été délivrée à la Fondation BAGATELLE le 31 mai 1995. Cette assignation assimilable à la réclamation écrite n'avait pas fait préalablement l'objet d'un refus de prise en charge écrit et motivé par la compagnie LA PROVIDENCE qui garantissait le risque au moment de l'accident. Cette réclamation n'a été portée à la connaissance simultanée de la compagnie AXA Assurances et de la SHAM qu'à partir de leur mise en

cause par assignation des 25 et 26 septembre 1995 à la requête du Docteur X... et de la Fondation Bagatelle. La SHAM n'est donc pas tenu de garantir le dommage des époux Z... et de leur fille Alicia, en vertu de la clause de reprise du passé et doit être mise hors de cause.Sur les demandes annexes L... apparaît équitable d'allouer en cause d'appel en sus des indemnités de procédure précédemment octroyées : -aux époux Z... : la somme de 8.000 F, -à la C.P.A.M. de la Gironde : la somme de 1.000 F, -à la SHAM : la somme de 4.000 F. PAR CES MOTIFS, LA COUR, Vu l'ordonnance du 17 février 1999, Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions à l'exception de la mise hors de cause de la compagnie AXA Assurances et de la garantie de la SHAM au bénéfice de la Fondation BAGATELLE. Réformant sur ces points et statuant à nouveau. Dit que la compagnie AXA Assurances venant aux droits de la compagnie LA PROVIDENCE doit sa garantie à la Fondation BAGATELLE. Met hors de cause la SHAM. Ajoutant : Condamne la Fondation BAGATELLE à payer :

-à Monsieur et Madame Z... en leur qualité d'administrateurs légaux de leur fille Alicia une nouvelle provision de DEUX CENT MILLE FRANCS (200.000 F) à valoir sur son préjudice corporel, -à Monsieur et Madame Z... une provision complémentaire de VINGT MILLE FRANCS (20.000 F) au profit de chacun d'eux à valoir sur leur préjudice moral, -à Madame Z... une provision supplémentaire de CENT MILLE FRANCS (100.000 F) à valoir sur son préjudice corporel. Donne acte à la C.P.A.M. de la Gironde de

ce que sa créance provisoire s'élève à ce jour à UN MILLION TROIS CENT SEPT MILLE QUATRE CENT QUATRE VINGT QUATRE FRANCS CINQUANTE QUATRE CENTIMES (1.307.484,54 F), de ce qu'elle prend en charge la totalité du coût des actes donnés par le S.E.S.S.D.. Condamne la Fondation Bagatelle à payer en application des dispositions de l'article 700 du NCPC en cause d'appel en sus des sommes précédemment allouées de ce chef : - à Monsieur et Madame Z... la somme de HUIT MILLE FRANCS (8.000 F), - à la C.P.A.M. de la Gironde la somme de MILLE RANCS (1.000 F), - à la SHAM la somme de QUATRE MILLE FRANCS (4.000 F). Rejette toute autre demande contraire ou plus amples des parties. Condamne la Fondation BAGATELLE aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du NCPC au profit de la SCP ARSENE-HENRY-LANCON, de la SCP LABORIE-MOUSSIE-ANDOUARD, de la SCP BOYREAU, de Me FOURNIER, avoués à la Cour.Fondation BAGATELLE aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du NCPC au profit de la SCP ARSENE-HENRY-LANCON, de la SCP LABORIE-MOUSSIE-ANDOUARD, de la SCP BOYREAU, de Me FOURNIER, avoués à la Cour. Signé par le Président, et par le greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 97/03092
Date de la décision : 18/09/2001

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin - Responsabilité contractuelle - Faute - Obstacle au choix d'une femme enceinte d'interrompre sa grossesse - Lien de causalité - Enfant né handicapé - Droit à réparation des parents - /

Dès lors que le manquement d'un médecin à son obligation d'information a empêché des parents d'exercer leur choix d'interrompre la grossesse afin d'éviter la naissance d'un enfant atteint d'un handicap, ils peuvent demander réparation du préjudice subi. L'enfant né handicapé peut, également, demander réparation du préjudice résultant de son handicap si ce dernier est en relation de causalité directe avec la faute commise par le médecin dans l'exécution du contrat formé avec sa mère et qui a empêché celle-ci d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse, et si au surplus, il est établi, dans le cas d'une interruption pour motif thérapeutique, que les conditions médicales présentes pour la mise en oeuvre de cette mesure étaient réunies. Cette perte de chance de pratiquer une interruption volontaire de grossesse ne peut concerner que le couple et leur enfant handicapé, la demande d'indemnisation présentée par la soeur de ce dernier doit donc être rejetée


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2001-09-18;97.03092 ?
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