La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2022 | FRANCE | N°18/00107

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale tass, 06 juillet 2022, 18/00107


ARRET N°

-----------------------

06 Juillet 2022

-----------------------

N° RG 18/00107 - N° Portalis DBVE-V-B7C-BYT7

-----------------------

Etablissement [12]

C/

[O] [PX] [J] [S] [B], [M] [S] [BR] [U] épouse [RU], [K] [M] [IX] [T] [U] épouse [B], [AX] [W] VEUVE [U] veuve [U], [F], [IL], [O], [G] [RU], [C] [RU], CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE

----------------------

Décision déférée à la Cour du :

26 mars 2018

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BASTIA

21600218



------------------























copie exécutoire



le :



à :

COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE SOCIALE





ARRET DU : SI...

ARRET N°

-----------------------

06 Juillet 2022

-----------------------

N° RG 18/00107 - N° Portalis DBVE-V-B7C-BYT7

-----------------------

Etablissement [12]

C/

[O] [PX] [J] [S] [B], [M] [S] [BR] [U] épouse [RU], [K] [M] [IX] [T] [U] épouse [B], [AX] [W] VEUVE [U] veuve [U], [F], [IL], [O], [G] [RU], [C] [RU], CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE

----------------------

Décision déférée à la Cour du :

26 mars 2018

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BASTIA

21600218

------------------

copie exécutoire

le :

à :

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

APPELANTE :

Etablissement [12] nouvelle dénomination sociale de la [13] ([13])

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe JOBIN de la SCP RENÉ JOBIN PHILIPPE JOBIN, avocat au barreau de BASTIA

INTIMES :

Monsieur [O] [PX] [J] [S] [B]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Madame [M] [S] [BR] [U] épouse [RU] prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [Z] [R] [T] [UK]

[Adresse 14]

[Localité 2]

Madame [K] [M] [IX] [T] [U] épouse [B]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Madame [AX] [W] VEUVE [U] veuve [U]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Monsieur [F], [IL], [O], [G] [RU]

[Adresse 10]

[Adresse 14]

[Localité 2]

Monsieur [C] [RU]

[Adresse 10]

[Localité 2]

Tous représentés par Me Cynthia COSTA-SIGRIST, avocat au barreau de BASTIA

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE

Service Contentieux

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Valérie PERINO SCARCELLA, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 novembre 2021 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame COLIN, conseillère chargée du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur JOUVE, Président de chambre,

Madame COLIN, Conseillère

Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président

GREFFIER :

Madame CARDONA, Greffière lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 13 mars 2022 et a fait l'objet de prorogations au 22 juin et 06 juillet 2022

ARRET

-CONTRADICTOIRE

-Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

-Signé par Madame COLIN, conseillère, pour Monsieur JOUVE, Président de chambre empêché et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.

***

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 04 avril 2011, M. [O] [U], employé en qualité de mécanicien de 1971 à 1990 au sein de l'établissement public à caractère industriel et commercial [12] (venant aux droits des sociétés [7] puis [11]), est décédé des suites d'un carcinome broncho-pulmonaire.

Le 19 mai 2011, Mme [AX] [W] veuve [U] a sollicité de la caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) de la Haute-Corse la prise en charge de la maladie de son défunt conjoint au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Après saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (C.R.R.M.P.) de [Localité 8] et avis défavorable de ce dernier, la C.P.A.M. a notifié à Mme [W] une décision de refus de prise en charge.

Mme [W] a porté sa contestation devant la commission de recours amiable (C.R.A.) de la caisse, qui a implicitement rejeté sa requête.

Le 22 avril 2013, Mme [W] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (T.A.S.S.) de la Haute-Corse qui, par jugement du 31 mars 2014, a saisi pour avis le C.R.R.M.P. de [Localité 9].

Par avis motivé du 23 mars 2015, ce comité a émis un avis favorable à la reconnaissance du caractère professionnel de l'affection subie par M. [U].

Ultérieurement, Mme [W] a également saisi le T.A.S.S. d'une demande de reconnaissance de l'imputabilité du décès de M. [U] à cette maladie.

Par jugement du 18 mai 2015, le T.AS.S. de la Haute-Corse a homologué l'avis du C.R.R.M.P. de [Localité 9] en ce qu'il reconnaît le caractère professionnel de la maladie de M. [U] déclarée le 19 mai 2011, a ordonné en tant que de besoin à la C.P.A.M. de prendre en charge cette maladie au titre des risques professionnels, mais a rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité du décès à cette maladie au motif que la C.P.A.M. n'en avait pas été saisie au préalable.

