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01/06/2022 | FRANCE | N°19/00298

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale tass, 01 juin 2022, 19/00298


ARRET N°

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01 Juin 2022

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N° RG 19/00298 - N° Portalis DBVE-V-B7D-B5JB

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S.E.L.A.R.L. [3]

C/

URSSAF DE LA CORSE







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Décision déférée à la Cour du :

09 octobre 2019

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AJACCIO

17/00307

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COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE SOCIALE





ARRET DU : PREMIER JUIN DEUX MILLE VING

T DEUX



APPELANTE :



SELARL [3] Prise en la personne de son gérant, domicilié audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Stéphanie LAURENT, avocat au barreau d'AJACCIO et par Me Juliette ...

ARRET N°

-----------------------

01 Juin 2022

-----------------------

N° RG 19/00298 - N° Portalis DBVE-V-B7D-B5JB

-----------------------

S.E.L.A.R.L. [3]

C/

URSSAF DE LA CORSE

----------------------

Décision déférée à la Cour du :

09 octobre 2019

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AJACCIO

17/00307

------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

APPELANTE :

SELARL [3] Prise en la personne de son gérant, domicilié audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Stéphanie LAURENT, avocat au barreau d'AJACCIO et par Me Juliette MOSSER, avocat au barreau de NICE

INTIMEE :

URSSAF DE LA CORSE

Contentieux

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Mme [G] [F] en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 février 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur JOUVE, Président de chambre et Madame COLIN, Conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur JOUVE, Président de chambre

Madame COLIN, Conseillère

Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président

GREFFIER :

Madame CARDONA, Greffière lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 01 juin 2022

ARRET

-CONTRADICTOIRE

-Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

-Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière, présente lors de la mise à disposition de la décision.

FAITS ET PROCEDURE

L'URSSAF de la Corse a notifié le 29 mai 2017 à la SELARL [3] une lettre d'observation à l'issue d'un contrôle portant sur la période du 1er avril 2014 au 31 décembre 2016 qui a donné lieu à un redressement d'un montant total de 20'008 €.

Par courrier du 28 juin 2017, la société concernée a indiqué à l'organisme social qu'elle acceptait le redressement mais seulement à hauteur d'un montant de 9 883 €.

Par courrier du 21 juillet 2017, l'URSSAF a maintenu le montant initial du redressement et a notifié à la cotisante le 1er août 2017,notification reçue le 3 août, une mise en demeure de lui payer la somme totale de 22'567 € dont 2 559 € à titre de majorations.

Par courrier du même jour, l'URSSAF a notifié à la cotisante une confirmation d'observations suite à contrôle.

Par courriers distincts du 21 septembre 2017, la SELARL [3] a saisi la Commission de recours amiable d'une contestation de ces deux décisions.

Par requêtes distinctes envoyées par lettres recommandées le 15 décembre 2007, la SELARL [3] a saisi le tribunal des affaires sociales de Corse-du-Sud d'une contestation des décisions implicites de ces rejets par la Commission de recours amiable.

Les deux affaires ont été jointes à l'audience du 10 avril 2019 devant la juridiction devenue compétente en la matière, à savoir le pôle social du tribunal de grande instance d'Ajaccio.

Lequel, par jugement contradictoire rendu le 9 octobre 2019, a :

- débouté la SELARL de ses demandes,

- confirmé le redressement opéré par l'URSSAF de la Corse à l'encontre de la SELARL [3] le 29 mai 2017,

- confirmé la mise en demeure notifiée par l'URSSAF de la Corse à la SELARL [3] le 1er août 2017.

Par courrier électronique adressé à la cour le 7 novembre 2019, la SELARL [3] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes des conclusions de son conseil notifiées par voie électronique le 26 mai 2020 et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la SELARL [3] qui conclut à l'infirmation de la décision déférée, sollicite :

* à titre principal,

- qu'il soit dit que son recours est régulier bien-fondé,

- l'annulation de la mise en demeure du 1er août 2017,

- l'annulation de la décision de la Commission de recours amiable,

- l'annulation des redressements subséquents,

* à titre subsidiaire,

- la limitation des assiettes de redressement sur la période concernée à :

21'203 € pour Madame [P] en lieu et place de la somme de 26'993 € retenue par l'URSSAF,

9 924 € pour Madame [H] en lieu et place de la somme de 12 694 € retenue par l'URSSAF,

et, en tout état de cause,

- la condamnation de l'URSSAF à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamnation de l'URSSAF aux entiers dépens.

