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08/12/2022 | FRANCE | N°21/014211

France | France, Cour d'appel de Besançon, 01, 08 décembre 2022, 21/014211


ARRÊT No

CS/LZ

COUR D'APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Contradictoire
Audience publique du 13 Octobre 2022
No RG 21/01421 - No Portalis DBVG-V-B7F-ENA3

S/appel d'une décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTBELIARD en date du 17 mai 2021 [RG No 11-20-175]
Code affaire : 51B
Demande tendant à l'exécution des autres obligations du locataire et/ou tendant à faire prononcer la résiliation pour inexécution de ces obligations et ordonner l'expulsion

[M]

[C] C/ [B] [V], VEUVE [R], [I] [R], [G] [R], [W] [R] épouse [H]

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [M] [C]
né le [Dat...

ARRÊT No

CS/LZ

COUR D'APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Contradictoire
Audience publique du 13 Octobre 2022
No RG 21/01421 - No Portalis DBVG-V-B7F-ENA3

S/appel d'une décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTBELIARD en date du 17 mai 2021 [RG No 11-20-175]
Code affaire : 51B
Demande tendant à l'exécution des autres obligations du locataire et/ou tendant à faire prononcer la résiliation pour inexécution de ces obligations et ordonner l'expulsion

[M] [C] C/ [B] [V], VEUVE [R], [I] [R], [G] [R], [W] [R] épouse [H]

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [M] [C]
né le [Date naissance 7] 1958 à [Localité 15]
demeurant [Adresse 6]

Représenté par Me Julien VERNET, avocat au barreau de BESANCON

APPELANT

ET :

Madame [B] [V], VEUVE [R]
née le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 11]
demeurant [Adresse 6]/FRANCE

Représentée par Me Corinne BUGNET-LEVY de la SCP LEVY - BUGNET LEVY, avocat au barreau de BESANCON

Monsieur [I] [R]
né le [Date naissance 4] 1962 à [Localité 13]
demeurant [Adresse 17]/FRANCE

Représenté par Me Corinne BUGNET-LEVY de la SCP LEVY - BUGNET LEVY, avocat au barreau de BESANCON

Monsieur [G] [R]
né le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 13]
demeurant [Adresse 10] / FRANCE

Représenté par Me Corinne BUGNET-LEVY de la SCP LEVY - BUGNET LEVY, avocat au barreau de BESANCON

Madame [W] [R] épouse [H]
née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 13]
demeurant [Adresse 14]/FRANCE

Représentée par Me Corinne BUGNET-LEVY de la SCP LEVY - BUGNET LEVY, avocat au barreau de BESANCON

INTIMÉS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

MAGISTRAT RAPPORTEUR : Monsieur Cédric SAUNIER, conseiller, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, avec l'accord des conseils des parties.

GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier.

Lors du délibéré :

Monsieur Cédric SAUNIER, conseiller, a rendu compte conformément à l'article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats :

Monsieur M. WACHTER, Président et Monsieur Jean-François LEVEQUE, Conseiller.

L'affaire, plaidée à l'audience du 13 octobre 2022 a été mise en délibéré au 08 décembre 2022. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Faits, procédure et prétentions des parties

Suite au décès survenu le [Date décès 3] 2011 de [S] [R], co-acquéreur avec son épouse Mme [B] [V] d'un bien immobilier composé d'une maison avec remise et terrain cadastré [Adresse 6] à [Localité 11] section AH no[Cadastre 8] lieudit "[Adresse 16]" et no[Cadastre 9] lieudit "[Adresse 12]" selon acte authentique du 27 décembre 1996, ses enfants MM. [I] et [G] [R] ainsi que Mme [W] [R] ont bénéficié de la transmission de la propriété du bien, chacun à hauteur d'un tiers, tandis que Mme [V] a opté pour le bénéfice de l'usufruit sur la totalité.

M. [M] [C] occupe un appartement de quatre pièces situé au premier étage du bien susvisé depuis le 1er juillet 1990 en vertu d'un bail verbal, tel que mentionné dans l'acte notarié du 27 décembre 1996.

Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] ont fait signifier le 12 février 2020 au locataire un commandement de payer les loyers visant l'article 1184 du code civil, remis à étude.