Le 02 juillet 2015, Mme [W] a donc saisi la C.P.A.M. de cette dernière demande.

Le 10 septembre 2015, la caisse a décidé de prendre en charge le décès au titre de la législation professionnelle.

Le 17 septembre 2015, Mme [W] s'est vu notifier l'attribution d'une rente avec effet rétroactif au 19 mai 2011.

Le 26 novembre 2015, les ayants droit de M. [U] - Mme [AX] [W], épouse du défunt, Mmes [K] [U] épouse [B] et [M] [U] épouse [RU], filles du défunt, MM. [O] [B], [F] [RU], [C] [RU] et [E] [RU] (tous deux représentés par leur mère [M] [U]), petits-enfants du défunt - ont saisi la C.P.A.M. de la Haute-Corse d'une demande de mise en oeuvre de la procédure de conciliation en vue de faire reconnaître la faute inexcusable de la [12].

Le 12 février 2016, la caisse a établi un procès-verbal de carence, seul le conseil des ayants droit de M. [U] ayant déféré à la convocation prévue pour la tentative de conciliation.

Le 15 avril 2016, les ayants droit de M. [U] ont saisi le T.AS.S. de la Haute-Corse afin de voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices, outre la majoration de la rente allouée à Mme [W].

Par jugement contradictoire du 26 mars 2018, la juridiction a :

- déclaré recevable l'action des ayants droit de M. [U] ;

- dit que la maladie dont a été victime M. [U], des suites de laquelle il est décédé le 04 avril 2011, est due à la faute inexcusable de son employeur, la [12] ;

- prononcé la mise hors de cause de la S.A.E.M.L. [11] ;

- fixé au maximum la majoration de la rente revenant à Mme [W] en sa qualité de conjointe survivante ;

- alloué à Mmes [AX] [W] veuve [U], [K] [U] épouse [B] et [M] [U] épouse [RU], en leur qualité d'ayants droit exerçant l'action successorale et en réparation des préjudices subis par la victime avant son décès :

100 000 euros au titre du préjudice moral,

40 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- alloué aux ayants droit de M. [U], au titre de la réparation de leur préjudice moral, les sommes suivantes :

60 000 euros à Mme [W] veuve [U],

40 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU], sa fille,

40 000 euros à Mme [K] [U] épouse [B], sa fille,

30 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU] en sa qualité de représentante légale de son fils mineur [C] [RU],

30 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU] en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [E] [RU],

30 000 euros à M. [O] [B], son petit-fils,

30 000 euros à M. [F] [RU], son petit-fils ;

- dit que la C.P.A.M. ferait l'avance de ces sommes, à charge pour elle d'en obtenir le remboursement par l'employeur [12], le jugement valant titre à l'encontre de celui-ci ;

- ordonné l'exécution provisoire des condamnations prononcées à concurrence d'1/3 ;

- débouté les parties pour le surplus et autres demandes différentes ou contraires ;

- condamné la [12] à payer aux ayants droit de M. [U] la somme totale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit qu'une copie du jugement serait adressée au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (F.I.V.A.).

Par courrier électronique du 20 avril 2018, l'établissement [12] a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

- prononcé la mise hors de cause de la S.A.E.M.L. [11] ;

- dit que la C.P.A.M. ferait l'avance de ces sommes, à charge pour elle d'en obtenir le remboursement par l'employeur [12], le jugement valant titre à l'encontre de celui-ci ;

- ordonné l'exécution provisoire des condamnations prononcées à concurrence d'1/3 ;

- débouté les parties pour le surplus et autres demandes différentes ou contraires ;

- dit qu'une copie du jugement serait adressée au F.I.V.A.

Lors de l'audience des plaidoiries du 09 novembre 2021, les parties, non-comparantes, étaient représentées.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de ses conclusions, réitérées et soutenues oralement à l'audience, l'établissement [12], appelant, demande à la cour de :

'Infirmer la décision en toutes ses dispositions,

Vu l'article R 441-14 du Code de la Sécurité sociale.

Vu le défaut d'information de l'employeur,

Dire que le caractère professionnel de la maladie de Monsieur [U], n'est pas opposable à la [12].

Dire que la maladie dont a été victime Monsieur [U] n'est pas due à la faute inexcusable de son employeur, la [12].

