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11/01/2023 | FRANCE | N°20/00105

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale tass, 11 janvier 2023, 20/00105


ARRET N°

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11 Janvier 2023

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N° RG 20/00105 - N° Portalis DBVE-V-B7E-B62U

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Société TAXI MONTE

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PARIS

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Décision déférée à la Cour du :

29 juin 2020

Pole social du TJ de BASTIA

19/00431

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Copie exécutoire délivrée le :






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à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUBLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE SOCIALE





ARRET DU : ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS





APPELANTE :



Société TAXI MONTE, prise en la personne de son représentant Monsie...

ARRET N°

-----------------------

11 Janvier 2023

-----------------------

N° RG 20/00105 - N° Portalis DBVE-V-B7E-B62U

-----------------------

Société TAXI MONTE

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PARIS

----------------------

Décision déférée à la Cour du :

29 juin 2020

Pole social du TJ de BASTIA

19/00431

------------------

Copie exécutoire délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUBLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

APPELANTE :

Société TAXI MONTE, prise en la personne de son représentant Monsieur [O] [B], domicilié es qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Linda PIPERI, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PARIS

[Localité 2]

Représentée par Me Valérie PERINO SCARCELLA, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 janvier 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme COLIN, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur JOUVE, Président de chambre,

Madame COLIN, Conseillère

Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président

GREFFIER :

Madame CARDONA, Greffière lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 04 mai 2022 puis a fait l'objet de prorogations au 07 septembre, 21 septembre et 11 janvier 2023.

ARRET

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

- Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 04 octobre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) de Paris a notifié à la société TAXI MONTE un indu d'un montant de 5 661 euros correspondant au remboursement de frais de transports effectués sans entente préalable entre [Localité 4] et le centre hospitalier de [Localité 1] pour permettre à un assuré de recevoir des séances d'hémodialyse du 03 au 31 juillet 2017 et du 03 au 31 août 2017.

Le 18 décembre 2018, la C.P.A.M. a mis en demeure la société TAXI MONTE de payer cette somme.

Par décision du 26 mars 2019 notifiée le 08 avril 2019, la commission de recours amiable de la caisse a confirmé le bien-fondé de cette créance pour un montant total de 5 661 euros.

Le 24 septembre 2019, la C.P.A.M. a décerné une contrainte à l'encontre de la société TAXI MONTE pour ce même montant de 5 661 euros, contrainte notifiée à cette dernière le 27 septembre 2019.

Le 10 octobre 2019, la société TAXI MONTE a formé une opposition à cette contrainte auprès du greffe du pôle social du tribunal de grande instance de Bastia.

Par jugement contradictoire du 29 juin 2020, cette juridiction - devenue pôle social du tribunal judiciaire - a :

- déclaré recevable l'opposition à contrainte formée par la société TAXI MONTE ;

- rejeté au fond l'opposition ;

- condamné la société TAXI MONTE à payer à la C.P.A.M. de Paris la somme de 5 661 euros ;

- condamné la société TAXI MONTE au paiement des frais de signification et de dépens.

Par courrier électronique du 20 juillet 2020, la société TAXI MONTE, prise en la personne de son représentant légal, a interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 02 juillet 2020, l'appel tendant à l'infirmation du jugement uniquement en ce qu'il a rejeté au fond l'opposition et condamné le transporteur à payer à la CPAM la somme de 5 661 euros, outre les frais de signification de la contrainte et les dépens.

Cette affaire a été appelée à l'audience du 11 janvier 2022, au cours de laquelle les parties, non-comparantes, étaient représentées.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de ses conclusions, réitérées et soutenues oralement à l'audience, la société TAXI MONTE, appelante, demande à la cour de':

' - REFORMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions

- FAIRE DROIT à l'opposition à contrainte formée par Monsieur [O], TAXI MONTE le 10 octobre 2019.

- DIRE que de ce fait, la contrainte est nulle et non avenue

Y ajoutant,

- CONDAMNER la CPAM de PARIS à payer au concluant la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.'

Au soutien de ses prétentions, l'appelante fait notamment valoir qu'elle a procédé sans difficulté au transport du patient du 12 juin au 06 octobre 2017 sans que le remboursement des sommes versées au titre des mois de juin, septembre et octobre 2017 ne soit sollicité par la caisse.

Elle explique en outre que le patient transporté renvoyait à deux des six cas de figures listés à l'article R. 322-10 du code de la sécurité sociale :

- des transports liés aux traitements prescrits pour les malades reconnus tteints d'une affection de longue durée ;

- des transports en série ;

et que ces conditions de transport sont alternatives et non cumulatives.

