La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/11/2007 | FRANCE | N°06/185

France | France, Cour d'appel de Besançon, 14 novembre 2007, 06/185


ARRET No
RV / CBCOUR D'APPEL DE BESANCON
-172 501 116 00013-
ARRET DU QUATORZE NOVEMBRE 2007
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE


contradictoire
Audience publique
du 09 Octobre 2007
No de rôle : 06 / 00185


S / appel d'une décision
du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BESANCON
en date du 10 JANVIER 2006 RG No 04 / 03018
Code affaire : 59B
Demande en paiement relative à un autre contrat


ENTREPRISE SAS X...C / Bernard Y..., Nicole Z... épouse Y..., Philippe A..., Chantal B... épouse A..., Sylvain C..., ASSOCIATION " ON VOUS SALUE

X... "


PARTIES EN CAUSE :
ENTREPRISE SAS X..., ayant son siège, ZA du Fourney-25640 MARCHAUX, prise en la pe...

ARRET No
RV / CBCOUR D'APPEL DE BESANCON
-172 501 116 00013-
ARRET DU QUATORZE NOVEMBRE 2007
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

contradictoire
Audience publique
du 09 Octobre 2007
No de rôle : 06 / 00185

S / appel d'une décision
du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BESANCON
en date du 10 JANVIER 2006 RG No 04 / 03018
Code affaire : 59B
Demande en paiement relative à un autre contrat

ENTREPRISE SAS X...C / Bernard Y..., Nicole Z... épouse Y..., Philippe A..., Chantal B... épouse A..., Sylvain C..., ASSOCIATION " ON VOUS SALUE X... "

PARTIES EN CAUSE :
ENTREPRISE SAS X..., ayant son siège, ZA du Fourney-25640 MARCHAUX, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice demeurant pour ce audit siège,

APPELANTE

Ayant Me Bruno GRACIANO pour avoué
et Me Robert BAUER, avocat au barreau de MONTBELIARD
ET :
Monsieur Bernard Y..., né le 04 Juillet 1945 à BESANCON (25000)
de nationalité française, demeurant...-25115 POUILLEY LES VIGNES

Madame Nicole Z... épouse Y..., née le 12 Juin 1947 à MORTEAU (25500), de nationalité française, demeurant...-25115 POUILLEY LES VIGNES

Monsieur Philippe A..., né le 17 Février 1955 à GRAY (70100), de nationalité française, demeurant...

Madame Chantal B... épouse A..., née le 26 Août 1962 à HERICOURT (70400), de nationalité française, demeurant...

Monsieur Sylvain C..., né le 06 Décembre 1969 à CHAMPAGNOLE (39300), de nationalité française, demeurant...-25360 NAISEY LES GRANGES

ASSOCIATION " ON VOUS SALUE X... ", ayant son siège,33 rue de la Malatière-25115 POUILLEYLES VIGNES, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice,

INTIMES

Ayant la SCP DUMONT-PAUTHIER pour avoué
et Me Christian PILATI, avocat au barreau de BESANCON
COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

MAGISTRATS : M. SANVIDO, Président de Chambre, M. POLANCHET et R. VIGNES, Conseillers,

GREFFIER : M. ANDRE, Greffier,

Lors du délibéré

M. SANVIDO, Président de Chambre,

M. POLANCHET et R. VIGNES, Conseillers,

L'affaire plaidée à l'audience du 09 Octobre 2007, a été mise en délibéré au 7 novembre 2007, et à cette date le délibéré prorogé au 14 Novembre 2007. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Faisant grief aux époux Y..., aux époux A..., à Monsieur C... et à l'Association " ON VOUS SALUE X... " d'avoir distribué des tracts et exercé des actes de dénigrement à son encontre au cours du salon de l'Habitat tenu à Besançon Micropolis les 15,16 et 17 octobre 2004, où elle était exposante, la société X..., exploitant une activité d'électricité et de géothermie, les a fait assigner, par actes des 16,20 et 21 décembre 2004, devant le Tribunal de Grande Instance de Besançon, sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, en réparation de son préjudice commercial, moral et financier, en paiement d'une pénalité pour tout nouvel agissement de dénigrement ou incitation au boycott et en remboursement des frais irrépétibles qu'elle a exposés.

Par jugement du 10 janvier 2006, auquel la Cour se réfère pour un plus ample exposé des faits et moyens, ainsi que pour les motifs, le tribunal a dit que les faits allégués par la société X... constituent des diffamations ou injures au sens de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 et déclaré irrecevable comme prescrite l'action civile engagée par la demanderesse.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 27 janvier 2006, la société X... a interjeté appel de cette décision.

Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées le 2 mai 2007 par la société X..., aux termes desquelles elle demande à la Cour, après infirmation du jugement, de :

-dire que les époux Y..., les époux A..., Monsieur C..., l'association " ON VOUS SALUE X... " sont les auteurs d'agissements de dénigrements, d'inexactitudes, de dénaturation, de déformation des faits, d'incitation au boycott totalement injustifiés au préjudice de la SAS X...,

-les condamner in solidum à l'indemniser de son entier préjudice, commercial, moral et financier,

En conséquence, les condamner in solidum à lui payer la somme de 80. 000 € à titre de réparation de son préjudice, financier commercial et moral,

Au besoin, ordonner une expertise,

-dire que chaque nouvel agissement de dénigrement ou d'incitation au boycott de l'un quelconque des défendeurs sera sanctionné par une pénalité de 10. 000 €,

-condamner également les défendeurs in solidum au paiement d'une somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Vu les dernières conclusions déposées le 16 février 2007 par les époux Y..., les époux A..., Monsieur C... et l'Association " ON VOUS SALUE X... ", intimés, concluant à la confirmation du jugement et sollicitant la condamnation de l'appelante à leur payer la somme de 500 en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 21 juin 2007,

Vu les pièces régulièrement communiquées ;

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que la société X... verse essentiellement aux débats plusieurs attestations de personnes s'étant rendues sur son stand lors du salon de l'Habitat du 15 au 17 octobre 2004, qui déclarent avoir été abordées par d'autres personnes dénigrant sa compétence et la qualité de ses prestations (attestations M... Pascal I..., N..., J..., O...), ainsi que la qualité des matériels vendus par elle (attestation Franck I...), et qui les ont incitées à ne pas leur apporter leur clientèle, voire à s'adresser à une entreprise concurrente (attestations M...
P..., J..., O...) et à contacter l'Association " ON VOUS SALUE X... " (attestations P..., J...) ;

Attendu que si les allégations relatives à l'incompétence et la malhonnêteté des dirigeants d'une société commerciale portant atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne, y compris morale, peuvent constituer des diffamations, soumises au régime juridique de la loi du 29 juillet 1881, il n'en est pas de même de l'abus de la liberté d'expression consistant en un dénigrement des prestations ou du matériel fournis par l'entreprise, ni de la commission d'actes de détournement de clientèle ou l'incitation au boycott qui, s'ils sont établis, constituent des délits civils au sens de l'article 1382 du Code Civil ;

Qu'il s'ensuit que, pour cette deuxième catégorie d'actes, distincte et divisible de la première, l'action engagée par la société X... n'est pas soumise à la brève prescription édictée par la loi du 29 juillet 1881 et que le jugement doit être infirmé en ce qu'il l'a déclarée irrecevable ;

Attendu qu'il résulte des attestations susmentionnées que les intimés, regroupés au sein de l'association " ON VOUS SALUE X... ", ont distribué des tracts et systématiquement interpellé les clients potentiels de la société X... lors du salon de l'Habitat 2004 en leur adressant des mises en garde, recommandations ou incitations à ne pas contracter, ainsi relatées :

-" ne surtout pas prendre les établissements X... pour réaliser ce genre d'installation....... " (attestation M...) ;

-" ces derniers (membres de l'association " JE VOUS SALUE X... " (sic) ayant participé à l'émission " sans aucun doute " de Julien K...) récupéraient la clientèle sur le stand de M. T... et dénigraient ses propres........ " (attestation P...) ;

-" j'ai constaté........ le 16 octobre 2004........ les agissements des membres de l'association " ON VOUS SALUE X... " (qui distribuaient) des tracts...... et récupéraient les personnes sortant du stand de Monsieur François-Xavier X... pour les dissuader de travailler avec lui.... " (attestation Nathalie J...) ;

-" (J'ai) constaté le dimanche 17 octobre que les prospectus qui sortaient du stand de Monsieur X... étaient interpellés par plusieurs personnes pour dénigrer l'entreprise X... sur son activité....... " (attestation N...) ;

-" (J'ai) vu et entendu le 16 octobre 2004 des membres de l'association " ON VOUS SALUE X... " qui interpellaient des personnes qui sortaient du stand de Monsieur François-Xavier X... pour leur remettre un tract et qui le dénigraient......J'ai personnellement demandé à ce jeune couple pourquoi ils avaient été interpellés, ils m'ont montré le tract et m'ont dit qu'ils ne feraient pas appel à cette entreprise...... " (attestation Jean-Alain J...) ;

-" Je me suis fait accoster en sortant du stand X... par une femme brune les cheveux coupés au carré qui voulait me mettre en garde contre cette entreprise..... elle m'a dit qu'ils avaient créés une association, puis elle m'a donné un tract avec des numéros de téléphone en me disant que je pouvais prendre contact avec eux quand je le voulais..... elle m'a dit que si je voulais faire de la géothermie, il valait mieux passer avec l'entreprise FRANTHERM...... ils m'ont dit de choisir qui je voulais, mais pas l'entreprise X....... le même manège a continué avec d'autres personnes sortant du même stand " (attestation O...) ;