Dire n'y avoir lieu à majoration de rente,

Débouter en conséquence les consorts [U] de toutes leurs demandes fins et conclusions ;

En tout état de cause et pour le cas où la Cour retiendrait l'imputabilité de la cause de la maladie à l'encontre de la [12], réduire à de plus juste proportion le montant des sommes allouées aux Consorts [U] pour leur préjudice moral de la façon suivante :

Madame veuve [U] la somme de : 20.000 euros

Madame [B] sa fille la somme de : 20.000 euros

Madame [RU] sa fille la somme de : 20.000 euros

Madame [RU], es-qualité d'administratrice de son enfant mineur [T], la somme de : 10.000 euros

Monsieur [F] [RU] la somme de : 10.000 euros

Monsieur [PX] [B] la somme de : 10.000 euros

Monsieur [C] [RU] la somme de : 10.000 euros

Réduire également les sommes allouées au titre de l'action successorale de la façon suivante :

Préjudice moral 30.000 euros

Souffrance endurées 25.000 euros

Subsidiairement

Ordonner une expertise médicale sur pièces

Les condamner à 1500 au titre de l'article 700 du CPC'.

Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait valoir, au visa de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au présent litige, qu'il n'a pas été informé de la procédure introduite par Mme [W] tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, et que le principe du contradictoire n'ayant pas été respecté, la décision de reconnaissance doit lui être déclarée inopposable.

L'appelant soutient également qu'aucune automaticité ne saurait exister entre la prise en charge de la maladie par la C.P.A.M. et l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, dont les élements constitutifs ne sont pas réunis en l'espèce.

Il indique qu'aucune des pièces médicales versées au dossier ne démontre avec certitude le lien de causalité entre la maladie et l'activité professionnelle exercée par M. [U] au sein de la [12], et qu'il appartient aux intimés d'apporter la preuve que M. [U] aurait contracté sa maladie entre 1983 et 1991, seule période contractuelle susceptible d'engager la responsabilité de la [12].

L'appelant précise que le défunt présentait de lourds antécédents tabagiques et que le cancer du poumon, dont il a souffert en premier lieu et qui a évolué en cancer de la plèvre, n'est nullement caractéristique d'une exposition prolongée à l'amiante.

L'établissement [12] soulève en outre que M. [U] a pu être victime d'une contamination environnementale, la région bastiaise étant riche en minéraux amiantifères.

Il souligne au surplus que n'est pas démontré qu'il avait conscience d'exposer ses salariés à l'inhalation de poussières d'amiante, les courriers électroniques échangés entre les membres de sa direction attestant au contraire qu'aucun de ces cadres n'avait à cette époque connaissance d'un tel risque. Il affirme qu'aucun autre salarié n'a déposé de recours similaire alors que les effectifs présents sur les sites de travail où exerçait M. [U] étaient nombreux.

Au terme de ses écritures, réitérées et soutenues oralement à l'audience, les consorts [U], intimés, demandent à la cour de :

'Confirmer le jugement rendu par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Corse en date le 26 mars 2018 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'il a :

-Déclaré recevable l'action de Madame [AX] [W] veuve [U], Madame [K] [M] [IX] [P] épouse [B], Madame [M] [S] [BR] [U] épouse [RU] prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs [C] né le 29 janvier 2000 et [E] [R] [T] née le 24 août 2004, Monsieur [O] [PX] [J] [S] [B] et Monsieur [F] [HD] [G] [RU] ;

-Dit que la maladie dont a été victime Monsieur [O] [U] et des

suites de laquelle il est décédé le 4 avril 2011, est due à la faute inexcusable de son

employeur, la [12] ;

-Prononcé la mise hors de cause de la SAEML [11] ;

-Fixé au maximum la majoration de la rente revenant à Madame [AX] [W] veuve [U] en sa qualité de conjoint survivant de feu [O] [U] ;

-Alloué à Madame [AX] [W] veuve [U], Madame [K] [M] [IX] [P] épouse [B] et à Madame [M] [S] [BR] [U] épouse [RU] en leurs qualités d'ayants droit de Monsieur [O] [U] exerçant l'action successorale

et en réparation des préjudices subis par la victime avant son décès :

- 100.000 euros au titre du préjudice moral

- 40.000 euros au titre des souffrances endurées ;

-Alloué aux ayants droit de Monsieur [O] [U] au titre de la réparation de leur préjudice moral, les sommes suivantes :