L'appelante affirme ainsi que c'est à bon droit qu'elle a procédé au transport de ce patient atteint d'une affection longue durée, sans avoir à se préoccuper de l'obtention d'un accord préalable.

Enfin, elle fait grief à la caisse de ne pas avoir dirigé son action en recouvrement à l'encontre du patient transporté, l'article L. 322-5 du même code mettant à la charge de ce dernier la présentation préalable de la prescription médicale permettant l'exécution de la prestation de transport.

*

Au terme de ses conclusions, réitérées et soutenues oralement à l'audience, la C.P.A.M. de Paris, intimée, demande à la cour de':

' CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Bastia le 29 juin 2020 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNER la société TAXI MONTE à verser à la CPAM de Paris la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile'.

L'intimée réplique notamment que le litige concerne des transports en série ayant engendré une prise en charge indue, en l'absence de procédure d'entente préalable avec la caisse, qui était obligatoire en application de l'article R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale.

Elle ajoute que, même à considérer que les transports aient été pris en charge au titre d'une affection de longue durée de l'assuré transporté, la procédure d'entente préalable demeurait obligatoire, au visa d'un arrêt rendu le 15 mars 2018 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (n°17-14.403).

Enfin, la caisse soutient qu'elle a dirigé à bon escient son action en recouvrement contre la société de transport et non contre l'assuré transporté, les versements indus ayant été opérés dans le cadre du tiers-payant et donc perçus directement par le transporteur.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

La recevabilité de l'appel interjeté par la société TAXI MONTE n'étant pas contestée, il ne sera pas statué sur celle-ci.

- Sur l'indu

L'article R. 322-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au présent litige, dispose que ' Sont pris en charge les frais de transport de l'assuré ou de l'ayant droit se trouvant dans l'obligation de se déplacer :

1° Pour recevoir les soins ou subir les examens appropriés à son état dans les cas suivants :

a) Transports liés à une hospitalisation ;

b) Transports liés aux traitements ou examens prescrits en application de l'article L. 324-1 pour les malades reconnus atteints d'une affection de longue durée et présentant l'une des déficiences ou incapacités définies par le référentiel de prescription mentionné à l'article R. 322-10-1 [Un référentiel de prescription arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale précise les situations dans lesquelles l'état du malade justifie respectivement la prescription des modes de transport prévus au présent article en fonction de l'importance des  déficiences et incapacités et de leurs incidences] ;

c) Transports par ambulance justifiés par l'état du malade dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article R. 322-10-1 ;

d) Transports en un lieu distant de plus de 150 kilomètres dans les conditions prévues aux articles R. 322-10-4 et R. 322-10-5 ;

e) Transports en série, lorsque le nombre de transports prescrits au titre d'un même traitement est au moins égal à quatre au cours d'une période de deux mois et que chaque transport est effectué vers un lieu distant de plus de 50 kilomètres ;

f) Transports liés aux soins ou traitements dans les centres mentionnés au 3° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles et dans les centres médico-psycho-pédagogiques, mentionnés au 19° de l'article L. 160-14 du présent code. [...]'

L'article R. 322-10-4 du même code ajoute qu'' Est, sauf urgence attestée par le médecin prescripteur, subordonnée à l'accord préalable de l'organisme qui sert les prestations après avis du contrôle médical la prise en charge des frais de transport :

a) Exposés sur une distance excédant 150 kilomètres ;

b) Mentionnés aux e et f du 1° de l'article R. 322-10 ;

c) Par avion et par bateau de ligne régulière.

Dans le cas prévu au a le contrôle médical vérifie notamment que les soins ne peuvent être dispensés dans une structure de soins située à une distance n'excédant pas 150 kilomètres.

L'absence de réponse dans un délai de quinze jours à compter de l'expédition de la demande vaut accord préalable.'

Ainsi, il résulte des articles R. 322-10 et R. 322-10-4 susvisés que, sauf urgence attestée par le médecin prescripteur, la prise en charge des frais de transport en série est subordonnée à l'accord préalable de la caisse.

Les transports en série s'entendent de transports impliquant la réalisation de plus de quatre trajets de plus de 50 km chacun sur une même période de deux mois.

En l'espèce, le litige porte sur la prise en charge des frais de transports effectués par la société TAXI MONTE en faveur d'un assuré de la C.P.A.M. de Paris, M. [T] [S], ayant résidé temporairement en Haute-Corse de juin à octobre 2017.

