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07/09/2022 | FRANCE | N°20/00028

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale tass, 07 septembre 2022, 20/00028


ARRET N°

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07 Septembre 2022

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N° RG 20/00028 - N° Portalis DBVE-V-B7E-B6CL

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URSSAF DE [Localité 4]

C/

S.A.R.L. [6]







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Décision déférée à la Cour du :

03 février 2020

Pole social du TJ de BASTIA

19/00223

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COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE SOCIALE





ARRET DU : SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

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APPELANTE :



URSSAF DE [Localité 4]

Contentieux

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Mme [P] [L] en vertu d'un pouvoir général





INTIMEE :



S.A.R.L. [6] Prise en la personne de son représentant léga...

ARRET N°

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07 Septembre 2022

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N° RG 20/00028 - N° Portalis DBVE-V-B7E-B6CL

-----------------------

URSSAF DE [Localité 4]

C/

S.A.R.L. [6]

----------------------

Décision déférée à la Cour du :

03 février 2020

Pole social du TJ de BASTIA

19/00223

------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

APPELANTE :

URSSAF DE [Localité 4]

Contentieux

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Mme [P] [L] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE :

S.A.R.L. [6] Prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié ès qualité audit siège

N° SIRET : [N° SIREN/SIRET 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Pascale MELONI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 février 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur JOUVE, Président de chambre et Madame COLIN, Conseillère et Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur JOUVE, Président de chambre

Madame COLIN, Conseillère

Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président

GREFFIER :

Madame CARDONA, Greffière lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 01 juin 2022 puis a fait l'objet d'une prorogation au 07 septembre 2022

ARRET

-CONTRADICTOIRE

-Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

-Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière, présente lors de la mise à disposition de la décision.

***

FAITS ET PROCEDURE

L'URSSAF de [Localité 4] a procédé au contrôle à [Localité 5] d'un restaurant 'Le Marinuccia' exploité par la SARL [6] dont la gérante est Madame [U] [H], dans le cadre d'un contrat de location-gérance du fonds de commerce, le bailleur étant Monsieur [T] [H], père de la sus nommée.

A la suite, l'organisme social a adressé à la personne morale, une lettre d'observations datée du 24 mai 2017 et réceptionnée le 2 juin 2017 portant sur quatre points et entraînant un rappel de cotisations et de contributions pour un montant total de 52 824 € en principal.

Par courrier daté du 20 juin 2017, la société a uniquement contesté le quatrième chef de redressement concernant l'assujettissement des revenus tirés de la location-gérance en cas de loueur salarié pour un montant de 50 108 € décomposé comme suit :

17 030 € pour l'année 2014,

16 502 € pour l'année 2015,

16 576 € pour l'année 2016.

Le 16 octobre 2017, l'URSSAF a notifié à la SARL [6] une mise en demeure de lui payer la somme de 60'035 € dont 52 823 € de cotisations principales et 7 212 € de majorations de retard.

Cette mise en demeure a été annulée par la commission de recours amiable le 28 mars 2018.

L'URSSAF a alors envoyé deux nouvelles mises en demeure :

- l'une en date du 21 décembre 2018 portant sur les années 2015/2016 pour un montant de 36 911 € dont 33 259 € de cotisations principales et de 3 652 € de majorations de retard,

- l'autre en date du 26 février 2019 portant sur l'année 2014 pour un montant de 23'124 € dont 19 564 € de cotisations principales et de 3 560 € de majorations de retard.

La SARL [6] a contesté la première mise en demeure du 21 décembre 2018 en saisissant la commission de recours amiable. Celle-ci dans une décision du 28 février 2019 notifiée le 22 mars 2019 a rejeté cette contestation et a validé la mise en demeure pour son entier montant.

Par courrier en date du 22 mai 2019, la SARL [6] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Bastia en invoquant la nullité de la mise en demeure, l'irrégularité du contrôle et le défaut de fondement du redressement.

Par jugement contradictoire en date du 3 février 2020, cette juridiction a :

- annulé le seul chef de redressement n°4 intitulé 'assujettissement des revenus tirés de la location-gérance : loueur salarié' émis dans la lettre d'observations datée du 19 mai 2017,

- annulé la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019,

- invité l'URSSAF de [Localité 4] à tirer les conséquences de cette annulation partielle pour rectifier le montant revendiqué au titre du redressement imposé à la SARL [6],

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné l'URSSAF de [Localité 4] aux dépens.