- 60.000 euros à Madame [AX] [W] veuve [U],

- 40.000 euros à Madame [K] [M] [IX] [P]

épouse [B], sa fille,

- 40.000 euros à Madame [M] [S] [BR] [U]

épouse [RU], sa fille,

- 30.000 euros à Madame [M] [S] [BR] [U] épouse [RU] es-qualité de représentante légale de son fils mineur [C] [RU] né le 29 janvier 2000,

- 30.000 euros à Madame [M] [S] [BR] [U] épouse [RU] es-qualité de représentante légale de sa fille mineure [E] [R] [T] née le 24 août 2004,

- 30.000 euros à Monsieur [O] [PX] [J] [S] [B], son petit-fils,

- 30.000 euros à Monsieur [F] [IL] [O] [G] [RU], son petit-fils,

-Dit que la CPAM fera l'avance de ces sommes à charge pour elle d'en obtenir le remboursement par l'employeur [12], le présent jugement valant titre à l'encontre de celui-ci ;

-Débouté les parties pour le surplus et autres demandes différentes ou contraires ;

-Condamné la [12] à payer aux demandeurs la somme totale de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Y ajoutant,

Rejeter toutes demandes, fins et conclusions présentées par la [12] en cause d'appel

Condamner la [12] à verser à chacun des ayants-droit la somme de 1.200,00 € en application des dispositions de l'article 700 du CPC en cause d'appel

Condamner la [12] aux entiers dépens d'appel'.

Les intimés rétorquent que l'exposition de M. [U] à l'amiante dans le cadre de son activité professionnelle ne peut plus être contestée puisque le T.A.S.S. de la Haute-Corse a reconnu, par jugement définitif, l'origine professionnelle de la maladie, et que la C.P.A.M. ayant initialement rendu une décision favorable à l'employeur, elle n'avait aucunement l'obligation de lui notifier celle-ci.

Ils ajoutent que les éléments médicaux versés aux débats attestent du caractère professionnel de la maladie et de l'imputabilité du décès à cette pathologie et que le groupe CNHSCT [13] 2010 fait état de l'utilisation d'amiante comme isolant thermique de matériels roulants anciens.

Les intimés font également observer que le défunt n'a suivi aucune cure de sevrage tabagique, n'a jamais travaillé dans un débit de boissons et n'a donc pas été soumis durablement à un tabagisme passif.

Ils soutiennent en outre que la preuve d'une contamination environnementale n'est pas rapportée par l'appelant, qui a en revanche manipulé des matériels contenant de l'amiante dans le cadre de l'entretien et de la manutention des wagons, des locomotives et des rails.

Les consorts [U] soulignent également l'inutilité du recours à une expertise médicale sur pièces au regard de l'avis déjà exprimé par le C.R.R.M.P. de [Localité 9], rendu au regard notamment d'un rapport circonstancié établi par l'employeur.

Sur les éléments constitutifs de la faute inexcusable, les intimés affirment qu'aucune mesure de protection ou de sécurité n'était observée par l'employeur à l'époque de l'exposition de M. [U] aux poussières d'amiante, et que la [12] aurait dû avoir conscience du danger qu'encourait son salarié au regard du caractère notoire - de longue date - de la nocivité de l'amiante et de l'importance de sa taille.

Sur l'indemnisation des préjudices, les intimés font valoir qu'ils ont été particulièrement présents auprès de M. [U] durant sa maladie et l'ont accompagné jusqu'à son décès, que les préjudices personnellement subis par la victime avant son décès sont entrés dans le patrimoine de ses ayants droit qui sont donc recevables à exercer la présente action successorale, et que l'appelant n'invoque aucun élément sérieux à l'appui de sa demande subsidiaire de minoration des sommes allouées en première instance.

Au terme de ses conclusions, réitérées et soutenues oralement à l'audience, la C.P.A.M. de la Haute-Corse, intimée, demande à la cour de :

' Décerner acte à la concluante de ce qu'elle a fait une exacte application des textes en vigueur

Constater que la Caisse s'en rapporte à Justice sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et la fixation du montant fixé en réparation des préjudices.

Débouter la Société [12] de sa contestation du caractère professionnel de l'affection présentée par Monsieur [U] le 19 mai 2011. '

L'intimée fait valoir que selon la jurisprudence, l'employeur, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, n'est pas recevable à à solliciter l'inooposabilité à son égard de la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation sur les risques professionnels.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

A titre liminaire, la recevabilité de l'appel interjeté par l'établissement [12] n'étant pas contestée, il ne sera pas statué sur celle-ci.

