La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/2008 | FRANCE | N°08/01724

France | France, Cour d'appel de Besançon, 26 novembre 2008, 08/01724


ARRET No
RV / CB

COUR D'APPEL DE BESANCON
-172 501 116 00013-

ARRET DU VINGT SIX NOVEMBRE 2008

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

contradictoire
Audience publique
du 21 Octobre 2008
No de rôle : 08 / 01724

S / appel d'une décision
du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DOLE
en date du 28 JUIN 2006 RG No 05 / 00884
Code affaire : 59A
Demande en nullité d'un contrat ou des clauses relatives à un autre contrat

SA CNP ASSURANCES C / Lydie-DECEDEE LE 05 / 11 / 2007- X... Eric Représentant Amandine Y...


PARTIES EN CA

USE :

SA CNP ASSURANCES, ayant son siège, 4 Place Raoul Dautry-75716 PARIS CEDEX 15, prise en la personne de ses représent...

ARRET No
RV / CB

COUR D'APPEL DE BESANCON
-172 501 116 00013-

ARRET DU VINGT SIX NOVEMBRE 2008

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

contradictoire
Audience publique
du 21 Octobre 2008
No de rôle : 08 / 01724

S / appel d'une décision
du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DOLE
en date du 28 JUIN 2006 RG No 05 / 00884
Code affaire : 59A
Demande en nullité d'un contrat ou des clauses relatives à un autre contrat

SA CNP ASSURANCES C / Lydie-DECEDEE LE 05 / 11 / 2007- X... Eric Représentant Amandine Y...

PARTIES EN CAUSE :

SA CNP ASSURANCES, ayant son siège, 4 Place Raoul Dautry-75716 PARIS CEDEX 15, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice demeurant pour ce audit siège,

APPELANTE

Ayant la SCP DUMONT-PAUTHIER pour avoué
et Me Anne-Colette PROST, avocat au barreau de DOLE

ET :
Madame Lydie-DECEDEE LE 05 / 11 / 2007- X..., née le 02 Mars 1965 à PONTARLIER (25300), demeurant...-39250 CUVIER

INTIMEE

Ayant la SCP LEROUX pour avoué
et Me Vanina BEVALOT, avocat au barreau de BESANCON

Monsieur Eric Y..., de nationalité française, demeurant...-39250 CUVIER représentant sa fille Amandine Y... née le 07 / 10 / 2003, en sa qualité d'unique héritière de Mademoiselle Lydie X..., décédée le 5 novembre 2007,

INTIME

Ayant la SCP LEROUX pour avoués
Et Me Vanina BEVALOT pour avocat au barreau de BESANCON

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties :

MAGISTRATS RAPPORTEURS : M. POLANCHET, Conseiller et R. VIGNES, Conseiller,

GREFFIER : M. ANDRE, Greffier,

Lors du délibéré

M. SANVIDO, Président de Chambre,

M. POLANCHET et R. VIGNES, Conseillers,

qui en ont délibéré sur rapport des Magistrats Rapporteurs.

L'affaire plaidée à l'audience du 21 Octobre 2008, a été mise en délibéré au 26 Novembre 2008. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Mme Lydie X..., titulaire auprès de la SA CNP Assurances d'un contrat d'assurance décès, invalidité, incapacité totale de travail destiné à couvrir à hauteur de 50 % trois prêts souscrits en 2002 auprès de la Caisse d'épargne de Franche-Comté, s'est vu refuser par l'assureur sa garantie à la suite du sinistre qu'elle a déclaré, consécutivement à un arrêt maladie ayant débuté le 8 janvier 2004.

Par acte du 3 novembre 2005, Mme X... a fait assigner la CNP devant le tribunal de grande instance de Dole afin d'obtenir la mise en oeuvre de la garantie souscrite.

Par jugement du 28 juin 2006, auquel la Cour se réfère pour un plus ample exposé des faits et moyens, ainsi que pour les motifs, le tribunal a :

- condamné la CNP à prendre en charge la moitié des échéances des prêts garantis par le contrat du 18 mars 2002, à compter du 91e jour d'incapacité temporaire totale de travail, soit le 8 avril 2004, jusqu'à la fin de la période d'incapacité temporaire totale, avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2005,

- ordonné la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- dit que l'indemnité versée à Mme X... sera, conformément aux dispositions de l'article L. 113-9 du code des assurances, réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés,

- dit qu'il appartiendra à la CNP d'effectuer ce calcul,

- condamné la CNP à payer à Mme X... une indemnité de 600 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration déposée au greffe de la Cour le 22 août 2006, la SA CNP Assurances a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions récapitulatives déposées le 3 octobre 2007, la CNP demande à la Cour, après avoir infirmé le jugement, de :

