ORDONNANCE N° 31
du 23 JUILLET 2024
N° RG 24/00046 - N° Portalis DBVE-V-B7I-CIOC
Syndic. de copro. [4]
C/
[F]
[Z]
COUR D'APPEL DE BASTIA
ORDONNANCE DE REFERE
DU
VINGT TROIS JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE
Audience publique tenue par Mme Hélène DAVO, première présidente, assisté de Mme Elorri FORT, lors des débats et du prononcé,
DEMANDEUR :
Le syndicat des copropriétaires [4]
Représenté par son syndic en exercice, la société ACTIF IMMOBILIER,
Immeuble [4] [Adresse 6]
[Localité 3]
non comparant représenté par Me Marie ROSSI, avocat au barreau d'AJACCIO substituée par Me TISSOT-POLI Stéphanie, avocat au barreau de BASTIA
DEFENDEURS :
Monsieur [P] [K] [V] [F]
né le 06 Septembre 1942 à [Localité 7]
[Adresse 5]
[4] B
[Localité 1]
non comparant représdenté par Me Dominique REMITI-LEANDRI, avocat au barreau D'AJACCIO substituée par Me Claudia LUISI, avocat au barreau de BASTIA
Monsieur [X] [Z]
né le 03 Novembre 1975 à [Localité 3]
[Adresse 2] [4] B
[Localité 3]
non comparant représenté par Me Dominique REMITI-LEANDRI, avocat au barreau d'AJACCIO substituée par Me Claudia LUISI, avocat au barreau de BASTIA
DEBATS :
A l'audience publique du 25 juin 2024,
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 juillet 2024
ORDONNANCE :
Contradictoire,
Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signée par Hélène DAVO, première présidente, et par Elorri FORT, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Par acte en date des 17 septembre et 19 octobre 2023, le syndicat des copropriétaire [4] a assigné M. [P] [F] et M. [X] [Z] à comparaître devant le président du tribunal judiciaire d'Ajaccio aux fins de les voir, principalement, condamnés à remettre en état les parties communes, notamment en démolissant le mur de parpaing construit sur la terrasse du bâtiment [4], ce sous astreinte.
Par ordonnance de référé contradictoire en date du 6 février 2024, le président du tribunal judiciaire d'Ajaccio a :
« - CONDAMNÉ M. [X] [Z] et M. [P] [F] à procéder à une remise en état des lieux, et notamment à démolir le mur de parpaing construit sur la terrasse du bâtiment [4] décrit par l'huissier en ses constats, à remettre la terrasse en son état antérieur ;
- CONDAMNÉ M. [P] [F] et M. [X] [Z] à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] sis [Adresse 6] à [Localité 3] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente procédure de référé ;
- REJETÉ les demandes plus amples ».
Par déclarations en date du 26 février 2024, M. [X] [Z] et M. [P] [F] ont interjeté appel du jugement.
Par assignation en référé, délivrée 17 avril 2024 à M. [X] [Z] et M. [P] [F], le syndicat des copropriétaire [4] a saisi la première présidente de la cour d'appel de Bastia aux fins de voir radier l'affaire du rôle.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions écrites auxquelles il est renvoyé à l'audience, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] demande à la première présidente de la cour d'appel de Bastia de :
« Vu l'article 524 du code de procédure civile,
Vu l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire d'Ajaccio le 6 février 2024,
ORDONNER la radiation du rôle de la cour d'appel de l'affaire portant le n° RG 24/132 ;
CONDAMNER les appelants à vers au concluant la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la présente instance ».
Au soutien de ses prétentions, le syndicat expose que :
- M. [P] [F] et M. [X] [Z], en procédant à la fermeture de leur balcon situé côté mer, ont réalisé des travaux sur une partie commune de l'immeuble. Ils précisent qu'ils ont modifié l'aspect extérieur du bâtiment et que, de ce fait, ils étaient obligés de recueillir l'autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires ;
- M. [P] [F] et M. [X] [Z] n'ont pas exécuté la décision du président du tribunal judiciaire d'Ajaccio et ils ne démontrent pas qu'une telle exécution aurait des conséquences excessives puisqu'elles ne sont pas irréversibles ;
- la demande de régularisation formée par M. [P] [F] et M. [X] [Z] est sans incidence puisqu'ils ne peuvent préjuger d'une éventuelle autorisation qui serait donnée par l'assemblée des copropriétaires. Il précise qu'une décision de refus de la part des copropriétaires ne serait pas constitutive d'une rupture d'égalité.
