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03/12/2008 | FRANCE | N°08/02223

France | France, Cour d'appel de Besançon, PremiÈre chambre civile, 03 décembre 2008, 08/02223


ARRÊT No

BP/AR

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 14 JANVIER 2009

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

SECTION A

Contradictoire

Audience publique

du 03 décembre 2008

No de rôle : 08/02223

S/appel d'une décision

du tribunal de grande instance de Dole

en date du 02 juillet 2008 RG No 08/00009

Code affaire : 78A

Demande tendant à la vente immobilière et à la distribution du prix (à compter du 1er janvier 2007)

Jean-François X... C/ SA MSC et ASSOCIES

PARTIE

S EN CAUSE :

Monsieur Jean-François X...

demeurant ...

APPELANT

Ayant la SCP LEROUX pour Avoué

et Me Roger VOYE pour Avocat

ET :

SA MSC et ASSOCIES
...

ARRÊT No

BP/AR

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 14 JANVIER 2009

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

SECTION A

Contradictoire

Audience publique

du 03 décembre 2008

No de rôle : 08/02223

S/appel d'une décision

du tribunal de grande instance de Dole

en date du 02 juillet 2008 RG No 08/00009

Code affaire : 78A

Demande tendant à la vente immobilière et à la distribution du prix (à compter du 1er janvier 2007)

Jean-François X... C/ SA MSC et ASSOCIES

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur Jean-François X...

demeurant ...

APPELANT

Ayant la SCP LEROUX pour Avoué

et Me Roger VOYE pour Avocat

ET :

SA MSC et ASSOCIES

ayant siège 96-98, avenue Raymond Poincaré - 75116 PARIS

INTIMÉE

Ayant la SCP DUMONT - PAUTHIER pour Avoué

et Me Eric SIMONET pour Avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame M. LEVY et Monsieur B. POLLET, Conseillers.

GREFFIER : Madame A. ROSSI, Greffier.

lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame M. LEVY et Monsieur B. POLLET, Conseillers.

**************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par jugement en date du 9 juillet 1992, devenu définitif, le tribunal de grande instance de PARIS a homologué un accord en vertu duquel Jean-François X... s'est reconnu débiteur envers le Crédit Commercial de France (CCF) d'une somme de 322 913,86 F (49 227,90 €), outre intérêts au taux légal à compter du 26 mars 1991, payable par mensualités avec déchéance du terme en cas de défaut de paiement à bonne date d'une seule mensualité.

Par acte notarié en date du 4 janvier 2006, rectifié le 14 avril 2006, la société HSBC France (nouvelle dénomination du CCF) a cédé à la société MCS et Associés un portefeuille de créances, parmi lesquelles celle détenue par la société cédante à l'égard de Jean-François X....

Le 14 décembre 2007, la société MCS et Associés a fait signifier à Jean-François X... un commandement de payer valant saisie immobilière.

Par jugement réputé contradictoire en date du 2 juillet 2008, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de DOLE a :

- constaté que la créance de la société MCS et Associés s'élève à la somme de 82 131,28 €, outre intérêts à compter du 16 décembre 2007,

- ordonné la vente forcée du bien immobilier saisi.

Jean-François X... a interjeté appel de ce jugement et sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire.

Par ordonnance en date du 30 septembre 2008, le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel de céans a déclaré recevable, mais mal fondée, la demande de sursis à exécution.

L'immeuble saisi a été vendu suivant jugement d'adjudication du 1er octobre 2008.

*

Jean-François X... conclut à l'annulation du jugement déféré et sollicite une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, il fait valoir, pour l'essentiel :

- que son recours est recevable, l'article 52 du décret du 27 juillet 2006 prévoyant que le jugement d'orientation est susceptible d'appel et lui permettant, par conséquent, de critiquer les vérifications effectuées par le juge de l'exécution quant à l'existence d'un titre exécutoire constatant une créance certaine et exigible,

- que le juge de l'exécution n'a pas rempli son office, en omettant de vérifier, comme il aurait dû le faire en vertu de l'article 49 du décret du 27 juin 2006,