Quant à la recevabilité de l'action introduite par les consorts [U] en leur nom personnel et au titre de la succession, bien que frappée d'appel, elle n'est pas discutée par l'appelante. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

- Sur la demande d'inopposabilité à l'employeur de la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle

Il est acquis que l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au présent litige, régit exclusivement la procédure administrative applicable à la prise en charge, par un organisme social, d'un accident du travail, d'une maladie professionnelle ou d'une rechute au titre de la législation professionnelle.

Il en résulte que si un employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle (comme cela sera développé infra), il n'est en revanche pas recevable à contester, à la faveur de cette instance, l'opposabilité de la décision de prise en charge de ces accident, maladie ou rechute par la caisse primaire au titre de la législation sur les risques professionnels.

La présente cour est uniquement saisie d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Il convient dès lors de déclarer irrecevable la demande de l'employeur tendant à lui voir déclarer inopposable 'le caractère professionnel de la maladie' de M. [U] (aucune décision précise de la caisse n'étant d'ailleurs visée par l'appelant au dispositif de ses conclusions soutenues oralement à l'audience).

- Sur la faute inexcusable de l'employeur

L'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale dispose que 'Lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.'

Il résulte des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail que l'employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs en veillant à éviter les risques, à évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités et à adapter le travail des salariés, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail, ainsi que le choix des équipements de travail, des méthodes de travail et de production.

L'employeur est ainsi tenu, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par les salariés du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise.

Le manquement à cette obligation constitue une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 susvisé lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, ces deux critères étant cumulatifs.

Toutefois, l'établissement du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est un préalable nécessaire à la reconnaissance d'une faute inexcusable de l'employeur.

Sur le caractère professionnel de la maladie

La reconnaissance de la faute inexcusable d'un employeur suppose pré-établie l'existence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

L'action en reconnaissance de la faute inexcusable se caractérise par son indépendance à l'égard de la procédure administrative - puis éventuellement judiciaire - de prise en charge d'un accident ou d'une maladie au titre de la législation professionnelle, liant un organisme social à son assuré. Il s'ensuit que cette procédure est sans incidence sur les conditions et les effets de la reconnaissance de la faute inexcusable.

En vertu de cette indépendance des procédures, l'employeur peut ainsi toujours défendre à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable en contestant le caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute, même si la prise en charge de ces derniers est définitive à son égard.

Ainsi, contrairement à ce soutiennent les intimés, la [12] est autorisée à contester l'origine professionnelle de la maladie, et partant du décès, de M. [U].

*

Aux termes des 2e, 3e, 4e et 5e alinéas de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au présent litige, « est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. 

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1 ».

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [O] [U] est décédé le 04 avril 2011 des suites d'un carcinome broncho-pulmonaire, et qu'il avait exercé en qualité de mécanicien entre 1971 et 1990 au sein des ateliers bastiais de la société [7] devenue ensuite [11].

Selon le Dr [H] [TN], pneumologue, cette pathologie est désignée au tableau n°30 bis des maladies professionnelles relatif au cancer broncho-pulmonaire primitif.

Si la désignation de la maladie, le délai de prise en charge (40 ans) et la durée d'exposition (10 ans) ne sont pas débattus, la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie a été contestée, de sorte que la C.P.A.M. puis le T.A.S.S. ont sollicité l'avis de C.R.R.M.P.

Il ressort de l'avis motivé du 23 mars 2015 rendu par le C.R.R.M.P. de [Localité 9] (seul versé au dossier par les parties) que M. [U] a exercé la profession de mécanicien des chemins de fer durant 19 ans et que 'pour cette activité, le groupe CNHSCT [13] 2010 a mis en évidence que l'amiante a été utilisée comme isolant thermique de matériels roulants anciens (l'interdiction remontant à 1997).' Le comité en déduit qu'existe un lien de causalité direct entre la maladie dont a souffert M. [U] et son travail habituel. Les trois médecins composant ce comité expliquent par ailleurs avoir fondé leur avis sur divers éléments, dont le rapport circonstancié de l'employeur, les enquêtes réalisées par la C.P.A.M. et l'audition de l'ingénieur conseil chef du service de prévention de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (C.A.R.S.A.T.).