- dire que Mme X... a effectué une fausse déclaration intentionnelle lors de la souscription de son contrat, en occultant un traitement suivi pour dépression,

En conséquence, la débouter de sa demande d'indemnisation,

- subsidiairement, dire que toute éventuelle prise en charge des échéances du prêt ne pourra s'effectuer que dans les termes et limites contractuelles et au profit de l'organisme prêteur, bénéficiaire du contrat d'assurance,

- condamner l'intimée à lui payer la somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par conclusions récapitulatives déposées le 21 juin 2007, Lydie X... demande à la Cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, à l'exception de celle afférente à la réduction de la prise en charge des échéances des prêts garantis, de condamner la CNP à lui payer la moitié des échéances des prêts garantis à compter du 91e jour d'ITT, soit du 8 avril 2004 jusqu'à la fin de la période d'ITT, ainsi qu'une indemnité de 1. 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Mme X... étant décédée le 5 novembre 2007, l'instance a été interrompue, puis reprise par l'intervention volontaire d'Éric Y... en qualité de représentant légal de sa fille Amandine Y..., unique héritière de Mme X....

Par conclusions déposées le 21 février 2008, Éric Y..., ès qualités, demande à la Cour de confirmer le jugement, sauf en ce qu'il a réduit la prise en charge des échéances des prêts garantis, et, sur son appel incident, de :

- condamner la CNP à payer à Amandine Y... la moitié des échéances des prêts garantis à compter du 91e jour d'ITT jusqu'au 5 novembre 2007, soit une somme de 18 109, 72 €, outre intérêts de retard à compter du 3 novembre 2005,

- dire qu'en raison de l'assurance décès, Amandine Y... sera déchargée du paiement du solde des échéances des prêts garantis à compter du 5 novembre 2007,

- ordonner la capitalisation des intérêts dus pour une année entière conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner la CNP au paiement d'une indemnité de 2. 000 € pour frais irrépétibles ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les pièces régulièrement communiquées,

Vu l'ordonnance de clôture du 24 juin 2008 ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la garantie :

Attendu que, suivant les dispositions de l'article L. 113 – 8 alinéa 1er du code des assurances, le contrat d'assurance est nul en cas de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé a été sans influence sur le sinistre ;

Que l'alinéa 2 prévoit que l'assuré, lors de la déclaration des risques, doit répondre exactement aux questions posées par l'assureur sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge ;

Attendu que Mme X... a, le 18 mars 2002, répondu négativement à la question posée dans le bulletin de demande d'admission dans l'assurance ainsi libellée : « avez-vous au cours de votre existence subi un traitement pour troubles nerveux, dépression nerveuse ? » ;

Attendu qu'il résulte de la fiche signalétique versée aux débats que Mme X... a effectué plusieurs consultations entre le 18 janvier 2000 et le 20 janvier 2003 pour des troubles du sommeil, de la fatigue et de la « déprime » et que son médecin traitant lui a prescrit du Séropram (antidépresseur) et du Levothyrox (traitement des pathologies thyroïdiennes) ;

Attendu cependant que la question posée par l'assureur, dont les termes doivent être strictement interprétés, portait sur l'existence de troubles nerveux et / ou dépression nerveuse qui pour la dernière correspond à un état mental caractérisé par une lassitude importante, une dépréciation de soi, un pessimisme qui entraînent des perturbations importantes dans les rapports psycho-affectifs ; que Mme X... qui avait consulté son médecin généraliste pour des troubles bénins qualifiés de troubles du sommeil, fatigue, déprime (correspondant à une tristesse passagère liée à une situation difficile) et s'était vu prescrire le traitement susmentionné seulement en février et mai 2000, puis en mars, mai et juin 2001 et enfin en décembre 2001, sans même qu'il soit établi qu'un arrêt de travail lui ait été prescrit pour ce motif, n'a jamais été dirigée vers un spécialiste des maladies psychiatriques et que, s'agissant de troubles largement répandus dans la population pour des motifs conjoncturels, il y a lieu d'admettre qu'elle n'a pas eu conscience d'être atteinte d'une ou des affections mentionnées dans le questionnaire d'assurance ;

Attendu que Mme X..., ne possédant pas de qualification médicale particulière, ne pouvait savoir, dans le cadre de la relation de confiance nouée avec son médecin généraliste, que le Séropram qui lui était prescrit était également indiqué, selon le dictionnaire Vidal, pour le traitement d'épisodes dépressifs majeurs ;