Aux termes d'écritures déposées le 9 octobre 2020, l'URSSAF sollicite :

- la confirmation du jugement critiqué dans toutes ses dispositions,

- la condamnation de la société appelante à lui verser la somme de 1 000 €

sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamnation de la société appelante aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l'appel :

Interjeté dans les formes et délai de la loi, l'appel formé par la SELARL [3] sera déclaré recevable.

Sur la validité de la mise en demeure :

Au visa des dispositions de l'article R 244-1 du code de la sécurité sociale, la SELARL [3] invoque la nullité de la mise en demeure qui lui a été adressée le 1er août 2017, celle-ci ne comportant ni la référence de la lettre d'observation (dont seule la date est indiquée), ni la mention de la date du dernier courrier de l'URSSAF en réponse aux observations formulées par ses soins le 28 juin 2017. Ces manquements qui ne lui ont pas permis de connaître l'étendue de ses obligations, vicient l'acte de sommation qui est une formalité préalable indispensable à tout recouvrement forcé.

L'URSSAF qui réfute cette argumentation, conclut à la validité de la mise en demeure litigieuse qui, par ses mentions et ses références à la lettre d'observation préalablement envoyée à la cotisante, lui permettait de connaître parfaitement l'étendue, la cause et la nature de son obligation.

L'article R 244-1 du code de la sécurité sociale dispose :

L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature, le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L 243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.

En réplique aux critiques de son adversaire, l'organisme social souligne que la mise en demeure litigieuse indique de façon satisfaisante :

- l'origine de la créance par la mention Contrôle. Chef de redressement notifié le 29/05/2017. Article R 243-9 du code de la sécurité sociale,

- la nature des cotisations par la mention Régime général,

- le montant des sommes réclamées par la mention Cotisations dues : 20 008 €,

- les majorations appliquées par la mention 2 559,00 €,

- les périodes concernées par la mention 01.01.14/31.12.14; 01.01.15/31.12.15; 01.01.16/31.12.16

Contrairement à ce que soutient la société appelante, l'absence sur la lettre de mise en demeure de référence à la lettre d'observations et de mention à sa date, l'absence de référence au courrier de réponse de l'URSSAF aux observations de la cotisante et de mention à sa date ne constituent pas en eux des vices de forme entraînant automatiquement la nullité de la formalité et de la procédure subséquente. Ces irrégularités ne sont susceptibles d'entraîner cet effet que s'il est constant que concrètement elles n'ont pas permis à l'intéressée d'avoir une exacte connaissance de la nature, de la cause de l'étendue de la créance réclamée.

En outre, il est de jurisprudence constante que les informations de ce type sont valablement données par l'organisme social si dans sa lettre de mise en demeure il est fait référence aux chefs de redressement mentionnés dans la lettre d'observations dont le débiteur a eu connaissance.

En l'espèce, les mentions de l'acte litigieux ci-dessus rappelées, permettent à la SELARL [3] de connaître la cause, la nature et le montant des sommes qui lui sont réclamées. L'absence de références à la lettre d'observations et à la confirmation d'observations suite à contrôle adressée en réponse aux observations de la cotisante, est sans incidence pratique puisque la créance finalement recouvrée est rigoureusement identique à celle initialement réclamée.

Le jugement déféré qui a rejeté la demande de nullité sera donc confirmé.

Sur la prise en compte des indemnités kilométriques :

La SELARL [3] sollicite l'annulation de la confirmation d'observations du 21 juillet 2017 en ce qu'elle a rejeté sa contestation portant sur le point 3 la lettre d'observations relatif au refus d'exonération des remboursements de frais professionnels qu'elle a effectués au profit de deux de ses salariés, Madame [H] et Madame [P] au titre des indemnités kilométriques dues en raison de l'utilisation par les intéressées de véhicules personnels.

L'URSSAF conclut au bien-fondé de sa position.

Après un rappel des textes applicables à la matière, les premiers juges ont pertinemment rappelé qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de l'usage professionnel de leur véhicule personnel par les salariés, en justifiant notamment de l'intégralité des indemnités kilométriques versées par la production d'états de frais correspondants.

Tout aussi justement, ils ont relevé que la SELARL [3] n'a pas distingué dans le décompte présenté lors du contrôle, le type de véhicule utilisé et qu'elle n'a précisé que par la suite que chacune des deux salariées concernées pouvait utiliser trois véhicules personnels différents pour effectuer les déplacements ouvrant droit à indemnités.