Cet avis médical clair et circonstancié est étayé par de multiples pièces versées par les ayants droit de M. [U] parmi lesquelles :

- l'attestation établie le 27 février 2013 par M. [L] [Y], qui affirme avoir travaillé avec la victime, avoir manipulé des 'moteurs d'autorails en contact permanent avec des matériaux amiantés' (joints et tresses d'étanchéité) ainsi que du matériel lui-même amianté tel que des garnitures de freins jusqu'à la fin des années 1990, ce sans aucune protection fournie par l'employeur ;

- le certificat médical établi le 05 mars 2013 par le Dr [H] [TN], pneumologie, qui indique que 'dans le cas où il serait démontré la présence de ces poussières [d'amiante] sur le lieu de travail, l'imputabilité serait attribuée d'office. En effet, le cancer bronchique avec ou sans traces d'amiante est une pathologie secondaire à l'inhalation d'amiante beaucoup plus fréquente que le mésothéliome (cancer de la plèvre)' ;

- un article de presse quotidienne nationale (Libération) du 19 février 1997, soulignant que 'la [13] a par ailleurs indiqué que fin mars [1997] toutes les semelles de freins contenant de l'amiante utilisées sur les trains auront été remplacées', article qui, mis en parallèle avec le courrier électronique du 24 octobre 2011 de M. [I] [N], directeur commercial et président du C.H.S.C.T. des [11], tend à démontrer l'exposition habituelle de la victime à l'amiante puisqu'il affirme que M. [U] avait notamment pour tâche de changer les semelles de freins ;

- un article issu du magazine hebdomadaire syndical 'Le Courrier du Cheminot', daté de novembre 2010, déplorant que 'tous les engins moteurs construits avant 1996 contiennent ou ont contenu de l'amiante' ;

- le certificat médical rédigé le 26 février 2013 par la Dre [D] [A], oncologue, qui précise que 'ce patient ayant travaillé aux [11] il a été très probablement en contact avec l'amiante (facteur de risque majeur)'.

Pour contester le lien de causalité entre la maladie et le décès de M. [U] et son activité professionnelle, l'appelant produit le courrier électronique du 24 octobre 2011 ci-dessus évoqué, aux termes duquel il est indiqué que selon un ancien salarié de l'entreprise - M. [BR] [TZ] - les différentes tâches mécaniques confiées à M. [U] ne l'auraient pas mis en contact avec des matériaux amiantés.

Or, il ne peut qu'être constaté que ni M. [TZ] ni aucun autre ancien salarié de l'entreprise n'a établi d'attestation en ce sens. La valeur probante de ce témoignage indirect ne peut donc qu'être jugée relative.

L'appelant affirme également que la pathologie subie par M. [U] peut être causée soit par une consommation excessive de tabac, soit par la présence d'amiante dans l'environnement personnel du défunt.

Or, outre le caractère hypothétique de ces deux suggestions, il ressort des attestations établies par trois médecins et produites par les intimés que, contrairement à ce qu'affirme l'employeur, M. [U] n'a jamais fait l'objet d'une cure de sevrage tabagique. Quant à l'intensité de sa consommation antérieure à son arrêt du tabac, elle n'est pas davantage démontrée.

S'agissant de la présence d'amiante à l'état naturel dans certaines régions de la Haute-Corse, elle n'est pas contestable. Cependant, l'appelant n'apporte pas la preuve que M. [U] aurait été exposé habituellement, dans le cadre de sa vie personnelle, à l'inhalation de poussières libérées par des travaux dans des roches amiantifères effectués à proximité de son domicile.

Enfin, quant à la demande d'expertise médicale sur dossier subsidiairement formée par l'appelant, elle paraît superflue au regard de l'avis motivé émis par le C.R.R.M.P. de [Localité 9]. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la [12] de sa demande d'expertise sur pièces.

Ainsi, il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'affection ayant causé le décès de M. [U] présente un lien direct avec le travail habituel accompli par ce dernier durant 19 ans au sein de l'établissement [12].

Sur la conscience du danger

La conscience du danger exigée de l'employeur est analysée in abstracto et ne vise pas une connaissance effective et précise de celui-ci. Elle s'apprécie au moment ou pendant la période de l'exposition au risque.

En l'espèce, il est constant que la majorité des affections consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante ont été inscrites dès le 03 août 1945 dans un tableau des maladies professionnelles, que l'asbestose a été inscrite dès le 31 août 1950 au tableau n°30 des maladies professionnelles, que les mesures de sécurité à prendre dans les établissements où le personnel était exposé à un risque d'inhalation ont été définies par décret du 17 août 1977, et que le cancer broncho-pulmonaire est ajouté à la liste des maladies dues à l'inhalation de poussière d'amiante dès 1985.