Par acte d'huissier de justice délivré le 22 juin 2020, invoquant un manquement de M. [C] à ses obligations contractuelles de jouissance paisible des lieux et de règlement du loyer, ceux-ci ont assigné leur locataire aux fins :
- de voir résilier le bail d'habitation du 1er juillet 1990 ;
- de voir ordonner son expulsion ainsi que le transport et le séquestre de ses meubles en garantie;
- de le voir condamner à leur payer la somme de 7 795,71 euros au titre des loyers et charges impayés, augmentée des intérêts au taux légal à compter du commandement de payer ;
- de voir fixer l'indemnité d'occupation à la somme de 260 euros par mois ;
- de le voir condamner à les indemniser de leurs préjudices matériel et moral.

M. [C] concluait au rejet des demandes formées à son encontre et sollicitait reconventionnellement une indemnité de 7 795,71 euros en réparation de son préjudice moral, subsidiairement assorti de la compensation avec les sommes réclamées au titre des loyers impayés.
Il sollicitait par ailleurs, le cas échéant, des délais de paiement.

Par jugement du 17 mai 2021, le juge chargé des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montbéliard :
- a déclaré régulière et recevable la demande en résiliation de bail ;
- a condamné M. [C] à verser à Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 4 996,78 euros, représentant la dette au 31 janvier 2021, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- a prononcé la résiliation du bail conclu entre les parties ;
- a ordonné l'expulsion de M. [C] ainsi que celle de tous occupants de son chef à défaut de libération volontaire dans le délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à libérer les lieux, avec si nécessaire le concours de la force publique et l'assistance d"un serrurier ;
- a condamné M. [C] à payer à Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] une indemnité mensuelle d'occupation de 260 euros à compter de la résiliation du bail et jusqu'à libération effective des lieux matérialisée par la remise des clés entre les mains du bailleur ou de son représentant ;
- s'est déclaré incompétent pour connaître de la mesure de saisie des biens de M. [C] ;
- a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] ;
- a condamné M. [C] à leur payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- a rappelé l'exécution exécutoire du jugement ;
- a condamné M. [C] aux entiers dépens de la procédure, en ce compris le coût des commandements de payer et de justifier de l'assurance, de l'assignation en justice et de ses suites.

Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré :
- que si les bailleurs justifient de leur créance de loyer à compter du mois d'avril 2018, ils produisent des décomptes contradictoires relatifs à la période antérieure ;
- que M. [C] a violé son obligation de jouissance paisible des lieux, ainsi qu'il résulte de sa condamnation définitive pour avoir, en 2018, adressé à ses bailleurs des messages téléphoniques malveillants, dans un contexte de dégradation de leurs relations alors que l'appartement loué est situé au dessus de celui habité par Mme [V], âgée de 87 ans ;
- que M. [C] n'établit pas le mauvais état du logement qu'il invoque au soutien de sa demande indemnitaire ;
- que la demande de résiliation du bail a été notifiée conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 ;
- que si le locataire a transmis aux bailleurs une attestation d'assurance couvrant la période du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020, il n'a pas exécuté ses obligations de paiement du loyer et de jouissance paisible des lieux, de sorte que la demande de résiliation du bail est fondée ;
- que les opérations d'expulsion et de saisie prévues par le code des procédures civiles d'exécution relèvent, en cas de difficulté, du juge de l'exécution ;
- concernant la demande indemnitaire formée par les bailleurs, que les frais d'huissier de justice doivent être mis pour partie à la charge du locataire mais que leur demande au titre du préjudice moral doit être rejetée dans la mesure où ils ont tardé durant près de deux ans à solliciter le règlement des loyers.

Par déclaration du 27 juillet 2021, M. [C] a régulièrement interjeté appel de ce jugement sauf en ce que le juge de première instance s'est déclaré incompétent pour connaître de la mesure de saisie de ses biens et a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R].