Attendu qu'au nombre des distributeurs de tracts ont été identifiés les époux Y..., les époux A..., Monsieur C... (attestations M... Franck et Pascal I..., J...) et que les intimés se bornent, selon leurs dernières écritures, à contester la recevabilité de l'action de l'appelante et l'existence d'un préjudice, mais non être les auteurs de l'action contestée ;

Que pour sa part Monsieur L..., du Centre Technique du Rayonnement, présent au salon de l'Habitat, les 16 et 17 octobre 2004, a déclaré avoir subi des pressions psychologiques de la part de l'association " JE VOUS SALUE X... " (sic) par la présence0 de Madame Y... et de ses autres adhérents, lesquelles n'ont pas cessé malgré l'intervention de la sécurité du salon ;

Attendu qu'en cet état il y a lieu de retenir qu'au cours du salon de l'Habitat qui s'est déroulé du 15 au 17 octobre 2004, les intimés ont excédé les limites autorisées de la liberté d'expression et ont, par leurs dénigrements réitérés et leurs interventions intempestives auprès de la clientèle potentielle de la société X... afin de l'inviter à ne pas contracter avec elle, commis une faute relevant des dispositions de l'article 1382 du Code Civil ;

Attendu qu'il résulte des extraits du répertoire des métiers et du registre du commerce et de la lettre du commissaire aux comptes de la SAS X... du 10 novembre 2004, que celle-ci, dirigée par le fils X..., a repris le fonds de commerce de son père Paul, désormais en retraite auquel les intimés reprochent d'avoir installé des systèmes de géothermie défectueux et que les différentes interventions médiatisées tant dans la presse écrite locale que la télévision nationale, ainsi que les actes de dénigrement et incitations au boycott lors de salons professionnels, dont celui tenu à Besançon en octobre 2004, semblent avoir eu un impact négatif sur l'évolution du chiffre d'affaires de la société, sa notoriété et son activité dans l'installation de chauffage par géothermie ;

Que selon l'avis précité adressé le 10 novembre 2004 par l'expert comptable et le commissaire aux comptes de l'appelante, celle-ci a présenté pour l'exercice clos le 30 septembre 2004, un chiffre d'affaires inférieur de près de 40 % aux documents prévisionnels, laissant entrevoir une perte probable pour l'exercice en cours et pour l'exercice à venir et que le carnet de commande présentait une situation très inférieure à ce qui'était lors de la constitution de la société et de la transmission du fonds de commerce (27. 10. 03-3. 11. 03) ; qu'une procédure d'alerte auprès du président du Tribunal de Commerce a été évoquée ;

Qu'ainsi alors que les ventes réalisées en octobre 2003 présentaient un chiffre d'affaires de 75. 535,02 €, elles n'ont représenté qu'une valeur de 15. 383,69 € en octobre 2004 ;

Attendu qu'il convient de retenir une relation de cause à effet entre la faute commise par les intimés et le préjudice commercial subi par la société X... ; que toutefois, à défaut de production d'analyses et documents comptables plus étayés et actualisés, celui-ci sera évalué à la somme de 15. 000 €, sans qu'il y ait lieu de recourir à une expertise ;

Attendu qu'il ne sera pas fait droit à la demande de l'appelante tendant à la prévision d'une pénalité en cas de nouvel agissement fautif des intimés ;

Que ces derniers qui succombent supporteront les dépens et leur frais irrépétibles et seront condamnés à payer à l'appelante une indemnité de 2. 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 10 janvier 2006 par le Tribunal de Grande Instance de Besançon,

Statuant à nouveau,

DECLARE recevable l'action engagée par la société X... sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil,

DIT que Nicole et Bernard Y..., Chantal et Philippe A..., Sylvain C... et l'Association " ON VOUS SALUE X... " sont auteurs de dénigrements des prestations et matériels vendus par la société X... et incitations au boycott fautifs,

CONDAMNE Bernard Y..., Nicole Z... épouse Y..., Philippe A..., Chantal B... épouse A..., Sylvain C... et l'Association " ON VOUS SALUE X... " à payer in solidum à la SAS Entreprise X... les sommes de :

-QUINZE MILLE EUROS (15. 000 €) à titre de dommages et intérêts,

-DEUX MILLE EUROS (2. 000 €) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

DEBOUTE la SAS Entreprise X... pour le surplus,

CONDAMNE Bernard Y..., Nicole Z... épouse Y..., Philippe A..., Chantal B... épouse A..., Sylvain C... et l'Association " ON VOUS SALUE X... " in solidum aux entiers dépens avec possibilité de recouvrement direct au profit de Maître GRACIANO, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile,

LEDIT arrêt a été signé par M. SANVIDO, Président de Chambre, ayant participé au délibéré et M. ANDRE, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Numéro d'arrêt : 06/185
Date de la décision : 14/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Besançon


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-14;06.185 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award