Il ressort des certificats établis par les Dr [E], médecin traitant de l'assuré, et [X] [H], néphrologue, que les trajets litigieux ont eu lieu du 03 au 31 juillet 2017 et du 03 au 31 août 2017, à raison de deux séances d'hémodialyse par semaine, soit un total de 16 trajets en deux mois. La distance parcourue entre [Localité 4] et [Localité 1] est supérieure à 50 km, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par les parties.

En conséquence, ces trajets doivent être appréhendés comme des 'transports en série', dont la prise en charge nécessite un accord préalable obligatoire avec la caisse.

La société TAXI MONTE se prévaut de l'existence d'une demande d'accord préalable

en se fondant sur le certificat médical établi le 18 octobre 2018 par le Dr [X] [H], néphrologue, en ces termes : 'Une demande d'accord préalable de transport avait été établie pour ces transports en série'.

Toutefois, à l'instar du premier juge, il sera considéré que ce certificat ne saurait se substituer à la fourniture de la demande d'accord préalable elle-même formée dans les conditions définies à l'article R. 322-10-4 susvisé. Il sera au surplus souligné que ce certificat a été établi postérieurement aux transports litigieux.

Il n'est en outre fait nulle mention d'une urgence susceptible d'exonérer la sociétéTAXI MONTE de cette demande d'accord préalable dans la prescription médicale de transport du 1er juin 2017 du Dr [E], seul document établi à une date antérieure aux transports contestés.

Outre le fait que le Dr [X] [H] lui-même qualifie ces transports de transports en série et que la priorité donnée à cette catégorie de transports - qui se distinguent des autres catégories par leur fréquence et donc leur coût pour la solidarité nationale - - résulte de l'esprit du texte réglementaire, il sera objecté à l'appelante qu'elle ne démontre pas avec suffisamment de précision en quoi ces transports relèveraient uniquement de la catégorie visée au b) de l'article R. 322-10 relatif aux assurés atteints d'une affection de longue durée.

En effet, quand bien même serait considérée comme suffisante la simple croix cochée par le Dr [V] dans la case 'ALD exonérante' dans sa prescription médicale de transport du 1er juin 2017, il n'est pas démontré que l'assuré présentait l'une des déficiences ou incapacités définies par le référentiel de prescription mentionné à l'article R. 322-10-1 du code de la sécurité. Ce référentiel n'est pas versé aux débats et les déficiences ou incapacités dont souffrirait l'assuré transporté ne sont pas évoquées dans les pièces médicales produites.

Il sera donc jugé que la société TAXI MONTE ne s'est pas conformée aux exigences posées par l'article R. 322-10-4 susvisé en ne démontrant pas que la C.P.A.M. avait été saisie d'une demande d'accord préalable en vue de la prise en charge de frais de transports en série.

La société TAXI MONTE fait en outre grief à la caisse d'avoir dirigé son action en recouvrement à son encontre et non à celle de l'assuré transporté.

Toutefois, cet assuré n'a pas été attrait en la cause par l'appelante, et il ressort des pièces fournies par la C.P.A.M. qu'il bénéficiait du tiers-payant, de sorte que les sommes versées par la caisse ont été directement perçues par le transporteur.

Ce moyen ne saurait donc prospérer.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, c'est par une juste appréciation des circonstances de l'espèce que le premier juge a rejeté l'opposition à contrainte, condamné la société TAXI MONTE à payer à la C.P.A.M. la somme de 5 661 euros, outre les frais de signification de la contrainte.

La décision querellée sera donc confirmée sur ces points.

- Sur les dépens

L'alinéa 1er de l'article 696 du code de procédure civile dispose que 'la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie'.

La société TAXI MONTE devra donc supporter la charge des entiers dépens exposés en cause d'appel, et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a condamnée au paiement des dépens de première instance.

- Sur les frais irrépétibles

L'équité commande en l'espèce de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties seront donc déboutées de leurs demandes présentées sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement par décision contradictoire mise à disposition au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions déférées le jugement rendu le 29 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Bastia ;

Y ajoutant,

DEBOUTE la société TAXI MONTE, prise en la personne de son représentant légal, de ses demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE la société TAXI MONTE, prise en la personne de son représentant légal, au paiement des entiers dépens d'appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale tass
Numéro d'arrêt : 20/00105
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;20.00105 ?
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