Selon ses dernières conclusions transmises le 20 avril 2022, il conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il :
- a déclaré régulière et recevable la demande en résiliation de bail ;
- l'a condamné à verser à Mme [B] [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 4 996,78 euros, représentant la dette au 31 janvier 2021, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- a prononcé la résiliation du bail conclu entre les parties ;
- l'a condamné à payer à Mme [B] [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- a rappelé l'exécution exécutoire du jugement ;
- l'a condamné aux entiers dépens de la procédure, en ce compris les commandements de payer et de justifier de l'assurance, l'assignation en justice et ses suites.

Il demande à la cour statuant à nouveau de :
- débouter Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] de leurs demandes contraires, à tout le moins de réduire notablement les sommes mises à sa charge au regard de la vétusté du logement et de ses équipements ;
- les condamner à lui régler une indemnité de 3 000 euros "du fait de leur attitude et de la mesure d'expulsion, alors même que le premier président de la cour d'appel n'a pas rendu sa décision prévue le 28 octobre 2021" ;
- les condamner à lui régler la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- les condamner aux frais et dépens de première instance et d'appel.

Précisant avoir été expulsé du logement depuis le 22 octobre 2021, il fait valoir :
- que s'il n'a jamais engagé de procédure à l'encontre de ses bailleurs, le logement concerné ne respecte pas les prescriptions prévues par l'article 6 de la loi no 86-1290 du 23 décembre 1986 en raison de l'absence d'eau courante depuis quinze ans et d'un dégât des eaux signalé en vain;
- que les bailleurs ne produisent aucun élément de nature à établir son manquement à l'obligation de jouissance paisible des lieux, étant précisé qu'il s'est amendé de son comportement ayant donné lieu à sa condamnation le 25 août 2020 du chefs d'appels téléphoniques malveillants commis entre les mois de mars à juillet 2018 ;
- concernant le paiement des loyers, qu'il a sollicité sans succès les bailleurs et l'huissier de justice mandatés par leurs soins, qu'il a repris le versement des loyers au mois de janvier 2020, qu'il pensait que les loyers de l'année 2018 étaient en règle tandis que la demande des bailleurs est tardive et brutale de sorte qu'ils ont engagé leur responsabilité, et enfin qu'il résulte du décompte établi le 9 juillet 2021 par Maître [X] [O], huissier de justice, quite à l'imputation des versements opérés par la Caisse d'allocations familiales (CAF) pour la période d'avril 2019 à mars 2021 qu'il ne reste redevable que d'une somme de 789,14 euros correspondant à des frais d'huissier de justice ;
- que l'absence de réponse des bailleurs à ses sollicitations au cours du bail et leur attitude déloyale justifie une indemnisation de son préjudice moral à hauteur de 3 000 euros ;
- concernant les demandes indemnitaires additionnelles présentées par les bailleurs en appel, qu'il n'a pu procéder au nettoyage du logement avant sa restitution en raison du contexte de l'expulsion, que les greniers étaient communs et accessibles à tous, qu'il a occupé le logement durant vingt-trois ans de sorte qu'il en résulte une vétusté au sens du décret no2016-382 du 30 mars 2016 ainsi qu'une usure normale, tandis que certaines réparations incombent aux propriétaires.

Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] ont répliqué en dernier lieu par conclusions transmises le 8 juillet 2022 pour demander à la cour:

Sur les demandes de M. [C] :
- de le "débouter de son appel" ;
- de le condamner à leur payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 8 000 euros outre le coût des honoraires de M. [O], huissier de justice, "qui ne seraient pas inclus aux dépens pour un total de 707,18 euros" ;
- de le condamner aux dépens d'appel ;

Sur leurs demandes :

- A titre principal,
. de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré régulière et recevable leur demande en résiliation de bail, a condamné M. [C] au paiement d'une dette de loyers, a prononcé la résiliation du bail, a ordonné l'expulsion de M. [C], l'a condamné à leur payer une indemnité mensuelle d'occupation de 260 euros à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux, l'a condamné à leur payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens et a rappelé l'exécution provisoire du jugement ;
. "en tant de de besoin", de prononcer la résiliation judiciaire du bail, d'ordonner l'expulsion de M. [C] ainsi que le transport et la séquestration de ses meubles en garantie, la fixation de l'indemnité d'occupation mensuelle à la somme de 260 euros, de condamner M. [C] à leur payer la somme de 2 069,53 euros au titre des loyers impayés outre intérêts au taux légal à compter du 12 février 2020 et de le débouter de toutes ses demandes ;