Compte tenu de l'importance de la taille de l'entreprise employeure, de la structure de son organisation interne et des moyens dont elle disposait pour appréhender efficacement les dispositifs mis en oeuvre par le législateur pour réduire le risque d'exposition à l'amiante présente dans des matériaux dont elle ne pouvait que connaître la composition, il sera considéré que la [12] aurait dû avoir conscience du danger qu'elle faisait courir à son salarié en le mettant habituellement au contact d'une telle substance nocive.

Sur les mesures de sécurité

L'absence de mesures de protection résulte tant de l'attestation de M. [L] [Y] ('Jamais on nous a dit de prendre des précautions nécessaires et toute notre activité nous avons travaillé sans aucune protection') que du courrier électronique émanant de M. [N], qui conclut en ces termes : 'Je vous fais parvenir en pièces jointes le premier document unique des CFC qui date de mars 2009. Ce document n'existait pas à l'époque où M. [U] faisait partie de l'effectif des CFC'.

L'appelant ne soutient d'ailleurs pas avoir soumis M. [U] au respect d'une quelconque mesure de protection en ce domaine.

Aussi, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la maladie ayant causé le décès de M. [U] était due à la faute inexcusable de son employeur, l'établissement [12].

Le jugement querellé sera donc confirmé sur ce point.

- Sur l'indemnisation des préjudices

L'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale précise qu''Indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit en vertu de l'article précédent, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

De même, en cas d'accident suivi de mort, les ayants droit de la victime mentionnés aux articles L. 434-7 et suivants ainsi que les ascendants et descendants qui n'ont pas droit à une rente en vertu desdits articles, peuvent demander à l'employeur réparation du préjudice moral devant la juridiction précitée.

La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur.'

L'indemnisation du préjudice moral recouvre notamment les souffrances psychologiques, l'anxiété d'une évolution péjorative de la pathologie liée à l'exposition à l'amiante ainsi que l'angoisse de mort.

Sur la rente majorée

Le bénéfice de la rente d'ayant droit majorée au taux maximum n'est pas contesté par l'appelant. Le jugement querellé sera donc confirmé en ce qu'il a fixé au maximum la majoration de la rente revenant à Mme [W] veuve [U] en sa qualité de conjointe survivante.

Sur les préjudices dont l'indemnisation est sollicitée au titre de l'action successorale

Il n'est pas contesté par l'appelant que les préjudices personnellement subis par la victime avant son décès sont entrés dans le patrimoine de ses ayants droit, qui sont donc recevables à exercer la présente action successorale.

Il ressort des pièces médicales produites par les intimés que le carcinome broncho-pulmonaire subi par M. [U] a été diagnostiqué en juillet 2008. Son état s'est rapidement dégradé et M. [U] est décédé le 04 avril 2011 à l'âge de 76 ans, soit moins de trois ans après le diagnostic et à l'issue notamment de sept cures de chimiothérapie, d'une thoracotomie et d'une ponction pleurale. Le Dr [X] [V], pneumologue, fait état d'une forte dégradation de l'état de M. [U] un mois et demi avant son décès, caractérisée par une importante détresse respiratoire accompagnée d'un état confusionnel et parfois sub-comateux.

Il s'en déduit que M. [U] n'a pu qu'éprouver d'importantes douleurs physiques accompagnées de souffrances psychologiques et d'une réelle angoisse de mort.

Les sommes allouées en première instance paraissent toutefois excessives au regard de la jurisprudence habituelle en cette matière.

La cour appréciera ainsi le préjudice moral subi par M. [O] [U] à hauteur de 40 000 euros, et les souffrances endurées à la somme de 25 000 euros.

Sur les préjudices personnels des consorts [U]

L'appelant sollicite une réduction des sommes allouées en première instance à hauteur de 20 000 euros pour Mme [W] et ses filles, et de 10 000 euros pour chacun des petits-enfants. La cour ne saurait dès lors allouer des sommes inférieures.

Les sommes attribuées en première instance paraissent effectivement excessives au regard de la jurisprudence habituelle en cette matière, et seront minorées dans les proportions suivantes :

- Mme [W] veuve [U] :

Au regard de l'importance de la durée de vie commune (52 ans) et de son accompagnement dans la maladie et dans les mois précédant le décès, la cour fera une appréciation du préjudice moral de Mme [W] à hauteur de 25 000 euros.