* la qualité de créancière de la société MCS et Associés, étant observé que la cession de créance du 4 janvier 2006 est inopposable au débiteur, faute de comporter l'indication de l'objet et du montant de la créance cédée,

* le montant de la créance, celui-ci étant contestable, puisque la somme en principal réclamée dans le commandement de payer du 15 décembre 2007 est de 39 823,75 €, alors que, avant la cession de la créance, notamment à l'occasion d'une saisie-arrêt de rémunérations autorisée par jugement du 16 juin 2005, le montant de la créance en principal avait été fixé à 18 934,48 €, - qu'en se contentant de "constater que la créance s'élève à la somme de 82 131,28 € outre intérêts à compter du 16 décembre 2007", le premier juge a méconnu les dispositions de l'article 51 du décret du 27 juillet 2006, qui lui faisaient obligation de fixer le montant de la créance en distinguant le principal, les frais, les intérêts et autres accessoires.

*

La société MCS et Associés conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de l'appel de Jean-François X..., par application des dispositions de l'article 6 du décret du 27 juillet 2006 selon lesquelles aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut être formée après l'audience d'orientation, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Subsidiairement, l'intimée sollicite la confirmation du jugement déféré. En réponse aux moyens invoqués par l'appelant, elle soutient, en substance :

- que le juge de l'exécution a bien vérifié que les conditions de la saisie immobilière étaient réunies, mais qu'il n'a pu le faire qu'au vu des éléments qu'elle lui avait elle-même fournis, le débiteur n'ayant pas comparu en première instance,

- que l'acte de cession de créance comportait des mentions permettant l'identification des créances cédées, qu'il n'était pas nécessaire que le montant des créances y soit indiqué, et qu'il est opposable au débiteur dès lors qu'il lui a été régulièrement signifié,

- que le montant de la créance résulte d'un décompte clair tenant compte des règlements intervenus avant la cession de la créance, de leur imputation sur les intérêts conformément à l'article 1254 du code civil, et de l'application du taux d'intérêt légal majoré de 5 %.

La société MCS et Associés réclame enfin une somme de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux dernières conclusions de l'appelant déposées le 25 novembre 2008 et à celles de l'intimée déposées le 28 novembre 2008.

La clôture de l'instruction de l'affaire, initialement prononcée par ordonnance en date du 26 novembre 2008, a été reportée, par ordonnance du 2 décembre 2008, à cette dernière date.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel

Attendu qu'aux termes de l'article 52 du décret du 27 juillet 2006, le jugement d'orientation est susceptible d'appel dans les quinze jours de sa notification par le greffe ;

Attendu qu'il s'ensuit que la partie qui n'a pas comparu à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution est recevable à contester, par la voie de l'appel, le jugement rendu suite à cette audience ;

Attendu que les dispositions de l'article 6 du décret précité, selon lesquelles toute contestation formée postérieurement à l'audience d'orientation est irrecevable, ne sont applicables qu'à défaut de disposition contraire ; que constitue une telle disposition contraire le droit d'interjeter appel du jugement d'orientation ; qu'en effet, le droit d'appel comporte nécessairement, sauf à priver l'appel de toute utilité, le droit de critiquer la décision attaquée, notamment de contester l'appréciation portée par le premier juge sur les conditions de la saisie immobilière et le montant de la créance;

Attendu que l'appel de Jean-François X... est donc en l'espèce recevable ;

Sur la nullité du jugement déféré

Attendu que, selon l'appelant, le jugement d'orientation serait nul, faute pour le juge d'avoir procédé à la vérification des conditions de la saisie, et d'avoir fixé le montant de la créance du poursuivant en distinguant le principal des intérêts, frais et accessoires ;

Sur la vérification des conditions de la saisie

Attendu qu'en vertu de l'article 49 du décret du 27 juillet 2006, à l'audience d'orientation le juge vérifie que les conditions de la saisie immobilière prévues aux articles 2191 et 2193 du code civil sont réunies ;