- A titre incident,
. d'infirmer le jugement en ce qu'il a chiffré la dette de loyers à la somme de 4 996,78 euros et rejeté leur demande de dommages et intérêts ;
. statuant à nouveau, de condamner M. [C] à leur payer une somme de 2 069,53 euros, au titre des loyers impayés outre intérêts au taux légal à compter du 12 février 2020 ainsi qu'une somme de 1 000 euros chacun en réparation de leur préjudice moral ;

- A titre additionnel,
. de condamner M. [C], en raison de la dégradation des lieux constitutif de faute, à leur payer une indemnité de 47 517,32 euros au titre du nettoyage, de la désinfection et de la réparation des lieux loués, outre la somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral ;
. de le débouter de toutes ses demandes ;

- En toute hypothèse,
. de condamner M. [C] à leur payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 8 000 euros outre le coût des honoraires de M. [O], huissier de justice, "qui ne seraient pas inclus aux dépens pour un total de 707,18 euros" ;
. de le condamner aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel ;
. de le débouter de toutes ses demandes.

Ils exposent :
- que M. [C] n'a pas respecté ses obligations d'une part de jouissance paisible des lieux, étant observé qu'il a persisté dans ses agissements insultants et menaçants postérieurement au 17 juin 2019, d'autre part de payer les loyers ;
- qu'en considération de la dette chiffrée à 7 768,53 euros selon décompte établi le 21 janvier 2021 par l'huissier, et suite au paiement de la somme de 5 699 euros par la CAF le 4 avril 2021, le reliquat de loyers s'élève désormais à la somme de 2 069,53 euros ;
- qu'ils ont tenté d'entrer en contact avec leur locataire suite à l'arrêt de paiement des loyers, y compris pour leur partie prise en charge par la CAF, lequel a proféré des insultes et menaces à leur encontre de sorte qu'il ont espéré, dans la crainte, une régularisation avant d'introduire une procédure aux fins de résiliation du bail et d'expulsion ;
- que leur locataire ne produit aucun élément de nature à établir le mauvais état du logement qu'il invoque, étant observé qu'il n'avait fait état d'aucune difficulté lors de la procédure s'étant déroulée en 2010 devant le tribunal d'instance de Montbéliard saisi en raison du défaut de paiement des loyers et de production d'une attestation d'assurance ;
- qu'au soutien de sa demande indemnitaire, M. [C] n'établit ni faute de leur part, ni préjudice dans la mesure où il est notamment à l'origine de l'insalubrité des lieux qu'il allègue, ni lien de causalité ;
- que selon facture établie par la SAS Evolution Service, l'évacuation des déchets et le nettoyage du logement lui ont coûté la somme de 6 000 euros TTC, à laquelle il convient d'ajouter le montant du devis de réparation établi le 15 janvier 2022 par la SARL Tarby à hauteur de 41 518,32 euros, ainsi que la somme de 20 000 euros au titre de leur préjudice moral supplémentaire.

Par ordonnance rendue le 28 octobre 2021, le magistrat délégué par Madame la première présidente de la cour d'appel de Besançon a rejeté la demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement critiquée formée par M. [C], ainsi que la demande de dommages et intérêts formée par Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R].

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 septembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 13 octobre suivant et mise en délibéré au 8 décembre 2022.

En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.

Motifs de la décision

A titre liminaire, la cour constate que M. [C] n'invoque aucun élément de nature à remettre en cause la régularité et la recevabilité de la demande en résiliation du bail formée par Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R], de sorte que la cour ne peut que confirmer le jugement critiqué sur ces points.

- Sur le règlement des loyers,

En application de l'article 7 de la loi no 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi no 86-1290 du 23 décembre 1986, le locataire est notamment tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

En l'espèce, il est constant entre les parties d'une part que M. [C] a occupé, jusqu'à son expulsion mise à exécution le 22 octobre 2021, un appartement situé [Adresse 6] à [Localité 11] en vertu d'un bail verbal moyennant un loyer de 260 euros par mois, d'autre part qu'une dette de loyer, dont seuls le chiffrage et le reliquat sont contestés, a été constituée.