*
Par conclusions écrites auxquelles il est renvoyé à l'audience, M. [X] [Z] et M. [P] [F] demandent à la première présidente de la cour d'appel de Bastia de :
« - débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4], pris e la personne de son syndic en exercice, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre Messieurs [Z] [X] et [F] [P] ;
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du pc ainsi qu'aux entiers dépens ».
Pour contester la demande de radiation formée par le syndicat des copropriétaires, M. [P] [F] et M. [X] [Z] soutiennent que :
- ils ont effectué une demande de régularisation, laquelle ne pourra manifestement pas être refusée au regard des nombreuses fermetures de loggia effectuées dans l'immeuble. Ils précisent qu'un tel refus s'analyserait en une rupture d'égalité des copropriétaires ;
- la condamnation prononcée par le tribunal judiciaire d'Ajaccio est fondée sur une modification de l'aspect extérieur de l'immeuble. Or, ils estiment que pour retenir une atteinte à l'aspect extérieur de l'immeuble, les juges doivent prendre en considération l'harmonie préexistante aux travaux litigieux. Sur ce point, ils précisent qu'il n'existe aucune atteinte à l'harmonie de l'immeuble puisque de nombreux copropriétaire ont effectués des modifications sur leurs loggias et balcons ;
- la remise en état des lieux aurait des conséquences manifestement excessives au regard du coût ;
- le règlement intérieur de la copropriété n'a pas été mis en conformité avec la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.
MOTIVATION
Sur la demande de radiation
Par application du premier alinéa de l'article 524 du code de procédure civile, « lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision ».
Il n'est pas contesté que M. [P] [F] et M. [X] [Z] ont partiellement exécuté l'ordonnance de référé en s'acquittant du montant des condamnations prononcées au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils reconnaissent, par ailleurs, ne pas avoir exécuté la décision en ce qu'elle leur ordonne de démolir le mur de parpaing construit sur la terrasse du bâtiment. Ils expliquent qu'une telle exécution entraînerait des conséquences manifestement excessives au regard du coût et de la régularisation en cours.
En l'espèce, il est établi que M. [P] [F] et M. [X] [Z] ont effectué des travaux aux fins de fermer leur loggia sans avoir obtenu l'autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires.
Pour autant, l'ensemble des éléments versés en procédure démontre que l'exécution de l'ordonnance de référé, en ce qu'elle ordonne la démolition des travaux réalisés et la remise en état, emporterait des conséquences manifestement excessives.
En effet, M. [P] [F] et M. [X] [Z] justifient avoir entamé une procédure de régularisation auprès de la copropriété. S'il est vrai qu'il est impossible de préjuger de la décision de l'assemblée des copropriétaires, il n'en demeure pas moins que le procès-verbal de constat en date du 24 octobre 2023 et le rapport d'expertise en date du 16 mai 2024 démontrent que la moitié des loggias situées au rez-de-chaussée de l'immeuble [4], où résident M. [P] [F] et M. [X] [Z], ont donné lieu à des modifications (fermetures, modification d'ouverture). Sur ce point, les photos produites mettent en évidence que certaines fermetures sont similaires à celle réalisée par M. [P] [F] et M. [X] [Z].
De plus, il convient de rappeler que le juge des référés est juge de l'évidence et non du fond. Pour ordonner des mesures conservatoires ou de remise en état, il doit, par application de l'article 834 du code de procédure civile, démontrer :
- soit, la nécessité de prévenir d'un dommage imminent ;
- soit la nécessité de faire cesser un trouble manifestement illicite.
Or, force est de relever que l'ordonnance querellée ne comporte aucune motivation sur ces deux points, seul étant constaté l'absence d'autorisation préalable et la modification de l'aspect extérieur de l'immeuble.
Ainsi, tenant compte tant du défaut de motivation de l'ordonnance de référé que du coût disproportionné qu'entrainerait les travaux de démolition et de remise en état au regard de la procédure de régularisation engagée et des constatations de l'expert, il convient de débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de radiation.
Sur les autres demandes
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] succombant, il sera condamné aux dépens de la présente instance.
L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile. À ce titre, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] sera condamné à payer la somme globale de 3 000 euros à M. [P] [F] et M. [X] [Z].
PAR CES MOTIFS
Nous, Hélène DAVO, Première Présidente, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,
- DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] de sa demande de radiation du rôle de la cour d'appel de l'affaire portant le n° RG 24/132 ;
- CONDAMNONS le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] aux dépens de la présente instance ;
- CONDAMNONS le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [4] à payer à M. [P] [F] et M. [X] [Z] la somme globale de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LA PREMIERE PRESIDENTE,
Elorri FORT Hélène DAVO