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09/03/2022 | FRANCE | N°21/001101

France | France, Cour d'appel de Bastia, 01, 09 mars 2022, 21/001101


Chambre civile
Section 2

ARRÊT No

du 9 MARS 2022

No RG 21/00110
No Portalis DBVE-V-B7F-CAEI
JJG - C

Décision déférée à la Cour :
Ordonnance Référé, origine Président du TJ d'AJACCIO, décision attaquée en date du 02 Février 2021, enregistrée sous le no 20/00125

Consorts [S]

C/

[ZA]

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

NEUF MARS DEUX-MILLE-VINGT-DEUX

APPELANTS :

Mme [B] [G] épouse [S]
née le [Date naissance

4] 1941 à CONSTANTINE (ALGÈRIE)
[Adresse 11]
[Localité 14]

Représentée par Me Stéphane NESA, avocat au barreau d'AJACCIO

Mme [X], [P] [S] épouse [D]
née le [Date na...

Chambre civile
Section 2

ARRÊT No

du 9 MARS 2022

No RG 21/00110
No Portalis DBVE-V-B7F-CAEI
JJG - C

Décision déférée à la Cour :
Ordonnance Référé, origine Président du TJ d'AJACCIO, décision attaquée en date du 02 Février 2021, enregistrée sous le no 20/00125

Consorts [S]

C/

[ZA]

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

NEUF MARS DEUX-MILLE-VINGT-DEUX

APPELANTS :

Mme [B] [G] épouse [S]
née le [Date naissance 4] 1941 à CONSTANTINE (ALGÈRIE)
[Adresse 11]
[Localité 14]

Représentée par Me Stéphane NESA, avocat au barreau d'AJACCIO

Mme [X], [P] [S] épouse [D]
née le [Date naissance 8] 1970 à [Localité 15]
[Adresse 17]
[Adresse 18]
20090 AJACCIO

Représentée par Me Stéphane NESA, avocat au barreau d'AJACCIO

M. [K], [VP], [E] [S]
né le [Date naissance 5] 1972 à [Localité 10]
[Adresse 11]
[Localité 14]

Représenté par Me Stéphane NESA, avocat au barreau d'AJACCIO

Mme [W], [M], [L] [S]
née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 10]
[Adresse 7]
20090 AJACCIO

Représentée par Me Stéphane NESA, avocat au barreau d'AJACCIO

INTIMÉE :

Mme [C] [ZA] épouse [I]
née le [Date naissance 6] 1949 à AJACCIO
[Adresse 16]
[Localité 14]

Représentée par Me Carole ANDARELLI, avocate au barreau d'AJACCIO

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/444 du 31/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 6 janvier 2022, devant Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Jacques GILLAND, président de chambre
Judith DELTOUR, conseillère
Stéphanie MOLIES, conseillère

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Françoise COAT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 9 mars 2022.

ARRÊT :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Françoise COAT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Par acte d'huissier du 25 octobre 2019 et 5 novembre 2019, Mme [C] [ZA], épouse [I], a fait assigner Mme [B] [G], épouse [S], et M. [H] [S] par-devant le président du tribunal de grande instance d'Ajaccio statuant en référé de :

"Vu l'article 809 du code de procédure civile,

Recevoir Madame [C] [I] en son action, et y faire droit,

Constater que la parcelle [Cadastre 12] située sur la Commune d'[Localité 14] se trouve enclavée.

Constater que la barrière positionnée sur la parcelle [Cadastre 13] constitue une voie de fait, et
un trouble manifestement illicite,

Ordonner la remise en état par l'enlèvement de la barrière positionnée sur la parcelle [Cadastre 13], sous astreinte de 100,00 € par jour de retard, passé le délai de quinze jours suivant la date de signification de la décision à intervenir.

Condamner solidairement Madame [B] [S] et Monsieur [H] [S] à verser à Madame [C] [I] la somme de 1000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens, en ceux compris les frais de constat du 20 décembre 2017."

Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] ,ayant droit de d'[E] [S], leur père, décédé le [Date décès 3] 2015, sont intervenus volontairement dans la procédure.

Par ordonnance du 2 février 2021, le président du tribunal judiciaire d'Ajaccio statuant en référé a :

"Rejeté en l'état les demandes formulées contre M. [H] [S],

Ordonné à Mme [B] [G] Vve [S], M. [K] [S], Mme [P] [S] et Mme [W] [S] de permettre à Mme [C] [I] et à ses ayants droit d'accéder à sa parcelle en lui ouvrant la barrière positionnée sur la parcelle [Cadastre 13] et ce sous astreinte de 50 € d'astreinte par jours de retard à compter du 7ème jour suivant la notification de la présente décision,

Condamné in solidum [G] Vve [S], M. [K] [S], Mme [P] [S] et Mme [W] [S] à payer à Mme [C] [I] 1500 € sur le fondement de l'artic1e 700 du Code de procédure civile,

Condamné in solidum [G] Vve [S], M. [K] [S], Mme [P] [S] et Mme [W] [S] aux dépens de l'instance,

Rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit en application de l'article 514 du Code de procédure civile."