Par déclaration effectuée au greffe de la cour le 10 février 2020, l'URSSAF de [Localité 4] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières écritures déposées le 11 août 2021 et soutenues à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, l'URSSAF sollicite :

- d'être reçue en son appel,

- la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré régulière la mise en demeure du 26 février 2019,

- l'infirmation du jugement pour le surplus,

et statuant à nouveau,

* sur la forme,

- la confirmation de l'absence de prescription de sa créance au titre de l'année 2014, la validation de la mise en demeure du 26 février 2019 et de la contrainte du 13 mai 2019,

- la confirmation de la régularité du contrôle opéré et notifié le 24 mai 2017 ainsi que le redressement subséquent s'élevant à 52'823 €

- la confirmation de la validité de la mise en demeure du 26 février 2019, parfaitement régulière et dépourvue de tout vice de forme,

- le rejet de l'ensemble des demandes incidentes adverses,

* sur le fond,

- l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il énonce que le chef de redressement n°4 est fondé sur les auditions tirées du contrôle inopiné, lesquelles viennent seulement à l'appui des constatations de l'inspecteur,

- la validation du redressement opéré s'élevant à 52 823 €,

- la validation de la lettre d'observation rédigée par l'inspecteur en charge de recouvrement de l'URSSAF en date du 24 mai 2017,

- la confirmation de la décision de la commission de recours amiable en date du 4 juin 2019,

- la validation de la mise en demeure du 26 février 2019 pour son entier montant de 23 124 €

- la validation de la contrainte du 13 mai 2019 pour son entier montant s'élevant 23 124 €,

- la condamnation de la SARL [6] au paiement de la somme de 23 124 € outre le paiement des frais de signification et les entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 12 janvier 2021 et soutenues à l'audience, la SARL [6] sollicite :

- la confirmation de la décision entreprise,

et y ajoutant,

- le constat que l'URSSAF ne rapporte pas la preuve de la gestion de faits imputés à Monsieur [H],

- l'annulation de la décision rendue par la commission de recours amiable,

- le rejet des demandes de l'URSSAF tendant au maintien du redressement titre de la gestion de fait pour la somme de 23 124 €,

- la limitation du redressement aux sommes de 2 511 € (réduction générale des cotisations), de 44 € (CSG sur la part patronale régime de prévoyance complémentaire) et de 161 € (avantages en nature)

à titre incident,

- que soit déclaré recevable son appel incident,

- l'infirmation de la décision entreprise dans ses dispositions lui faisant grief et notamment en ce qu'a été rejetée sa demande tendant à voir déclarer nulles et de nullité absolue les opérations de contrôle effectuées dans le cadre du redressement litigieux,

en tout état de cause,

- la condamnation de l'URSSAF aux entiers dépens,

y ajoutant

- que soit déclaré nul et non avenu l'ensemble des chefs de redressement retenu dans la lettre d'observations, en l'état de l'annulation de la mise en demeure du 16 octobre 2017, en l'absence de régularisation par la mise en état du 26 février 2019 en l'état du manquement au respect du principe du contradictoire,

Par conséquent,

- l'annulation de la mise en demeure du 21 décembre 2018, de la contrainte du 13 mai 2019, des chefs de redressement retenu dans la lettre d'observations du 19 mai 2017 et de la décision de la commission de recours amiable du 4 juin 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel:

Interjeté dans les formes et délai de la loi, l'appel formé par la SARL sera déclaré recevable

Sur la régularité de la mise en demeure :

Dans le cadre de son appel incident la société intimée réitère ses demandes tendant à voir prononcer la nullité de la mise en demeure du 21 décembre 2018 ainsi que des opérations de contrôle .

La SARL [6] soutient ainsi tout d'abord que la procédure est irrégulière car la première mise en demeure datée du 16 octobre 2017 a été annulée et devait consécutivement annuler le redressement dont elle était l'issue.

Par des motifs pertinents que la cour adopte intégralement, le premier juge a écarté ce moyen au motif qu'il ressort des termes de la décision de la commission de recours amiable du 28 mars 2018 qu'il était constaté que la mise en demeure querellée était viciée du fait de l'absence de l'indication d'un délai d'un mois dont bénéficie le cotisant pour régulariser sa situation et a donc prononcé l'annulation de la mise en demeure du 16 octobre 2017 d'un montant de 60 035 € pour vice de forme, prenant le soin de préciser dans son dispositif que cette annulation n'avait aucune conséquence sur le fond du redressement.

Il en était déduit l'URSSAF pouvait dès lors décider de poursuivre la procédure en délivrant de nouveau, de manière régulière, une nouvelle mise en demeure, ce qu'elle a valablement fait le 21 décembre 2018.

La société intimée conteste également la validité de cette deuxième mise en demeure en ce que cette dernière porte sur un montant de 36'911€ distinct de celui initialement réclamé dans la lettre d'observations.