De même, ils ont souligné que contrairement à ce que soutenait la cotisante, l'URSSAF ne lui a pas reproché d'avoir autorisé ces salariées à utiliser plusieurs véhicules personnels mais seulement de ne pas avoir donné cette précision spontanément lors du contrôle.

Ils ont également indiqué qu'en tout état de cause, lorsque le salarié utilise à titre professionnel plusieurs véhicules, le barème doit être appliqué de façon séparée pour chaque véhicule, en fonction de leur puissance fiscale respective et que l'employeur ne peut additionner les kilomètres parcourus par l'ensemble des véhicules pour déterminer les frais d'utilisation correspondants.

Ils ont alors logiquement considéré que c'est à tort que la requérante qui n'avait à aucun moment justifié de l'affectation respective des indemnités kilométriques à chacun des véhicules personnels utilisés par ses deux salariées, faute d'avoir produit un décompte détaillant pour chaque déplacement le véhicule utilisé, sa puissance fiscale et le nombre de kilomètres concernés, entendait voir retenu indistinctement l'un des cumuls annuels de kilomètres parcourus tous véhicules confondus qu'elle présentait au soutien de ses prétentions.

Il en était déduit que l'employeur ne rapportait pas la preuve qui lui incombait et que la réintégration des sommes correspondantes dans l'assiette des cotisation été justifiée.

En appel, outre les points qui ont ainsi été tranchés et justifiés par une motivation que la cour fait sienne, la SELARL [3] fait valoir que les informations correctives et complémentaires relatives à l'utilisation d'autres véhicules qu'elle a apportées à l'URSSAF au cours de la période contradictoire lui sont opposables. À cet effet, elle produit un tableau récapitulatif reprenant les différentes éléments visés.

Sur quoi, il convient de relever que ce n'est qu'au stade de la procédure judiciaire, que l'employeur produit enfin des états de frais spécifiant pour chaque salariée le kilométrage total retenu selon le véhicule utilisé.

De toute façon, la force probante de ces pièces est insuffisante. En effet, outre la tardiveté de leur production et leur imprécision qui déjà interrogent sur leur sincérité, la relative complexité des situations évoquées nécessitait lors de la phases de contrôle et de la phase contradictoire d'élémentaires vérifications en présence de documents purement déclaratifs que n'accompagnent que de rares et disparates éléments relatifs aux véhicules.

Encore maintenant, il n'est ainsi pas précisément indiqué quel véhicule est utilisé pour quelles missions et sur quelle distance. L'indication concernant Madame [P] que la Peugeot 206 servait pour les déplacements quotidiens et la Twingo pour les déplacements de plus de 20 km, est trop vague pour permettre le moindre recoupement.

Quant à Madame [H], il est uniquement fait état de la propriété d'un Pajero, d'une Ford Fiesta, d'une 207 et d'un Terrano II.

Les documents techniques fournis sont par ailleurs insuffisants pour permettre de vérifier sérieusement le kilométrage annoncé et ce d'autant que les véhicules sont susceptibles d'être conduits par d'autres membres de la famille et que les déplacement domicile/travail sont exclus.

Les prétendus déplacements à l'extérieur d'[Localité 1] ne sont corroborés par aucune autre pièce (tickets de stationnement, facture de carburant, fiches restaurant...).

Ces carences et ce manque de rigueur sont de surcroît, pour le moins surprenants de la part d'un employeur qui est un professionnel du chiffre a priori sensibilisé à la problématique récurrente de la justification des frais professionnels.

L'appelante évoque à titre infiniment subsidiaire, la 'tolérance' dont l'URSSAF aurait entendu faire preuve au niveau du kilométrage sur [Localité 1] pour au final n'en rien faire. S'agissant d'un positionnement purement subjectif de l'autorité administrative dans l'application de la norme réglementaire, l'appréciation et le cas échéant la sanction d'une apparente contradiction, ne relève pas, en l'absence d'une décision finale juridiquement critiquable, de la compétence de la juridiction judiciaire.

Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Aucune considération d'équité n'impose qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SELARL [3] qui succombe, supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe de la cour,

DÉCLARE recevable l'appel formé par la SELARL [3] ,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

et y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SELARL [3] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale tass
Numéro d'arrêt : 19/00298
Date de la décision : 01/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-01;19.00298 ?
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