Attendu qu'en l'espèce, il est indiqué dans les motifs du jugement déféré que les conditions visées aux articles 2191 et 2193 étaient réunies ; que cette mention suppose que le juge a effectué toutes vérifications sur ce point ; que le juge n'avait pas à s'expliquer sur des contestations qui ne lui étaient pas soumises, puisque Jean-François X... n'avait pas comparu devant lui ; qu'il ne pouvait statuer qu'au vu des justificatifs produits par le créancier saisissant ; qu'il n'est par conséquent nullement établi qu'il ait manqué à son office ; Sur l'indication du montant de la créance

Attendu que, selon l'article 51 du décret du 27 juillet 2006, le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires ;

Attendu qu'en l'espèce, le premier juge n'a pas respecté ce texte, puisqu'il s'est borné à constater le montant global de la créance (82 131,28 €), sans indiquer la ventilation de cette somme entre le principal, les intérêts et les frais ;

Attendu toutefois que les dispositions de l'article 51 précité ne sont assorties d'aucune sanction ; que leur non-respect n'est pas de nature à entraîner la nullité du jugement ;

Sur le fond

Attendu que l'appelant conteste la saisie aux motifs, d'une part que la société MCS et Associés n'aurait pas la qualité de créancière, d'autre part que le montant de la créance serait indéterminé ;

Sur la qualité de créancière de l'intimée

Attendu qu'il n'est pas contesté qu'à l'origine, le CCF disposait d'un titre exécutoire à l'encontre de Jean-François X..., consistant dans le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 9 juillet 1992 ; que la contestation de l'appelant porte sur l'opposabilité de la cession de la créance à la société MCS et Associés ;

Attendu que l'acte de cession de portefeuille de créances du 4 janvier 2006, rectifié le 14 avril 2006, comporte, en annexe 1, la liste des créances cédées, avec, en ce qui concerne Jean-François X..., l'indication des numéros de comptes client ; que ces numéros sont ceux des comptes bancaires qui avaient été ouverts par Jean-François X... dans les livres du CCF et dont les soldes débiteurs constituent la créance ; que, par conséquent, ces indications permettaient parfaitement l'identification de la créance cédée ;

Attendu par ailleurs qu'il n'est pas nécessaire que l'acte de cession de créance mentionne le montant de la créance cédée ;

Attendu enfin que la cession de créance est opposable à Jean-François X... pour lui avoir été signifiée, conformément à l'article 1690 du code civil, par acte d'huissier en date du 23 juin 2006 ;

Attendu que la contestation de l'appelant portant sur la qualité de créancière de l'intimée n'est donc pas fondée ; Sur le montant de la créance

Attendu qu'il est de jurisprudence constante que la cession de créance ne peut conférer au cessionnaire plus de droits à l'égard du débiteur cédé que n'en avait le cédant ;

Attendu qu'en l'espèce, la saisie a été effectuée, selon le décompte annexé au commandement de payer en date du 15 décembre 2007, pour une somme de 82 131,28 €, dont 39 823,75 € en principal et 42 307,53 € au titre des intérêts échus au 15 décembre 2007 ; que ce décompte a été établi en fonction d'intérêts calculés au taux légal majoré de 5 %, avec imputation des versements effectués par le débiteur sur ces intérêts ;

Or attendu qu'il résulte d'une décision du tribunal d'instance de Paris XIème en date du 16 juin 2005, antérieure à la cession de créance, qu'une saisie des rémunérations du débiteur avait été autorisée pour une somme de 43 572,06 €, dont 18 934,48 € en principal, et 24 637,58 € au titre des intérêts échus ;

Attendu que, selon l'intimée, la différence entre le montant de la créance au 16 juin 2005 et son montant au 15 décembre 2007 provient du fait que le CCF avait imputé les versements du débiteur non pas sur les intérêts échus, mais sur le principal;

Attendu que si, selon l'article 1254 du code civil, les acomptes versés en paiement d'une dette productive d'intérêts s'imputent d'abord sur les intérêts, cette règle peut être inversée avec l'accord du créancier ; qu'en l'espèce, cet accord se déduit du fait que le CCF a pratiqué une saisie-arrêt pour les montants indiqués ci-dessus, calculés après imputation des versements antérieurs du débiteur sur le principal de la dette ;