La cour relève que l'état des sommes dues par le locataire établi le 21 janvier 2021 par M. [X] [O], huissier de justice, liste précisément d'une part les échéances de loyer concernées, de manière distincte du montant des frais de procédure, d'autre part les versements effectués par M. [C], aucun de ces éléments n'étant remis en cause de manière étayée par ce dernier.
Le total des sommes dues au 21 janvier 2021 est chiffré à la somme de 8 213,40 euros.

Il convient de noter que l'état des sommes dues dressé par le même huissier de justice le 9 juillet 2021 a été expressément élaboré par référence au jugement dont appel, de sorte qu'il ne prend pas en compte la dette de loyer antérieure au mois d'avril 2018 dont le montant a été écarté en première instance.
Ce document ne constitue dès lors pas un décompte des sommes dues en vertu du contrat de bail, mais un décompte des sommes dues en exécution du jugement du 17 mai 2021.

Or, si les bailleurs produisent le décompte des loyers et des versements susvisés, lequel ne fait apparaître aucune incohérence, le locataire ne produit aucun élément de nature à infirmer celui-ci du fait d'une erreur de comptabilisation des loyers ou d'un défaut d'imputation de certains versements.

Il en résulte qu'après déduction de la somme de 5 699 euros réglée par la CAF le 4 avril 2021, sur laquelle les parties s'accordent, la dette de loyer de M. [C] au titre du contrat litigieux doit être chiffrée à la somme de 2 069,53 euros correspondant au montant des seuls loyers impayés au 21 janvier 2021, soit 7 768,53 euros, diminué du versement de régularisation opéré par la CAF, sans que les circonstances d'engagement de la procédure en justice par les bailleurs ne revête une incidence sur point.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point et M. [C] sera condamné à payer à Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 2 069,53 euros au titre des loyers impayés, augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

- Sur la demande tendant à la résiliation du bail, à l'expulsion de M. [C] et à sa condamnation à régler aux bailleurs une indemnité mensuelle d'occupation,

En vertu des dispositions susvisées, le locataire doit user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée.

Par ailleurs et en application de l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

En l'espèce et indépendamment du défaut de paiement des loyers, le juge de première instance a, par de justes motifs que la cour adopte, relevé qu'il résulte tant de la condamnation définitive prononcée par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Besançon le 25 août 2020 au titre de faits d'appels téléphoniques malveillants commis du 23 mars au 23 juillet 2018 à l'encontre de Mme [V], que du relevé - non contesté - des messages sms reçus entre le 8 août 2019 et le 7 novembre 2020 par cette dernière, que M. [C] a violé son obligation de jouissance paisible des locaux en ce que la personne destinataire de ces communications et messages est une autre résidente de l'immeuble.

Et jugement critiqué relatives à l'expulsion du locataire et au règlement d'une indemnité d'occupation sont nécessairement déférées à la cour du fait de l'appel portant sur la résiliation du bail, ant relevé qu'en application de l'article 562 du code de procédure civile, les dispositions du ledit jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a prononcé cette résiliation, a ordonné l'expulsion de M. [C] et l'a condamné à régler aux bailleurs une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 260 euros à compter de la résiliation et jusqu'à la libération complète des lieux.

- Sur la demande indemnitaire formée par M. [C],

En application de l'article 1147 du code civil applicable au litige devenu l'article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

En l'espèce, le juge de première instance a par d'exacts motifs toujours d'actualité retenu que M. [C], qui invoque l'indécence du logement concerné ainsi qu'un préjudice moral, ne produit aucun élément de nature à établir un comportement fautif des bailleurs.

Le jugement dont appel sera donc complété en ce sens et ce dernier sera débouté de sa demande indemnitaire.