- Mmes [K] [U] épouse [B] et [M] [U] épouse [RU], filles du défunt :

Il ressort des pièces versées aux débats que les filles de M. [U], vivant à proximité de leur père, ont été présentes à ses côtés durant sa maladie.

La cour fera une appréciation de leur préjudice moral à hauteur de 20 000 euros alloués à chacune d'elles.

- MM. et Mme [C] [RU], [F] [RU], [E] [RU] et [O] [B], petits-enfants du défunt :

MM. et Mme [C] [RU], [F] [RU], [E] [RU] et [O] [B] étaient respectivement âgés de 11 ans, 21 ans, 7 ans et 22 ans au moment du décès de leur grand-père.

La cour fera une appréciation de leur préjudice moral à hauteur de 10 000 euros alloués à chacun d'eux, Mme [E] [RU], mineure, étant représentée par sa mère [M] [U] épouse [RU].

Le jugement querellé sera donc infirmé s'agissant des sommes qu'il a allouées en réparation de ces divers préjudices.

- Sur les dépens

L'alinéa 1er de l'article 696 du code de procédure civile dispose que 'la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie'.

L'établissement [12] succombant dans ses principales prétentions, il devra supporter la charge des entiers dépens exposés en cause d'appel postérieurement au 31 décembre 2018, date à laquelle a pris fin le principe de gratuité de la procédure en matière de droit de la sécurité sociale.

- Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser aux intimés la charge des frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'exposer en cause d'appel. Il sera toutefois observé que les intimés, qui sollicitent la somme de 1 200 euros au profit de chacun d'entre eux, ont constitué le même avocat qui a assuré leur défense par un seul et même jeu d'écritures.

L'établissement [12] sera donc condamné au versement de la somme de globale de 2 000 euros à l'ensemble des consorts [U] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera en outre débouté de sa propre demande formée sur ce fondement, et le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

DECLARE irrecevable la demande de la [12] tendant à lui voir déclarer inopposable 'le caractère professionnel de la maladie' de M. [O] [U] ;

CONFIRME le jugement rendu le 26 mars 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Corse en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a :

- alloué à Mmes [AX] [W] veuve [U], [K] [U] épouse [B] et [M] [U] épouse [RU], en leur qualité d'ayants droit exerçant l'action successorale et en réparation des préjudices subis par la victime avant son décès :

100 000 euros au titre du préjudice moral,

40 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- alloué aux ayants droit de M. [U], au titre de la réparation de leur préjudice moral, les sommes suivantes :

60 000 euros à Mme [W] veuve [U],

40 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU], sa fille,

40 000 euros à Mme [K] [U] épouse [B], sa fille,

30 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU] en sa qualité de représentante légale de son fils mineur [C] [RU],

30 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU] en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [E] [RU],

30 000 euros à M. [O] [B], son petit-fils,

30 000 euros à M. [F] [RU], son petit-fils ;

Statuant de nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la [12] à verser :

- à Mmes [AX] [W] veuve [U], [K] [U] épouse [B] et [M] [U] épouse [RU], en leur qualité d'ayants droit exerçant l'action successorale et en réparation des préjudices subis par la victime avant son décès, les sommes suivantes :

40 000 euros au titre du préjudice moral,

25 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- à l'ensemble des ayants droit de M. [O] [U], au titre de la réparation de leur propre préjudice moral, les sommes suivantes :

25 000 euros à Mme [AX] [W] veuve [U],

20 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU],

20 000 euros à Mme [K] [U] épouse [B],

10 000 euros à M. [C] [RU],

10 000 euros à M. [F] [RU],

10 000 euros à Mme [M] [U] épouse [RU] en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [E] [RU],

10 000 euros à M. [O] [B] ;

CONDAMNE la [12] au paiement des dépens exposés en cause d'appel postérieurement au 31 décembre 2018 ;

CONDAMNE la [12] à verser à Mme [AX] [W] veuve [U], Mmes [K] [U] épouse [B] et [M] [U] épouse [RU] (en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [E] [RU]), MM. [O] [B], [F] [RU] et [C] [RU], parties communes d'intérêts, la somme globale de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LA GREFFIÈRE P/ LE PRÉSIDENT EMPECHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale tass
Numéro d'arrêt : 18/00107
Date de la décision : 06/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-06;18.00107 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award