Par déclaration au greffe du 12 février 2021, Mme [B] [G], Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] ont interjeté appel de l'ordonnance prononcé/e en ce qu'elle a :

"Ordonné à Mme [B] [G] Veuve [S], M. [K] [S], Mme [P] [S] et Mme [W] [S] de permettre à Mme [C] [I] et à ses ayants droit d'accéder à sa parcelle en lui ouvrant la barrière positionnée sur la parcelle [Cadastre 13] et ce sous astreinte de 50 € d'astreinte par jours de retard à compter du 7ème jour suivant la notification de la présente décision,

Condamné in solidum [G] Veuve [S], M. [K] [S], Mme [P] [S] et Mme [W] [S] à payer à Mme [C] [I] 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamné in solidum [G] Veuve [S], M. [K] [S], Mme [P] [S] et Mme [W] [S] aux entiers dépens de l'instance."

Par conclusions déposées au greffe le 26 octobre 2021, Mme [C] [ZA] a demandé à la cour de :

"Vu l'article 682 et 685 du code Civil ;

Vu les articles 514 et 526 du code de Procédure Civile ;

Vu l'article 809 du Code de Procédure Civile ;

Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONSTATER l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 12] appartenant à Madame [I] ;

CONSTATER que la barrière cadenassée installée par les Consorts [S] sur la parcelle [Cadastre 9], ainsi que la clôture présente sur la parcelle [Cadastre 1] constitue un trouble manifestement illicite ;

CONSTATER que le Juge des référés avait parfaitement compétence pour statuer sur les demandes de Madame [I] ;

En conséquence :

CONFIRMER l'Ordonnance de référé du 2 février 2021 en toutes ses dispositions ;

DÉBOUTER les consorts [S] de l'ensemble de leurs demandes ;

CONDAMNER les défendeurs au paiement de la somme de 2000 euros au titre des dispositions l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

SOUS TOUTES RÉSERVES"

Par ordonnance du 27 octobre 2021, la clôture de la procédure a été différée au 15 décembre 2021 et l'affaire fixée à plaider au 6 janvier 2022.

Par conclusions déposées au greffe le 14 décembre 2021, Mme [B] [G], Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] ont demandé à la cour de :

"Vu l'article 809 du code de procédure civile,

Vu les articles 688 et suivants du code civil,

Vu les articles 699 et suivants et 700 du code de procédure civile

RECEVOIR Madame [B] [G] veuve [S], Monsieur [K] [VP] [E] [S], Madame [P], [X] [S] épouse [D] et Mme [W] [M] [L] [S] recevables en leur action et y faire droit.

DÉCLARER irrecevable la demande de radiation formulée par l'intimée sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile.

SUR LA RÉFORMATION DE L'ORDONNANCE QUERELLÉE

INFIRMER l'ordonnance rendue par Monsieur le Président Tribunal judiciaire d'AJACCIO en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a rejeté les demandes formulées contre Monsieur [H] [S].

STATUANT À NOUVEAU

JUGER que Mme [I] ne justifie d'aucun titre lui permettant de se prévaloir de l'existence d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 13] appartenant aux appelants.

JUGER que le terrain qui appartient à Mme [I] (parcelle [Cadastre 12]) est fort distant des terrains des appelants, de sorte que cette situation laisse songeur quant à l'étendue du supposé droit qu'elle prétend détenir sur eux.

JUGER qu'en tout état de cause le droit de tout propriétaire de clore son héritage est prévu par la loi de sorte que son usage ne peut constituer un trouble manifestement illicite.

JUGER que Mme [I] n'établit pas que le terrain dont elle indique être propriétaire serait enclavé, à supposer toutefois que la constatation d'une situation d'enclave relève de l'office du juge des référés.

DÉBOUTER Madame [C] [I] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, faute pour elle d'avoir rapporté la preuve de l'état d'enclave de sa parcelle [Cadastre 12].

LA CONDAMNER à verser aux appelants une somme qui ne saurait être inférieure à 4 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l‘instance de référé et de la présente instance, en ceux compris les frais de signification de l'arrêt à venir.

SOUS TOUTES RÉSERVES"

Le 6 janvier 2022, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 9 mars 2022.

La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait, en application de l'article 455 du code de procédure civile, expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.