Attendu que, le cessionnaire de la créance ne pouvant réclamer au débiteur plus que ne le pourrait le cédant, il ne peut remettre en cause le mode d'imputation des paiements accepté par le cédant ;

Attendu qu'il s'ensuit que le montant de la créance doit être fixé :

- en principal, à 18 934,48 €, sous déduction d'un dernier versement de 1 954,69 € effectué par le débiteur le 1er août 2005 (postérieurement à la saisie-arrêt du 16 juin 2005 mais antérieurement à la cession de créance), soit 16 979,79 €,

- en intérêts, à 24 637,58 €, montant des intérêts échus au 16 juin 2005, outre les intérêts échus et à échoir postérieurement à cette date ;

Attendu qu'il convient donc de réformer le jugement déféré, uniquement quant au montant de la créance du saisissant ;

Sur les demandes accessoires

Attendu que Jean-François X... est à l'origine de la procédure d'appel puisqu'il n'avait pas comparu en première instance ; qu'il succombe en plus grande part, son recours n'étant que très partiellement accueilli ; qu'il sera donc condamné aux dépens d'appel, cette condamnation emportant nécessairement rejet de sa demande tendant à être indemnisé de ses frais irrépétibles ;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable que l'intimée conserve la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposées en cause d'appel ; qu'il ne sera donc pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile en sa faveur;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique, après débats en audience publique, contradictoirement, et après en avoir délibéré ;

DÉCLARE l'appel de Jean-François X... recevable et partiellement fondé ;

DIT n'y avoir lieu à annulation du jugement rendu, le 2 juillet 2008, par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de DOLE ;

CONFIRME ledit jugement, sauf en ce qu'il a constaté que la créance de la société MCS et Associés s'élève à la somme de 82 131,28 €, outre intérêts à compter du 16 décembre 2007 ;

Statuant à nouveau sur ce point ;

FIXE le montant de la créance de la société MCS et Associés à l'égard de Jean-François X... :

- à la somme de 16 979,79 € (SEIZE MILLE NEUF CENT SOIXANTE-DIX-NEUF EUROS ET SOIXANTE-DIX-NEUF CENTIMES) en principal,

- à la somme de 24 637,58 € (VINGT-QUATRE MILLE SIX CENT TRENTE-SEPT EUROS ET CINQUANTE-HUIT CENTIMES) au titre des intérêts échus au 16 juin 2005, outre les intérêts échus et à échoir postérieurement à cette date ;

REJETTE les demandes des deux parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile; CONDAMNE Jean-François X... aux dépens d'appel, avec droit pour la SCP DUMONT-PAUTHIER, avoués, de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LEDIT ARRÊT a été prononcé en audience publique et signé par Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré, et Madame A. ROSSI, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : PremiÈre chambre civile
Numéro d'arrêt : 08/02223
Date de la décision : 03/12/2008
Sens de l'arrêt : Délibéré pour prononcé
Type d'affaire : Civile

Analyses

CESSION DE CREANCE - Paiement -

Selon l'article 1254 du code civil, les acomptes versés en paiement d'une dette productive d'intérêts s'imputent d'abord sur les intérêts. Cette règle peut être inversée avec l'accord du créancier, cet accord pouvant se déduire du fait que celui-ci a pratiqué une saisie-arrêt pour les montants calculés après imputation des versements antérieurs du débiteur sur le principal de la dette. S'agissant d'une cession de créance, il est de jurisprudence constante qu'elle ne peut conférer au cessionnaire plus de droits à l'égard du débiteur cédé que n'en avait le cédant. Ainsi, le cessionnaire de la créance ne pouvant réclamer au débiteur plus que ne le pourrait le cédant, il ne peut remettre en cause le mode d'imputation des paiements accepté par le cédant, et ne peut réclamer un montant différent, en raison du fait que ce dernier avait imputé les versements du débiteur antérieurs à la cession, non pas sur les intérêts échus, mais sur le principal


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Dole, 02 juillet 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.besancon;arret;2008-12-03;08.02223 ?
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