- Sur la demande indemnitaire formée par Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R],

En premier lieu, les frais d'huissier de justice engagés par Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R], dont seule la partie correspondant au coût du commandement de payer et du commandement d'avoir à produire une attestation d'assurance est au demeurant justifiée, relèvent non pas des dépens tels qu'énumérés à l'article 695 du code de procédure civile et constituent en réalité des frais irrépétibles dont le sort relève des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile.
Par ailleurs, les bailleurs ne justifient pas du préjudice moral qu'ils invoquent, indépendamment de la tardiveté avec laquelle ils ont engagé une action judiciaire à l'encontre de M. [C] telle que relevée par le juge de première instance.
Dès lors, le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a rejeté leur demande indemnitaire fondée sur les frais d'huissier de justice à hauteur de 707,18 euros et sur un préjudice moral dont le quantum a été porté de 1 000 euros chacun à 10 000 euros en appel.

En second lieu, Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] ont formé en appel une demande spécifique de dommages et intérêts à hauteur de 47 517,32 euros au titre des frais de nettoyage et de réparation du logement.
Malgré l'absence de précision concernant l'état du logement dans le procès-verbal d'expulsion établi le 22 octobre 2021 par M. [X] [O], les photographies annexées ainsi que le procès-verbal de constat dressé le même jour font état de nombreux détritus présents dans l'ensemble de celui-ci et de la vétusté des revêtements de mur et sol ainsi que des équipements sanitaires.

S'il est exact que le départ de M. [C] du logement s'est déroulé sous la contrainte, la cour observe néanmoins que son expulsion avait été ordonnée par jugement du 17 mai 2021, soit plus de cinq mois auparavant, avec exécution provisoire nonobstant appel, tandis qu'il n'a assigné ses bailleurs en arrêt de l'exécution provisoire que par actes des 22 et 23 septembre 2021.

Par ailleurs, étant rappelé qu'en application de l'article 7 de la loi no 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire répond des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement, la cour relève que l'état sanitaire de l'appartement constaté le 22 octobre 2021 ne relevait pas de son entretien ménager courant mais d'une accumulation de déchets et de détritus, dont M. [C] n'impute pas la responsabilité à un tiers et d'un tel degré qu'elle constitue une dégradation au sens de ces dispositions.
Dès lors, ce-dernier sera condamné à payer à Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 5 000 euros correspondant à la facturation référencée FA00000911 des travaux de désinfection et de nettoyage effectués par la société Evolution Services.

Alors même que l'état des revêtements de sol et des murs ainsi que des équipements sanitaires correspond à celui d'un logement loué depuis plus de trente ans, Mme [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] ne produisent aucun élément de nature à établir une dégradation de ceux-ci dépassant la seule usure normale en l'absence de tout élément comparatif à la date d'entrée dans les lieux. Ces derniers seront donc déboutés de leur demande indemnitaire relative aux travaux de réfection des sols, plafonds, murs, embrasures et boiseries à hauteur de 41 518,32 euros selon devis no 220120 établi par la société Tarby.

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

Complète le jugement rendu entre les parties le 17 mai 2021 par le juge des contentieux de la protection de Montbéliard en ce que M. [M] [C] sera débouté de sa demande indemnitaire ;

Confirme, dans les limites de l'appel, ledit jugement ainsi complété, sauf en qu'il a :
- condamné M. [M] [C] à verser à Mme [B] [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 4 996,78 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- condamné M. [M] [C] aux entiers dépens de la procédure, en ce compris le coût des commandements de payer et de justifier de l'assurance, de l'assignation en justice et de ses suites.

Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Condamne M. [M] [C] à payer à Mme [B] [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 2 069,53 euros au titre des loyers impayés, augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Condamne M. [M] [C] à payer à Mme [B] [V], M. [I] [R], M. [G] [R] et Mme [W] [R] la somme de 5 000 euros au titre des travaux de désinfection et de nettoyage et les déboute du surplus de leur demande indemnitaire aux fins de remise en état du logement situé [Adresse 6] à [Localité 11] ;

Condamne M. [M] [C] aux dépens d'appel, en ce non compris le coût des commandements signifiés le 12 février 2020 et des honoraires d'huissier de justice mentionnés dans le détail des frais daté du 18 mars 2020 ;

Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute les parties de leurs demandes.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Leila Zait, greffier.

Le greffier, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 01
Numéro d'arrêt : 21/014211
Date de la décision : 08/12/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Montbéliard, 17 mai 2021


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.besancon;arret;2022-12-08;21.014211 ?
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