Tout aussi pertinemment, le premier juge a rejeté cette argumentation au motif que la différence existante entre les différents montants s'expliquait par le fait que la première mise en demeure annulée portait sur les années 2014,2015 et 2016 alors que la deuxième mise en demeure ne portait plus que sur les deux dernières années. Il était relevé que cette mise en demeure du 21 décembre 2018 était explicite sur ce point, mentionnant les périodes concernées ainsi que les montants indiqués au titre du redressement portant sur les années 2015 et 2016 qui correspondent aux montants déjà indiqués sur la lettre d'observations, de même qu'aux montants retenus dans la mise en demeure du 21 décembre 2018 pour les mêmes périodes.

Quant aux demandes émanant des deux parties relativement à la validité de la troisième mise en demeure du 26 février 2019, la cour relève qu'aucune contestation n'ayant préalablement été formulée à son encontre devant la commission de recours amiable, elles ne sont pas recevables dans le cadre de la présente instance et qu'il n'y a pas autrement à statuer à leur sujet, sachant que la juridiction en est saisie par ailleurs dans le cadre d'une instance pendante devant elle d'opposition à la contrainte subséquente délivrée le 13 mai 2019.

Concernant le non-respect du principe du contradictoire au cours de la procédure de contrôle, cette question sera évoquée ci-après dans le cadre de l'examen du chef de redressement n°4.

Sur le chef de redressement n°4 :

Au titre du point n° 4 de son redressement intitulé Assujettissement des revenus tirés de la location-gérance : loueur salarié, l'URSSAF a considéré que la gestion du fonds de commerce relative au restaurant 'Le Marinuccia' exploité par la SARL [6], n'est pas assurée par la gérante de droit de la société, Madame [U] [H], mais de fait, par le père de celle-ci, Monsieur [T] [H], propriétaire des murs et actuel bailleur. Ce montage juridique permettant de faire échapper le montant des loyers versés au titre de cette location-gérance à toute cotisation.

L'organisme de recouvrement a retenu que la gestion de fait était établie par le constat que juste après que Monsieur [T] [H] jusque-là exploitant personnel de l'établissement, a pris sa retraite, le fonds de commerce dont il est propriétaire a été donné en location-gérance à la SARL [6] dont sa fille, [U], est la gérante associée, que celle-ci, non salariée de cette structure, n'en perçoit aucun revenu ou dividende, sachant qu'elle est par ailleurs employée à temps plein en qualité de réceptionniste par une autre société d'hôtellerie. Il est fait état de l'audition, lors d'un contrôle inopiné effectué précédemment le 18 juin 2013, de six salariés du restaurant qui ont déclaré avoir été recrutés et/ou avoir travaillé sous les directives de Monsieur [H].

Pour solliciter l'infirmation du jugement déféré qui, pour annuler ce chef de redressement, a relevé que ces auditions ne se sont pas déroulées lors du contrôle qui a mené audit redressement et qu'aucune indication n'est donnée pour vérifier les conditions selon lesquelles elles sont intervenues afin d'en vérifier la régularité et déterminer dans quelle mesure ces informations ont été transmises, l'appelante soutient que son appréciation de la réalité de la gérance de la société est essentiellement fondée sur l'analyse faite des différents éléments objectifs de la situation et que les auditions contestées ne sont venues que la conforter.

À l'instar du premier juge, il y a lieu d'écarter les éléments recueillis lors de ces auditions pour les motifs exposés. Dès lors, il convient de considérer que les autres éléments valablement recueillis et résultant de l'analyse de la situation sont insuffisants pour caractériser indiscutablement la gestion de fait. Au-delà de la présence quotidienne, non contestée, de l'intéressé, âgé de 80 ans mais que peut expliquer son attachement personnel et familial à l'entreprise, il n'est fait état et a fortiori démontré, l'existence concrète de sa part d'actes de gestion ou de direction. L'établissement d'une gestion de fait ne peut non plus se déduire des seuls faits que Monsieur [H] perçoit légitimement les loyers d'un fonds de commerce dont il est propriétaire ou que sa fille [U] renonce à percevoir un revenu ou un dividende au titre de sa participation à la vie d'une société familiale.

Pour autant, l'irrégularité de ces auditions litigieuses effectuées dans le cadre d'un contrôle inopiné, distinct du contrôle à l'origine des diverses mises en demeure litigieuses, ne saurait entraîner la nullité totale de celui-ci et subséquemment, comme il est demandé à titre incident, la nullité des chefs de redressement autres que celui visé au point n° 4. De surcroît, la saisine de la commission de recours amiable limitée au seul chef n° 4, interdit toute contestation ultérieure des autres chefs.

Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Aucune considération d'équité n'impose qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant l'URSSAF de [Localité 4] supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe de la cour,

REÇOIT la SARL [6] en son appel,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

DIT n'y avoir lieu, en cause d'appel à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE l'URSSAF de [Localité 4] aux entiers dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale tass
Numéro d'arrêt : 20/00028
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;20.00028 ?
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