Qu'il en résulte que si le jugement doit être confirmé en ce qu'il a écarté toute fausse déclaration intentionnelle, il doit être réformé en ce qu'il a retenu une omission ou déclaration inexacte, alors que l'assurée s'est bornée, en fonction de la conscience qu'elle avait de son état, à répondre exactement à la question qui lui était posée ; qu'il n'y a donc pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 113-9 du code des assurances ;

Sur les indemnités :

Attendu que M. Y..., ès qualités, fait valoir que Mme X... a assumé seule le paiement des échéances des prêts garantis depuis janvier 2004 et que la CNP ne peut se libérer de ses obligations directement auprès de la Caisse d'épargne, ce qui l'obligerait à introduire une nouvelle action contre l'établissement prêteur pour obtenir un remboursement ;

Qu'il formule une demande nouvelle résultant de l'évolution du litige pour solliciter, au titre de l'assurance décès, la prise en charge des échéances à compter du 5 novembre 2007 ;

Attendu que conformément aux conditions générales du contrat d'assurance (articles 2 et 8) l'indemnité au titre de l'incapacité totale de travail est due après un délai de carence de 90 jours jusqu'à la fin de la période d'ITT ;

Que la CNP sera en conséquence condamnée à prendre en charge la moitié des échéances des prêts garantis suivant contrat du 18 mars 2002 à compter du 8 avril 2004 jusqu'au 5 novembre 2007, date du décès de Mme X..., soit une somme de 18 109, 72 € ; que toutefois, dès lors que l'assurée a fait l'avance à la Caisse d'épargne de la part des échéances garanties qui devaient être prises en charge par l'assureur, le remboursement incombant à la CNP devra intervenir directement entre les mains d'Amandine Y..., représentée par son père Éric Y...,

Que les intérêts au taux légal courront à compter du 3 novembre 2005, date de l'assignation, au fur et à mesure de leur échéance pour les mensualités échues du 3 novembre 2005 au 5 novembre 2007 ;

Attendu que selon l'article 8 des conditions générales d'assurance, en cas de décès survenant en cours d'assurance, l'assureur garantit le paiement en une seule fois au prêteur d'une somme représentant 100 % du capital restant dû au lendemain de la dernière échéance précédant le décès ; que pour le calcul, le capital retenu est celui correspondant à la quotité garantie sur la tête en cause, soit en l'espèce 50 % ;

Qu'il convient donc de condamner la CNP à prendre en charge à compter du 5 novembre 2007, à proportion de la quotité garantie, les échéances des prêts couverts par l'assurance dans les conditions prévues aux dispositions contractuelles susvisées ;

Que la capitalisation des intérêts dus pour une année entière sera ordonnée en application de l'article 1154 du code civil,

Attendu que l'appelante qui succombe supportera les dépens et ses frais irrépétibles et sera condamnée à payer à l'intimé une indemnité de 1. 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré,

REÇOIT en son intervention Éric Y..., ès qualités de représentant légal d'Amandine Y..., unique héritière de Lydie X..., décédée le 5 novembre 2007,

CONFIRME le jugement rendu le 28 juin 2006 par le tribunal de grande instance de Dole en ce qu'il a écarté la fausse déclaration intentionnelle et condamné la SA CNP Assurances, outre aux dépens, à payer à Lydie X... la somme de SIX CENTS EUROS (600 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirmant pour le surplus et y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article L. 113-9 du code des assurances,

CONDAMNE la SA CNP Assurances à prendre en charge la moitié des échéances des prêts garantis suivant contrat du 18 mars 2002 à compter du 8 avril 2004 jusqu'au 5 novembre 2007, date du décès de Mme X..., soit une somme de DIX HUIT MILLE CENT NEUF EUROS SOIXANTE DOUZE CENTIMES (18 109, 72 €), avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2005, date de l'assignation, au fur et à mesure de leur échéance pour les mensualités échues du 3 novembre 2005 au 5 novembre 2007,

DIT que les montants susvisés seront versés à Amandine Y..., représentée par son père Éric Y...,

CONDAMNE LA SA CNP ASSURANCES à prendre en charge à compter du 5 novembre 2007, à proportion de la quotité garantie, les échéances des prêts objets de l'assurance dans les conditions prévues aux dispositions contractuelles,

DIT que les intérêts dus pour une année entière produiront intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil,

CONDAMNE LA SA CNP Assurances à payer à Éric Y..., ès qualités, la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1. 500 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la SA CNP Assurances aux dépens d'appel, avec possibilité de recouvrement direct au profit de la SCP LEROUX, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

LEDIT arrêt a été signé par M. SANVIDO, Président de Chambre, ayant participé au délibéré et M. ANDRE, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Numéro d'arrêt : 08/01724
Date de la décision : 26/11/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Dole


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-11-26;08.01724 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award