SUR CE

Pour statuer comme il l'a fait le premier juge a considéré que la parcelle appartenant à Mme [C] [ZA] était enclavée, que, depuis plus de 30 ans, l'accès à cette parcelle se fait en passant par la parcelle cadastrée [Cadastre 13] appartenant aux appelants, que ceux-ci ont fermé l'accès à leur parcelle par le biais d'un portail porteur d'un cadenas fermé, ce qui pour le premier juge constitue un trouble manifestement illicite auquel il doit être mis fin.

* Sur la notion d'enclave

Mme [C] [ZA] estime que son fonds est enclavé et, pour cela, elle produit un procès-verbal de constat d'huissier établi le 6 avril 2021 par M. [V] [J], clerc d'huissier habilité aux constats, qui fait valoir que la solution alternative proposée par les appelants est dangereuse présentant une déclivité particulièrement importante avec une pente avoisinant les 45 o et un dévers particulièrement dangereux alors que sur le passage revendiqué le pente est moins importante, qu'il est large et présente une véritable facilité d'accès, avec un dévers très limité.

Or, s'agissant d'une servitude fondée sur un état d'enclave de parcelle, l'article 682 du code civil prévoit que le propriétaire dont le fonds est enclavé et qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante, comme en l'espèce, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de son fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

En l'espèce, le premier juge s'est fondé sur un procès-verbal d'huissier, plus ancien, établi le 20 décembre 2017 par le même clerc, qui confirme selon lui qu'aucun autre passage que celui revendiqué n'est utilisable en l'état afin de desservir les parcelles de Mme [C] [ZA].

De plus, ce procès-verbal, produit en cause d'appel est confirmé par les attestations établies M. [Y] [U], Mme [Z] [F], M. [H] [N], Mme [O] [T], propriétaires de parcelles elles aussi enclavées, qui rapportent tous emprunter le chemin passant par la parcelle des appelants pour accéder à leur fonds, chemin identique à celui revendiqué par Mme [C] [ZA] et donc de leur nécessité de passer au-travers de la propriété des appelants.

Les appelants, pour contrer ces éléments de preuve de l'état d'enclavement, produisent de leur côté un procès-verbal de constat, établi le 15 février 2021 par M. [A] [R], clerc habilité aux constats, qui établit l'existence d'un autre accès à la parcelle de Mme [ZA], mais ne fait état d'aucun élément quant à son côté pratique et sa déclivité, ne faisant que constater son existence, nullement contestée par l'intimée.

Ils produisent aussi un constat d'huissier plus récent, daté du 5 août 2021, établi par aussi M. [A] [R], clerc d'huissier habilité, qui indique qu'il a emprunté avec M. [K] [S] le chemin de servitude présenté comme l'alternative au trajet revendiqué par Mme [C] [ZA], et qu'au bout de ce dernier, ils sont «parvenus jusqu'au niveau de parcelles de terre que le requérant nous indique être celles de son voisin».

Cet élément non contradictoire ne repose ainsi que sur les indications de M. [S], nullement corroborées, alors que l'état d'enclavement est revendiqué et est attesté par divers témoins justifiant le passage par la parcelle des appelants.

De plus, à tous le moins, en ce qui concerne ce second accès sur l'ancien chemin de servitude, il n'est pas démontré qu'il est en bon état, malgré un entretien récent, il est surtout beaucoup moins praticable que celui retenu en première instance et il n'est nullement défini et acquis qu'il permet d'accéder à la parcelle de Mme [C] [ZA].

En conséquence, l'état d'enclave n'étant pas contestable, l'apposition d'un cadenas sur le portail placé à l'entrée de leur parcelle par les appelants constitue un trouble manifestement illicite ; il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.

Les parties se doivent d'engager une instance au fond si elles veulent justifier de modifications sur le terrain ne rendant plus nécessaire le passage par le bien des appelants.

* Sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile

S'il est équitable de laisser à la charge de Mme [B] [G], Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] les frais irrépétibles qu'ils ont engagés, il n'en va pas de même pour Mme [C] [ZA]; en conséquence, il convient de déboute les appelants de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à l'intimée la somme de 2 000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions querellées,

Y ajoutant,

Au fond, renvoie les parties à mieux se pouvoir,

Déboute Mme [B] [G], Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] de l'ensemble de leur demande,

Condamne in solidum Mme [B] [G], Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] à payer à Mme [C] [ZA] la somme de 2 000 euros au titre des disposions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [B] [G], Mme [X] [S], M. [K] [S] et Mme [W] [S] au paiement des entiers dépens.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : 01
Numéro d'arrêt : 21/001101
Date de la décision : 09/03/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2022-03-09;21.001101 ?
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